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Chapeau

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50. Extrait de l'arrêt du 23 février 1977 en la cause Bonzi contre Tribunal d'accusation et Procureur général du canton de Vaud

Regeste

Mise au secret; limitations du droit du prévenu de communiquer avec son avocat; liberté personnelle, art. 3 et art. 6 CEDH.
En droit vaudois, la mise au secret ne comporte pas une limitation de la liberté personnelle en soi disproportionnée au but reconnu légitime (assurer les besoins de l'enquête) pour laquelle elle peut être ordonnée. Les restrictions qu'elle implique (interdiction des visites et limitation du droit de communiquer librement avec son défenseur) ne sont pas contraires aux art. 3 et art. 6 CEDH.

Faits à partir de page 293

BGE 103 Ia 293 S. 293
Placé en détention préventive, Bonzi a été mis au secret pour dix jours, en application de l'article 79 du code vaudois de procédure pénale, dans le but d'empêcher toute collusion
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avec des tiers. Bonzi est inculpé de vol, de détention illicite d'explosifs et d'armes, subsidiairement de recel. La mise au secret a été prolongée à deux reprises par le Tribunal d'accusation du canton de Vaud. Elle a ainsi duré du 17 juin au 16 juillet 1976. Dès son arrestation, Bonzi a pu charger un avocat de la défense de ses intérêts. Si cet avocat n'a pu voir son client mis au secret, il a pu en revanche correspondre avec lui par l'intermédiaire et sous le contrôle du Juge informateur. Un recours formé contre l'ordonnance de mise au secret a été rejeté par le Tribunal d'accusation, qui a considéré que l'on se trouvait en l'espèce en présence d'une infraction grave et que le succès des investigations en cours imposait des mesures particulières de sécurité.
Bonzi a formé contre cette décision un recours de droit public. Il conteste la constitutionnalité des dispositions du code vaudois de procédure pénale concernant la mise au secret. Cette mesure serait incompatible avec les art. 3 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme. La décision attaquée serait en outre contraire au principe de la proportionnalité et violerait la liberté personnelle.

Considérants

Considérant en droit:

4. La constitution du canton de Vaud ne contient aucune disposition particulière relative à la mise au secret des personnes arrêtées et placées en détention préventive. A l'art. 4 elle dispose que la liberté individuelle est garantie (al. 1); nul ne peut être poursuivi ou arrêté que dans les cas déterminés par la loi et selon les formes qu'elle prescrit; tout individu arrêté doit être entendu par le magistrat compétent dans les vingt-quatre heures qui suivent son arrestation (al. 2); hors les cas qui appartiennent à la discipline militaire, nul ne peut être mis en état d'arrestation qu'en vertu de l'ordre du juge auquel la loi donne cette compétence (al. 3). Le recourant ne prétend pas que les dispositions légales sur la mise au secret seraient contraires à la constitution cantonale; il ne soutient pas non plus que le droit cantonal lui assure en ce domaine une garantie constitutionnelle plus étendue que le droit fédéral non écrit. La question litigieuse est ainsi celle de savoir si la décision attaquée est compatible avec la notion de liberté personnelle, telle qu'elle est garantie en droit fédéral.
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a) Le droit constitutionnel fédéral non écrit garantit à l'individu le droit d'aller et venir, le droit à ce que soit respectée son intégrité corporelle, tout comme celui de choisir son mode de vie, d'organiser ses loisirs et d'avoir des contacts avec autrui. Les personnes détenues, qui peuvent également invoquer la garantie de la liberté personnelle, ne sauraient toutefois prétendre jouir de toutes les formes de ce droit constitutionnel. La mesure d'incarcération qui les frappe doit certes reposer sur une base légale, être dans l'intérêt public et être conforme au principe de la proportionnalité. Mais, une fois incarcérés, les intéressés sont soumis aux restrictions qui découlent de la mesure de contrainte qui leur est imposée et du rapport spécial qui les lie à l'Etat (ATF 100 Ia 460 consid. IIIa). Si toutes ces restrictions ne doivent pas nécessairement résulter de dispositions spéciales et précises de la loi, il n'en demeure pas moins qu'elles n'ont pas à aller au-delà de ce qu'exige le but de l'incarcération; elles doivent respecter le principe de la proportionnalité. Ces principes s'appliquent d'ailleurs tout particulièrement à la détention préventive, qui est imposée à un individu prévenu d'une infraction et dont l'incarcération est destinée à assurer le déroulement normal de l'instruction d'une affaire pénale. D'autre part, lorsque le législateur a prévu certaines garanties en faveur des détenus, les restrictions à la liberté personnelle de ceux-ci trouvent leurs limites dans les principes posés par la loi (ATF 101 Ia 49 consid. 4).
b) Aux termes des art. 79 et 89 CPP:
"Art. 79.- Lorsque les besoins de l'instruction l'exigent, le juge ordonne la mise au secret du prévenu.
La durée de la mise au secret ne peut excéder dix jours. Toutefois, sur demande motivée du juge, le Tribunal d'accusation pourra autoriser une ou plusieurs prolongations de dix jours chacune, au maximum.
Lorsque le prévenu est au secret, il doit être suivi à l'enquête sans désemparer.
Art. 80.- Le prévenu mis au secret ne peut communiquer avec personne.
Le juge peut toutefois apporter au régime du secret les assouplissements qu'il jugera opportuns, notamment en ce qui concerne le défenseur."
En droit vaudois, la mise au secret est donc une mesure, limitée dans le temps, que la loi cantonale de procédure pénale prévoit à l'égard des inculpés placés en détention préventive.
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Cette restriction de la liberté personnelle a une base légale; elle est de plus justifiée par l'intérêt public, puisqu'elle ne peut être ordonnée que si les besoins de l'instruction l'exigent. Avec raison, le recourant ne conteste d'ailleurs pas la réalisation des deux premières conditions auxquelles la jurisprudence subordonne toute restriction de la liberté personnelle en droit cantonal. Il ne prétend pas non plus que, dans son cas particulier, les instances cantonales auraient ordonné, puis confirmé sa mise au secret en violation des art. 79 et 80 CPP. Il fait valoir essentiellement le moyen tiré d'une prétendue violation du principe de la proportionnalité. Il s'agit là d'une question que le Tribunal fédéral examine librement, car la mise au secret constitue une atteinte grave à la liberté personnelle (ATF 101 Ia 53 consid. 7; ATF 98 Ia 100 consid. 2).
Dans son mémoire de recours, le recourant affirme que "la décision entreprise apparaît en tout état de cause contraire au principe de la proportionnalité", mais il ne dit pas en quoi la mesure concrète prise à son égard serait disproportionnée. Au fond, il considère, sur un plan général, que les précautions à prendre en cas de détention préventive (selon les art. 81 et 82 du règlement vaudois des maisons d'arrêts, prisons d'arrondissement, etc. du 11 janvier 1944) sont suffisantes pour sauvegarder entièrement les besoins de l'enquête; de ce fait, "on ne saurait recourir, sans violer le principe de la proportionnalité, au régime plus strict de la mise au secret". Ce n'est donc pas la mesure concrète prise à son égard, mais l'institution même de la mise au secret que le recourant tient pour contraire au principe de la proportionnalité. Dans l'arrêt X. du 22 janvier 1975, le Tribunal fédéral ne s'est pas prononcé sur la justification de la mise au secret comme telle. Il a constaté, in concreto, que la première condition à laquelle l'art. 152 CPP gen. subordonne la mise au secret (c'est-à-dire l'existence d'un délit d'une gravité exceptionnelle) n'était pas réalisée; il a aussi laissé entendre que la réalisation de la seconde condition (la mesure doit être ordonnée pour les besoins de l'enquête) était pour le moins douteuse (ATF 101 Ia 54 consid. 7c et d). La solution adoptée dans cet arrêt n'est donc pas applicable en l'espèce.
c) Dans quatre cantons romands, le code de procédure pénale contient des dispositions particulières sur la mise au secret (art. 70 et 152 ss CPP à Genève, art. 79 et 80 CPP dans
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le canton de Vaud, art. 141 et 142 CPP à Neuchâtel et art. 73 CPP en Valais). Sauf à Genève, où les conditions sont encore plus rigoureuses (voir l'art. 152 CPP; ATF 101 Ia 53 ss consid. 7), le juge chargé de l'instruction d'une affaire pénale ne peut ordonner la mise au secret que lorsque les besoins de l'instruction l'exigent. En outre, dans les quatre cantons, c'est le législateur lui-même qui a fixé le temps relativement court (8 jours à Genève et à Neuchâtel, 10 jours dans le canton de Vaud et 14 jours en Valais) pendant lequel un inculpé en détention préventive peut être maintenu au secret. En Valais, le juge instructeur peut prolonger ce délai en rendant une ordonnance motivée contre laquelle l'inculpé ou son défenseur peut porter plainte au Tribunal cantonal (art. 73 al. 3 CPP) alors que, dans les trois autres cantons, seule l'instance cantonale de recours et de surveillance (Chambre d'accusation ou Tribunal d'accusation) peut autoriser une ou plusieurs prolongations. Par ailleurs, à Genève, à Neuchâtel et dans le canton de Vaud, l'ordonnance de mise au secret peut faire l'objet d'un recours immédiat à cette instance judiciaire cantonale (voir, en droit valaisan, les art. 73 et 166 CPP). Pratiquement, la mise au secret a pour conséquence essentielle d'isoler complètement le détenu contre lequel cette mesure est prise, de sorte que toute communication lui est interdite avec qui que ce soit, en particulier avec son défenseur ou avec le médecin et l'aumônier de la prison (voir, en droit vaudois, les art. 80 al. 1 CPP et 124 al. 2 de la loi du 18 septembre 1973 sur l'exécution des condamnations pénales et de la détention préventive). Il faut cependant relever que le juge informateur ou le Tribunal d'accusation peut, selon les circonstances, atténuer les rigueurs de ce régime en droit vaudois, notamment en autorisant le détenu à communiquer avec son défenseur (art. 80 al. 2 CPP).
Dans les autres cantons et en droit fédéral, la loi ignore l'institution de la mise au secret. Toutefois, le juge chargé de l'instruction de l'affaire pénale a parfois la possibilité, lorsque les besoins de l'enquête l'exigent, d'empêcher l'inculpé en détention préventive de communiquer avec des tiers, notamment avec son défenseur, et cela pendant un certain temps dont il fixe lui-même la durée. Ainsi, l'art. 117 PPF autorise, en principe, tout inculpé en détention préventive à communiquer oralement et par écrit avec son défenseur, mais le juge
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d'instruction peut, exceptionnellement, limiter ou faire cesser pour un temps déterminé ces communications lorsque l'intérêt de l'instruction l'exige. En droit pénal administratif, la limitation ou la suppression de ces communications pour plus de 3 jours doit être soumise à l'approbation de l'autorité qui a décerné le mandat d'arrêt (art. 58 al. 2 DPA). Dans le canton de Zurich, les communications orales et écrites de l'inculpé peuvent être contrôlées et, "soweit der Untersuchungszweck gefährdet ist", le défenseur peut se voir interdire la consultation du dossier et toute communication avec l'inculpé (art. 16, 17 et 18 StPO; voir, à ce sujet, un arrêt de l'Obergericht du 18 janvier 1954, ZR 54/1955, No 146, p. 282; voir aussi HANSRUEDI MÜLLER, Verteidigung und Verteidiger im System des Strafverfahrens, dargestellt am Beispiel der zürcherischen Prozessordnung, thèse Zurich 1974, p. 26 et 130; PETER HUBER, Die Stellung des Beschuldigten - insbesondere seine Rechte - in der Strafuntersuchung unter Berücksichtigung des Kantons Zürich, thèse Zurich 1974, p. 154 ss, 181 ss). Dans d'autres cantons, toute communication de l'inculpé en détention préventive avec son défenseur est, en principe, interdite pendant une première partie de l'enquête pénale (voir DOMINIQUE PONCET, Le droit à l'assistance de l'avocat durant la procédure, Recueil de travaux suisses présentés au VIIIe Congrès international de droit comparé, 1970, p. 421 et 422). Ainsi, par exemple, l'inculpé peut communiquer librement avec son défenseur seulement après la clôture de l'enquête en droit fribourgeois (art. 22 al. 2 CPP; voir aussi, en droit bâlois, le par. 113 StPO de Bâle-Ville).
Ainsi, dans la mesure où, en doctrine, des critiques sont formulées au sujet de l'institution de la mise au secret, alors même qu'elle est soumise à une réglementation très stricte, il est bien clair que ces critiques devraient, à plus forte raison, être d'abord dirigées contre les dispositions légales qui, en droit fédéral et dans la procédure de plusieurs cantons, laissent au juge (parfois même à un fonctionnaire chargé de l'instruction) une plus grande liberté pour prendre des mesures restrictives ou coercitives pratiquement analogues à la mise au secret, et cela pour un temps que la loi ne fixe pas et sans être obligé de soumettre toute prolongation de ces mesures à l'approbation préalable d'une instance judiciaire cantonale. Avec raison, on a fait observer que "la réglementation
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de ce moyen de pression est peut-être un moindre mal, car là où la loi ignore la "mise au secret", rien n'interdit au juge d'empêcher toute communication avec le prévenu, sans limite de temps, ce qui constitue une torture morale plus grave" (voir FRANÇOIS CLERC, La détention avant jugement, Recueil de travaux suisses présentés au VIIIe Congrès international de droit comparé, p. 404).
d) Telle qu'elle est prévue dans les codes de procédure pénale de quatre cantons romands, l'institution de la mise au secret à fait l'objet de critiques relativement fréquentes en doctrine. On lui reproche essentiellement d'être un moyen de pression que le juge utilise parfois pour obtenir un aveu de l'inculpé. Partant de l'idée que le juge dispose, notamment en droit genevois ou neuchâtelois, d'autres moyens d'éviter toute collusion, on a considéré que la mise au secret serait, en réalité, "une sanction prise contre le prévenu récalcitrant à l'interrogatoire", une mesure "qui implique pour beaucoup d'hommes une torture morale" (FEYYAZ GÖLCÜKLÜ, L'interrogatoire en matière pénale, étude de droit neuchâtelois, thèse Neuchâtel 1952, p. 78 ss). Certes, "la détention préventive a un effet accessoire qu'on ne pourra jamais éliminer complètement: ce sont les aveux que l'inculpé est souvent amené à faire dans l'espoir que rien ne s'opposera à son élargissement"; c'est pourquoi l'on ne saurait approuver la mise au secret, car elle affaiblit encore la volonté de l'inculpé (MAX WAIBLINGER, en collaboration avec Roger Lang et Roland Jaton, La protection de la liberté individuelle durant l'instruction, Revue internationale de droit pénal, Paris 1953, p. 250 et 251). Plusieurs auteurs ont plus ou moins nettement confirmé ces critiques (HANS F. PFENNINGER, Probleme des schweizerischen Strafprozessrechts, Ausgewählte Aufsätze, p. 120; FRANÇOIS CLERC, Le procès pénal en Suisse romande, p. 86; HANS WALDER, Die Vernehmung des Beschuldigten, p. 155; DOMINIQUE PONCET, L'instruction contradictoire dans le système de la procédure pénale genevoise et en droit français, thèse Genève 1967, p. 140 ss; FRANÇOIS CLERC, La détention préventive, RPS 84/1968, p. 165 ss; du même auteur, La détention avant jugement, Recueil de travaux suisses présentés au VIIIe Congrès international de droit comparé, p. 404; du même auteur, Initiation à la justice pénale en Suisse, vol. I, p. 173). Pour HANS SCHULTZ, "le sens de cette mise au secret
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ne peut être rien d'autre que d'arracher un aveu au prévenu récalcitrant. Point nécessaire de dire que cette manière de procéder n'est pas compatible avec les droits de l'homme ni avec les principes d'une procédure pénale moderne et humaine" (La sauvegarde des droits des détenus, Revue de science criminelle et de droit comparé, supplément 1967, p. 101). En résumé, on peut donc constater que la plupart des auteurs reprochent à l'institution de la mise au secret d'être une mesure qui, en isolant complètement l'inculpé, aggrave inutilement le régime de la détention préventive; on conteste, en général, que cette mesure soit ordonnée réellement dans le but - en soi reconnu légitime - d'éviter toute collusion de l'inculpé avec des tiers et l'on en déduit qu'elle constitue en fait un moyen de pression - difficilement compatible avec les principes modernes de la procédure pénale - qui est exercé sur les inculpés récalcitrants pour les amener à faire des aveux.
On peut cependant se demander si ces critiques sont en l'espèce décisives, car les auteurs qui les ont formulées se sont placés essentiellement sur le terrain du droit pénal ou de la procédure pénale. Ils n'ont pas examiné, en droit constitutionnel, si la mise au secret est compatible avec la notion de liberté personnelle, telle qu'elle est garantie en droit fédéral non écrit. Certes, l'auteur d'une thèse consacrée à la protection de la liberté personnelle dans la procédure pénale du canton d'Argovie soutient que la mise au secret "hat als fix festgelegte Institution tatsächlich keine Berechtigung; denn jede Verschärfung der Haft bedeutet eine Verschärfung eines Freiheitseingriffes und hat sich auf die im individuellen Fall nötigen Massnahmen zu beschränken" (voir MARKUS MEYER, Der Schutz der persönlichen Freiheit im rechtsstaatlichen Strafprozess, thèse Zurich 1962, p. 145). Cet auteur paraît cependant avoir oublié que la mise au secret a été instituée dans les cantons romands précisément pour éviter les abus. Dans chaque cas particulier, le juge doit vérifier si cette mesure est justifiée et il ne peut l'ordonner que pour un temps strictement limité et sous le contrôle d'une instance judiciaire cantonale (voir, à cet égard, JUSTUS KRÜMPELMANN, Die Untersuchungshaft im deutschen, ausländischen und internationalen Recht, Landesbericht für die Schweiz, p. 657 et 658).

5. Selon la jurisprudence, la détention préventive a pour but d'assurer le déroulement régulier de l'enquête pénale; elle
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doit empêcher l'inculpé de se soustraire à la procédure en s'enfuyant ou de faire disparaître les indices de son acte délictueux, entravant ainsi l'éclaircissement de l'affaire (ATF 97 I 52 consid. 4 b et les références citées). Ainsi, pour autant qu'elles ne restreignent pas la liberté du détenu au-delà de ce qu'exigent ce but de l'instruction pénale et l'ordre de l'établissement de détention (ATF 100 Ia 458 consid. If), certaines mesures peuvent être prises à l'égard de l'inculpé en détention préventive qui aggravent le régime de sa détention, notamment en limitant ses relations avec l'extérieur (ATF 100 Ia 456 ss, ATF 99 Ia 270 ss consid. IV et V, ATF 97 I 843 consid. 5). En revanche, des restrictions de liberté ayant un caractère pénal sont inadmissibles dans le régime de la détention préventive, à moins qu'il ne s'agisse de mesures disciplinaires; de même, sont contraires à la constitution les limitations de la liberté d'un inculpé placé en détention préventive qui auraient pour but de le contraindre à reconnaître les infractions qui lui sont reprochées (ATF 97 I 843 consid. 5).
a) Le législateur vaudois n'a certainement pas prévu le régime spécial de la mise au secret pour assurer l'ordre nécessaire dans les établissements de détention, ni comme une peine disciplinaire qui serait infligée aux détenus ayant enfreint les règles de discipline. Il a précisé que le juge peut ordonner la mise au secret "lorsque les besoins de l'enquête l'exigent" (art. 79 al. 1 CPP). Cette mesure semble donc avoir été instituée dans un but que la jurisprudence et la doctrine reconnaissent légitime.
Toutefois, dans la doctrine, on a soutenu que la mise au secret, telle qu'elle est prévue dans quatre cantons romands, ne peut pas avoir un autre but que de contraindre l'inculpé récalcitrant à reconnaître les infractions qui lui sont reprochées, et qu'elle est donc, de ce fait, inadmissible (voir, dans ce sens, GENEVIÈVE ZIRILLI, Problèmes relatifs à la détention préventive, thèse Lausanne 1975, p. 101; voir cependant l'opinion plus nuancée de MARTIN SCHUBARTH, Die Rechte des Beschuldigten im Untersuchungsverfahren, besonders bei Untersuchungshaft; eine Analyse der schweizerischen Strafprozessgesetze unter rechtsstaatlichen Gesichtspunkten, p. 182 et 183). Par ailleurs, dans l'arrêt X., du 22 janvier 1975, le Tribunal fédéral n'a certes pas tranché la question sur le plan théorique, mais, sensible aux arguments développés dans la
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doctrine, il a tout de même laissé entendre que le juge d'instruction paraissait avoir ordonné la mise au secret non pas dans le but d'éviter toute collusion (en droit genevois, il disposait pour cela d'autres moyens), mais pour faire pression sur l'inculpé (ATF 101 Ia 56 consid. 7 d).
b) Dans la décision attaquée, le Tribunal d'accusation a défini les conditions d'application de l'art. 79 al. 1 CPP vaud. La mise au secret ne peut être ordonnée qu'en raison des exigences de l'instruction; elle ne saurait viser à constituer un moyen de pression sur le prévenu et "il convient, en outre, pour respecter le principe de la proportionnalité d'une telle mesure, d'ajouter qu'elle doit être limitée aux enquêtes se rapportant aux délits graves, qu'elle doit être utilisée exceptionnellement et qu'elle l'est en fait dans le canton de Vaud". Il a ensuite jugé que la mesure ordonnée par le juge informateur satisfaisait à ces conditions restrictives, considérant notamment "que le succès des investigations impose des mesures particulières de sécurité visant à en assurer la discrétion et à éliminer tout risque de collusion avec les tiers encore recherchés". Se référant aux éléments de la procédure, il a ainsi constaté "que la mesure en tant que telle ne constitue pas un moyen de pression sur le recourant pour le faire parler".
Pour sa part, le recourant n'allègue aucun fait précis qui soit de nature à contredire - ou même à mettre en doute - les constatations faites par l'instance cantonale de recours. Il ne prétend pas ni ne démontre que, dans son cas particulier, la mise au secret aurait été en réalité ordonnée dans le but de faire pression sur lui pour l'obliger à parler; dans son mémoire de recours, il cite simplement les considérations qui ont été faites dans la doctrine au sujet de l'institution de la mise au secret dans les cantons romands.
Dans ces conditions, il faut considérer que le bien-fondé des critiques formulées dans la doctrine n'est pas démontré, tout au moins en ce qui concerne l'application des art. 79 et 80 CPP dans le canton de Vaud. Le recourant n'a fourni aucune preuve ni même des indices permettant de penser que, dans son cas ou dans d'autres cas concrets, une mise au secret a été ordonnée dans le seul but de faire pression sur le prévenu pour l'obliger à parler. Il résulte au contraire des renseignements donnés par le procureur général du canton de Vaud que
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les ordonnances de mise au secret sont tout à fait exceptionnelles dans la pratique judiciaire vaudoise et qu'elles ne sont rendues que si les besoins de l'enquête le justifient. Le recourant ne conteste pas l'exactitude de ces renseignements.

6. a) Il convient dès lors d'examiner si la mise au secret, telle qu'elle est réglementée en droit vaudois (art. 79 et 80 CPP), restreint la liberté des prévenus au-delà de ce qu'exigent les besoins de l'enquête et si, de ce fait, elle consacre - ou peut consacrer - une violation du principe de la proportionnalité. Tenant compte du caractère exceptionnel de cette mesure, admise seulement dans les cas graves et pour un temps strictement limité, le Tribunal d'accusation ne l'a pas admis. Dans ses observations, le procureur général du canton de Vaud s'efforce de démontrer que la mise au secret est compatible avec la garantie constitutionnelle de la liberté personnelle. En revanche, le recourant soutient une opinion contraire: à ses dires, les dispositions des art. 80 et 81 du règlement vaudois des maisons d'arrêts, des prisons d'arrondissement, du 11 janvier 1944, "sauvegardent entièrement les besoins de l'enquête; on ne saurait recourir, sans violer le principe de proportionnalité, au régime plus strict de la mise au secret".
Actuellement, le régime de la détention préventive est défini en droit vaudois par les art. 64 et 65 CPP et 121 ss de la loi du 18 septembre 1973 sur l'exécution des condamnations pénales et de la détention préventive, qui a remplacé, dès le 1er janvier 1974, le règlement du 11 janvier 1944. En règle générale, les personnes détenues préventivement sont isolées les unes des autres; le juge peut prescrire des mesures particulières d'isolement pour les besoins de l'enquête (art. 122 al. 2 et 3 de la loi du 18 septembre 1973). Le prévenu en détention préventive peut recevoir la visite des personnes qui sont munies d'une permission du juge, mais, sauf autorisation spéciale du juge, ces visites ne sont admises qu'en présence d'un gardien ou d'un agent de la police judiciaire et à raison d'une personne à la fois (art. 64 al. 1 et 2 CPP vaud.). En outre, le prévenu ne peut recevoir ou expédier la correspondance, des objets ou des messages que sous le contrôle et par l'intermédiaire du juge (art. 65 al. 1 et 2 CPP vaud.). Toutefois, ces mesures restrictives ne sont pas applicables au défenseur, qui peut librement communiquer, oralement ou par
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écrit, avec le prévenu (art. 64 al. 3 et 65 al. 3 CPP). Enfin, selon l'art. 124 de la loi du 18 septembre 1973, les médecins et aumôniers attitrés de la prison et les autres personnes ayant un mandat de l'administration pénitentiaire ont libre accès auprès des personnes détenues préventivement, sous réserve d'instructions contraires du juge. Cette disposition réserve cependant l'art. 80 CPP.
Aux termes de l'art. 80 al. 1 CPP, le prévenu mis au secret ne peut communiquer avec personne. Cela veut dire d'abord qu'il doit être isolé des autres détenus, mais cet isolement est déjà prévu comme la règle générale, applicable dans le régime normal de la détention préventive (art. 122 al. 2 de la loi du 18 septembre 1973). Ensuite, la mise au secret a pour conséquence l'interdiction des visites qui, dans le régime normal, sont assez généralement permises; en outre, elle entraîne la suppression du droit qui, dans le régime normal, appartient à tout prévenu de communiquer librement avec son défenseur. En revanche, il semble bien que le prévenu mis au secret conserve la faculté de recevoir et d'expédier des lettres, des objets ou des messages sous le contrôle et par l'intermédiaire du juge. L'art. 80 al. 2 CPP autorise le juge à apporter au régime du secret les assouplissements qu'il jugera opportuns, notamment en ce qui concerne le défenseur. Dans ses observations sur le recours, le Ministère public affirme qu'en droit vaudois, "l'accès au médecin et à l'aumônier existe pour le détenu au secret", si ce dernier le demande. Il convient de prendre acte de cette déclaration, dont le recourant ne conteste pas le bien-fondé.
b) Pratiquement, la mise au secret entraîne, en droit vaudois, deux restrictions supplémentaires de la liberté relative dont jouissent normalement les prévenus placés en détention préventive: ce sont, d'une part, la suppression des visites et, d'autre part, l'interdiction de communiquer avec le défenseur. Or le recourant critique essentiellement cette seconde conséquence, qu'il tient pour une mesure de méfiance inadmissible à l'égard des avocats et, de ce fait, incompatible avec la garantie constitutionnelle de la liberté personnelle. Ce moyen n'est pas fondé.
La législation fédérale (art. 117 PPF et 58 DPA) ainsi que la plupart des lois cantonales posent en principe la libre communication, oralement et par écrit, avec le défenseur, mais elles
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prévoient que le juge d'instruction peut exceptionnellement limiter ou faire cesser ces communications pour un temps déterminé, "lorsque l'intérêt de l'instruction l'exige". D'autres législations cantonales disposent que ce droit ne pourra s'exercer qu'à partir d'un certain stade de la procédure ou, mais alors exceptionnellement, avant ce stade. En revanche, et cela vaut pour toutes les législations helvétiques, à partir d'un moment que l'on peut fixer approximativement à la période entre la clôture de l'instruction et l'éventuel renvoi en jugement, la consultation du dossier par le défenseur ne pourra plus être refusée (voir DOMINIQUE PONCET, Le droit à l'assistance de l'avocat durant la procédure, Recueil de travaux suisses présentés au VIIIe Congrès international de droit comparé, p. 422 et les références citées).
Ces limitations du droit de communiquer librement avec son défenseur peuvent paraître "fort critiquables" (voir DOMINIQUE PONCET, loc.cit., p. 423), elles n'en existent pas moins partout en Suisse, de sorte qu'il n'est pas possible d'affirmer que le prévenu en détention préventive doit avoir en Suisse un droit absolu et inconditionnel de communiquer librement avec son défenseur à tous les stades de l'enquête pénale. Ce droit peut être limité ou même supprimé pour autant que cette mesure soit prise à titre exceptionnel, dans les cas graves, et seulement pour le temps nécessaire aux besoins de l'enquête. Or tel est bien le cas, en droit vaudois, de la mise au secret qui, selon la loi et la jurisprudence, est subordonnée à des conditions - formelles et matérielles - rigoureuses et reste, en fait, une mesure exceptionnelle. Il faut d'ailleurs relever qu'il s'agit là, en droit vaudois, de la seule mesure par laquelle toute communication du prévenu avec son défenseur peut être interdite. Le juge vaudois ne dispose pas d'autre moyen, telle la suspension de l'information contradictoire que le juge d'instruction genevois peut ordonner "lorsque l'importance d'une procédure l'exige" (art. 70 al. 1 CPP gen.; voir à ce sujet ATF 101 Ia 56 consid. 7 d; DOMINIQUE PONCET, Thèse précitée, Genève 1967, p. 138 ss). Il convient en outre de rappeler qu'en vertu de l'art. 80 al. 2 CPP, le juge informateur - ou le Tribunal d'accusation - peut apporter au régime du secret certains assouplissements, notamment en ce qui concerne le défenseur: le prévenu et son défenseur ont donc toujours la possibilité de faire valoir des motifs particuliers d'obtenir cet
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assouplissement. Or, en l'espèce, le Tribunal d'accusation a relevé qu'à aucun moment le recourant "n'a indiqué en quoi il serait indispensable de voir son défenseur immédiatement" et "que le dossier ne révèle pas non plus de circonstance particulière qui justifierait l'application d'office de l'art. 80 al. 2 CPP".
c) En définitive, il n'est pas démontré qu'en droit vaudois la mise au secret comporte une limitation de la liberté personnelle en soi disproportionnée au but - reconnu légitime - pour lequel elle peut être ordonnée et il n'est pas exact de dire que le juge vaudois ne tient pas compte des circonstances de chaque cas (voir MARKUS MEYER, thèse précitée, Zurich 1962, p. 145). Le juge informateur et le Tribunal d'accusation ont l'obligation de lever le secret dès le moment où les besoins de l'enquête n'exigent plus l'isolement du prévenu; de plus, en vertu de l'art. 80 al. 2 CPP, ils peuvent - et doivent - apporter au régime du secret les assouplissements justifiés par les circonstances. Par ailleurs, ces limitations de la liberté personnelle en droit vaudois (notamment la suppression de toute communication directe entre le prévenu et son défenseur) existent dans la plupart des autres cantons comme aussi dans la législation fédérale. S'il fallait tenir les dispositions des art. 79 et 80 CPP pour incompatibles avec le principe de la proportionnalité, il est clair que l'on devrait aussi déclarer contraires à la garantie constitutionnelle de la liberté personnelle toutes les dispositions légales ou réglementaires qui, en droit fédéral et dans la plupart des cantons, autorisent le juge à interdire, pour un temps limité, les communications entre le prévenu et son défenseur. Dans ces conditions, le moyen tiré d'une prétendue violation du principe de la proportionnalité doit être rejeté.

7. Le recourant soutient en outre que l'institution même de la mise au secret est contraire à la liberté personnelle garantie aux art. 3 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme.
a) Aux termes de l'art. 3 de la convention, "nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants". Cette disposition est interprétée en ce sens que l'autorité n'a pas le droit, dans le procès pénal, de faire usage de méthodes d'interrogatoire ayant pour effet de porter atteinte à la liberté de décision du prévenu (ATF 101 Ia
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58/59 consid. 9; voir aussi GURADZE, Die Europäische Menschenrechtskonvention, Kommentar, Nos 9 et 11 ad art. 3 p. 53 et 54); "sogenannte Überrumpelungsmanöver sind unzulässig; sie stellen eine Entwürdigung der Person dar" (voir PETER BISCHOFBERGER, Die Verfahrensgarantie der europäischen Konvention zum Schutze der Menschenrechte und Grundfreiheiten (Art. 5 und 6) in ihrer Einwirkung auf das schweizerische Strafprozessrecht, thèse Zurich 1972, n. 519). Cependant, pour la Commission européenne des droits de l'homme, toute méthode d'interrogatoire ne consacre pas une violation de l'art. 3 dès lors qu'elle est de nature à porter atteinte à la liberté de décision du prévenu; dans l'application de l'art. 3 l'appréciation des circonstances joue un rôle important (voir des exemples de méthodes jugées admissibles en raison des circonstances, notamment en Irlande du Nord, cités par FRANCIS G. JACOBS, The European Convention on human rights, p. 25, FREDE CASTBERG, The European Convention on human rights, p. 82 et 83).
Dans son mémoire de recours, le recourant ne se plaint pas d'avoir dû subir, au cours de sa mise au secret, des interrogatoires selon des méthodes ayant porté atteinte à sa liberté de décision. Il ne prétend pas non plus que le régime du secret ait eu chez lui un tel effet. Par ailleurs, il n'a pas démontré que, dans le canton de Vaud, la mise au secret a été ordonnée dans le but de faire pression sur le prévenu récalcitrant pour l'obliger à parler ni qu'elle a pu avoir pour effet de porter atteinte à la liberté de décision du prévenu. Le recourant se contente d'affirmer, d'une manière toute générale et théorique, que la suppression de tout contact entre le prévenu et le monde extérieur "constitue un traitement inhumain ou dégradant au sens de l'art. 3 de la Convention, car il n'est rien d'autre qu'une forme de torture psychique". Dans ces conditions, le moyen tiré d'une prétendue violation de l'art. 3 de la convention n'apparaît pas fondé.
b) Enfin, selon le recourant, "l'exclusion de l'avocat - fût-ce pour un temps relativement court - est contraire au droit de tout accusé à avoir les facilités nécessaires à la préparation de sa défense et à avoir l'assistance d'un défenseur (art. 6 ch. 3b et c de la Convention)".
Aux termes de l'art. 6 al. 3 lettre b de la convention, "tout accusé a droit notamment à ... disposer du temps et des
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facilités nécessaires à la préparation de sa défense", ce qui signifie qu'il doit pouvoir librement communiquer avec son défenseur (voir GURADZE, op.cit., No 31 ad art. 6 p. 107). Dans son rapport du 9 décembre 1968 relatif à la convention, le Conseil fédéral a relevé à ce sujet que "le droit de la défense entraîne normalement celui de communiquer librement avec son défenseur". Se référant à la législation genevoise, il a ajouté que "les cantons qui autorisent le juge d'instruction à ordonner, dans des cas exceptionnels et pour les besoins de l'enquête, la mise au secret de l'inculpé pourraient dès lors rencontrer certaines difficultés suivant l'usage que leurs autorités feront de cette faculté" (FF 1968 II 1120 n. 6).
Ni la Commission, ni la Cour européenne des droits de l'homme n'ont posé en principe absolu le droit inconditionnel pour le prévenu de communiquer avec son défenseur librement et en tout temps. Au contraire, sans le dire expressément, la Commission semble admettre comme allant de soi certaines restrictions apportées à l'exercice de ce droit, l'essentiel étant que le défenseur soit en mesure d'assister le prévenu au stade décisif de la procédure. Ainsi, dans l'affaire Köplinger, ayant constaté que l'avocat avait assisté le requérant à un stade décisif de la procédure, la Commission a considéré que l'avocat "a disposé du temps et des facilités nécessaires à la préparation de la défense de Köplinger"; de plus, "elle estime que le requérant n'a pas été empêché de développer de façon appropriée ses recours interjetés contre le jugement de première instance, du fait que les autorités de la prison ne lui ont pas permis d'apporter avec lui ses notes manuscrites et ses documents annotés, lorsqu'il a été conduit au parloir pour y rencontrer son avocat" (voir Répertoire de la jurisprudence relative à la Convention européenne des droits de l'homme, 1955-1967, p. 151 et 153, No 172). Dans la doctrine, on a encore précisé que l'inculpé doit, dans la mesure du possible, être autorisé à communiquer avec son défenseur, librement, par écrit et oralement, dès que l'état de la procédure le permet et notamment lorsqu'il n'y a plus de danger de collusion (voir PETER BISCHOFBERGER, op.cit., n. 514; voir cependant DOMINIQUE PONCET, La protection de l'accusé par la Convention européenne des droits de l'homme, p. 184, n. 527, qui soutient que les règles de la CEDH concernant la communication avec le défenseur s'appliquent également à la phase de
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l'instruction préparatoire, ce qui a pour conséquence que toutes les dispositions des diverses procédures qui ont pour effet d'interdire cette communication, ou de la suspendre, sont contraires à la Convention). Il est vrai que, selon le ch. 93 des règles minima pour le traitement des détenus, adoptées par le Comité des ministres du Conseil de l'Europe en date du 19 janvier 1973, "un prévenu doit, dès son incarcération, pouvoir choisir son avocat ou être autorisé à demander la désignation d'un avocat d'office lorsque cette assistance est prévue, et à recevoir des visites de son avocat en vue de sa défense". Toutefois, cette résolution No (73) 5 du Comité des ministres contient seulement des recommandations et non pas des normes de droit international obligatoires pour les Etats membres du Conseil de l'Europe; selon la jurisprudence, un détenu ne peut pas, par la voie du recours de droit public, se plaindre de la violation d'une ou de plusieurs de ces recommandations (ATF 102 Ia 284 consid. 2c, 307 consid. 4a). Par ailleurs, il faut relever qu'en l'espèce, ni le recourant, ni son défenseur n'ont réclamé, devant les instances cantonales, l'observation stricte de la règle No 93; ils n'ont pas demandé un assouplissement du régime du secret dans ce sens (art. 80 al. 2 CPP).
Ainsi, en raison de son caractère exceptionnel et des conditions rigoureuses - formelles et matérielles - auxquelles elle est subordonnée en droit vaudois, l'institution de la mise au secret telle qu'elle est réglementée aux art. 79 et 80 CPP n'apparaît pas en soi contraire aux dispositions de l'art. 6 de la convention.

Dispositif

Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
Rejette le recours.

contenu

document entier
regeste: allemand français italien

Etat de fait

Considérants 4 5 6 7

Dispositif

références

ATF: 101 IA 53, 97 I 843, 101 IA 56, 100 IA 460 suite...

Article: art. 79 et 80 CPP, art. 80 al. 2 CPP, art. 152 CPP, art. 3 et art. 6 CEDH suite...