9C_317/2023 28.08.2023
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
9C_317/2023, 9C_318/2023, 9C_319/2023  
 
 
Arrêt du 28 août 2023  
 
IIIe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Parrino, Président, Moser-Szeless et Beusch. 
Greffière : Mme Vuadens. 
 
Participants à la procédure 
1. A.________ SA (9C_317/2023), 
2. B.B.________ et C.B.________ (9C_318/2023), 
3. D.D.________ et E.D.________ (9C_319/2023), 
tous représentés par M e Olivier Righetti, avocat, 
recourants, 
 
contre 
 
Administration cantonale 
des impôts du canton de Vaud, 
route de Berne 46, 1014 Lausanne, 
intimée. 
 
Objet 
Impôt cantonal et communal et impôt fédéral direct 2007 à 2016, récusation, 
 
recours contre le jugement du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 22 mars 2023 (FI.2022.0089, FI.2022.0087, FI.2022.0090). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________ SA (ci-après: la Société) est une société anonyme vaudoise, dont les actionnaires principaux sont B.B.________ et D.D.________, qui en sont aussi respectivement l'administrateur et le directeur. Le 30 janvier 2015, puis le 4 décembre 2015, l'Administration cantonale des impôts du canton de Vaud (ci-après: l'Administration cantonale) a ouvert à l'encontre de la Société, de B.B.________ et de son épouse C.B.________, ainsi que de D.D.________ et de son épouse E.D.________, des procédures en rappel et en soustraction d'impôts pour les périodes fiscales 2005 à 2014. Le 6 mars 2018, l'Administration cantonale a encore ouvert des procédures pour tentatives de soustraction d'impôts des périodes fiscales 2015 et 2016.  
 
A.b. Le 16 juillet 2020, l'Administration cantonale a notifié à la Société, à B.B.________ et C.B.________ et à D.D.________ et E.D.________ des décisions de rappel d'impôts et des décisions de taxations définitives pour les périodes fiscales 2005 à 2016. Le même jour, elle a prononcé à l'encontre de la Société, de B.B.________ et de D.D.________ des amendes pour soustraction et tentative de soustraction d'impôts pour les périodes fiscales 2010 à 2016, les périodes antérieures étant prescrites.  
Par décisions sur réclamation du 11 mai 2022, l'Administration cantonale a très partiellement admis les réclamations formées par les contribuables. Elle a annulé certaines reprises (modifiant en conséquence les éléments imposables et les amendes) ainsi que les compléments d'impôts des périodes fiscales 2005 à 2006, en raison de la péremption du droit de rappeler l'impôt de ces périodes. 
 
B.  
Le 13 juin 2022, la Société, B.B.________ et C.B.________ et D.D.________ et E.D.________ ont recouru contre la décision sur réclamation du 11 mai 2022 qui leur avait été respectivement notifiée auprès du Tribunal cantonal, Cour de droit administratif et de droit public, du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal cantonal). A l'invitation du juge instructeur, ils ont consenti à la levée du secret fiscal. Ils ont également accepté que la même section du Tribunal statue tant sur le volet fiscal du dossier que sur son volet pénal. A leur requête, le Tribunal cantonal a par ailleurs joint les causes. 
Le Tribunal cantonal a statué par arrêt du 22 mars 2023. En substance, il a constaté la péremption du droit de rappeler les impôts de la période fiscale 2007 et confirmé les reprises effectuées par l'Administration cantonale, sous réserve d'une reprise relative à la période fiscale 2012, prenant acte du fait que l'Administration cantonale y avait renoncé en procédure. Le Tribunal cantonal a par conséquent partiellement admis les recours, annulé les décisions sur réclamation du 11 mai 2022 en tant qu'elles concernaient les périodes fiscales 2007 et 2012, renvoyé, s'agissant de la période fiscale 2012, la cause à l'Administration cantonale pour nouvelles décisions dans le sens des considérants, calculs des impôts et prononcés d'amendes, et confirmé pour le surplus les décisions sur réclamation du 11 mai 2022. 
 
C.  
Agissant séparément par la voie du recours en matière de droit public, la Société (cause 9C_317/2023), B.B.________ et C.B.________ (cause 9C_318/2023) et D.D.________ et E.D.________ (cause 9C_319/2023) demandent au Tribunal fédéral d'annuler partiellement l'arrêt du 22 mars 2023 dans la mesure où il concerne les rappels et reprises d'impôts des périodes fiscales 2008 à 2011 et 2013 à 2016, ainsi que les amendes des périodes fiscales 2010 à 2011 et 2013 à 2016, et de renvoyer la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision dans une nouvelle composition de juges, dans le sens des considérants. 
Le 1er juin 2023, les recourants ont adressé au Tribunal fédéral une déclaration de levée du secret fiscal et sollicité la jonction des causes. 
Le Tribunal cantonal, l'Administration cantonale et l'Administration fédérale des contributions concluent au rejet des recours. Les recourants se sont déterminés sur chacun des recours respectifs. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Les recours en matière de droit public interjetés séparément par la Société, par les époux B.B.________ et C.B.________ et par les époux D.D.________ et E.D.________ sont dirigés contre le même arrêt. Ils contiennent les mêmes griefs et les mêmes conclusions. Les recourants ont par ailleurs adressé une déclaration de levée du secret fiscal au Tribunal fédéral. Il est partant justifié, pour des motifs d'économie de procédure, de joindre les causes et de statuer dans un seul arrêt (art. 24 PCF [RS 273] en relation avec l'art. 71 LTF). La requête correspondante des recourants est partant admise. 
 
2.  
L'arrêt attaqué a été rendu en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF), dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF) qui ne tombe sous le coup d'aucune exception de l'art. 83 LTF. La voie du recours en matière de droit public est donc ouverte. L'arrêt attaqué constitue par ailleurs une décision finale (art. 90 LTF), y compris s'agissant de la période fiscale 2012. En effet, le Tribunal cantonal a certes renvoyé le dossier à l'Administration cantonale pour nouvelles décisions sur réclamation s'agissant de cette période, mais elle ne lui a pas laissé de marge de manoeuvre, de sorte que l'arrêt attaqué représente une décision finale s'agissant de cette période fiscale également (sur la qualification d'un arrêt de renvoi de décision finale, cf. ATF 138 I 143 consid. 1.2; 135 V 141 consid. 1.1). 
Au surplus, les recours ont été déposés en temps utile, compte tenu des féries (art. 46 al. 1 let. a et 100 al. 1 LTF), et dans les formes prescrites (art. 42 LTF), par les destinataires de la décision attaquée, qui ont qualité pour recourir (art. 89 al. 1 LTF). Il convient donc d'entrer en matière. 
 
3.  
 
3.1. Selon l'art. 106 al. 1 LTF, le Tribunal fédéral applique le droit d'office. Toutefois, conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, il n'examine la violation de droits fondamentaux ainsi que celle de dispositions de droit cantonal et intercantonal que si ce grief a été invoqué et motivé, c'est-à-dire s'il a été expressément soulevé et exposé de manière claire et détaillée (ATF 149 III 81 consid. 1.3; 148 I 127 consid. 4.3).  
 
3.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des situations visées à l'art. 105 al. 2 LTF.  
 
3.3. Selon l'art. 99 al. 1 LTF, aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente. Cette exception vise les faits et preuves qui existent avant l'arrêt attaqué et qui sont rendus pertinents pour la première fois par celui-ci. Il peut notamment s'agir de faits qui concernent le déroulement de la procédure devant l'instance précédente et qui sont allégués afin d'en contester la régularité (cf. ATF 149 II 19 consid. 2.2; 148 II 426 consid. 2.1; 139 III 120 consid. 3.1.2).  
 
3.3.1. En l'espèce, les recourants allèguent qu'ils ont découvert, au moment de la notification de l'arrêt du 22 mars 2023, que F.________ a fait partie des juges qui ont statué sur leur recours, alors qu'il existe une apparence de prévention de cette personne à l'égard de leur mandataire. Le Tribunal cantonal aurait par conséquent statué dans une composition irrégulière, de sorte que l'arrêt attaqué devrait être annulé.  
 
3.3.2. Il ressort de ces allégués non contredits que c'est bien l'arrêt attaqué qui a justifié la présentation, pour la première fois, de faits et preuve nouveaux - qui ne constituent toutefois pas de vrais novas - devant le Tribunal fédéral. Ceux-ci sont par conséquent recevables.  
 
4.  
Il convient de circonscrire l'objet du litige devant le Tribunal fédéral. 
 
4.1. L'objet du litige dans la procédure de recours est le rapport juridique réglé dans la décision attaquée, dans la mesure où - d'après les conclusions du recours - il est remis en question par la partie recourante (ATF 144 II 359 consid. 4.3). L'objet de la contestation (Anfechtungsgegenstand) et l'objet du litige (Streitgegenstand) sont identiques lorsque la décision administrative est attaquée dans son ensemble. En revanche, les rapports juridiques non litigieux sont certes compris dans l'objet de la contestation, mais pas dans l'objet du litige (ATF 144 II 359 consid. 4.3 et les références).  
 
4.2. Dans l'arrêt attaqué, le Tribunal cantonal a, d'une part, constaté que le droit de rappeler les impôts de la période fiscale 2007 était périmé et, d'autre part, confirmé les reprises effectuées par l'Administration cantonale dans ses décisions sur réclamation du 11 mai 2020, sous réserve d'une reprise, liée à la période fiscale 2012, que l'Administration cantonale avait abandonnée durant la procédure. Le Tribunal cantonal a partant annulé les décisions sur réclamation en tant qu'elles concernaient la période fiscale 2007, annulé les décisions sur réclamation en tant qu'elles concernaient la période fiscale 2012, renvoyant, pour cette période, la cause à l'Administration cantonale pour qu'elle recalcule les reprises, compléments d'impôts et amendes sans la reprise abandonnée, et confirmé ces décisions pour le surplus.  
 
4.3. Dans leurs recours, les recourants ne contestent pas l'arrêt attaqué - en leur faveur sur ce point - en tant qu'il a constaté la péremption du droit de rappeler les impôts de la période fiscale 2007. Cette période fiscale ne fait donc pas partie de l'objet du litige. Il en va de même de la période fiscale 2012, puisque les recourants ne mentionnent pas cette période dans leurs conclusions, au motif que le Tribunal cantonal en a annulé les reprises et les amendes. Même si le Tribunal cantonal ne s'est en réalité pas limité à annuler les décisions sur réclamation concernant la période fiscale 2012, mais qu'il a renvoyé le dossier à l'Administration cantonale pour nouveau calcul des reprises, compléments d'impôts et amendes de cette période, il découle des conclusions claires des recours que la période fiscale 2012 ne fait pas partie de l'objet du litige devant le Tribunal fédéral.  
 
5.  
Invoquant une violation de l'art. 6 CEDH, de l'art. 30 Cst. et de l'art. 9 al. 1 let. e de la loi cantonale vaudoise du 28 octobre 2008 sur la procédure administrative (LPA; BLV 173.36), qui concrétise le droit à la récusation, les recourants soutiennent que, du fait de la présence de F.________ dans la composition du Tribunal cantonal qui a statué sur leurs recours, celui-ci n'a pas constitué un tribunal indépendant et impartial, en raison d'une apparence de prévention de ce juge à l'encontre de leur mandataire. 
 
5.1. La garantie minimale d'un tribunal indépendant et impartial, telle qu'elle résulte de l'art. 6 par. 1 CEDH (applicable en l'occurrence en raison du caractère pénal de la procédure relative à la soustraction d'impôt; cf. ATF 140 I 68) et de l'art. 30 al. 1 Cst. - lesquels ont, de ce point de vue, la même portée (cf. ATF 144 I 159 consid. 4.3; 140 I 271 consid. 8.4.1) - permet, indépendamment du droit de procédure applicable, de demander la récusation d'un juge dont la situation ou le comportement est de nature à susciter des doutes quant à son impartialité. Elle vise à éviter que des circonstances extérieures à l'affaire puissent influencer le jugement en faveur ou au détriment d'une partie. Elle n'impose pas la récusation seulement lorsqu'une prévention effective du juge est établie, car une disposition interne de sa part ne peut guère être prouvée. Il suffit que les circonstances donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale du magistrat. Cependant, seuls les éléments objectivement constatés doivent être pris en considération; les impressions purement individuelles ne sont pas décisives (ATF 144 I 159 consid. 4.3; 142 III 732 consid. 4.2.2; 140 III 221 consid. 4.1;139 I 121 consid. 5.1). Dans une affaire récente, le Tribunal fédéral a jugé que le fait que l'avocat associé d'un confrère exerçant également la fonction de juge suppléant se trouve dans un rapport d'inimitié avec l'avocat des recourants n'était pas un élément suffisant pour faire douter de l'impartialité de ce juge (arrêt 9C_675/2022 du 29 mars 2023 consid. 7).  
La partie qui a connaissance d'un motif de récusation doit l'invoquer aussitôt, sous peine d'être déchue du droit de s'en prévaloir ultérieurement. Il est en effet contraire aux règles de la bonne foi de garder en réserve le moyen tiré de la composition irrégulière du tribunal pour ne l'invoquer qu'en cas d'issue défavorable de la procédure (ATF 140 I 271 consid. 8.4.3; 139 III 120 consid. 3.2.1; 138 I 1 consid. 2.2). Cela ne signifie pas que la composition concrète de la Cour amenée à statuer doive nécessairement être expressément communiquée au justiciable. Il suffit que l'information ressorte d'une publication générale facilement accessible, en particulier sur internet, par exemple dans un annuaire officiel (ATF 140 I 271 consid. 8.4.3; 139 III 120 consid. 3.2.1). Cela suppose toutefois que la composition concrète du tribunal soit suffisamment prévisible pour que la partie doive s'attendre à ce que la personne dont la récusation est demandée y siège effectivement en faisant preuve de l'attention voulue (ATF 139 III 120 consid. 3.2.1; 128 V 82 consid. 2b; arrêt 2C_1216/2013 du 27 mai 2014 consid. 6.4). Sous l'angle de la prévisibilité, il faut ainsi prendre en considération la composition habituelle du tribunal et rapporter cet élément au nombre total des membres qui le composent. Ainsi, si une Cour siège habituellement à trois juges et qu'elle ne compte parmi ses membres qu'un président, deux assesseurs - dont celui contesté - et deux assesseurs suppléants, il faut alors admettre que le justiciable pouvait s'attendre à ce que cet assesseur siège effectivement, de sorte qu'il doit demander sa récusation sans attendre que le jugement ne soit rendu (arrêt 9C_643/2007 du 16 juin 2008 consid. 2.2). Une telle prévisibilité n'existe en revanche pas si une autorité de recours siège habituellement à trois membres et qu'elle en comporte quinze (cf. arrêt 2C_1216/2013 du 27 mai 2014 consid. 6.4). 
Il incombe au justiciable d'alléguer qu'il n'a eu que tardivement connaissance de la situation d'incompatibilité, respectivement du motif de récusation dont il entend se prévaloir (ATF 140 I 271 consid. 8.4.3). 
 
5.2. En l'espèce, les recourants exposent que leur mandataire a représenté, en 2015, une personne contre laquelle F.________ avait ouvert une action civile. Dans le cadre de cette procédure, leur mandataire avait présenté F.________ sous un jour peu favorable, en mettant en cause son sérieux et sa probité. Cette procédure s'était terminée par convention et de manière défavorable à F.________, car il s'était engagé à retirer toutes ses conclusions et les frais de la procédure avaient été mis à sa charge. Ces circonstances étaient propres à fonder une apparence de prévention de la part de F.________ à l'encontre de leur mandataire.  
 
5.3. Il ressort des pièces produites par les recourants que leur mandataire a effectivement représenté, en 2015, une personne contre laquelle F.________ avait ouvert une action civile pour lui réclamer le paiement d'environ 97'000 fr., dans le cadre d'un litige né après l'acquisition par le demandeur des actions d'une société fiduciaire qui appartenait au défendeur. Dans le cadre de cette procédure, sous la plume du mandataire des recourants, il a été reproché à F.________ d'affirmer de manière "peu sérieuse" qu'il n'avait pas d'expérience en matière de vente d'actions, alors qu'il était expert-comptable diplômé, agent fiduciaire, spécialiste en finance et comptabilité et juge assesseur du Tribunal cantonal. Ce litige s'est terminé par la conclusion d'une convention signée le 15 juillet 2015 par les parties et qui a été ratifiée le 19 juillet suivant par le Président du Tribunal d'arrondissement de Lausanne. Cette convention prévoit que F.________ retire entièrement les conclusions de sa demande. Le litige s'est ainsi terminé de manière défavorable à F.________, puisque non seulement il n'en a retiré aucun avantage pécuniaire, mais qu'en outre, le Président du Tribunal d'arrondissement de Lausanne a mis à sa charge les frais de la procédure, par 1'750 fr.  
De telles circonstances sont objectivement de nature à susciter des doutes quant à l'impartialité du juge assesseur en question à l'égard des recourants. L'expérience enseigne, en effet, qu'une partie à un procès reporte souvent ses sentiments négatifs contre sa partie adverse sur l'avocat de celle-ci au point de le considérer comme un adversaire, à l'égal de cette partie (cf. ATF 139 III 120 consid. 3.2.2 et les références; cf. aussi ATF 147 III 89 consid. 4.2.2). En l'occurrence, au vu des propos tenus par le mandataire des recourants dans la procédure civile susmentionnée, qui ont mis en doute la bonne foi et le manque de sérieux de F.________, en rappelant de surcroît sa fonction de juge assesseur, mais également au vu de l'issue du litige, en particulier sous l'angle financier, pour F.________, on peut objectivement concevoir que, malgré les années passées depuis lors, cette personne ait pu garder un certain ressentiment à l'égard du mandataire des recourants. Quoi qu'il en soit, ces faits sont objectivement propres à créer une apparence de prévention de ce juge assesseur à l'égard du mandataire des recourants, indépendamment de ses sentiments subjectifs. 
 
5.4. Reste à déterminer si les recourants ont exercé leur droit à temps ou si celui-ci est périmé. A cet égard, les recourants allèguent, sans être contredits, que la composition complète de la Cour qui a statué sur leur recours ne leur a pas été communiquée à l'avance et que, comme le Tribunal cantonal a statué par circulation, ils n'ont appris qu'au moment de la notification de l'arrêt attaqué que F.________ avait fait partie de la composition des juges ayant statué sur leurs recours. Dans sa réponse, le Tribunal cantonal relève que la liste de ses juges assesseurs est consultable en ligne sur son site internet, laissant ainsi entendre que les recourants auraient dû exercer leur droit à la récusation avant que l'arrêt ne soit rendu et qu'ils ont donc agi tardivement.  
En tant qu'avocat, le mandataire des recourants ne pouvait certes pas ignorer que la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal vaudois rend en principe ses arrêts à trois juges, dont un ou deux peuvent être des juges assesseurs désignés à tour de rôle dans les affaires, en fonction de leurs connaissances techniques spécifiques de la matière (cf. art. 33 al. 1 et 2 du règlement organique du 13 novembre 2007 du Tribunal cantonal [ROTC]; BLV 173.31.1). Il ne pouvait pas non plus ignorer que la liste des juges assesseurs est publiée sur le site internet de la Cour de droit administratif et public (https://www.vd.ch/toutes-les-autorites/ordre-judiciaire-vaudois-ojv/tribunal-cantonal/cour-de-droit-administratif-et-public). En outre, le mandataire des recourants savait, en 2015, que F.________ était un juge assesseur du Tribunal cantonal, comme il le rappelle du reste dans ses recours. 
On ne peut pas pour autant reprocher aux recourants de ne pas avoir demandé la récusation du juge F.________ avant que l'arrêt n'ait été rendu. Les recourants ne pouvaient en effet pas raisonnablement anticiper que F.________ ferait effectivement partie de la composition du Tribunal cantonal qui statuerait sur leur recours. La consultation de la liste des juges assesseurs ne permettait en effet pas de rendre ce fait prévisible, puisqu'elle comporte une liste de quarante personnes et que le Tribunal cantonal statue à trois, avec éventuellement un ou deux juges assesseurs. Les recourants n'étaient donc pas déchus du droit de se prévaloir du motif de récusation à l'encontre de cette personne au stade du recours devant la Cour de céans. 
 
5.5. Au surplus, le fait que, comme le relève l'Administration cantonale, l'admission du motif de récusation conduise à empêcher le cas échéant F.________ à siéger à l'avenir comme juge dans des causes dans lesquelles le mandataire des recourants apparaît n'est pas pertinent.  
 
5.6. Au vu de ce qui précède, le moyen tiré de la violation de la garantie d'un tribunal indépendant et impartial s'avère fondé. En conséquence, il y a lieu d'admettre les recours, d'annuler l'arrêt attaqué en tant qu'il concerne les périodes fiscales 2008 à 2011 et 2013 à 2016 et de renvoyer la cause au Tribunal cantonal pour qu'il statue à nouveau dans cette mesure sur les recours dans une composition qui ne comprend pas F.________. Dans ce cadre, il sera loisible au Tribunal cantonal de communiquer à l'avance aux recourants dans quelle composition il entend statuer.  
 
6.  
Au vu de l'issue des recours, il n'est pas perçu de frais judiciaires (art. 66 al. 4 LTF). Ayant obtenu gain de cause avec l'aide d'un mandataire professionnel, les recourants ont droit à des dépens (art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Les causes 9C_317/2023, 9C_318/2023 et 9C_319/2023 sont jointes. 
 
2.  
Les recours sont admis. L'arrêt attaqué est annulé en tant qu'il concerne les périodes fiscales 2008 à 2011 et 2013 à 2016. La cause est renvoyée au Tribunal cantonal pour qu'il statue à nouveau sur les recours dans ce cadre, sans la participation de F.________. 
 
3.  
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
4.  
Le Tribunal cantonal versera aux recourants une indemnité unique de 2'000 fr. à titre de dépens. 
 
5.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, et à l'Administration fédérale des contributions. 
 
 
Lucerne, le 28 août 2023 
 
Au nom de la IIIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Parrino 
 
La Greffière : Vuadens