6B_198/2022 29.11.2022
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_198/2022  
 
 
Arrêt du 29 novembre 2022  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mme et MM. les Juges fédéraux 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, Denys et Muschietti. 
Greffier : M. Fragnière. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
Savolainen Avocats, 
boulevard des Philosophes 18, 1205 Genève, 
recourant, 
 
contre  
 
Tribunal d'application des peines et mesures de la République et canton de Genève, 
rue des Chaudronniers 9, 1204 Genève, 
intimé. 
 
Objet 
Indemnisation du défenseur d'office, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale 
de recours, du 20 décembre 2021 
(PM/768/2021 ACPR/896/2021). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Le 22 juillet 2021, le Tribunal d'application des peines et des mesures (ci-après: TAPEM) a désigné A.________ en qualité de défenseur d'office de B.________ qui, se trouvant en exécution de peine au sein de l'Établissement fermé de la Brenaz (GE), avait sollicité sa libération conditionnelle. 
Par décision du 30 août 2021, le TAPEM a fixé à 889 fr. 55 TTC l'indemnité due à l'avocat A.________, réduisant de 1'588 fr. 60 le montant réclamé par ce dernier selon sa liste des opérations. 
 
B.  
Statuant par arrêt du 20 décembre 2021, la Chambre pénale de recours de la Cour de justice genevoise a rejeté le recours formé par l'avocat A.________ contre la décision du 30 août 2021, qu'elle a confirmée. 
 
C.  
A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 20 décembre 2021. Il conclut, avec suite de frais et dépens, principalement à sa réforme en ce sens que son indemnité d'office soit fixée à un montant de 1'315 fr., TVA et débours compris. Subsidiairement, il conclut à son annulation et au renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
L'indemnité litigieuse a été fixée par une autorité de première instance dont la décision a ensuite fait l'objet d'un recours au plan cantonal. On ne se trouve dès lors pas dans l'hypothèse visée par l'art. 135 al. 3 let. b CPP, qui prévoit un recours devant le Tribunal pénal fédéral lorsque l'indemnité pour la défense d'office est fixée par l'autorité de recours. Le recours en matière pénale au Tribunal fédéral est ouvert (ATF 140 IV 213 consid. 1.7). 
 
2.  
Le recourant conteste le montant de l'indemnité qui lui a été octroyée pour son activité de défenseur d'office. Il se plaint en substance d'une motivation arbitraire. 
 
2.1.  
 
2.1.1. Aux termes de l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès.  
L'autorité cantonale dispose d'un large pouvoir d'appréciation dans la fixation de l'indemnité du défenseur d'office. Pour fixer cette indemnité, l'autorité doit tenir compte de la nature et de l'importance de la cause, des difficultés particulières que celle-ci peut présenter en fait et en droit, du temps que l'avocat lui a consacré, de la qualité de son travail, du nombre des conférences, audiences et instances auxquelles il a pris part, du résultat obtenu et de la responsabilité qu'il a assumée (ATF 122 I 1 consid. 3a et les références citées; arrêt 6B_1231/2018 du 20 mars 2019 consid. 2.1.1). Le Tribunal fédéral n'intervient qu'en cas d'arbitraire. Tel est le cas lorsque la décision repose sur une appréciation insoutenable des circonstances, est incompatible avec les règles du droit et de l'équité, omet de prendre en considération tous les éléments propres à fonder la décision ou, au contraire, tient compte de critères dénués de pertinence (ATF 125 V 408 consid. 3a; plus récemment, arrêt 6B_1231/2018 précité; cf. ATF 141 I 124 consid. 3.2). Il ne suffit pas que l'autorité ait apprécié de manière erronée un poste de l'état de frais ou qu'elle se soit fondée sur un argument déraisonnable; encore faut-il que le montant global alloué à titre d'indemnité se révèle arbitraire (ATF 109 Ia 107 consid. 3d; arrêt 6B_304/2018 du 5 octobre 2018 consid. 1.1). Le Tribunal fédéral fait preuve de réserve lorsque l'autorité estime exagérés le temps ou les opérations déclarés par l'avocat d'office, car il appartient aux autorités cantonales de juger de l'adéquation entre les activités déployées par ce dernier et celles qui sont justifiées par l'accomplissement de sa tâche (ATF 141 I 124 consid. 3.2; arrêt 6B_866/2019 du 12 septembre 2019 consid. 3.1). 
La fixation des honoraires de manière forfaitaire est admissible. Dans un tel cas, il ne doit être tenu compte du temps de travail effectif que pour fixer le montant des honoraires dans le cadre de l'échelle forfaitaire (ATF 143 IV 453 consid. 2.5; 141 I 124 consid. 4.2). Le forfait est inconstitutionnel lorsqu'il ne tient aucun compte de la situation concrète et que dans le cas d'espèce, il est hors de toute proportion raisonnable eu égard aux prestations fournies par l'avocat (ATF 143 IV 453 consid. 2.5.1). 
 
2.1.2. Dans le canton de Genève, l'art. 16 al. 2 du règlement sur l'assistance juridique et l'indemnisation des conseils juridiques et défenseurs d'office en matière civile, administrative et pénale (RAJ/GE; RS/GE E 2 05.04) dispose que seules les heures nécessaires sont retenues. Elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance et des difficultés de la cause, ainsi que de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu.  
 
2.2. Le recourant invoque, à l'appui de ses griefs, certains faits non pris en considération par la cour cantonale, qu'il estime pertinents. En tant qu'il se fonde sur des constatations qui ne figurent pas dans l'état de fait cantonal, sans exposer, de manière circonstanciée et pièces à l'appui, que les faits retenus l'ont été d'une manière absolument inadmissible, son argumentation est irrecevable (art. 106 al. 2 LTF).  
Il en va ainsi notamment lorsque, s'agissant de faits " sous-jacents " à son mémoire de recours, le recourant renvoie le Tribunal fédéral à l'ensemble des pièces du dossier de la procédure ou lorsqu'il allègue que le dossier, passablement volumineux, avait dû lui être envoyé par le biais de deux courriels successifs, qu'il avait appelé le 22 juillet 2021 son avocat stagiaire pour lui dire de rendre visite à B.________ afin de connaître son instruction sur la tenue d'une audience au TAPEM, qu'il avait passé différents appels téléphoniques entre le 22 juillet 2021 et le 30 août 2021, voire qu'il avait pris le soin de ne pas solliciter certains postes dans son état de frais ou encore que son mandant, particulièrement vulnérable, était placé dans un contexte carcéral inadapté à son état de santé. 
 
2.3. Dans un premier grief, le recourant reproche à la cour cantonale de n'avoir pas tenu compte d'une durée de 80 minutes sur les 120 minutes requises pour la prise de connaissance des pièces du dossier (" Analyse du dossier "), effectuée le 23 juillet 2021 après sa désignation en qualité de défenseur d'office de B.________.  
 
2.3.1. La cour cantonale a relevé que la prise de connaissance du dossier (161 pages) le 23 juillet 2021 avait pour objectif premier d'indiquer au TAPEM si la tenue d'une audience était sollicitée, étant précisé qu'en outre, l'analyse du dossier avait été implicitement comprise dans la durée de 135 minutes admise au titre de la préparation de l'audience. Aussi, en raison de l'absence de complexité particulière du dossier, de son volume limité et du fait que le recourant en avait une bonne connaissance, la durée de 40 minutes retenue pour la prise de connaissance du dossier le 23 juillet 2021 apparaissait adéquate (cf. arrêt attaqué, consid. 2.3 p. 6).  
 
2.3.2. Dans ses développements, le recourant se borne pour l'essentiel à critiquer l'appréciation de l'autorité cantonale quant à la faible complexité et au volume limité du dossier, sans contester qu'au-delà des 40 minutes retenues, l'analyse du dossier avait été prise en compte au titre de la préparation de l'audience. Ce faisant, sans exposer en quoi la motivation de la cour cantonale était insoutenable dans son résultat, il se limite à proposer sa propre appréciation des preuves, dans une démarche appellatoire et partant irrecevable dans le recours en matière pénale.  
Pour le surplus, la cour cantonale pouvait, sans arbitraire, considérer que la prise de connaissance du dossier effectuée par le recourant le 23 juillet 2021 ne nécessitait pas plus de 40 minutes, lors même que les éléments clés du dossier devaient être repérés rapidement par un avocat expérimenté qui, ayant par ailleurs été le défenseur d'office de B.________, connaissait déjà son parcours, sa personnalité et ses antécédents. Dans ce contexte, la cour cantonale n'était pas empêchée de s'écarter d'une approche purement mathématique afin de retenir que le temps accordé par le TAPEM était adéquat, étant encore relevé que le nombre de pages d'un dossier n'est pas toujours révélateur de sa complexité et du temps nécessaire à son étude. 
 
2.4. Le recourant fait ensuite grief à la cour cantonale d'avoir réduit le forfait usuellement appliqué pour les courriers et les téléphones.  
 
2.4.1. Jugeant que l'allocation d'un forfait de 10 % pour ce poste était pleinement justifiée, la cour cantonale a constaté que le recourant n'avait pas indiqué en quoi, en l'espèce, un tel forfait ne couvrait pas les opérations concrètement consacrées aux courriers et aux téléphones. Pour le reste, en tant que le recourant se fondait sur des courriels produits en procédure, ceux-ci se rapportaient à des échanges qu'il avait eu avec la mère et la thérapeute de son mandant, ce qui ne devait pas être pris en considération en tant que ces contacts étaient antérieurs à la date de nomination du défenseur d'office et qu'ils constituaient des démarches relevant plutôt de l'assistance sociale (cf. arrêt attaqué, consid. 4.2 p. 8).  
 
2.4.2. Se référant à différents entretiens téléphoniques entre le 22 juillet 2021 et le 3 août 2021, le recourant estime, pour sa part, que la cour cantonale ne pouvait pas réduire le forfait de 20 % habituellement prévu pour les courriers et les téléphones. Cela étant, fondée sur des allégations de faits ne ressortant pas de l'arrêt attaqué, son argumentation est irrecevable (cf. consid. 2.2 supra).  
Au demeurant, le recourant n'apporte en particulier aucune indication chiffrée du temps que la cour cantonale aurait, selon lui, dû prendre en considération au titre des courriers et des téléphones dont il requiert l'indemnisation. Il se limite à énumérer différents échanges téléphoniques sans expliquer en quoi il aurait été critiquable pour la cour cantonale de ne pas en tenir compte à ce titre. Sa motivation est ainsi inapte à établir un quelconque arbitraire quant à la solution adoptée par la cour cantonale, pour qui le montant versé suffit dans le cas d'espèce à couvrir les frais effectifs et le temps consacré aux correspondances et aux téléphones. Pour le reste, l'approche cantonale permettant à l'autorité de s'éloigner du taux de 20 % pour l'indemnisation forfaitaire n'est pas insoutenable, dans la mesure où les frais et l'activité sont couverts par un montant inférieur, l'aspect déterminant étant leur couverture (cf. arrêt 6B_165/2014 du 19 août 2014 consid. 3.5). 
 
3.  
En tant que le recourant invoque finalement une violation des art. 29 al. 3 Cst., 134 al. 2 CPP et 12 let. a LLCA, il apparaît que ses critiques sont sans portée propre. De tels reproches se recoupent en effet avec le grief d'arbitraire s'agissant de l'application de l'art. 135 al. 1 CPP et du tarif cantonal en vue de la fixation de l'indemnité d'office (cf. consid. 2.1.1 supra).  
 
4.  
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Le recourant, qui succombe, supporte les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale de recours. 
 
 
Lausanne, le 29 novembre 2022 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
Le Greffier : Fragnière