1C_202/2023 23.01.2024
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_202/2023  
 
 
Arrêt du 23 janvier 2024  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Kneubühler, Président, 
Müller et Merz. 
Greffier : M. Parmelin. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
B.________, 
C.________, 
D.________ et E.________, 
tous représentés par Me Frédéric Hainard, avocat, 
recourants, 
 
contre  
 
Grand Conseil de la République et canton de Neuchâtel, Le Château, rue de la Collégiale 12, 2001 Neuchâtel 1, 
Conseil d'Etat de la République et canton de Neuchâtel, 
agissant par le Département de l'économie, de la sécurité et de la culture, 
 
Ville de La Chaux-de-Fonds, Espacité 1, 2301 La Chaux-de-Fonds. 
 
Objet 
Octroi d'un crédit d'engagement pour la réalisation d'une route de contournement; déclaration d'utilité publique des travaux; qualité pour recourir, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de droit public du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel du 14 mars 2023 (CDP.2022.70-DIV/dma). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Du 7 juin au 8 juillet 2019, le Département du développement territorial et de l'environnement de la République et canton de Neuchâtel a mis à l'enquête publique le projet routier de l'évitement est de La Chaux-de-Fonds, formé des plans d'aménagement et des plans d'alignement de la route principale H18. 
Le 28 novembre 2019, le Conseil général de la Ville de La Chaux-de-Fonds a accepté le rapport d'information du Conseil communal relatif au plan directeur partiel des mobilités lié au projet de contournement H18 mis en consultation aux mêmes dates. 
Le 23 avril 2021, le Grand Conseil de la République et canton de Neuchâtel a adopté un décret libellé en ces termes: 
 
" Art. premier Un crédit de 186'000'000 francs est accordé au Conseil d'Etat pour financer la réalisation du projet, du solde des acquisitions de terrains et des travaux relatifs à la réalisation du contournement est de La Chaux-de-Fonds par la route principale suisse H18. 
Art. 2 Le montant figurant à l'article 1 représente le montant brut du financement auquel il faut trancher 107'650'800 francs de contribution fédérales, 1'800'000 francs de subventionnement du projet d'agglomération et 3'382'00 francs de participation des CFF, portant ainsi à 73'167'200 francs le montant net restant à charge de l'Etat de Neuchâtel. 
Art. 3 Le Conseil d'Etat est autorisé à se procurer, éventuellement par la voie de l'emprunt, les moyens nécessaires à l'exécution de ce décret. 
Art. 4 Les travaux faisant l'objet du présent décret sont déclarés d'utilité publique. Le Conseil d'Etat reçoit tous les pouvoirs pour acquérir, à l'amiable ou par voie d'expropriation, les immeubles qui pourraient être nécessaires à l'exécution des travaux. 
Art. 5 En cas d'expropriation, il sera fait application de la loi cantonale sur l'expropriation pour cause d'utilité publique, du 26 janvier 1987. 
Art. 6 Le détail d'exécution de ces projets, acquisitions et travaux est confié au soin du Conseil d'Etat. Le rapport de gestion financière du Département du développement territorial et de l'environnement donnera chaque année toutes les indications utiles sur l'avancement des travaux, sur les dépenses engagées et sur leur financement. 
Art. 7 Le crédit sera amorti conformément aux dispositions de la loi sur les finances de l'Etat et des communes (LFinEC), du 24 juin 2014, et de son règlement d'exécution. 
Art. 8 Le présent décret est dépendant de l'approbation du PDPM (Plan directeur partiel des mobilités)." 
Ce décret a fait l'objet d'un référendum qui a abouti et qui a été soumis au vote populaire le 28 novembre 2021. La population neuchâteloise l'a accepté à 77,12 %. 
Par arrêté du 19 janvier 2022 publié dans la Feuille officielle du 21 janvier 2022, le Conseil d'Etat de la République et canton de Neuchâtel a promulgué le décret. 
Par arrêt du 10 mars 2022, le Tribunal fédéral a déclaré irrecevable le recours déposé contre ce décret par F.________ et divers consorts et l'a transmis avec ses annexes à la Cour de droit public du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel comme objet de sa compétence (cause 1C_51/2022). 
La Cour de droit public a déclaré le recours irrecevable au terme d'un arrêt rendu le 14 mars 2023. 
 
B.  
Par acte du 2 mai 2023, A.________, B.________, C.________, D.________ et E.________ forment un recours en matière de droit public et un recours constitutionnel subsidiaire contre cet arrêt en concluant à son annulation et au renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. A titre subsidiaire, ils demandent au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt attaqué et, partant, l'article 8 du décret du 31 mars 2021 portant octroi d'un crédit d'engagement de 186'000'000 francs pour la réalisation du contournement est de La Chaux-de-Fonds par la route principale suisse H18. 
Le Conseil communal de la Ville de La Chaux-de-Fonds, le Grand Conseil et le Conseil d'Etat concluent principalement à l'irrecevabilité du recours et subsidiairement à son rejet. 
Les recourants ont répliqué. 
Par ordonnance incidente du 5 juin 2023, le Président de la Ire Cour de droit public du Tribunal fédéral a rejeté la requête d'effet suspensif assortie au recours. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours est dirigé contre une décision finale d'irrecevabilité prise en dernière instance cantonale; sur le fond, la contestation porte sur un décret du Grand Conseil qui octroie au Conseil d'Etat un crédit pour financer un projet routier et qui déclare d'utilité publique les travaux y relatifs. Le recours est dès lors recevable comme recours en matière de droit public selon les art. 82 ss LTF, aucune des exceptions définies à l'art. 83 LTF n'étant réalisée (cf. ATF 135 II 145 consid. 3.2). Le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable (cf. art. 113 LTF). 
Les recourants peuvent se prévaloir d'un intérêt digne de protection à ce que le Tribunal fédéral examine si la cour cantonale ne leur a pas dénié la qualité pour recourir contre le décret litigieux en violation du droit fédéral (cf. ATF 135 II 145 consid. 3.1). 
Les juges cantonaux ayant refusé d'entrer en matière sur le recours, seule la question de sa recevabilité peut être portée devant le Tribunal fédéral. La conclusion principale des recourants tendant à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause au Tribunal cantonal pour qu'il statue matériellement sur le recours dont ils l'avaient saisi est donc recevable (ATF 135 II 145 consid. 4). La conclusion subsidiaire qui tend à l'annulation de l'article 8 du décret ne l'est en revanche pas. Les autres conditions de recevabilité sont par ailleurs réunies, si bien qu'il y a lieu d'entrer en matière. 
 
2.  
Les recourants reprochent à la Cour de droit public de leur avoir dénié la qualité pour recourir contre le décret en violation de l'art. 111 LTF
 
2.1. Selon cette disposition, la qualité de partie à la procédure devant toute autorité cantonale précédente doit être reconnue à quiconque a qualité pour recourir devant le Tribunal fédéral. L'alinéa 3 précise que l'autorité qui précède immédiatement le Tribunal fédéral doit pouvoir examiner au moins les griefs visés aux art. 95 à 98 LTF. Il en résulte que la qualité pour recourir devant les autorités cantonales ne peut pas s'apprécier de manière plus restrictive que celle pour recourir devant le Tribunal fédéral, les cantons demeurant libres de concevoir cette qualité de manière plus large (ATF 144 I 43 consid. 2.1). Selon l'arrêt attaqué, la jurisprudence cantonale interprète les règles de la loi neuchâteloise sur la procédure et la juridiction administratives sur la qualité pour recourir en s'en tenant à la jurisprudence fédérale, de sorte qu'il convient d'analyser la qualité pour recourir sous l'angle de l'art. 89 al. 1 LTF. S'agissant de droit fédéral (art. 111 al. 1 LTF), le Tribunal fédéral examine cette question librement.  
 
2.2. La Cour de droit public a constaté que les recourants étaient domiciliés hors du périmètre du projet de route de contournement est de la Ville de La Chaux-de-Fonds que le crédit d'engagement litigieux de 186 millions de francs avait pour but de financer et que la mise en oeuvre des mesures d'accompagnement prévues par le PPDM passera par des procédures communales (demandes de crédit spécifiques, permis de construire, publications d'arrêtés de circulation) dans le cadre desquelles ils pourront faire valoir leurs droits. Elle en a conclu que les recourants n'avaient aucun intérêt pratique ou juridique à demander l'annulation du crédit d'engagement. Quant à la déclaration d'utilité publique des travaux routiers, ils ne démontraient pas en quoi cette décision incidente leur causerait un préjudice irréparable.  
Les recourants soutiennent pour leur part avoir démontré en quoi consistait le dommage causé par le déplacement du trafic induit par la réalisation du projet de route de contournement et, par conséquent, en quoi en tant que propriétaires d'immeubles situés sur les axes routiers impactés par la mise en oeuvre du décret et par le PPDM, la valeur marchande de leur bien-fonds se verrait diminuée si l'arrêt querellé était confirmé. 
 
2.3. Le décret litigieux a un double objet: il porte tout d'abord sur l'octroi d'un crédit d'engagement de 186'000'000 francs pour financer les travaux relatifs à la réalisation du contournement est de La Chaux-de-Fonds par la route principale suisse H18, soit une autorisation donnée au Conseil d'Etat de prendre des engagements financiers pouvant aller au-delà de l'exercice budgétaire pour un projet déterminé dont la réalisation s'étend sur plusieurs années; sur ce point, il revêt la nature d'une décision. Le décret litigieux déclare ensuite d'utilité publique, au sens de l'art. 10 de la loi neuchâteloise sur l'expropriation pour cause d'utilité publique (LEXUP; RS-NE 710), les travaux d'aménagement de la route de contournement est de La Chaux-de-Fonds, permettant ainsi au Conseil d'Etat d'exproprier au besoin les droits réels nécessaires à leur réalisation. La déclaration d'utilité publique se rapporte également à un projet déterminé et revêt le caractère d'une décision. Le décret litigieux équivaut ainsi matériellement à une décision au sens de l'art. 82 let. a LTF, en sorte que la recevabilité du recours déposé à son encontre se détermine non pas d'après les critères applicables au recours dirigé contre un acte normatif, mais d'après ceux valables pour le recours formé contre une décision.  
 
2.4. Les recourants n'agissent pas en tant que citoyens et électeurs du canton de Neuchâtel pour dénoncer un vice dans la procédure ayant conduit à l'adoption du décret par le Grand Conseil ou une violation de leur droit de vote en lien avec le référendum auquel il a été soumis ou la votation relative à cet objet (cf. ATF 106 Ia 307 consid. 1b). Leur qualité de citoyens ou de contribuables ne suffit pas davantage pour leur conférer la vocation pour recourir contre la décision octroyant le crédit d'engagement (ATF 145 I 121 consid. 1.5.3.2; 123 I 41 consid. 5c/aa; 119 Ia 214 consid. 2b). Bien qu'ils puissent indirectement exercer une influence sur l'ampleur de la charge fiscale, les actes étatiques concernant l'emploi des ressources publiques n'affectent en principe pas la situation juridique des citoyens et des contribuables. Un particulier n'a dès lors pas qualité pour attaquer une dépense publique du seul fait que pour divers motifs, il la désapprouve (ATF 145 I 121 consid. 1.5.3.2; arrêt 1C_164/2018 du 10 juillet 2018 consid. 1.3). Le fait que les recourants puissent être touchés par le projet de route de contournement en tant qu'il a pour effet de reporter le trafic automobile sur les routes dont ils sont riverains ne leur confère pas un intérêt digne de protection à contester l'octroi du crédit d'engagement y relatif. La procédure relative à l'adoption du crédit d'engagement est indépendante de celle de la procédure d'autorisation de construire (cf. ATF 117 Ib 35 consid. 3e). Le destinataire du décret est l'organe exécutif qui est autorisé à opérer la dépense prévue conformément aux conditions et charges également prévues. Cette décision, prise par une autorité à caractère politique, n'a aucune incidence sur d'éventuels intérêts individuels (cf. arrêt 1C_123/2011 du 7 juillet 2011 consid. 3.1). Les conséquences négatives de la construction de la route de contournement, telles qu'alléguées par les recourants, ne découlent pas directement de l'octroi du crédit d'engagement. Il s'agit plutôt de conséquences possibles du projet de construction qui fait l'objet d'une procédure indépendante. Or, sur la base de l'art. 89 al. 1 LTF, les riverains qui seraient habilités à contester le permis de construire ne sont pas pour autant légitimés à s'en prendre à la décision de l'Etat relative aux dépenses pour le projet de construction correspondant (arrêt 1C_164/2018 du 10 juillet 2018 consid. 1.3). La décision attaquée est ainsi conforme au droit fédéral en tant qu'elle dénie aux recourants la qualité pour recourir contre le décret en tant qu'il octroie au Conseil d'Etat un crédit d'engagement. On ne voit pas davantage en quoi le décret litigieux toucherait les recourants dans un intérêt digne de protection en tant qu'il fait dépendre son entrée en vigueur de l'adoption du PPDM. Pour le surplus, ces derniers ne développent aucune argumentation en lien avec la motivation retenue dans l'arrêt attaqué pour leur dénier la qualité pour agir contre le décret litigieux en tant qu'il déclare d'utilité publique les travaux de construction de la route de contournement. On peine à comprendre les recourants en tant qu'ils prétendent que leur qualité pour recourir devrait leur être octroyée parce qu'ils n'auraient pas été consultés à l'instar des riverains du projet de route de contournement avant l'adoption du décret. Ils n'indiquent pas sur quelle base légale ou constitutionnelle ils fondent un droit d'être entendus préalablement à la décision d'octroi du crédit d'engagement, soumise au référendum.  
 
3.  
Le recours en matière de droit public doit ainsi être rejeté dans la mesure où il est recevable. Les frais judiciaires sont mis à la charge des recourants qui succombent (art. 65 et 66 al. 1 LTF). La Ville de La Chaux-de-Fonds, qui a procédé sans l'assistance d'un avocat et sans que son intérêt patrimonial ne soit en jeu, ne saurait prétendre à des dépens (art. 68 al. 3 LTF; ATF 134 II 117 consid. 7). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable. 
 
2.  
Le recours en matière de droit public est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 fr., sont mis à la charge des recourants. 
 
4.  
Il n'est pas alloué de dépens. 
 
5.  
Le présent arrêt est communiqué au mandataire des recourants, à la Ville de La Chaux-de-Fonds ainsi qu'au Grand Conseil, au Conseil d'Etat et à la Cour de droit public du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel. 
 
 
Lausanne, le 23 janvier 2024 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
Le Greffier : Parmelin