4A_3/2023 30.08.2023
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4A_3/2023  
 
 
Arrêt du 30 août 2023  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes les Juges fédérales 
Jametti, Présidente, Kiss et May Canellas. 
Greffier : M. Douzals. 
 
Participantes à la procédure 
A.________ AG, 
représentée par Me Michael Biot, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
B.________, 
représentée par Me Antonia Mottironi, avocate, 
intimée. 
 
Objet 
licenciement abusif, 
 
recours en matière civile contre l'arrêt rendu le 9 novembre 2022 par la Chambre des prud'hommes de la Cour de justice du canton de Genève 
(C/29770/2019-5, CAPH/178/2022). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Par contrat de travail du 18 mai 2009, B.________ (ci-après: l'employée, la demanderesse ou l'intimée) a été engagée par C.________ SA, succursale luxembourgeoise, en qualité de " Business Developer Financial Services " à partir du 1 er juin 2009 pour une durée indéterminée.  
Par courrier du 29 mai 2014, elle a été informée de son détachement à U.________ en Suisse pour la période du 25 mai 2014 au 24 mai 2015. Elle était placée sous la supervision de D.________, cadre de A.________ AG. 
Dans le cadre d'un échange de courriels intervenu entre 2014 et 2015 au sujet du transfert de son contrat de travail à A.________ AG, l'employée a indiqué à la responsable des ressources humaines de cette société que, le cas échéant, elle conserverait son domicile luxembourgeois et se déplacerait en Suisse chaque semaine. Son interlocutrice lui a répondu, le 18 juillet 2014, qu'elle serait traitée de la même manière que n'importe quel employé suisse; elle pourrait donc demander le remboursement de ses frais de déplacement entre Genève et les locaux du client, mais - pour des raisons d'équité avec les autres collaborateurs - elle devrait assumer le coût des billets d'avion entre la Suisse et le Luxembourg. Elle lui a confirmé, le 29 juillet 2015, qu'en cas d'engagement par A.________ AG, la politique de remboursement des frais de déplacement serait régie par le règlement sur les dépenses de A.________ AG. 
 
A.b. Le 13 décembre 2016, A.________ AG (ci-après: l'employeuse, la défenderesse ou la recourante) a soumis à l'employée un projet de contrat de travail prévoyant que celle-ci serait engagée dès le 1er février 2017 comme " Senior Managing Consultant " et que son lieu de travail serait Genève.  
Le 30 décembre 2016, l'employée s'est étonnée auprès du service de ressources humaines de l'employeuse que ce soit Genève et non Bâle, comme discuté, qui ait été mentionnée comme lieu de travail. Lesdites ressources humaines se sont mises en rapport avec D.________, lequel a confirmé l'affectation de l'employée à Bâle. 
 
A.c. Par contrat de travail de durée indéterminée du 10 janvier 2017, l'employée a été engagée par l'employeuse dès le 1 er février 2017 en qualité de " Senior Managing Consultant ". Son lieu de travail contractuel était V.________ dans le canton de Bâle-Campagne. L'employée demeurait sous la supervision de D.________. Son salaire était de 205'000 fr. par an, treizième salaire inclus (soit 15'769 fr. 25 par mois). Les règlements et code de conduite de A.________ AG faisaient partie intégrante de son contrat de travail. Le contrat a été signé par D.________ et la cheffe du recrutement de A.________ AG.  
 
A.d. Le règlement sur les dépenses s'appliquait à tous les employés de A.________ AG, notamment en matière de remboursement des frais de voyage (art. 2.1.2). De manière générale, l'usage des transports en commun était préconisé (art. 2.2.1). Lorsqu'un véhicule privé était utilisé, une indemnité kilométrique de 0,85 fr. était versée pour tout déplacement excédant 201 km par mois (art. 2.2.1 et 2.5.3). En cas de déplacement entre les différentes branches de la société, seul le prix du voyage en transport en commun était remboursé, indépendamment du mode de déplacement choisi par l'employé. Les déplacements entre le lieu de domicile et le lieu de travail ne donnaient pas droit à une indemnisation (art. 2.2.1). En cas de déplacement professionnel en Suisse, un montant forfaitaire de 84 fr. pour les frais de bouche était prévu (art. 2.5.1).  
Le code de conduite des employés mentionnait notamment que ceux-ci étaient tenus de déclarer de manière complète et honnête leurs frais professionnels. Ils devaient en particulier s'interdire de transmettre des informations susceptibles d'induire en erreur les personnes chargées de les traiter (art. 4.2). 
 
A.e. Par courriel du 17 janvier 2017, E.________, " Recruitement specialist " au sein de l'employeuse, s'est adressée à D.________ pour connaître les raisons de l'assignation de l'employée à Bâle. Son correspondant lui a répondu le même jour que celle-ci voyagerait la plupart du temps entre Luxembourg, Paris, Genève et Guernesey pour le projet F.________ et que Bâle avait été choisie le temps qu'elle soit fixée sur le lieu où elle passerait la majorité de son temps, car c'était le lieu le plus proche de son domicile au Luxembourg. E.________ lui a fait remarquer que l'adressage du courrier de l'employée était à Genève, ce qui n'était pas correct. Ce dernier point a finalement été corrigé le 16 mars 2017.  
Par courriel du 31 janvier 2017, la société chargée des démarches d'immigration pour l'employeuse a informé les ressources humaines de celle-ci qu'une demande d'autorisation de travail avait été déposée pour que l'employée puisse travailler à Bâle. Ces démarches impliquaient que les autorités genevoises soient informées du départ de l'employée. 
 
A.f. Par courrier du 9 mai 2018, l'employeuse a mis fin aux rapports de travail avec l'employée en raison de la fermeture du site bâlois. Un nouveau contrat de travail a été simultanément conclu entre les parties prévoyant les mêmes conditions de travail que le précédent, à l'exception du lieu de travail qui se situerait désormais à Zurich.  
 
A.g. Après la démission de D.________, intervenue en octobre 2018, G.________ est devenu le supérieur de l'employée, une autre personne s'intercalant entre eux dans la ligne hiérarchique.  
 
A.h. Par courriel du 13 février 2019, la " Project Management Office Manager " de l'employeuse a indiqué à l'employée et au supérieur de celle-ci que le client H.________ SA avait refusé le remboursement des frais de déplacement en voiture entre Zurich et Genève ainsi que les billets de train dont le prix excédait 127 fr. Les précités étaient informés qu'à l'avenir, seul le remboursement du prix d'un billet de train demi-tarif entre Zurich et Genève pourrait être réclamé. Suite à un échange de courriels, il a finalement été convenu le 15 février 2019 entre les intéressés - y compris les supérieurs de l'employée - que celle-ci cesserait de réclamer l'indemnité kilométrique à ce client et que les indemnités déjà réclamées seraient mises sur le compte de l'employeuse.  
 
A.i. L'employeuse a mis en oeuvre une enquête interne afin de vérifier l'allégation selon laquelle l'employée avait demandé et reçu des remboursements pour des dépenses non valables : elle vivait au Luxembourg, avait Zurich " comme lieu de travail " et avait demandé des indemnités kilométriques entre Zurich et Genève alors qu'elle ne faisait pas de trajets entre ces deux villes en voiture, mais venait directement du Luxembourg en avion.  
Le rapport d'enquête a été établi le 22 mai 2019. Il conclut que cette allégation est fondée. Selon ce document, l'employée avait reconnu avoir obtenu des remboursements pour des trajets en voiture qu'elle n'avait pas effectués pour 22'447 USD entre juin 2017 et février 2019. Elle avait également été remboursée en 2017 pour des frais d'avion entre Bruxelles et Genève (1'348 USD). Elle avait expliqué avoir conclu un accord verbal avec son supérieur hiérarchique, lui permettant de procéder de la sorte pour compenser les frais d'avion qu'elle devait supporter entre son domicile au Luxembourg et Genève. Elle avait également obtenu des remboursements pour des frais effectifs d'hôtel, de nourriture et de taxis à Genève, puisqu'elle y travaillait sans y résider. Elle avait toujours été claire sur le fait qu'elle n'entendait pas déménager à Genève, même après son transfert auprès de l'employeuse. Toujours selon ce rapport, en septembre 2017, les responsables du département de l'employeuse chargé de surveiller les frais avaient demandé au supérieur de l'employée des informations relatives à ses frais, notamment les billets d'avion entre Genève et Bruxelles, puisque l'intéressée n'habitait pas en Belgique mais au Luxembourg, les frais de taxi et les dépenses en liquide. Après les avoir obtenues, le département en question n'avait rien entrepris. 
Ni D.________ ni G.________ n'ont été interrogés pour les besoins de ce rapport. 
Ce document n'a pas été communiqué à l'employée. Elle ne l'a obtenu que dans le cadre de la présente procédure. 
 
A.j. Par courrier du 20 juin 2019, l'employeuse a licencié l'employée avec effet au 30 septembre 2019. Celle-ci était dispensée de travailler dès le 28 juin 2019. L'employeuse indiquait notamment avoir subi un dommage de 155'844 fr. correspondant à des dépenses professionnelles indûment payées (88'707 fr. de frais d'hébergement, 43'342 fr. de frais de bouche, 22'447 fr. d'indemnités kilométriques et 1'348 fr. de frais d'avion). Elle déclarait compenser une partie de ce montant avec les salaires de juin à septembre 2019 et entendait facturer le solde à l'employée par lettre séparée. Si l'employée obtenait un emploi avant la fin de son contrat, elle était tenue d'en informer l'employeuse et le revenu qu'elle en retirerait serait " ajouté aux prétentions " de celle-ci.  
Par courrier du 1 er juillet 2019, l'employée a contesté le congé et en a réclamé la motivation.  
L'employeuse lui a fait savoir, le 20 août 2019, que les motifs tenaient dans le fait que, pendant plus de deux ans, l'employée avait délibérément présenté de manière fausse ses frais de voyage et méthodiquement contourné les règles internes relatives au remboursement des frais; elle aurait gravement violé lesdites règles et causé un dommage de 155'844 fr., détruisant la relation de confiance avec son employeuse. Cette dernière confirmait ses prétentions en réparation du dommage. Après compensation avec les salaires encore dus, le solde qui se montait à 104'944 fr. devait lui être versé jusqu'au 31 août 2019. Elle réservait ses droits, y compris des poursuites pénales. 
Par courriers des 30 août 2019 et 15 janvier 2020, l'employée a contesté ces accusations et s'est opposée au licenciement qu'elle a qualifié d'abusif. Elle a fait savoir que, lors des discussions ayant abouti à son transfert à l'employeuse, il avait été convenu que son lieu de travail serait Bâle, qui était proche de son domicile au Luxembourg, étant précisé qu'on ne lui avait pas dit à l'époque pour quel client elle travaillerait. Sa mission auprès de H.________ à Genève avait débuté à la fin du mois d'avril 2017; elle devait être temporaire, mais s'était révélée permanente en février 2018. Elle n'avait aucune certitude de rester sur ce projet. Ce client avait réclamé à plusieurs reprises qu'elle en soit écartée alors que l'employeuse souhaitait la garder sur ce projet en raison de ses connaissances. L'employeuse était responsable des conséquences liées à la désignation de son lieu de travail. Les frais litigieux avaient été facturés aux clients de l'employeuse et payés par eux de sorte que celle-ci ne subissait aucun dommage. L'employée avait respecté toutes les règles posées par son employeur. Son droit d'être entendue dans le cadre du rapport d'audit avait été violé de manière flagrante; elle exigeait d'en prendre connaissance. 
 
B.  
 
B.a. Par demande du 10 décembre 2019 déclarée non conciliée et introduite devant le Tribunal des prud'hommes du canton de Genève le 15 juin 2020, l'employée a conclu à ce que l'employeuse soit condamnée à lui verser la somme totale de 184'328 fr. 95 avec intérêts moratoires, dont 102'500 fr. net à titre d'indemnité pour licenciement abusif, 63'077 fr. brut à titre de salaire pour la période de juin à septembre 2019, 11'826 fr. 95 brut à titre de treizième salaire au prorata, pour la période de janvier à septembre 2019, 1'100 fr. net à titre de remboursement de la position créditrice de sa carte de crédit professionnelle, 1'975 fr. net à titre de remboursement de ses frais de formation et 3'840 fr. net à titre de remboursement de ses frais de déplacement pour la période du 15 février au 30 juin 2019.  
L'employeuse a conclu au déboutement de l'employée de toutes ses conclusions. Reconventionnellement, elle a conclu à ce que celle-ci soit condamnée à lui verser 103'834 fr. 10 à titre de dommages-intérêts. 
Par jugement du 1 er février 2022, le Tribunal des prud'hommes a condamné l'employeuse à verser à l'employée la somme brute de 74'903 fr. 95 et celle nette de 2'020 fr., avec intérêts moratoires, et débouté les parties de toute autre conclusion. Au chapitre de l'indemnité pour résiliation abusive, le Tribunal a considéré que l'employée s'était prévalue d'un lieu d'affectation contractuel qu'elle savait ne pas correspondre à la réalité pour réclamer le remboursement d'indemnités kilométriques entre Bâle et Genève, puis entre Zurich et Genève, sans pour autant avoir parcouru ces trajets ou supporté de frais correspondants. Son licenciement n'était donc pas abusif et aucune indemnité n'était due à ce titre.  
 
B.b. Par arrêt du 9 novembre 2022, la Chambre des prud'hommes de la Cour de justice du canton de Genève a admis l'appel de l'employée et condamné l'employeuse à lui verser, outre la somme nette de 2'020 fr., celle brute de 177'403 fr. 95 incluant l'indemnité pour congé abusif réclamée par l'employée, avec intérêts. Ses motifs seront exposés dans les considérants en droit du présent arrêt.  
 
C.  
L'employeuse forme un recours en matière civile, en concluant principalement à l'annulation de cet arrêt et à la confirmation du jugement du Tribunal des prud'hommes. 
Dans sa réponse, l'intimée a conclu à ce que le recours soit déclaré irrecevable, subsidiairement à ce qu'il soit rejeté. Dans la sienne, la Cour cantonale s'est référée aux considérants de son arrêt. 
Par ordonnance présidentielle du 21 février 2023, la demande d'effet suspensif de la recourante a été rejetée. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Les conditions de recevabilité du recours en matière civile sont réalisées sur le principe, notamment celles afférentes à la valeur litigieuse minimale de 15'000 fr. (art. 74 al. 1 let. a LTF) et au délai de recours (art. 100 al. 1 LTF). Dans ses conclusions, la recourante ne s'en prend qu'à l'indemnité pour licenciement abusif que la Cour cantonale l'a condamnée à payer à l'intimée. Contrairement à ce que soutient l'intimée, il n'y a donc aucun obstacle qui se dresse à l'entrée en matière. Demeure réservée la recevabilité des griefs individuels. 
 
2.  
 
2.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut rectifier ou compléter les constatations de l'autorité précédente que si elles sont manifestement inexactes ou découlent d'une violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). " Manifestement inexactes " signifie ici " arbitraires " (ATF 140 III 115 consid. 2; 135 III 397 consid. 1.5). Encore faut-il que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). La critique de l'état de fait retenu est soumise au principe strict de l'allégation énoncé par l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 140 III 264 consid. 2.3 et les références citées).  
La partie qui entend attaquer les faits constatés par l'autorité précédente doit expliquer clairement et de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 et les références citées). Si elle souhaite obtenir un complètement de l'état de fait, elle doit aussi démontrer, par des renvois précis aux pièces du dossier, qu'elle a présenté aux autorités précédentes en conformité avec les règles de procédure les faits juridiquement pertinents à cet égard et les moyens de preuve adéquats (ATF 140 III 86 consid. 2). Si la critique ne satisfait pas à ces exigences, les allégations relatives à un état de fait qui s'écarterait de celui de la décision attaquée ne pourront pas être prises en considération (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1). Aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF). 
 
2.2. Le recours en matière civile peut être exercé pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF), y compris le droit constitutionnel (ATF 136 I 241 consid. 2.1; 136 II 304 consid. 2.4). Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est donc limité ni par les arguments soulevés dans le recours, ni par la motivation retenue par l'autorité précédente; il peut admettre un recours pour un autre motif que ceux qui ont été invoqués et il peut rejeter un recours en adoptant une argumentation différente de celle de l'autorité précédente (ATF 137 II 313 consid. 1.4; 135 III 397 consid. 1.4). Compte tenu de l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués, sauf en cas d'erreurs juridiques manifestes. Il n'est pas tenu de traiter, comme le ferait une autorité de première instance, toutes les questions juridiques qui se posent, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui (ATF 140 III 115 consid. 2; 137 III 580 consid. 1.3). Par exception à la règle selon laquelle il applique le droit d'office, il n'examine la violation d'un droit constitutionnel que si le grief a été invoqué et motivé de façon détaillée (art. 106 al. 2 LTF; ATF 135 III 397 consid. 1.4 in fine).  
 
3.  
Il est constant que les parties ont été liées par un contrat de travail de durée indéterminée, librement résiliable par chacune d'elles conformément à l'art. 335 al. 1 CO, moyennant le respect du délai et du terme de congé convenus ou légaux, et que l'employeuse a mis fin à celui-ci le 20 juin 2019 pour l'échéance du 30 septembre suivant. A ce stade, le litige ne porte plus que sur l'indemnité pour résiliation abusive que la Cour cantonale a condamné l'employeuse à verser à son ancienne employée. 
Selon la Cour cantonale, la résiliation apparaît abusive (art. 336 CO) sous deux angles. 
En premier lieu, l'employeuse avait résilié le contrat de travail parce que l'employée avait fait valoir de bonne foi des prétentions résultant de son contrat de travail. Le motif qu'elle avait avancé pour justifier la résiliation, à savoir que l'employée aurait abusé de sa confiance en obtenant de sa part le remboursement de frais de déplacement qui ne correspondaient pas à la réalité, était inexact. En réalité, l'employée avait obtenu ces remboursements en se fondant sur un accord conclu avec son supérieur hiérarchique D.________, lequel était l'un des cadres de l'employeuse : ils étaient ainsi convenus que son lieu de travail serait Bâle en sachant pertinemment que l'employée n'y exécuterait pas concrètement son travail, ce qui lui permettait de facturer à l'employeuse les frais de déplacement en Suisse de Bâle à Genève où la mission auprès du client H.________ requérait sa présence. De cette manière, elle pouvait se faire rembourser des indemnités kilométriques entre Bâle et Genève, puis (dès la fermeture du site de Bâle) entre Zurich et Genève, qui compensaient les frais d'avion qu'elle devait engager du fait de son domicile au Luxembourg qu'elle n'entendait pas quitter. L'employeuse était parfaitement au courant de cet accord puisque son département compétent en matière de frais avait interpellé l'employée et D.________ sur ce point en septembre 2017 et n'avait entrepris aucune démarche après avoir entendu leurs explications. Cet accord avait également été validé et appliqué par G.________, qui était devenu le supérieur hiérarchique de l'employée après le départ de D.________. L'intéressé avait en effet déclaré qu'il savait que l'employée habitait au Luxembourg, qu'elle travaillait à Genève et qu'elle se faisait rembourser ses frais de déplacement, de logement et de bouche. Il estimait qu'elle était en droit de recevoir une indemnité pour ses frais de déplacement puisqu'il avait ajouté que, après le refus du client H.________ de continuer à prendre en charge ces frais, il avait cherché à trouver une autre solution permettant à l'employée de continuer à les facturer. A cela s'ajoutait que, suite à l'échange de courriels intervenu entre le 13 et le 15 février 2019, il avait été contenu entre les parties que les indemnités déjà réclamées seraient prises en charge par l'employeuse. L'employée avait agi de bonne foi : elle n'avait aucune raison de penser que l'accord conclu avec ses supérieurs et exécuté pendant plusieurs années n'était pas valable. 
En second lieu, la manière dont le licenciement avait été signifié violait gravement les droits de la personnalité de l'employée. L'employeuse avait accusé celle-ci de manière péremptoire d'avoir trompé sa confiance et de lui avoir occasionné un dommage de plus de 155'000 fr. en touchant des montants auxquels elle n'avait pas droit; elle avait proféré des accusations attentatoires à son honneur sans en vérifier de manière suffisante la réalité. Il lui aurait incombé de donner à son employée la possibilité de se prononcer sur les conclusions du rapport d'audit avant de la licencier, ce qu'elle n'avait pas fait. Si l'employée avait certes été interrogée dans ce contexte, elle n'avait pas pour autant pu faire valoir sa position; le but de l'enquête ne lui avait pas été dévoilé au moment de son audition et elle avait dû ouvrir action pour avoir accès finalement à ce document. Lorsqu'elle l'avait licenciée, l'employeuse lui avait signifié qu'elle retenait son salaire et que le revenu qu'elle tirerait d'un éventuel nouvel emploi, débuté pendant le délai de congé, serait ajouté à ses prétentions. Elle avait également réservé des poursuites pénales, ce qui était inapproprié et inutilement blessant, aucun élément sérieux ne lui permettant de supposer que l'employée aurait pu se rendre coupable d'une infraction pénale. Une telle mention pouvait être interprétée comme une tentative visant à la dissuader de faire valoir ses droits. La résiliation se révélait donc abusive sous cet angle également. 
La recourante attaque, comme il se doit (ATF 138 III 728 consid. 3.4; 133 IV 119 consid. 6.3 et les références citées), les deux pans de cette motivation. 
 
4.  
 
4.1. Selon l'art. 335 al. 1 CO, le contrat de travail conclu pour une durée indéterminée peut être résilié par chacune des parties. En droit suisse du travail, la liberté de la résiliation prévaut, de sorte que, pour être valable, un congé n'a en principe pas besoin de reposer sur un motif particulier.  
Le droit fondamental de chaque cocontractant de mettre unilatéralement fin au contrat est cependant limité par les dispositions sur le congé abusif (art. 336 ss CO) (ATF 136 III 513 consid. 2.3; 131 III 535 consid. 4.1). C'est le lieu de souligner la différence de nature existant entre la résiliation ordinaire au sens de l'art. 335 CO (qui entre ici seule en ligne de compte), que l'employeur est libre de notifier à moins que l'employé ne démontre son caractère abusif, et le congé immédiat (art. 337 CO), que l'employeur ne peut mettre en oeuvre que s'il démontre l'existence d'un juste motif. 
L'art. 336 al. 1 CO énumère des cas dans lesquels la résiliation (ordinaire) est abusive; cette liste n'est toutefois pas exhaustive et une résiliation abusive peut aussi être admise dans d'autres circonstances, en application de l'art. 2 al. 2 CC. Il faut cependant que ces autres situations apparaissent comparables, par leur gravité, aux cas expressément envisagés par l'art. 336 CO (ATF 136 III 513 consid. 2.3; 132 III 115 consid. 2.1). 
Aux termes de l'art. 336 al. 1 let. d CO, le congé est abusif lorsqu'il est donné par une partie parce que l'autre partie fait valoir de bonne foi des prétentions résultant du contrat de travail. Le travailleur n'est protégé contre le licenciement que s'il peut supposer de bonne foi que les droits qu'il a prétendus lui sont acquis. L'exigence de la bonne foi présente un double aspect, protégeant à la fois l'employeur et le travailleur : d'une part, la réclamation ne doit être ni chicanière ni téméraire, car la protection ne s'étend pas au travailleur qui cherche à bloquer un congé en soi admissible ou qui fait valoir des prétentions totalement injustifiées; d'autre part, la prétention exercée ne doit pas nécessairement être fondée en droit puisqu'il suffit que le travailleur soit légitimé, de bonne foi, à penser qu'elle l'est (ATF 136 III 513 consid. 2.4; arrêt 4A_39/2023 du 14 février 2023 consid. 3.2). 
 
4.2. La manière dont le congé est donné peut aussi le faire apparaître comme abusif. Même lorsque le motif de la résiliation est en soi légitime, celui qui exerce son droit de mettre fin au contrat doit agir avec des égards (ATF 132 III 115 consid. 2.2). Si l'employeur porte une grave atteinte aux droits de la personnalité du travailleur dans le contexte d'une résiliation, celle-ci doit être considérée comme abusive; un comportement simplement inconvenant ne suffit cependant pas (ATF 132 III 115 consid. 2.2 et 2.3; 131 III 535 consid. 4.2; plus succinctement : ATF 136 III 513 consid. 2.3).  
Il s'agit donc d'un cas de violation de l'art. 328 CO qui oblige l'employeur à protéger la personnalité du travailleur, notamment son honneur personnel et professionnel. L'employeur ne doit pas stigmatiser, de manière inutilement vexatoire et au-delà du cercle des intéressés, le comportement du travailleur. Il y a atteinte grave aux droits de la personnalité lorsque l'employeur formule des accusations lourdes qui se révèlent infondées alors qu'il ne dispose d'aucun indice sérieux ou n'a fait aucune recherche en vue d'établir les faits. L'employeur ne doit pas formuler des accusations accablantes si ses soupçons ne reposent sur aucun élément sérieux. Même si les faits sont exacts, la stigmatisation à l'égard de tiers peut constituer, de la part de l'employeur, une violation de son devoir de protéger la personnalité du travailleur (arrêts 4A_485/2016 du 28 avril 2017 consid. 2.2.2; 4A_99/2012 du 30 avril 2012 consid. 2.2.1 et les arrêts cités). 
 
5.  
Cela étant rappelé, il s'agit d'examiner les griefs que la recourante adresse aux deux piliers sur lesquels la Cour cantonale a bâti son arrêt. 
 
5.1. Les juges cantonaux ont considéré que le motif du licenciement était abusif. Ils ont constaté que le licenciement était lié à la formulation et l'obtention par l'employée, durant plusieurs années, de prétentions en remboursement des frais de déplacement de son lieu de travail contractuel (Bâle, puis Zurich) jusqu'à l'endroit où elle exerçait sa mission (Genève).  
Le motif de la résiliation relève du fait. 
 
5.1.1. La recourante ne conteste pas que le motif qui l'a poussée à congédier l'intimée résidait effectivement dans les remboursements en question. Cela étant, elle soutient que l'intimée avait monté ce stratagème avec son supérieur hiérarchique pour se faire rembourser des frais de déplacement en réalité inexistants, censés compenser des frais privés qu'elle devait assumer elle-même. Ainsi, le lieu de travail avait été artificiellement situé à Bâle dans son contrat, puis à Zurich dès la fermeture du site bâlois. De la sorte, l'employée pouvait facturer ses frais de déplacements kilométriques depuis Bâle (resp. Zurich) jusqu'à l'endroit où elle exécutait sa mission, à savoir Genève, puisque le règlement de frais de l'entreprise permettait le remboursement des frais de voyage professionnels jusqu'au lieu de mission. Toutefois, l'employée n'empruntait pas ces trajets, puisqu'elle venait directement en avion depuis son domicile au Luxembourg jusqu'à Genève. La recourante y voit la signature de la mauvaise foi de l'intimée. Son supérieur hiérarchique et elle se seraient bien gardés de dévoiler toutes les facettes de cet artifice aux services concernés. L'intimée n'aurait d'ailleurs même pas allégué avoir été de bonne foi.  
La bonne foi est présumée (art. 3 al. 1 CC; arrêt 4A_89/2022 du 20 septembre 2022 consid. 5.2). Il suffit donc à la partie qui bénéficie de la présomption d'alléguer sa bonne foi (arrêts 4C.465/1995 du 27 juin 1996 consid. 3b et la référence citée; 4C.255/1994 du 21 mars 1995 consid. 3b, résumé in ATF 121 III 176). Pour combattre cette présomption, la partie adverse peut alors établir que l'intéressé était de mauvaise foi; en vertu de l'art. 3 al. 2 CC, elle peut également ne pas remettre en cause la bonne foi de la partie qui s'en prévaut, mais démontrer qu'elle était incompatible avec l'attention que les circonstances permettaient d'exiger de ladite partie (ATF 131 III 511 consid. 3.2.2; 119 II 23 consid. 3a). En l'espèce, ceci n'a toutefois aucune incidence car la recourante ne fait pas valoir avoir déjà soumis le grief tiré d'un hypothétique défaut d'allégation à la Cour cantonale. Le grief en question apparaît ainsi nouveau et, partant, irrecevable. 
Quant à savoir si la Cour cantonale est tombée dans l'arbitraire en retenant que l'intimée avait agi de bonne foi, c'est un pas que l'on ne saurait franchir. Certes, tous les éléments ne pointent pas dans la même direction. D'une part, le caractère artificiel de l'assignation à Bâle, respectivement à Zurich, comme lieu de travail est devenu assez évident au fil du temps, s'il ne l'était pas déjà au début. En bonne logique, c'est Genève qui aurait dû être définie comme lieu de travail. D'autre part, comme la recourante le relève fort bien, l'employée et son supérieur hiérarchique D.________ n'ont pas braqué les projecteurs sur ce subterfuge. Le prénommé est bien plutôt demeuré dans le flou lorsqu'il a été interpellé par une spécialiste du recrutement de l'employeuse, à peine une semaine après la signature du contrat de travail initial, pour connaître les raisons de l'assignation de l'employée à Bâle. Il a en effet indiqué que l'employée voyagerait la plupart du temps entre Luxembourg, Paris, Genève et Guernesey pour le projet F.________ et que Bâle avait été choisie le temps qu'elle soit fixée sur le lieu auquel elle passerait la majorité de son temps, car c'était la localisation la plus proche de son domicile au Luxembourg. 
La Cour cantonale s'est toutefois laissée convaincre par d'autres éléments : l'accord sur le lieu de travail (Bâle, puis Zurich) figurait dans le contrat de travail de l'employée et était le fruit d'une négociation. Par ailleurs, lorsque le site de Bâle avait été fermé, le lieu de travail avait été déplacé artificiellement à Zurich dans le nouveau contrat de travail du 9 mai 2018. Il avait été appliqué durant des années. Le nouveau supérieur hiérarchique de l'intimée avait exprimé assez clairement que la logique à la base de cet accord lui paraissait équitable pour l'intimée qui souhaitait conserver son domicile au Luxembourg. Plusieurs services de l'employeuse, dont celui compétent en matière de frais, s'étaient intéressés à cette localisation et s'étaient contentés des explications qui leur avaient été délivrées, ce qui n'équivalait certes pas à un blanc-seing, pour répondre à un autre grief de la recourante, mais à tout le moins l'employée avait pu l'interpréter comme une forme de caution. Enfin, lorsque le client H.________ avait refusé de prendre en charge ces frais de déplacement - que la recourante lui refacturait - il avait été convenu que ce serait elle qui les assumerait et non l'employée. 
Partant, la Cour cantonale na pas versé dans l'arbitraire en retenant que l'intimée était de bonne foi, indépendamment de savoir si celle-ci était une cadre de l'entreprise et le cas échéant de quel niveau, ce qu'il n'est donc pas nécessaire de trancher. 
 
5.1.2. Sous couvert d'une violation de l'art. 101 CO, la recourante semble prétendre que l'intimée ne disposait pas d'une prétention en remboursement de ses frais de déplacement, car ses supérieurs hiérarchiques successifs n'auraient pas eu le pouvoir de conclure des accords dérogeant au règlement de frais. Cela étant, il n'est pas nécessaire ici de déterminer si cette prétention était fondée ou non. Il suffit de constater, avec la Cour cantonale, que l'intimée pouvait de bonne foi penser que cette prétention l'était, car ses deux supérieurs hiérarchiques successifs l'avaient confortée dans cette appréciation et que la contrariété avec le règlement de frais n'était pas flagrante.  
 
5.1.3. La recourante estime qu'il faudrait quantifier le rôle de chacun dans le remboursement des frais de déplacement qui aurait, selon elle, été exécuté à tort. Le lien de causalité aurait été rompu. L'intimée et ses supérieurs auraient, à l'en croire, commis une faute si importante qu'elle apparaîtrait " comme la seule cause du préjudice ". On peine à cerner de quel préjudice il s'agit dans la logique de la recourante et cette identification est incontournable puisque le lien de causalité ne se conçoit qu'en relation avec un préjudice donné. Le présent litige ne porte pas sur l'indemnisation de la recourante pour un dommage qu'elle aurait subi ou sur le remboursement des frais qu'elle exigerait de l'intimée. Il concerne l'indemnité à laquelle prétend l'intimée pour résiliation abusive (art. 336a al. 1 CO). La gravité de la faute de l'employeur et l'éventuelle faute concomitante du travailleur ont un impact dans le contexte de la fixation de cette indemnité (cf. consid. 6 ci-dessous). Cela étant, pour juger du caractère abusif de la résiliation, l'examen porte sur le point de savoir si l'intimée a fait valoir de bonne foi des prétentions résultant du contrat de travail, indépendamment de savoir si son supérieur hiérarchique a commis une faute grave vis-à-vis de son employeur en agissant au-delà de ses compétences ou à l'encontre des intérêts de l'entreprise.  
La recourante ne formule pas d'autre grief à l'encontre de ce premier pan de motivation, de sorte que ce dernier peut être entériné. La résiliation du contrat de travail est dès lors abusive à raison du motif sur lequel elle est fondée. 
 
5.2. Il demeure à examiner les griefs que la recourante adresse au second volet de la motivation de l'arrêt cantonal. La Cour cantonale a estimé que le congé était également abusif en raison de la façon dont la recourante avait licencié l'intimée. Mettant l'accent sur la gravité des faits qu'elle impute à l'intimée, sur la possibilité qu'elle lui a laissée de s'exprimer dans le contexte du rapport d'enquête interne ainsi qu'après la notification du congé, la recourante dénonce une violation de l'art. 336 CO.  
Le Tribunal fédéral ne peut pas non plus la suivre sur ce chapitre. Dans son courrier du 20 août 2019, la recourante a reproché à l'intimée d'avoir, pendant plus de deux ans, délibérément présenté de manière fausse ses frais de voyage et méthodiquement contourné les règles afférentes aux frais, qualifiant ces actes de manquements massifs à la loyauté. Elle lui a asséné ces faits comme étant des évidences : à ses yeux, l'intimée était malhonnête. Elle n'avait pourtant pas même pris la peine d'interroger ses supérieurs pour les besoins de son rapport d'enquête, comme si l'intimée avait agi de sa propre initiative en bernant la ligne hiérarchique. Surtout, elle lui a réclamé réparation du " dommage " qu'elle aurait subi, à savoir plus de 155'000 fr. de dépenses professionnelles qu'elle estimait avoir remboursé indûment. Ce alors que ce montant avait été facturé et payé par son client, si bien que le préjudice était en réalité inexistant. Elle lui a donné un délai de dix jours pour verser le solde résultant de la compensation avec les derniers salaires (soit 104'944 fr.), ce qui était assez illusoire. Pour l'employée, à l'infamie s'ajoutait ainsi la perspective de la banqueroute. Pour finir, l'employeuse a brandi la menace de suites pénales, alors que rien dans le comportement de son employée ne dénotait une quelconque infraction pénale. Elle a donc tiré au canon sur des moineaux. 
Partant, la recourante a beau s'en défendre. La manière dont elle a congédié l'employée est stigmatisante au regard des circonstances et, partant, abusive. 
Le grief de violation de l'art. 336 CO et de l'art. 101 CO doit donc être rejeté. 
 
6.  
Demeure l'indemnité par laquelle la Cour cantonale a sanctionné cette résiliation. 
 
6.1. La recourante dénonce une violation de l'art. 336a CO. Elle se plaint du caractère injuste du montant de l'indemnité en cause, qui ferait fi des " intérêts en présence ". Il eût, à son sens, fallu tenir compte de la faute concomitante de l'intimée. Quant aux conséquences économiques résultant du licenciement pour celle-ci, elles ne seraient pas démontrées. Finalement, le Tribunal des prud'hommes lui avait donné raison s'agissant du caractère abusif du licenciement, de sorte que la sanction pécuniaire serait excessive au regard des faits qui pourraient être appréciés, et l'ont été, dans un sens comme dans l'autre.  
 
6.2. La partie qui résilie abusivement le contrat doit verser à l'autre partie une indemnité (art. 336a al. 1 CO) qui ne peut dépasser l'équivalent de six mois de salaire du travailleur; le tribunal fixe celle-ci en tenant compte de toutes les circonstances (art. 336a al. 2 CO).  
Le tribunal fixe l'indemnité en équité (art. 4 CC; ATF 123 III 391 consid. 3c). Il doit notamment tenir compte de la gravité de la faute de l'employeur, d'une éventuelle faute concomitante du travailleur, de la manière dont s'est déroulée la résiliation, de la gravité de l'atteinte à la personnalité du travailleur licencié, de la durée des rapports de travail, de leur étroitesse, des effets économiques du licenciement, de l'âge du travailleur, d'éventuelles difficultés de réinsertion dans la vie économique et de la situation économique des parties (arrêts 4A_259/2022 du 23 février 2023 consid. 5.1; 4A_401/2016 du 13 janvier 2017 consid. 6.2.1; ATF 123 III 391 consid. 3c; 123 III 246 consid. 6a; 119 II 157 consid. 2b). 
Le montant de l'indemnité est fixé librement par le tribunal, en vertu d'un pouvoir d'appréciation que le Tribunal fédéral ne revoit qu'avec réserve. L'autorité de céans n'intervient que si la décision s'écarte sans raison sérieuse des règles établies par la doctrine et la jurisprudence en matière de libre appréciation, s'appuie sur des faits qui ne devaient jouer aucun rôle ou, au contraire, méconnaît des éléments qui auraient absolument dû être pris en considération, ou encore si elle aboutit à un résultat manifestement injuste (ATF 123 III 246 consid. 6a; arrêt 4A_259/2022 précité consid. 5.1 et l'arrêt cité). 
 
6.3. En l'espèce, les éléments que la Cour cantonale a pris en compte pour fixer l'indemnité ne prêtent pas flanc à la critique : l'employée travaillait depuis dix ans pour la recourante au moment où elle a été congédiée; elle n'avait pas commis de faute concomitante ni démérité dans l'exécution de ses tâches; les modalités du congé étaient inutilement vexatoires et l'atteinte aux droits de la personnalité de l'intimée importante. Contrairement à ce que la recourante croit discerner, la Cour cantonale n'a pas tenu compte d'une perte économique de l'intimée. Quant à la faute concomitante de cette dernière, elle n'est pas établie. Finalement, les juges cantonaux n'avaient pas à faire preuve de réserve dans la fixation de l'indemnité, pour tenir compte du fait que les premiers juges n'avaient point été du même avis s'agissant du caractère abusif du licenciement. Le Tribunal fédéral n'a dès lors nulle raison de réformer le montant de l'indemnité pour résiliation abusive que la Cour cantonale a fixé à six mois de salaire, soit 102'500 fr.  
 
7.  
Le recours, mal fondé, doit être rejeté. La recourante supportera les frais judiciaires et versera à son adverse partie une indemnité à titre de dépens. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, fixés à 5'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
La recourante versera à l'intimée une indemnité de 6'000 fr. à titre de dépens. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Chambre des prud'hommes de la Cour de justice du canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 30 août 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jametti 
 
Le Greffier : Douzals