2C_685/2023 26.03.2024
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_685/2023  
 
 
Arrêt du 26 mars 2024  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mme et MM. les Juges fédéraux 
Hänni, Juge présidant, Donzallaz et Kradolfer. 
Greffier : M. de Chambrier. 
 
Participants à la procédure 
A.________ SA, 
 
représentée par Me Michael Imhof, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Office fédéral de la Communication, 
rue de l'Avenir 44, 2501 Bienne, 
intimé. 
 
Objet 
Télécommunications; mesures transitoires en faveur des médias électroniques en lien avec le coronavirus (remboursement de la contribution unique pour l'année 2020), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal administratif fédéral, Cour I, du 7 novembre 2023 (A-1431/2022). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________ SA (ci-après: la société, puis la recourante) est une société anonyme avec siège à U.________. Son but est de promouvoir le développement de la radio locale dans le respect du pluralisme des opinions. Elle est au bénéfice d'une concession de radiocommunication pour la diffusion d'un programme de radio par voie hertzienne terrestre sur ondes ultracourtes (OUC). Sa concession est assortie d'un mandat de prestations et elle a droit à une quote-part de la redevance de radio-télévision.  
 
A.b. Le 17 mars 2020, l'Association suisse des radios privées et les Radios Régionales Romandes ont déposé une demande d'aide d'urgence pour les radios privées, également au nom de la société.  
 
A.c. Par décision du 5 juin 2020, l'Office fédéral de la communication (OFCOM) a attribué à la recourante une somme unique de 487'128 francs sur la base de l'ordonnance fédérale du 20 mai 2020 sur des mesures transitoires en faveur des médias électroniques en lien avec le coronavirus (COVID-19; RO 2020 1769, ci-après aOrdonnance COVID-19 médias électroniques). Il a enjoint à la société de lui remettre ses comptes annuels au plus tard le 30 avril 2021. Il a indiqué que, si cette dernière affichait dans ses comptes annuels un bénéfice pour 2020, il exigerait le remboursement partiel ou total de ce montant.  
 
A.d. Après avoir rappelé, le 16 juin 2020, qu'un bénéfice réalisé en 2020 conduirait à la réduction de l'aide extraordinaire en proportion de celui-ci, l'OFCOM a informé la société, par écrit du 17 décembre 2020, que les bases légales déterminantes étaient les principes comptables légaux, la législation sur les subventions et sur la radio et la télévision, ainsi que le guide complémentaire de l'OFCOM à l'attention des diffuseurs portant sur l'établissement des comptes annuels. En particulier, il a précisé que les mêmes méthodes d'évaluation devaient toujours être utilisées pour la présentation et l'établissement des comptes (principe de la permanence de la présentation et des méthodes d'évaluation), que la méthode d'amortissement devait être la même que celle utilisée l'année précédente (principe de la continuité), que les taux d'amortissement maximaux acceptés étaient ceux de l'Administration fédérale des contributions (AFC) et que les comptes annuels 2020 après d'éventuelles corrections étaient déterminants pour la fixation d'une éventuelle restitution.  
Le 8 mars 2021, l'OFCOM a adressé à la société une liste non exhaustive des documents de base à produire dans le cadre de la surveillance du respect des conditions d'octroi de la mesure transitoire 2020, en particulier un tableau détaillé des immobilisations 2020. 
 
A.e. Le 29 avril 2021, la société a remis à l'OFCOM ses comptes révisés 2020 ainsi que le rapport de son organe de révision.  
Le 22 juin 2021, l'OFCOM a demandé des informations complémentaires à la société. Celle-ci a répondu le 30 juin 2021. 
Par courrier du 15 novembre 2021, l'OFCOM a indiqué avoir vérifié les comptes annuels, le rapport de révision et d'autres documents de la société. Il a constaté que les amortissements 2020 étaient bien plus élevés que ceux des années précédentes, éléments extraordinaires exclus. En l'absence d'un inventaire des immobilisations permettant de justifier la permanence des taux d'amortissement appliqués annuellement, il a reconnu pour 2020 un montant d'amortissement correspondant à la moyenne des trois derniers exercices annuels (2017 à 2019). Il a retraité 320'495 francs et a calculé un bénéfice à rembourser de 332'208 francs. La société a contesté les corrections effectuées par l'OFCOM par courrier du 6 décembre 2021. 
 
B.  
Par décision du 24 février 2022, l'OFCOM a demandé à la société de lui rembourser, dans les 30 jours à compter de l'entrée en force de la décision, le montant finalement réduit à 232'322 francs de la somme de 487'128 francs reçue par décision du 5 juin 2020. L'OFCOM précisait avoir calculé les amortissements ordinaires attribuables aux années 2019 et 2020 sur la base moyenne des deux exercices 2017 et 2018 et que la valeur amortissable comprenait les nouveaux investissements consentis, déduction faite des subventions pour les nouvelles technologies. En appliquant la moyenne obtenue de 23%, il reconnaissait un amortissement ordinaire de 285'634 francs pour l'exercice 2020, ce qui après des corrections pour un montant total de 220'609 francs, conduisait à un bénéfice pour 2020 de 232'322 francs. 
Par arrêt du 7 novembre 2023, le Tribunal administratif fédéral a partiellement admis le recours interjeté par la société contre la décision précitée du 24 février 2022, en réduisant le montant à rembourser à 219'387 francs, au motif que le taux d'amortissement moyen devait être calculé sur les années 2016-2019 et non sur 2017-2018 comme l'avait retenu l'OFCOM et était ainsi de 22%. 
 
C.  
Par acte du 15 décembre 2023, A.________ SA recourt au Tribunal fédéral contre l'arrêt susmentionné du 7 novembre 2023, en concluant, sous suite de frais et dépens, à son annulation et, partant, à ce qu'il soit dit qu'elle ne doit pas rembourser à l'OFCOM le montant de "232'022" francs selon la décision du 24 février 2022, respectivement le montant de 219'387 francs selon la décision du 7 novembre 2023. 
Le Tribunal administratif fédéral se réfère intégralement à l'acte attaqué et renonce à formuler des observations. L'OFCOM indique qu'il confirme partager pleinement les considérants et conclusions de l'arrêt querellé. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 147 I 333 consid. 1).  
 
1.2. Le recours est dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF), rendue dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF) par le Tribunal administratif fédéral (art. 86 al. 1 let. a LTF).  
 
1.3. Selon l'art. 83 let. k LTF, le recours en matière de droit public est irrecevable contre les décisions en matière de subventions auxquelles la législation ne donne pas droit.  
 
1.3.1. Le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de préciser que les aides financières accordées à fonds perdu par les cantons aux entreprises dans le but de maintenir leur activité en relation avec l'épidémie de Covid-19 étaient des subventions au sens de l'art. 83 let. k LTF (arrêts 2C_142/2022 du 15 décembre 2023 consid. 1.4.2; 2C_59/2023 du 22 juin 2023 consid. 1.4 et la référence; 2C_401/2022 du 2 novembre 2022 consid. 1.2; 2C_8/2022 du 28 septembre 2022 consid. 1.2). Il n'y a pas lieu de qualifier autrement l'aide financière versée par la Confédération aux diffuseurs de radio et télévision en raison du Covid-19 sur la base de l'aOrdonnance COVID-19 médias électroniques.  
 
1.3.2. La question de l'existence d'un droit à la subvention peut rester ouverte. En effet, l'octroi ou l'assurance d'une subvention crée une position juridiquement protégée, si bien que la révocation ou le remboursement de celle-ci ne tombe pas sous le coup de l'art. 83 let. k LTF et peut faire l'objet d'un recours en matière de droit public, même si, initialement, il n'existait pas de droit à la subvention (arrêts 2C_1051/2022 du 14 décembre 2023 consid. 1.1; 2C_996/2022 du 23 mai 2023 consid. 1.2 et les références).  
 
1.4. Les autres conditions de recevabilité du recours en matière de droit public sont également réunies (cf. art. 42, 89 al. 1 et 100 al. 1 LTF), si bien qu'il convient d'entrer en matière, sous réserve de ce qui suit.  
 
1.5. En raison de l'effet dévolutif du recours au Tribunal administratif fédéral (cf. ATF 136 II 539 consid. 1.2), la recourante ne peut pas s'en prendre à la décision rendue par l'OFCOM le 24 février 2022. La conclusion n° 3 du recours, dans la mesure où elle porte sur cette décision, n'est ainsi pas recevable.  
 
2.  
 
2.1. Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF); il n'examine cependant la violation de droits fondamentaux que si ce grief a été invoqué et motivé par la partie recourante (cf. art. 106 al. 2 LTF).  
 
2.2. Pour statuer, le Tribunal fédéral se fonde sur les faits établis par l'autorité précédente (cf. art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des situations visées à l'art. 105 al. 2 LTF. Selon l'art. 97 al. 1 LTF, le recours ne peut critiquer les constatations de fait que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - c'est-à-dire arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 148 V 366 consid. 3.3; 147 I 73 consid. 2.2) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause. Conformément aux exigences de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF qui viennent d'être rappelées, la partie recourante doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces conditions sont réalisées. A défaut, il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait divergeant de celui qui est contenu dans l'acte attaqué (ATF 148 I 160 consid. 3; V 366 consid. 3.3; 145 V 188 consid. 2).  
 
2.3. En l'occurrence, la recourante dénonce une constatation arbitraire des faits, sans indiquer toutefois précisément quels faits seraient concernés, ni a fortiori démontrer en quoi ceux-ci auraient été retenus de façon insoutenable. Le recours ne satisfait ainsi pas aux exigences de motivation accrues de l'art. 106 al. 2 LTF. Le grief doit partant être écarté. Le Tribunal fédéral se fondera sur les faits tels qu'ils ressortent dudit arrêt. Par ailleurs, tel qu'il est motivé, le grief d'arbitraire dans la constatation des faits concerne plus une question de droit que de fait et sera examiné ci-après (cf. consid. 4 et 5).  
 
3.  
La recourante se plaint d'un défaut de base légale. Elle relève que la disposition de l'aOrdonnance COVID-19 médias électroniques portant sur l'obligation de restituer une partie, voire l'intégralité de l'aide en cas de bénéfice réalisé, a été abrogé avec effet au 1er décembre 2020. Elle conteste en outre que la loi fédérale du 5 octobre 1990 sur les aides financières et les indemnités (LSu; RS 616.1) puisse servir de base légale au remboursement comme l'a retenu le Tribunal administratif fédéral. 
 
3.1. Le principe de la légalité, consacré à l'art. 5 al. 1 Cst., exige que les autorités n'agissent que dans le cadre fixé par la loi. Tel que consacré à l'art. 5 al. 1 Cst., le principe de la légalité ne constitue pas un droit constitutionnel distinct, sauf en matière pénale ou fiscale, mais uniquement un principe constitutionnel général régissant l'activité de l'Etat. Il est toutefois permis de se plaindre de sa violation par le biais du recours en matière de droit public dès lors qu'il représente une règle de droit fédéral au sens de l'art. 95 let. b LTF (ATF 149 I 329 consid. 6.2).  
 
3.2. L'aOrdonnance COVID-19 médias électroniques, dans sa teneur en vigueur au 1er juin 2020 (RO 2020 1769), réglait notamment le paiement unique versé aux diffuseurs de radio pour l'année 2020, en raison de la situation extraordinaire en lien avec le coronavirus (cf. art. 1 al. 1 let. a). Elle prévoyait que l'OFCOM accordait, sur demande, un paiement unique aux diffuseurs de programmes de radio commerciaux titulaires d'une concession de radiocommunication OUC pour la diffusion de leur programme de radio dans une zone de desserte définie à l'annexe 1 de l'ordonnance fédérale du 9 mars 2007 sur la radio et la télévision (ORTV, RS 784.401; cf. art. 2 al. 1 let. a). L'art. 4 al. 3 de l'aOrdonnance COVID-19 médias électroniques prévoyait que les diffuseurs devait remettre à l'OFCOM jusqu'au 30 avril 2021 les comptes annuels 2020 et le rapport de révision et que s'il apparaissait qu'un bénéfice avait été réalisé, les montants prévus à l'al. 2 seraient réduits du montant du bénéfice et les montants correspondants dervraient être restitués (RO 2020 1769).  
 
3.3. Certes, le 11 novembre 2020, avec entrée en vigueur le 1er décembre 2020, le Conseil fédéral a abrogé notamment les art. 1 al. 1 let. a, 2 et 4 al. 1 à 3 de ladite ordonnance et prolongé la durée de validité de celle-ci jusqu'au 31 décembre 2021 (art. 5 al. 3; RO 2020 4673). Comme le relève l'autorité précédente, les dispositions topiques de l'aOrdonnance COVID-19 médias électroniques n'étaient plus en vigueur avant même que l'autorité inférieure ait pu contrôler si les bénéficiaires remplissaient les conditions d'octroi et cette ordonnance a été abrogée avant que l'autorité inférieure ne rende sa décision de remboursement le 24 février 2022.  
La recourante perd toutefois de vue que la décision du 5 juin 2020, comportait une condition résolutoire, en ce sens qu'il était indiqué que l'aide de 487'128 francs n'était maintenue que si les comptes annuels n'affichaient pas un bénéfice pour 2020 (dispositif, ch. 3). Cette décision, qui n'a pas été contestée par la recourante, a acquis force formelle de chose décidée, si bien qu'elle ne pouvait plus être remise en question, sinon par la voie exceptionnelle de la reconsidération (cf. ATF 137 I 69 consid. 2.2 s.; TSCHANNEN/MÜLLER/KERN, AllgemeinesVerwaltungsrecht, 5ème éd. 2022, § 31, n. 827 et 838 ss). 
La réalisation de la condition résolutoire en cause a ainsi entraîné la réduction de l'aide reçue en proportion du bénéfice obtenu et autorisait l'OFCOM à exiger le remboursement du montant versé en trop conformément à la décision du 5 juin 2020. Ladite réalisation n'impliquait donc pas la révocation de cette décision - laquelle aurait dû être rendue sur la base du droit en vigueur au moment de son prononcé. La décision de remboursement du 24 février 2022 ne pouvait donc être remise en question, y compris sous l'angle d'un éventuel défaut de base légal, que dans la mesure où les points contestés n'avaient pas déjà été réglés dans la décision du 5 juin 2020. La recourante ne pouvait partant pas s'en prendre, sous cet angle, au principe de l'obligation de rembourser en cas de bénéfice réalisé en 2020, ce principe ayant déjà été posé dans la décision du 5 juin 2020. 
 
3.4. Au demeurant, l'ordonnance du 11 novembre 2020, venant modifier celle du 1er juin 2020, ne contient pas de réglementation inter-temporelle et rien n'indique que le législateur aurait voulu modifier les conditions des aides déjà octroyées, en particulier en lien avec la réalisation d'un bénéfice. Concernant la décision du 5 juin 2020, il s'agit donc de se référer aux règles générales voulant que le droit applicable est celui en vigueur au moment où la décision a été prononcée (cf. ATF 148 V 162 consid. 3.2.1). L'abrogation des dispositions en cause est donc sans effet sur la décision du 5 juin 2020, y compris concernant les clauses accessoires qu'elle contenait.  
 
3.5. Par surabondance, il y a lieu de relever que le montant en cause, qui est versé à fonds perdu, représente une aide financière au sens de l'art. 3 al. 1 de la loi fédérale du 5 octobre 1990 sur les aides financières et les indemnités (loi sur les subventions ou LSu; RS 616.1) tombant dans le champ d'application de cette loi (cf. art. 2 al. 1 LSu). Le Tribunal administratif fédéral ne prête ainsi pas le flanc à la critique lorsqu'il retient que la LSu peut aussi trouver application dans le cas d'espèce, y compris s'il avait fallu examiner la question sous l'angle de la révocation (art. 30 al. 1 LSu).  
 
3.6. Le grief de violation du principe de la légalité est partant infondé.  
 
4.  
La recourante conteste devoir se soumettre aux exigences de l'OFCOM s'agissant de la tenue de la comptabilité et, en particulier, avoir l'obligation de fournir un inventaire détaillé comme le prévoit l'art. 3.3 du guide de l'OFCOM. Elle considère également que cette exigence est disproportionnée, celle-ci engendrant des coûts déraisonnables. Le guide de l'OFCOM n'a, selon elle, pas de valeur probante et elle considère que celui-ci ne lui a pas été clairement communiqué. Elle fait également valoir que l'OFCOM a validé ses comptes annuels précédents, notamment 2019 qui étaient tenus exactement de la même manière que ceux de 2020, sans jamais remettre en question l'amortissement de ses actifs et souligne que ses comptes ont été approuvés par son organe de révision. Se référant en particulier aux art. 957 CO, 18 de la loi fédérale du 24 mars 2006 sur la radio et la télévision (LRTV; RS 784.40) et 27 de l'ORTV, elle relève que ses comptes 2020 sont conformes aux exigences légales. 
 
4.1. S'agissant de la présentation et de l'établissement des comptes, l'art. 958c CO prévoit que l'établissement régulier des comptes est régi en particulier par les principes suivants; la clarté et l'intelligibilité, l'intégralité, la fiabilité, l'importance relative, la prudence, la permanence de la présentation et des méthodes d'évaluation et l'interdiction de la compensation entre les actifs et les passifs et entre les charges et les produits (al. 1). Le montant de chaque poste présenté dans le bilan et dans l'annexe est justifié par un inventaire ou d'une autre manière (al. 2). La présentation des comptes est adaptée aux particularités de l'entreprise et de la branche, dans le respect du contenu minimal prévu par la loi (al. 3).  
 
4.2. Concernant la prise en compte des dépenses, l'art. 14 al. 3 LSu prévoit que, pour ce qui a trait aux aides destinées à couvrir des déficits, le calcul des résultats financiers déterminants de l'entreprise est soumis notamment aux règles suivantes: les amortissements ne sont pris en compte qu'en tant qu'ils n'excèdent pas les taux usuels dans la branche (let. a); les amortissements sur les investissements qui ont été partiellement financés par des aides ou indemnités à fonds perdu ne sont pris en compte que pour la part qui dépasse ces prestations (let. b).  
 
4.3. Concernant les exigences en matière de compte annuel, il découle notamment de l'art. 18 LRTV que les diffuseurs de programmes suisses remettent à l'OFCOM le rapport et les comptes annuels et que le Conseil fédéral détermine le contenu du rapport et des comptes annuels (art. 18 al. 1 et 3). L'art. 42 LRTV, qui porte sur la surveillance financière, indique que le concessionnaire remet chaque année les comptes à l'OFCOM (al. 1) et que celui-ci peut exiger des renseignements du concessionnaire (al. 2). Aux termes de l'art. 27 al. 5 ORTV, tous les diffuseurs au bénéfice d'une concession doivent présenter des comptes annuels, se composant du compte de résultats, du bilan et de l'annexe, ainsi que le rapport de l'organe de révision. Le Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication (DETEC) peut édicter des instructions pour la présentation des comptes et la tenue de la comptabilité séparée selon l'art. 41 al. 2 LRTV. Selon l'art. 27 al. 6 ORTV, le compte de résultats et le bilan doivent être établis selon un plan comptable spécifique. L'art. 2 al. 1 de l'ordonnance du 5 octobre 2007 du DETEC sur la radio et la télévision (ODETEC, RS 784.401.11) prévoit que les diffuseurs concessionnaires établissent les comptes annuels selon les dispositions du code des obligations relatives à la comptabilité commerciale qui sont applicables aux sociétés anonymes et que l'OFCOM peut édicter des directives complémentaires, notamment pour garantir l'intégralité des données ainsi que pour évaluer le patrimoine et les transactions commerciales.  
Sur cette base, l'OFCOM a édicté en décembre 2019 un guide complémentaire à l'attention des diffuseurs portant sur l'établissement des comptes annuels (publié sur www.bakom.admin.ch > Page d'accueil > Médias électroniques > Infos pour les diffuseurs > Comptes annuels, page consultée le 7 mars 2024, ci-après: le guide de l'OFCOM). Ce guide prévoit que les diffuseurs au bénéfice d'une concession pour la diffusion d'un programme radio, assortie d'un mandat de prestations et donnant droit à une quote-part du produit de la redevance de réception, doivent fournir, entre autres, un tableau des immobilisations comprenant les détails des réserves latentes et de leur évolution (cf. guide de l'OFCOM ch. 2.2). S'agissant de l'inventaire des immobilisations, il spécifie qu'il est important d'avoir une preuve effective et non pas seulement une justification comptable. L'existence des actifs corporels doit être constatée d'une manière ou d'une autre. Les diffuseurs doivent tenir un fichier détaillé des immobilisations. Chaque objet doit être répertorié et valorisé dans l'inventaire, avec un numéro d'inventaire et un lieu de situation clairement définis. Il doit être en tout temps possible de remonter de la comptabilité aux différentes immobilisations via l'inventaire détaillé. La comptabilisation directement en charges d'actifs à caractère d'immobilisation est autorisée si l'actif ne dépasse pas 5'000 francs, peu importe l'exercice dans lequel ces dépenses sont réalisées. La direction du diffuseur doit établir des directives internes documentées sur la politique d'activation et sur les durées de vie retenues par type d'immobilisation. Ces directives doivent faire l'objet d'un contrôle interne d'application annuel et remises à l'OFCOM lors de ses travaux de surveillance financière (cf. guide de l'OFCOM ch. 3.3). Toujours selon ce guide, l'OFCOM prend en compte comme limite supérieure d'amortissement, les taux reconnus par l'impôt fédéral direct selon la "Notice A 1995 - Entreprises commerciales". Les procédés cantonaux spéciaux d'amortissement tel que les amortissements immédiats ne sont pas acceptés (ch. 3.16). 
 
4.4. Le guide de l'OFCOM constitue une ordonnance administrative qui n'a pas force contraignante pour le juge, mais dont il peut tenir compte lorsqu'elle permet une application correcte des normes légales dans un cas concret. Il doit s'en écarter lorsqu'elle pose des règles qui ne sont pas conformes à l'ordre juridique (cf. ATF 146 II 359 consid. 5.3; 141 II 338 consid. 6.1 et les arrêts cités; arrêt 2C_348/2022 du 7 mars 2023 consid. 4.4.1).  
 
 
4.5.  
 
4.5.1. D'emblée, il y a lieu de relever que la décision du 5 juin 2020, qui octroyait à la recourante une aide de 487'128 francs, indiquait que les comptes devaient être remis à l'OFCOM au plus tard le 30 avril 2021, en précisant que "les destinataires qui n'y [étaient] pas déjà tenus par la LRTV (art. 18 et 42 LRTV et art. 27 al. 2 ORTV) [devaient] également présenter des comptes annuels d'ici fin avril 2021, conformément aux exigences de l'OFCOM". L'office fédéral précité a précisé ce qu'il attendait de la recourante en matière de présentation des comptes les 17 décembre 2020 et 8 mars 2021, en renvoyant notamment aux dispositions du CO, de la LSu et au guide de l'OFCOM (cf. supra let. A.d). Dans ce dernier courrier, l'OFCOM rappelait à la recourante qu'elle devait lui fournir un tableau détaillé de ses immobilisations 2020 (solde initial/ constitution/ dissolution/ état final, avec comparaison de l'exercice précédent). En outre, il ressort également des faits de l'arrêt entrepris, qui lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF), que l'OFCOM avait déjà critiqué l'absence d'inventaire dans son rapport de révision du 15 avril 2009.  
La recourante a accepté le versement de l'aide en question, sans contester les exigences fixées en matière comptable et, en particulier, sans critiquer l'application sur ce point du guide de l'OFCOM. La recourante ne peut ainsi pas contester les règles applicables au stade du contrôle du respect des conditions d'octroi sans violer le principe de la bonne foi. 
 
4.5.2. Certes, il découle du principe de la continuité, rappelé dans le courrier du 17 décembre 2020, que la méthode d'amortissement doit être la même que celle utilisée l'année précédente, ce que la recourante allègue avoir respecté. Toutefois, dans son courrier du 15 novembre 2021, l'OFCOM a souligné la nécessité de produire un inventaire des immobilisations permettant de justifier la permanence des taux d'amortissement, en expliquant qu'en son absence, il devrait retenir pour 2020 un montant d'amortissement correspondant à la moyenne des trois derniers exercices annuels (2017 à 2019). Ainsi, dès réception de ce courrier, la recourante ne pouvait plus prétendre que les exigences en matière de comptabilité ne lui avait pas été clairement communiquées, ni ne pouvait considéré que la méthode d'amortissement qu'elle avait utilisé jusqu'alors, sans production d'inventaire, serait admissible.  
Par ailleurs, le Tribunal administratif fédéral explique de manière convaincante pour quelle raison, on ne pouvait déduire des décisions de fixation de la quote-part du produit de la redevance que les amortissements effectués jusqu'alors par la recourante avaient été faits correctement. Il relève en effet que, dans ce cadre, l'OFCOM examinait les comptes annuels et fixait la quote-part de la redevance selon d'autres critères et sur la base d'autres conditions que la mesure d'aide litigieuse. Il n'avait notamment pas à examiner si la recourante avait effectué un bénéfice. A titre d'exemple, l'autorité précédente indique que, dans sa décision du 26 octobre 2020 concernant l'exercice 2019, l'OFCOM avait certes mentionné n'avoir aucun motif de corriger les charges de la recourante, mais sans les avoir examinées en détail. Il relève que l'OFCOM n'avait d'ailleurs aucun motif de le faire, puisque les charges d'exploitation de la recourante prises en compte dépassaient de loin le montant maximum prévu par la concession et que, partant, même une correction à la baisse de celles-ci s'agissant des amortissements déclarés en 2019 n'aurait eu aucun impact sur le montant octroyé de la quote-part de la redevance. 
 
4.5.3. L'art. 2 al. 1 ODETEC autorisant l'OFCOM a édicter des directives complémentaires au CO concernant la tenue des comptes, on ne voit pas que cet office aurait outrepassé ses compétences en exigeant un inventaire détaillé des immobilisations. On ne voit pas non plus en quoi cette exigence serait contraire à l'ordre juridique, comme le soutient la recourante. A cet égard, il existe un intérêt public évident à pouvoir contrôler en détail les amortissements effectués, puisque ceux-ci influencent le bénéfice. L'examen rigoureux des amortissements effectués sert également l'égalité de traitement entre les bénéficiaires de l'aide en cause. Le "coût déraisonnable" pour l'entreprise bénéficiaire, invoquée par la recourante, ne ressort pas de l'arrêt attaqué. Au demeurant, il n'apparaît pas que cette exigence - qui s'impose d'ailleurs à toutes les entreprises concessionnaires qui ont droit à une quote-part du produit de la redevance de réception - serait disproportionnée au regard de l'aide perçue à fond perdu en cas d'exercice déficitaire. Enfin, on relèvera que le Tribunal administratif fédéral n'a pas exclu la possibilité de démontrer la pertinence des amortissements effectués autrement que par la présentation d'un inventaire, mais il a considéré que les autres documents présentés par la recourante ne permettaient pas de pallier à l'absence de celui-ci (arrêt attaqué consid. 5.4.2).  
 
4.6. Sur le vu de l'ensemble de ce qui précède, le Tribunal administratif fédéral ne prête pas le flanc à la critique lorsqu'il retient que la recourante était tenue de respecter les exigences fixées par l'OFCOM en matière de tenue des comptes, en particulier concernant le devoir de produire un inventaire détaillé des immobilisations.  
 
5.  
La recourante conteste la méthodologie d'amortissement utilisée par l'OFCOM et confirmée par le Tribunal administratif fédéral, à savoir l'application d'un taux d'amortissement moyen, lequel ne repose selon elle sur aucun principe comptable reconnu. 
 
5.1. Le guide de l'OFCOM prévoit une estimation d'office par appréciation lorsque le concessionnaire n'a pas satisfait à ses obligations ou si, pour d'autres raisons, les éléments financiers ne peuvent pas être établis sans doute possible. Celle-ci vise à assurer l'application correcte de la loi dans les cas douteux, lorsqu'une vérification exacte des comptes n'est pas possible par procédure ordinaire. Un comportement illégal du concessionnaire n'est pas indispensable. Il suffit que des éléments comptables ne puissent être déterminés de manière fiable. L'estimation est effectuée dans le cadre du pouvoir d'appréciation de l'OFCOM si, malgré sommation, le diffuseur n'a pas satisfait à ses obligations de procédure ou que les éléments probants ne peuvent pas être déterminés avec toute la précision voulue en l'absence de données suffisantes (cf. ch. 4.2).  
Selon le document "Marche à suivre pour le plan comptable pour les comptes annuels des diffuseurs titulaires d'une concession" établi par l'OFCOM en février 2021, les diffuseurs au bénéfice d'une quote-part de la redevance doivent comptabiliser selon la méthode indirecte (ci-après: Marche à suivre de l'OFCOM; p. 2, ch. 1510-1690; publié sur www.bakom.admin.ch > Page d'accueil > Médias électroniques > Infos pour les diffuseurs > Comptes annuels, page consultée le 7 mars 2024; concernant la notion de méthode indirecte, cf. RÉMY BUCHELER, Abrégé de droit comptable, 2ème éd 2018, p. 252 s.). Il précise également que les investissements pour lesquelles une contribution d'investissement pour les nouvelles technologies (subvention) a été octroyée, doivent être activées à la valeur d'acquisition (p. 2 ch. 1510-1690), ce qui correspond à un amortissement immédiat (sur cette notion, cf. ROUILLER/BAUEN/BERNET/LASSERE ROUILLER, La société anonyme suisse, 3ème éd. 2022, n° 1077 p. 1046 s.). 
 
5.2. En l'espèce, il ressort des faits de l'arrêt attaqué, qui lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF), que la recourante n'avait pas justifié le montant de chaque poste présenté dans le bilan par un inventaire. Toujours selon cet arrêt, la recourante n'a pas produit de directives internes documentées sur sa politique d'activation et sur les durées de vie retenues par type d'immobilisation qu'elle aurait appliquées à ses comptes annuels remis à l'OFCOM. Ni les comptes annuels ni les tableaux des immobilisations pour les années 2016 à 2020, produits devant l'OFCOM, ne révélaient une politique claire et constante d'amortissement. Les documents joints au recours déposé devant le Tribunal administratif fédéral ne permettaient pas de pallier à l'absence d'inventaire. En outre, il ressort également de cet arrêt que la recourante a perçu des subventions nouvelles technologies en 2017 et en 2019, mais n'a pas séparé dans ses comptes le montant comptabilisé comme amortissement ordinaire du montant comptabilisé comme amortissement pour nouvelles technologies, comme le prévoit le document Marche à suivre de l'OFCOM.  
 
5.3. Dans ces circonstances, la méthodologie d'amortissement utilisée par l'autorité précédente, basée sur les années 2016 à 2019 et conduisant à un taux moyen unique de 22%, n'est pas critiquable. En effet, comme le relève à juste titre le Tribunal administratif fédéral si cette approche n'était pas correct d'un point de vue strictement comptable, elle s'imposait dans le cadre de la fixation du droit aux aides en question, en raison du manque de clarté de la recourante dans la tenue de ses comptes (arrêt attaqué consid. 6.4.3 s.). En outre, il ressort de l'arrêt attaqué que la recourante n'a pas su saisir les nombreuses occasions qui lui ont été offertes pour expliquer de manière détaillée les amortissements effectués dans les comptes remis à l'OFCOM en avril 2021.  
Par ailleurs, le Tribunal administratif fédéral explique de façon convaincante pour quel motif les "amortissements nouvelles technologies" devaient être présentés séparément des amortissements ordinaires, ce que la recourante avait omis de faire. Cette absence de distinction empêche en effet de déterminer le taux d'amortissement ordinaire par catégorie d'actifs, les "amortissements nouvelles technologies" venant gonfler artificiellement ce premier (consid. 6.4.4). 
Enfin, contrairement à ce que soutient la recourante, le Tribunal administratif fédéral a examiné si la méthode prise en compte par l'OFCOM était adéquate. C'est ce qu'il exprime lorsqu'il indique qu'"il n'empiète pas sur le pouvoir d'appréciation de l'autorité inférieure lorsqu'elle a opté pour une solution appropriée" (consid. 6.3.4). La retenue qu'il s'impose pour ce qui concerne l'analyse des comptes et sur la question de savoir si la recourante a réalisé un bénéfice, ne prête pas le flanc à la critique, l'OFCOM disposant de connaissances spécialisées et d'une meilleure vue d'ensemble sur la question. 
 
6.  
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours. 
Succombant, la recourante doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 6'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante, à l'Office fédéral de la communication (OFCOM), au Tribunal administratif fédéral, Cour I, et au Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication. 
 
 
Lausanne, le 26 mars 2024 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Juge présidant : J. Hänni 
 
Le Greffier : A. de Chambrier