4A_141/2023 09.08.2023
Avis important:
Les versions anciennes du navigateur Netscape affichent cette page sans éléments graphiques. La page conserve cependant sa fonctionnalité. Si vous utilisez fréquemment cette page, nous vous recommandons l'installation d'un navigateur plus récent.
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4A_141/2023  
 
 
Arrêt du 9 août 2023  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes les Juges fédérales 
Jametti, Présidente, Hohl et Kiss. 
Greffier : M. Douzals. 
 
Participantes à la procédure 
A.________ SA, 
représentée par Me Philippe Eigenheer, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
B.________ SA, 
représentée par Me Thierry Sticher, avocat, 
intimée. 
 
Objet 
assurance-maladie collective; qualification du contrat de prestation de services, 
 
recours en matière civile contre l'arrêt rendu le 1er février 2023 par la 4ème Chambre des assurances sociales de la Cour de justice du canton de Genève (A/3244/2020, ATAS/56/2023). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. En janvier 2018, B.________ SA (ci-après: la société, la demanderesse ou l'intimée) a souscrit une police d'assurance-maladie collective pour son personnel auprès d' A.________ SA (ci-après: la société d'assurance, la défenderesse ou la recourante), valable dès le 1 er janvier 2019.  
 
A.b. Le 1 er janvier 2018, C.________ (ci-après: l'intéressée) a commencé à travailler à 40 % pour la société, dont l'administrateur est son époux, en qualité de responsable du marketing pour un salaire mensuel brut de 7'500 fr. versé douze fois l'an. Elle a perçu un bonus de 30'000 fr. en décembre 2018 et un salaire mensuel brut de 10'000 fr. en janvier et en février 2019.  
Aux termes de l'avenant du 15 janvier 2019 signé le 28 février 2019, son salaire annuel a été porté de 120'000 fr. à 300'000 fr., avec effet rétroactif au 1 er janvier 2019.  
 
A.c. L'intéressée est également active auprès de deux autres sociétés, soit D.________ Sàrl et E.________. Celles-ci sont toutes deux au bénéfice d'une assurance-maladie collective contractée auprès de la société d'assurance.  
Dans la première, que l'intéressée a fondée avec son époux, celle-ci est active à 50 % avec un horaire variable pour s'occuper de la comptabilité et des ressources humaines d'une station d'essence pour un salaire mensuel brut de 8'000 fr. 
Dans la seconde, auprès de laquelle elle est associée, elle touche un salaire annuel brut de 60'000 fr. pour une occupation irrégulière. 
 
A.d. Le 14 mai 2019, un cancer du sein a été diagnostiqué chez l'intéressée. Dès cette date, celle-ci a été en incapacité totale de travailler pour une durée indéterminée.  
 
A.e. Le 24 mai 2019, la société a informé la société d'assurance que sa masse salariale pour l'exercice 2019 s'élevait à 420'000 fr.  
 
A.f. Le 30 août 2019, la société a transmis à la société d'assurance le formulaire type de déclaration de maladie relatif à l'intéressée.  
Le 7 septembre 2019, la société d'assurance a indemnisé la société à concurrence de 13'151 fr. pour l'incapacité de travail de l'intéressée du 12 au 31 août 2019, suite au délai d'attente de 90 jours. 
 
A.g. Le 11 octobre 2019, la société d'assurance s'est interrogée sur le cas de l'intéressée, du fait que celle-ci était employée à 50 % auprès de deux sociétés qu'elle assurait et que ses différentes déclarations de salaire lui paraissaient surprenantes. Elle a procédé à une investigation.  
 
A.h. Le 30 octobre 2019, la société a transmis à la société d'assurance la documentation que celle-ci avait sollicitée. Elle a indiqué que l'intéressée avait un large carnet d'adresses et qu'elle était essentiellement chargée de trouver des terrains permettant à la société d'effectuer des promotions immobilières, ainsi que des clients pour l'achat des projets réalisés. Cette activité ne nécessitait pas un lieu fixe de travail ni des heures de travail ponctuelles. L'intéressée était amenée à se déplacer dans plusieurs communes du canton de Genève en journée, le soir et parfois le week-end.  
 
A.i. Le 27 mars 2020, l'expert mandaté par la société d'assurance a établi un rapport intermédiaire pour celle-ci. Il en ressort notamment que le taux d'occupation total de l'intéressée pour les trois sociétés était proche de 200 %.  
 
A.j. La société a continué de verser le salaire de l'intéressée pendant son incapacité de travail. Celle-ci lui a cédé sa créance éventuelle contre la société d'assurance.  
 
B.  
Le 14 octobre 2020, la société a déposé sa demande auprès de la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice du canton de Genève, concluant à ce que la société d'assurance fût condamnée à lui verser 268'280 fr. 40, intérêts en sus. Ce montant correspond aux indemnités journalières qui seraient dues pour l'incapacité de travail de l'intéressée du 14 mai 2019 au jour du dépôt de la demande, sous déduction du délai d'attente de 90 jours et du versement de 13'151 fr. effectué le 7 septembre 2019. 
Sur demande reconventionnelle, la société d'assurance a conclu à ce que la société fût condamnée à lui payer 13'151 fr., avec intérêts à 5 % l'an dès le 5 septembre 2019, à titre de remboursement des prestations versées indûment. 
Par arrêt du 1 er février 2023, la 4 ème Chambre des assurances sociales de la Cour de justice du canton de Genève a admis la demande de la société et rejeté la demande reconventionnelle de la société d'assurance.  
 
C.  
Contre cet arrêt, qui lui avait été notifié le 3 février 2023, la société d'assurance a formé un recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral le 3 mars 2023. En substance, elle conclut à ce que l'arrêt entrepris soit annulé et réformé, en ce sens que la demande de la société soit rejetée et sa demande reconventionnelle admise. Subsidiairement, elle conclut au renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
L'intimée conclut au rejet du recours. 
Les parties ont chacune déposé des observations complémentaires. 
La cour cantonale a renoncé à se déterminer sur le recours. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le litige porte sur une assurance complémentaire à l'assurance-maladie sociale, régie par la loi fédérale du 2 avril 1908 sur le contrat d'assurance (LCA; RS 221.229.1). Ce type de conflit ressortit à la matière civile au sens de l'art. 72 al. 1 LTF (ATF 138 III 2 consid. 1.1; 133 III 439 consid. 2.1). 
Au surplus, l'arrêt attaqué est une décision finale (art. 90 LTF) rendue par la Cour de justice du canton de Genève statuant en qualité d'instance cantonale unique au sens de l'art. 7 CPC (art. 134 al. 1 let. c de la loi du canton de Genève du 26 septembre 2010 sur l'organisation judiciaire [LOJ/GE; RS/GE E 2 05]; cf. art. 75 al. 2 let. a LTF et ATF 138 III 799 consid. 1.1). Aussi le présent recours est-il ouvert sans égard à la valeur litigieuse (art. 74 al. 2 let. b LTF). Interjeté au surplus par la société d'assurance, qui a succombé dans ses conclusions (art. 76 al. 1 LTF), dans le délai fixé par la loi (art. 100 al. 1 et art. 45 al. 1 LTF), le recours en matière civile est en principe recevable. 
 
2.  
 
2.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 140 III 115 consid. 2; 137 I 58 consid. 4.1.2; 137 II 353 consid. 5.1) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).  
Concernant l'appréciation des preuves, le Tribunal fédéral n'intervient, du chef de l'art. 9 Cst., que si le juge du fait n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, a omis sans raisons objectives de tenir compte des preuves pertinentes ou a effectué, sur la base des éléments recueillis, des déductions insoutenables (ATF 137 III 226 consid. 4.2; 136 III 552 consid. 4.2; 134 V 53 consid. 4.3; 133 II 249 consid. 1.4.3; 129 I 8 consid. 2.1). 
La critique de l'état de fait retenu est soumise au principe strict de l'allégation énoncé par l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 140 III 264 consid. 2.3 et les références citées). La partie qui entend attaquer les faits constatés par l'autorité précédente doit expliquer clairement et de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 et les références citées). Si elle souhaite obtenir un complètement de l'état de fait, elle doit aussi démontrer, par des renvois précis aux pièces du dossier, qu'elle a présenté aux autorités précédentes, en conformité avec les règles de la procédure, les faits juridiquement pertinents à cet égard et les moyens de preuve adéquats (ATF 140 III 86 consid. 2). Si la critique ne satisfait pas à ces exigences, les allégations relatives à un état de fait qui s'écarterait de celui de la décision attaquée ne pourront pas être prises en considération (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 130 I 258 consid. 1.3). 
 
2.2. Le Tribunal fédéral applique en principe d'office le droit (art. 106 al. 1 LTF) à l'état de fait constaté dans l'arrêt cantonal (ou à l'état de fait qu'il aura rectifié). Cela ne signifie pas que le Tribunal fédéral examine, comme le ferait un juge de première instance, toutes les questions juridiques qui pourraient se poser. Compte tenu de l'obligation de motiver imposée par l'art. 42 al. 2 LTF, il ne traite que les questions qui sont soulevées devant lui par les parties, à moins que la violation du droit ne soit manifeste (ATF 140 III 115 consid. 2, 86 consid. 2).  
Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF), y compris le droit constitutionnel (ATF 134 III 379 consid. 1.2; 133 III 446 consid. 4.1, 462 consid. 2.3). Il ne peut en revanche pas être interjeté pour violation du droit cantonal en tant que tel. Il est toutefois possible de faire valoir que la mauvaise application du droit cantonal constitue une violation du droit fédéral, en particulier qu'elle est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. ou contraire à d'autres droits constitutionnels (ATF 138 I 1 consid. 2.1; 134 III 379 consid. 1.2; 133 III 462 consid. 2.3). 
Le Tribunal fédéral n'est pas lié par l'argumentation juridique développée par les parties ou par l'autorité précédente; il peut admettre le recours, comme il peut le rejeter en procédant à une substitution de motifs (ATF 135 III 397 consid. 1.4). 
 
3.  
La recourante soutient que le contrat conclu entre la société intimée et l'intéressée devrait être qualifié de contrat de mandat et non de contrat de travail et, partant, que ledit contrat ne serait pas couvert par la police d'assurance-maladie collective conclue entre la société intimée et elle. 
 
3.1.  
 
3.1.1. La qualification juridique d'un contrat se base sur le contenu de celui-ci (ATF 144 III 43 consid. 3.3). Dans une première étape, il s'agit de déterminer le contenu du contrat en recherchant la réelle et commune intention des parties (art. 18 al. 1 CO). Si une telle intention ne peut être constatée, le contenu du contrat doit être interprété selon le principe de la confiance (ATF 145 III 365 consid. 3.2.1; 144 III 43 consid. 3.3; 140 III 134 consid. 3.2).  
Une fois le contenu du contrat déterminé, il s'agit, dans une seconde étape et sur cette base, de catégoriser juridiquement la convention (arrêts 4A_53/2021 du 21 septembre 2021 consid. 5.1.1; 4A_64/2020 du 6 août 2020 consid. 5 et les références citées). La qualification juridique d'un contrat est une question de droit. Le juge applique le droit d'office (art. 57 CPC) et détermine d'office les règles légales applicables à la convention des parties. Il n'est lié ni par la qualification effectuée par les parties ni par les expressions ou dénominations inexactes dont les parties ont pu se servir soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de la convention (" falsa demonstratio non nocet ") (ATF 131 III 217 consid. 3; 129 III 664 consid. 3.1; arrêts 4A_53/2021 précité consid. 5.1.1; 4A_64/2020 précité consid. 5 et les références citées).  
 
3.1.2. Par le contrat individuel de travail, le travailleur s'engage, pour une durée déterminée ou indéterminée, à travailler au service de l'employeur et celui-ci à payer un salaire fixé d'après le temps ou le travail fourni (art. 319 al. 1 CO). Les éléments caractéristiques de ce contrat sont une prestation de travail, un rapport de subordination, un élément de durée et une rémunération (arrêts 4A_53/2021 précité consid. 5.1.3; 4A_64/2020 précité consid. 6.1 et les arrêts cités; 4A_10/2017 du 19 juillet 2017 consid. 3.1).  
 
3.1.2.1. Le contrat de travail se distingue avant tout des autres contrats de prestation de services, en particulier du mandat, par l'existence d'un lien de subordination (ATF 125 III 78 consid. 4; 121 I 259 consid. 3a; 112 II 41 consid. 1a; arrêts 4A_53/2021 précité consid. 5.1.3.1; 4A_64/2020 précité consid. 6.2 et les arrêts cités), qui place le travailleur dans la dépendance de l'employeur sous l'angle personnel, organisationnel et temporel ainsi que, dans une certaine mesure, économique (ATF 121 I 259 consid. 3a; arrêts 4A_53/2021 précité consid. 5.1.3.1; 4A_64/2020 précité consid. 6.2 et les arrêts cités). Le travailleur est assujetti à la surveillance, aux ordres et instructions de l'employeur; il est intégré dans l'organisation de travail d'autrui et y reçoit une place déterminée (arrêts 4A_53/2021 précité consid. 5.1.3.1; 4A_64/2020 précité consid. 6.3.1; 4A_10/2017 précité consid. 3.1; 4A_200/2015 du 3 septembre 2015 consid. 4.2.1 et les arrêts cités).  
En principe, des instructions qui ne se limitent pas à de simples directives générales sur la manière d'exécuter la tâche, mais qui influent sur l'objet et l'organisation du travail et instaurent un droit de contrôle de l'ayant droit, révèlent l'existence d'un contrat de travail plutôt que d'un mandat (arrêts 4A_53/2021 précité consid. 5.1.3.1; 4A_64/2020 précité consid. 6.3.1 et les arrêts cités). 
 
3.1.2.2. Les critères formels, tels l'intitulé du contrat, les déclarations des parties ou les déductions aux assurances sociales, ne sont pas à eux seuls déterminants (arrêts 4A_53/2021 précité consid. 5.1.3.2; 4A_64/2020 précité consid. 6.4 et les arrêts cités). Il faut bien plutôt tenir compte de critères matériels relatifs à la manière dont la prestation de travail est effectivement exécutée, tels le degré de liberté dans l'organisation du travail et du temps, l'existence ou non d'une obligation de rendre compte de l'activité et/ou de suivre les instructions, ou encore l'identification de la partie qui supporte le risque économique.  
Constituent ainsi des éléments typiques du contrat de travail le remboursement des frais encourus par le travailleur (arrêts 4A_53/2021 précité consid. 5.1.3.2; 4A_64/2020 précité consid. 6.3.3 et les arrêts cités) et le fait que l'employeur supporte le risque économique et que le travailleur abandonne à un tiers l'exploitation de sa prestation, en contrepartie d'un revenu assuré (arrêts 4A_53/2021 précité consid. 5.1.3.2; 4A_64/2020 précité consid. 6.3.5 et les arrêts cités). 
La dépendance économique du travailleur est également un aspect typique du contrat de travail. Est déterminant le fait que, dans le contexte de la prestation que le travailleur doit exécuter, d'autres sources de revenus sont exclues et qu'il ne puisse pas, par ses décisions entrepreneuriales, influer sur son revenu. Un indice pour une telle dépendance réside dans le fait qu'une personne travaille pour une seule société. Cet indice est renforcé lorsque les parties conviennent d'une interdiction d'exercer toute activité économique similaire (arrêts 4A_53/2021 précité consid. 5.1.3.2; 4A_64/2020 précité consid. 6.3.6 et les arrêts cités). 
Seul l'examen de l'ensemble des circonstances du cas concret permet de déterminer si l'activité en cause est exercée de manière dépendante ou indépendante (ATF 130 III 213 consid. 2.1; 129 III 664 consid. 3.2; 128 III 129 consid. 1a/aa). 
 
3.2. Il ressort des déclarations des administrateurs et des employés de la société demanderesse que celle-ci est une petite entreprise qui est exploitée par deux couples qui travaillent ensemble de façon informelle et sur pied d'égalité. Lesdits couples achètent des terrains sur lesquels ils font construire des villas et des appartements et qu'ils vendent ensuite sur plans. L'intéressée avait pour tâche de trouver des terrains permettant à la société d'effectuer des promotions immobilières ainsi que des clients pour l'achat des projets réalisés. Cette activité ne nécessitait pas un lieu fixe de travail ni des heures ponctuelles et impliquait essentiellement l'entretien de son réseau relationnel, qui pouvait se faire tant en journée que le soir et parfois le week-end. La société avait pu acquérir un grand terrain grâce aux contacts de l'intéressée, ce qui lui avait permis de gagner quelques millions.  
La cour cantonale a constaté que la police liant les parties supposait l'existence d'un contrat de travail entre l'intéressée et la société afin de lui ouvrir le droit aux prestations d'assurance-maladie collective. Elle a jugé que tel était le cas. Elle a considéré que la société et l'intéressée avaient formellement conclu un contrat de travail et que rien n'empêchait la société et l'intéressée de convenir que le travail de celle-ci était celui d'une apporteuse d'affaires, sans horaires ni lieu de travail fixes, et d'un salaire élevé, pour tenir compte des affaires apportées à la société, plutôt que d'une participation de l'intéressée au bénéfice ou au chiffre d'affaires, selon l'art. 322a al. 1 CO. Vu les spécificités des rapports entre l'intéressée et les administrateurs de la société, qui travaillaient beaucoup ensemble, sur un pied d'égalité et en confiance, la cour cantonale a considéré que le critère de la subordination devait être relativisé et qu'il y avait lieu d'accorder davantage d'importance au fait que l'intéressée touchait une rémunération fixe et que c'était la société qui assumait le risque de l'entreprise. 
 
3.3. En substance, la recourante considère que l'intéressée était totalement libre de son temps, respectivement de son lieu de travail, qu'elle ne recevait pas d'instructions de la part de qui que ce soit au sein de l'intimée et qu'elle n'exerçait pas de fonction dirigeante au sein de l'intimée, dans la mesure où les deux couples exploitaient celle-ci sur un pied d'égalité. Selon elle, il n'était donc aucunement justifié de relativiser à ce point le critère de la subordination, qui n'était pas réalisé en l'espèce, et l'ensemble de ces éléments plaiderait en faveur de la qualification de contrat de mandat.  
 
3.4. L'intimée soutient quant à elle que, comme l'a retenu la cour cantonale, le critère de la subordination doit être relativisé s'agissant de professions libérales ou de salariés avec des fonctions dirigeantes car, dans ce cadre, le travailleur renonce à assumer le risque économique d'une affaire en échange d'un salaire fixe. Tel serait le cas ici, dans la mesure où, selon elle, l'intéressée utilisait son réseau professionnel pour promouvoir et dénicher des affaires pour l'intimée, où elle n'assumait pas le risque de l'affaire apportée, où elle n'avait pas le droit à une part du bénéfice en lien avec celle-ci et où elle bénéficiait en échange d'un salaire fixe pour le travail effectué.  
L'intimée soutient en outre que la recourante aurait agi de mauvaise foi et ratifié le contrat, dans la mesure où, malgré ses doutes quant à la réalité du contrat de travail et du salaire perçu depuis le mois d'octobre 2019, elle aurait continué à encaisser les primes d'assurance sur ce salaire, sans jamais remettre en cause la police d'assurance. 
 
3.5. Demeure ici litigieux le critère du lien de subordination entre l'intéressée et la société intimée et la mesure dans laquelle ce critère devrait être relativisé.  
Il ressort des constatations factuelles de la cour cantonale que l'intéressée pouvait travailler où et quand elle le souhaitait. Il ne ressort pas de l'arrêt entrepris que l'intéressée eût été soumise à des instructions de la part des administrateurs. Au contraire, les deux couples exploitant la société travaillaient sur un pied d'égalité. Dans sa subsomption, la cour cantonale a omis de prendre en compte un indice s'opposant à la qualification de contrat de travail, soit l'absence de dépendance économique de l'intéressée, dans la mesure où celle-ci était également active pour deux autres sociétés et que son taux d'activité s'élevait à 50 % s'agissant de D.________ Sàrl. 
Au vu de ces éléments, force est de constater que le critère du rapport de subordination fait défaut en l'espèce. 
Dans la mesure où l'intéressée était " responsable du marketing ", où son activité consistait dans la recherche de terrains et de clients et où il ne ressort pas de l'arrêt entrepris qu'elle aurait été administratrice de l'intimée, l'intéressée ne saurait être qualifiée de dirigeante de l'intimée. C'est dès lors à tort que la cour cantonale a retenu que le critère du lien de subordination, qui permet de distinguer le contrat de travail des autres contrats de prestation de services, devait être relativisé en raison de la spécificité des rapports entre l'intéressée et les administrateurs de la société. 
Si l'on doit donc donner raison à la cour cantonale lorsqu'elle estime que l'absence de lien de subordination ne permet pas de qualifier le contrat conclu de contrat de travail, on doit lui donner tort lorsqu'elle estime que ce critère doit être relativisé et que la modification de la rémunération mensuelle, qui a été portée de 7'500 fr. le 1er janvier 2018 à 25'000 fr. le 28 février 2019 avec effet rétroactif au 1 er janvier 2019, est déterminante et typique d'un contrat de travail. La cour cantonale a retenu que l'augmentation de la rémunération de l'intéressée était liée au fait que son activité avait permis une importante augmentation du chiffre d'affaires de la société et non à une modification de son cahier des charges ou de ses responsabilités. On ne voit en effet pas que l'intéressée puisse prétendre à l'égard de son mari et de ses associés à un tel salaire sur la durée, et ce sans égard aux affaires qu'elle apporte à la société, et donc aux bénéfices de celle-ci, et que c'est la société qui assume le risque de l'entreprise et devrait lui verser ce salaire sans condition. Sans qu'il ne soit nécessaire de parler de fraude ou de contrat simulé, il suffit de constater que les parties étaient dans l'erreur quant à la qualification du contrat, soit de l'activité exercée par l'intéressée dans cette entreprise familiale. On relèvera encore que la rémunération de l'intéressée était versée sur le compte de son mari, sur lequel elle avait une procuration, et qu'elle a demandé et obtenu une avance de salaire de 120'000 fr. pour faire des travaux dans leur chalet au mois d'avril 2019. Au vu de ces derniers éléments, des rapports personnels, de l'absence de lien de subordination et de la rémunération revue à la hausse uniquement en raison du bénéfice tiré par la société d'une promotion que l'intéressée lui avait apportée, le contrat liant la société et l'intéressée doit être qualifié de mandat.  
Dès lors que la police d'assurance litigieuse requiert l'existence d'un contrat de travail, ce que l'intimée ne conteste pas, le droit aux prestations d'assurance-maladie collective n'est pas ouvert. 
Le grief de la recourante doit dès lors être admis. Au vu de l'issue de ce grief, il n'est pas nécessaire d'examiner les autres griefs de la recourante. 
 
3.6. L'intimée soutient que la recourante aurait fait preuve de mauvaise foi et ratifié le contrat en continuant, malgré ses doutes quant à l'existence d'un contrat de travail et d'un salaire, d'encaisser des primes d'assurance relatives audit salaire. Dès lors que l'arrêt entrepris ne constate pas que la société d'assurance aurait continué d'encaisser lesdites primes et que l'intimée ne sollicite pas valablement le complètement de l'état de fait sur ce point, en indiquant avec précision qu'elle avait dûment allégué et prouvé ce fait devant la cour cantonale (cf. supra consid. 2.1), le grief de l'intimée est irrecevable.  
 
3.7. Partant, la demande de la société doit être rejetée et la demande reconventionnelle de la société d'assurance admise. Dans la mesure où la recourante conclut à ce que le montant de 13'151 fr. porte intérêts au 5 septembre 2019, où l'arrêt entrepris a constaté que la société d'assurance avait indemnisé la société à hauteur dudit montant le 7 septembre 2019 (cf. supra consid. A.f) et où la recourante ne démontre pas l'arbitraire de cette constatation, ce montant portera intérêts à compter de cette date-ci.  
 
4.  
Au vu de ce qui précède, le recours doit être admis et l'arrêt annulé et réformé, en ce sens que la demande de la société est rejetée et la demande reconventionnelle de la société d'assurance admise sous réserve du dies a quo des intérêts.  
Les frais judiciaires et les dépens de la procédure fédérale seront mis à la charge de l'intimée, qui succombe (art. 66 al. 1 et art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
La cause sera retournée à la cour cantonale pour nouvelle décision sur les dépens de la procédure cantonale. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est admis et l'arrêt est annulé et réformé, en ce sens que la demande de la société intimée est rejetée et que la société intimée est condamnée à payer à la recourante 13'151 fr., avec intérêts à 5 % l'an dès le 7 septembre 2019. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 6'500 fr., sont mis à la charge de l'intimée. 
 
3.  
L'intimée versera à la recourante une indemnité de 7'500 fr. à titre de dépens. 
 
4.  
La cause est retournée à la cour cantonale pour nouvelle décision sur les dépens de la procédure cantonale. 
 
5.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la 4 ème Chambre des assurances sociales de la Cour de justice de la République et canton de Genève.  
 
 
Lausanne, le 9 août 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jametti 
 
Le Greffier : Douzals