6B_594/2023 20.11.2023
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_594/2023  
 
 
Arrêt du 20 novembre 2023  
 
Ire Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mme et MM. les Juges fédéraux 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, Denys et Muschietti. 
Greffière : Mme Musy. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public central du canton de Vaud, 
avenue de Longemalle 1, 1020 Renens VD, 
intimé. 
 
Objet 
Irrecevabilité formelle du recours en matière pénale (indemnité du défenseur d'office), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton 
de Vaud, Chambre des recours pénale, du 29 mars 2023 (n° 254 PE22.012817-/PBR/epa). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Le 15 juillet 2022, le Ministère public du canton de Vaud a désigné l'avocat A.________ en qualité de défenseur d'office de B.________ dans le cadre d'une procédure pénale dirigée contre ce dernier. 
A l'issue des débats du 6 février 2023, le Président du Tribunal de police de l'arrondissement de Lausanne a lu le dispositif du jugement, qui a été notifié séance tenante. Il ressort du chiffre IX de ce dispositif que les frais, par 9'337 fr. 45, sont mis à la charge de B.________, ce montant incluant l'indemnité au défenseur d'office, A.________, par 4'962 fr. 45, dont le remboursement à l'État n'est exigible que si la situation financière du débiteur le permet. 
Le 7 février 2023, le tribunal a adressé aux parties un nouveau dispositif de jugement, rectifié à son chiffre IX en ce sens que l'indemnité d'office allouée à A.________ était réduite à 3'630 francs. 
 
B.  
Par arrêt du 29 mars 2023, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal a admis le recours interjeté par A.________ contre le jugement du 6 février 2023 en tant qu'il portait sur le montant de l'indemnité d'office allouée au prénommé, a annulé ce point du dispositif, le jugement étant maintenu pour le surplus, et a renvoyé le dossier de la cause au Tribunal de police de l'arrondissement de Lausanne pour qu'il procède dans le sens des considérants. La Chambre des recours pénale a, pour le surplus, alloué une indemnité de 396 fr. à A.________ pour la procédure de recours et laissé les frais de la procédure de recours, par 810 fr., à la charge de l'État. 
En bref, la cour cantonale a retenu que le tribunal de première instance était autorisé à faire application de l'art. 83 CPP pour rectifier le montant de l'indemnité d'office allouée à A.________. Il avait cependant violé le droit d'être entendu du prénommé en ne motivant pas suffisamment sa décision sur la quotité de l'indemnité octroyée, c'est-à-dire en ne précisant pas les opérations qui avaient été réduites, respectivement retranchées, de même que la part de l'indemnité représentée par les honoraires, les débours ou la TVA. 
 
C.  
Par actes datés des 5 et 9 mai 2023, A.________ forme un recours en matière pénale contre l'arrêt du 29 mars 2023. Il conclut, avec suite de frais et dépens, à sa réforme en ce sens que le dispositif du jugement rectifié rendu le 6 février 2023 par le tribunal de police est annulé et l'indemnité de défenseur d'office est maintenue à 4'962 fr. 45, ainsi qu'à son annulation et au renvoi de la cause à la Chambre pénale de recours pour nouvelle décision au sens des considérants. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 146 IV 185 consid. 2). 
 
1.1. Le recourant s'en prend à l'arrêt du 29 mars 2023 par lequel la cour cantonale a admis son recours, annulé le chiffre IX du dispositif du jugement rendu le 6 février 2023 en tant qu'il porte sur le montant de l'indemnité d'office qui lui a été allouée en sa qualité de défenseur d'office, et renvoyé le dossier de la cause au Tribunal de police de l'arrondissement de Lausanne pour qu'il procède dans le sens des considérants. En substance, il fait valoir que la cour cantonale a violé l'art. 83 CPP en considérant que le tribunal de première instance pouvait modifier le dispositif de son jugement sur la question de son indemnité. Le recourant conteste également le montant de l'indemnité allouée par la cour cantonale pour son activité déployée dans le cadre de la procédure de recours.  
 
1.2. L'indemnité octroyée pour l'activité de défenseur d'office a été fixée par une autorité de première instance dont la décision a ensuite fait l'objet d'un recours au plan cantonal. On ne se trouve dès lors pas dans l'hypothèse visée par l'art. 135 al. 3 let. b CPP, qui prévoit un recours devant le Tribunal pénal fédéral lorsque l'indemnité pour la défense d'office est fixée par l'autorité de recours (ATF 140 IV 213 consid. 1.7). Par ailleurs, dès lors que A.________ a recouru en son nom propre s'agissant de son indemnité de défenseur d'office fixée en première instance et obtenu gain de cause en deuxième instance, l'indemnité pour la procédure de recours ne relève pas de son mandat d'office (art. 135 al. 3 let. b CPP), mais des dépens (cf. ATF 125 II 518 consid. 5b; 6B_114/2022 du 24 novembre 2022 consid. 4.1: 6B_1284/2015 du 2 mars 2016 consid. 2.4).  
Le Tribunal fédéral est par conséquent compétent à raison de la matière. 
 
1.3. A teneur du dispositif de l'arrêt entrepris, le recourant, qui a obtenu gain de cause, n'a pas d'intérêt juridique à l'annulation de cet arrêt en tant qu'il admet son recours portant sur l'indemnité de défenseur d'office allouée pour la procédure de première instance (cf. art. 81 al. 1 LTF). Le recours formé à l'encontre de ce point du dispositif de la décision cantonale parait d'ores et déjà irrecevable pour ce motif.  
 
1.4. Selon les considérations qui suivent, le recours est également irrecevable sous un autre angle, tant en ce qu'il concerne l'indemnité de défenseur d'office allouée pour la première instance que les dépens accordés pour la procédure de recours.  
 
1.4.1. Les recours au Tribunal fédéral sont recevables contre les décisions finales (art. 90 LTF), les décisions partielles (art. 91 LTF) et les décisions préjudicielles ou incidentes aux conditions prévues par les art. 92 et 93 LTF.  
Selon la jurisprudence constante, un arrêt de renvoi constitue, en principe, une décision incidente (ATF 138 I 143 consid. 1.2; voir aussi arrêts 6B_459/2023 du 26 avril 2023 consid. 3.1.1; 6B_648/2022 du 7 février 2023 consid. 1.1; 6B_944/2022 du 27 septembre 2022 consid. 3.2; 6B_1432/2021 du 29 mars 2022 consid. 3.2), même si, par cette décision, une question matérielle y est tranchée partiellement (cf. ATF 134 II 124 consid. 1.3 et les références; Grégory Bovey, in Commentaire LTF, 3e éd., 2020, n° 17a d art. 93 LTF et la jurisprudence citée). Lorsque l'autorité de recours statue simultanément sur les frais et dépens de la procédure suivie devant elle, ce prononcé accessoire est également une décision incidente, alors même qu'il porte sur des prétentions qui ne seront plus en cause par la suite (cf. ATF 135 III 329 consid. 1.2 p. 331; arrêts 6B_425/2021 du 20 avril 2022 consid. 1.2; 6B_807/2020 du 7 mars 2022 consid. 2.1; Grégory Bovey, op. cit., nos 15 et 17 ad art. 93 LTF et la jurisprudence citée).  
Sous réserve des cas visés par l'art. 92 LTF, non réalisés ici, le recours en matière pénale est recevable, conformément à l'art. 93 al. 1 LTF, contre les décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément si elles peuvent causer un préjudice irréparable (let. a) ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (let. b). Dans la procédure de recours en matière pénale, un préjudice irréparable se rapporte à un dommage de nature juridique qui ne puisse pas être réparé ultérieurement par un jugement final ou une autre décision favorable au recourant (ATF 144 IV 321 consid. 2.3; 141 IV 284 consid. 2.2; 137 IV 172 consid. 2.1). Cette réglementation est fondée sur des motifs d'économie de procédure. En tant que cour suprême, le Tribunal fédéral doit en principe ne s'occuper qu'une seule fois d'un procès et cela seulement lorsqu'il est certain que le recourant subit effectivement un dommage définitif (ATF 139 IV 113 consid. 1). Le prononcé accessoire sur les frais et dépens contenu dans une décision incidente n'est pas de nature à causer un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF (ATF 143 III 416 consid. 1.3; 142 II 363 consid. 1.1; 135 III 329 consid. 1.2.2; arrêt 6B_807/2020 précité consid. 2.1). 
 
1.4.2. Le recourant soutient, à tort, que la décision attaquée serait finale. En effet, l'arrêt du 29 mars 2023 ne met pas fin à la présente procédure mais revêt un caractère incident au sens de l'art. 93 LTF, peu importe qu'une question matérielle - en l'occurrence, celle de savoir si le tribunal de première instance pouvait faire application de l'art. 83 CPP pour rectifier le montant de l'indemnité allouée au défenseur d'office - y soit tranchée partiellement, ou encore qu'il soit statué définitivement sur l'indemnité allouée au recourant pour l'activité déployée dans la procédure de recours. Partant, elle ne peut être attaquée qu'en présence de l'une des deux hypothèses de l'art. 93 al. 1 LTF. Or le recourant n'y consacre aucun développement, puisqu'il se limite à alléguer de manière erronée qu'il s'agissait d'une décision finale. L'on ne distingue pas, au demeurant, en quoi il subirait un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF, ni en quoi les conditions - exceptionnelles en matière pénale - de l'art. 93 al. 1 let. b LTF seraient réalisées. Conformément à la jurisprudence exposée plus haut, la décision sur les dépens alloués pour la procédure de recours ne cause pas non plus de préjudice irréparable.  
Partant, le recours en matière pénale n'est pas recevable contre l'arrêt entrepris. Le recourant pourra, à l'occasion d'un recours contre la décision finale, reprendre le cas échéant les griefs qu'il soulève par le présent recours, conformément à l'art. 93 al. 3 LTF
 
1.5. Au vu de ce qui précède, faute de satisfaire aux conditions de recevabilité d'un recours en matière pénale au Tribunal fédéral, le recours est irrecevable. Le recourant, qui succombe, devra supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF).  
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est irrecevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale. 
 
 
Lausanne, le 20 novembre 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
La Greffière : Musy