2C_971/2022 01.06.2023
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_971/2022  
 
 
Arrêt du 1er juin 2023  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Donzallaz, Juge présidant, Hänni et Ryter. 
Greffier : M. de Chambrier. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Maîtres Charles Joye et Thibault Blanchard, avocats, 
recourante, 
 
contre  
 
Autorité intercantonale de surveillance des jeux d'argent, 
Erlachstrasse 12, 3012 Berne, 
intimée. 
 
Objet 
Mesures de protection, joueurs exclus, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal intercantonal 
des jeux d'argent du 24 octobre 2022. 
 
 
Faits :  
 
A.  
A.________ exploite, sous la dénomination Loterie électronique, un ensemble de jeux de loterie à pré-tirage disponibles par le truchement d'appareils électroniques désignés sous l'acronyme DLE (distributeurs de loterie électronique), soit des bornes informatiques permettant la participation aux jeux de loterie grâce à un écran tactile. Depuis le 1er août 2019, les DLE sont équipés d'un dispositif de contrôle d'accès reposant sur un système de carte liée à l'empreinte digitale de son possesseur. Ce mécanisme protège le public contre le jeu excessif et assure le respect de la limite d'âge de dix-huit ans pour s'adonner à ces jeux. Actuellement 350 paires de DLE sont installés dans des lieux et établissements publics, dans six cantons romands. 
 
B.  
 
B.a. Après avoir obtenu de l'autorité intercantonale de surveillance des jeux d'argent (désignée par l'acronyme Gespa) une autorisation d'exploitant de jeux de grande envergure, A.________ a déposé le 15 décembre 2020, auprès de cette même autorité, une demande d'autorisation de jeu, au sens des art. 24 ss de la loi fédérale du 29 septembre 2017 sur les jeux d'argent (LJAr; RS 935.51; entrée en vigueur, pour les art. 1 à 85, 94 à 146, le 1 er janvier 2019), pour dix jeux de loterie de type billet virtuel à pré-tirage dénommés B.________, C.________, D.________, E.________, F.________, G.________, H.________, I.________, J.________ et K.________. Les jeux en question correspondent à ceux déjà autorisés sous l'ancien droit.  
Le 9 septembre 2021, la Gespa a statué sur les demandes de A.________, en rendant dix décisions, pour chacun des dix jeux susmentionnés, avec des motifs et dispositifs identiques. Le dispositif concernant le jeu B.________ avait la teneur suivante: 
 
" 1. L'autorisation de jeu pour le billet B.________ est octroyée, au sens des considérants.  
2. La requérante est tenue de prendre, au plus tard jusqu'au 30 septembre 2022, les dispositions techniques et organisationnelles nécessaires et suffisantes afin d'empêcher les joueurs exclus d'accéder aux jeux de la Loterie électronique, dont le billet B.________. 
3. La requérante est autorisée à exploiter plusieurs séries du jeu précité; elle doit informer la Gespa de la commercialisation de chacune des séries de manière au moins bimestrielle. 
4. Pour autant que la charge prévue au ch. 2 soit respectée, la durée de la présente autorisation de jeu est limitée à 10 ans à compter de son prononcé, soit au 30 septembre 2031. A défaut, l'autorisation prend fin au 30 septembre 2022. 
-..] ". 
 
B.b. Le 13 octobre 2021, A.________ a formé dix recours séparés, mais identiques, contre les décisions précitées du 9 septembre 2021 auprès du Tribunal intercantonal des jeux d'argent. Les recours étaient dirigés contre le ch. 2 du dispositif desdites décisions, lequel portait sur l'extension de l'exclusion des joueurs selon l'art. 80 al. 3 LJAr.  
 
B.c. Le 13 octobre 2021 également, A.________ a formé auprès de la Gespa des demandes d'interprétation, respectivement de rectification des dix décisions précitées du 9 septembre 2021, portant sur le ch. 2 du dispositif.  
La Gespa a donné suite à ces demandes le 15 octobre 2021, en reformulant le ch. 2 du dispositif des décisions en cause. Concernant le jeu B.________, le ch. 2 du dispositif avait la teneur suivante: 
 
" La requérante est tenue de prendre, au plus tard jusqu'au 30 septembre 2022, les dispositions techniques et organisationnelles nécessaires et suffisantes pour mettre en oeuvre, conformément aux considérants de la présente décision, l'extension de l'exclusion de l'art. 80 LJAr au billet B.________, soit par une mesure technique au moment de l'accès au jeu (telle qu'un système de login ou un compte joueur), soit par l'empêchement du paiement des gains unitaires dès CHF 20.-, accompagné de mesures supplémentaires pour en garantir l'efficacité ".  
La Gespa a pris des décisions identiques à propos des jeux C.________, D.________, E.________, F.________, G.________, H.________, I.________, J.________ et K.________, sous réserve de la valeur-seuil, fixée à 10 fr. pour les jeux C.________, D.________ et K.________, à 12 fr. pour le jeu J.________, à 20 fr. pour les jeux G.________ et I.________, à 22 fr. pour le jeu H.________ et à 30 fr. pour les jeux E.________ et F.________. 
Le 15 novembre 2021, A.________ a formé dix recours séparés, mais identiques contre les décisions rendues le 15 octobre 2021 par la Gespa, en lien avec celles du 9 septembre 2021, concernant les dix jeux en cause. A.________ concluait, principalement, à ce que le ch. 2 du dispositif des décisions du 9 septembre 2021, tel que reformulé le 15 octobre 2021, soit réformé en ce sens que la charge alternative litigieuse est supprimée et que A.________ est tenue de mettre en place une mesure suffisante pour empêcher le versement aux joueurs exclus des gains unitaires supérieurs à 50 francs. A titre subsidiaire, A.________ concluait à ce que le ch. 2 du dispositif soit réformé en ce sens que la charge litigieuse est supprimée et que A.________ est tenue de mettre en place une mesure suffisante pour empêcher le versement aux joueurs exclus des gains unitaires supérieurs à 50 fr., mesure qui pourra être réexaminée au terme d'une période d'évaluation probatoire de cinq ans après sa mise en oeuvre. A titre plus subsidiaire, A.________ concluait à ce que le ch. 2 du dispositif soit annulé et le ch. 4 adapté en conséquence, le dossier étant renvoyé à la Gespa pour qu'elle procède selon les considérants. 
 
B.d. Le 19 novembre 2021, le président du Tribunal intercantonal des jeux d'argent a ordonné la jonction des 20 procédures susmentionnées.  
Par arrêt du 24 octobre 2022, le Tribunal intercantonal des jeux d'argent a rejeté les recours dans la mesure de leur recevabilité, après avoir retenu que l'objet du litige portait uniquement sur le ch. 2 du dispositif des décisions des 9 septembre 2021, tel que modifié le 15 octobre 2021. 
 
C.  
Le 28 novembre 2022, A.________ a interjeté un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral en retenant, sous suite de frais et dépens, les conclusions suivantes: 
 
---..] 
Principalement : 
II.- Le jugement du Tribunal des jeux d'argent du 24 octobre 2022 est réformé en ce sens que le recours est admis et que le chiffre 2 du dispositif des autorisations rendues par la Gespa le 9 septembre 2021 tel que reformulé dans les décisions du 15 octobre 2021 est modifié en ce sens que la charge alternative litigieuse est supprimée et que la A.________ est tenue de mettre en place, dans un délai de deux mois à compter de l'entrée en force du jugement, une mesure adéquate pour empêcher le versement aux joueurs exclus des gains unitaires supérieurs à CHF 50.-. 
Subsidiairement :  
III.- Le jugement du Tribunal des jeux d'argent du 24 octobre 2022 est réformé en ce sens que le recours est admis et que le chiffre 2 du dispositif des autorisations rendues par la Gespa le 9 septembre 2021 tel que reformulé dans les décisions du 15 octobre 2021 est modifié en ce sens que la charge alternative litigieuse est supprimée et que la A.________ est tenue de mettre en place, dans un délai de deux mois à compter de l'entrée en force du jugement, une mesure adéquate pour empêcher le versement aux joueurs exclus des gains unitaires supérieurs à CHF 50.-, mesure qui pourra être réexaminée au terme d'une période d'évaluation probatoire de cinq ans après sa mise en oeuvre. 
Plus subsidiairement:  
IV.- Le jugement du Tribunal des jeux d'argent du 24 octobre 2022 est annulé ainsi que le chiffre 2 du dispositif des autorisations rendues par la Gespa le 9 septembre 2021 tel que reformulé dans les décisions du 15 octobre 2021, la cause étant renvoyée à la Gespa pour qu'elle procède selon les considérants. "  
La recourante requiert également que L.________ soit invitée à se déterminer par écrit sur le recours, ainsi que l'octroi de l'effet suspensif. 
Par ordonnance du 17 janvier 2023, après avoir donné l'occasion aux intéressés de se prononcer sur les deux requêtes précitées, la Présidente de la IIe cour de droit public a admis la demande d'effet suspensif et rejeté la requête tendant à inviter L.________ en procédure de recours devant le Tribunal fédéral. 
En substance, l'Office fédéral de la justice, sans retenir de conclusions formelles, prend position en faveur de l'arrêt attaqué. La Gespa conclut au rejet du recours. Le Tribunal intercantonal des jeux d'argent se réfère à l'arrêt attaqué et se prononce sur différents points du recours. A.________ réplique. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours en matière de droit public est recevable contre les arrêts du Tribunal intercantonal des jeux d'argent (cf. art. 82 let. a, 83 a contrario et 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF; ATF 148 II 392 consid. 1.3 et références). 
Les autres conditions de recevabilité étant remplies (art. 42, 89 al. 1, 90 et 100 LTF), il y a lieu d'entrer en matière. 
 
2.  
Le recours en matière de droit public (au sens des art. 82 ss LTF) peut être formé pour violation du droit (circonscrit par les art. 95 et 96 LTF). Contrairement au droit cantonal, revu sous l'angle de l'arbitraire, le Tribunal fédéral contrôle librement l'application du droit intercantonal (art. 95 let. e LTF; ATF 147 I 47 consid. 3.1). Le grief de violation du droit intercantonal est toutefois soumis, comme ceux tirés de la violation de droits fondamentaux, aux exigences de motivation accrues de l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 147 I 47 consid. 3.1 et les références). Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est limité ni par l'argumentation de la partie recourante ni par la motivation de l'autorité précédente. Il statue sur la base des faits établis par cette dernière (art. 105 al. 1 LTF). Cependant, il peut rectifier les faits ou les compléter d'office s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). La partie recourante ne peut critiquer les faits que s'ils ont été constatés de façon manifestement inexacte ou contraire au droit et si la correction d'un tel vice peut influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). 
 
3.  
Soulevant un grief de nature formelle qu'il convient d'examiner en premier lieu (cf. notamment ATF 141 V 557 consid. 3), A.________ se plaint d'une violation de son droit d'être entendue protégé par l'art. 29 al. 2 Cst. En substance, elle reproche notamment à la Gespa de ne pas l'avoir informée de l'existence de l'expertise externe du 24 août 2021, sur laquelle celle-ci a fondé ses décisions des 9 septembre 2021, telles que modifiées le 15 octobre 2021. La recourante indique n'avoir pris connaissance de cette expertise qu'à la lecture de l'arrêt attaqué. 
 
3.1. Le droit d'être entendu ancré à l'art. 29 al. 2 Cst., est une garantie de nature formelle, dont la violation doit entraîner l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recours sur le fond (ATF 144 I 11 consid. 5.3; 143 IV 380 consid. 1.4.1; 142 II 218 consid. 2.8.1).  
Ce droit comprend en particulier le droit, pour une partie à un procès, de prendre connaissance de toute argumentation présentée au tribunal et de se déterminer à son propos, que celle-ci contienne ou non de nouveaux éléments de fait ou de droit, et qu'elle soit ou non concrètement susceptible d'influer sur le jugement à rendre. Il appartient en effet aux parties, et non au juge, de décider si une prise de position ou une pièce nouvellement versée au dossier contient des éléments déterminants qui appellent des observations de leur part. Toute prise de position ou pièce nouvelle versée au dossier doit dès lors être communiquée aux parties pour leur permettre de décider si elles veulent ou non faire usage de leur faculté de se déterminer (ATF 146 III 97 consid. 3.4.1; 139 I 189 consid. 3.2). 
 
3.2. En l'occurrence, il ressort de l'arrêt attaqué que la recourante avait joint à sa demande du 15 décembre 2020 un rapport contenant une auto-évaluation de la dangerosité des jeux litigieux, effectuée selon la méthode "AsTERIG" ( Assesment Tool to Measure and Evaluate the Risk Potential of Gambling Products). Cette évaluation a elle-même fait l'objet d'un rapport daté du 24 août 2021 effectué à la demande de la Gespa par l'un de ses "experts externes" (arrêt querellé consid. 6.3.1). Les deux évaluations n'arrivaient pas au même résultat, la seconde arrivant à un score de dangerosité plus élevé. Selon l'arrêt attaqué, la différence des deux évaluations s'expliquait surtout par une divergence d'appréciation importante relative au critère de la continuité du jeu et, en particulier, sur la prise en compte des modérateurs de jeu visant à empêcher les joueurs de monopoliser les DLE sur une longue période. Le Tribunal intercantonal des jeux d'argent précise que la Gespa " a fait sienne " l'appréciation de son expert (consid. 6.3.1). Dans le cadre de l'examen de la proportionnalité de la mesure, ce même tribunal retient que la Gespa " pouvait, par le truchement de l'instrument AsTERIG, conclure que les jeux litigieux présentent un danger potentiel fort (et non seulement moyen, comme l'affirme la partie recourante) " (consid. 6.3.3).  
La recourante expose qu'avant d'avoir pris connaissance du jugement attaqué, elle " ignorait totalement l'existence même et le contenu de ce rapport, qui constitue manifestement un authentique rapport d'expertise externe ". La Gespa ne l'a informée ni du mandat confié, ni de l'existence du rapport en cause.  
Dans ses déterminations du 16 janvier 2023, le Tribunal intercantonal des jeux d'argent indique que le rapport en question figurait dans le dossier de la Gespa sous forme numérisée. Ce document comportait les initiales de son auteur et " éman[ait] d'une personne qui sans être désignée nommément, ne sembl[ait] pas appartenir à la Gespa ". Il explique que c'est pour cette raison qu'il " a évoqué un avis externe ou l'avis d'un expert externe ".  
Dans sa prise de position du 16 janvier 2023, la Gespa explique avoir elle-même évalué le potentiel de danger des jeux en cause, sans mandater un quelconque expert externe pour établir un rapport en la matière. Elle précise qu'il existe dix documents d'évaluation, soit un pour chaque jeu, et qu'il s'agit de documents internes. Elle ajoute que la différence entre les scores obtenus par l'auto-évaluation faite par la recourante et ceux des rapports internes sont proches et conduisent tous à un danger élevé. Dans ces circonstances, la Gespa estime qu'il n'y avait pas lieu d'accorder un droit d'être entendue à la recourante sur ce point. 
 
3.3. En l'espèce, il n'est pas contesté que la recourante n'a pas pu se prononcer sur le rapport (respectivement, les rapports) du 21 août 2021, ni devant la Gespa, ni devant le Tribunal intercantonal des jeux d'argent. La qualification de ce rapport d'interne ou d'externe à l'administration n'est pas déterminante (cf. ATF 115 V 297 consid. 2g/bb; arrêts 1C_159/2014 du 10 octobre 2014 consid. 4.3, in ZBl 116/2015 p. 323, RDAF 2016 I 304; 9C_454/2012 du 18 mars 2013 consid. 6.2.1, non publié aux ATF 139 V 106, mais in SVR 2013 IV n° 24 p. 66). En revanche, ce qui est en l'espèce décisif, c'est que ce rapport ait porté sur des éléments de fait essentiels, à savoir sur l'évaluation de la dangerosité des jeux en question, et que celui-ci ait joué un rôle dans la motivation de l'arrêt attaqué, lequel confirme que sur la base du rapport du 24 août 2021 en cause, la Gespa pouvait retenir que les jeux litigieux présentaient un danger potentiel fort.  
Dès lors, en ne permettant pas à la recourante, à tout le moins, de se prononcer sur les résultats de ce rapport, alors que cette pièce était déterminante pour l'issue du litige, la Gespa, puis le Tribunal intercantonal des jeux d'argent n'ont pas respecté le droit d'être entendue de l'intéressée (cf. supra consid. 3.1). Le fait que les résultats obtenus par les deux évaluations (celle de la recourante et de la Gespa) ne diffèrent pas de beaucoup n'y change rien. En effet, sur ce point, la Gespa perd de vue qu'il appartient aux parties, et non au juge ou à l'autorité, de décider si une prise de position ou une pièce nouvellement versée au dossier contient des éléments déterminants qui appellent des observations de leur part (cf. ATF 146 III 97 précité consid. 3.4.1; 139 I 189 consid. 3.2). La possibilité de prendre connaissance des documents en cause par le biais d'une consultation du dossier devant l'autorité précédente ne saurait annuler les vices constatés en matière de communication des pièces importantes aux parties, sous peine de vider d'une partie de sa substance une telle obligation. 
Enfin, la présente violation ne saurait être réparée devant le Tribunal fédéral, vu le pouvoir de cognition limité de celui-ci (cf. ATF 142 II 218 consid. 2.8.1; 133 I 100 consid. 4.9). 
 
3.4. La violation constatée conduit à l'admission du recours, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres griefs soulevés par la recourante.  
 
4.  
Sur le vu de ce qui précède, l'arrêt attaqué doit être annulé et la cause renvoyée à la Gespa (art. 107 al. 2 LTF) pour nouvelles décisions prises dans le respect du droit d'être entendu défini ci-dessus. 
Compte tenu de l'issue du litige, il ne sera pas perçu de frais judiciaires (art. 66 al. 1 et 4 LTF). La recourante, qui a obtenu gain de cause avec l'aide de mandataires professionnels, a droit à des dépens, à la charge de l'autorité intimée (cf. art. 68 al. 1 LTF). L'affaire sera également renvoyée au Tribunal intercantonal des jeux d'argent pour qu'il statue à nouveau sur les frais et dépens de la procédure suivie devant lui (cf. art. 67 et 68 al. 5 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est admis. Le jugement du 24 octobre 2022 est annulé et la cause renvoyée à la Gespa pour nouvelles décisions dans le sens des considérants. 
 
2.  
Il n'est pas perçu de frais judiciaire. 
 
3.  
Une indemnité de 2'000 fr., à payer à la recourante à titre de dépens, est mise à la charge de la Gespa. 
 
4.  
La cause est renvoyée au Tribunal intercantonal des jeux d'argent, afin qu'il statue à nouveau sur les frais et dépens de la procédure accomplie devant lui. 
 
5.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires de la recourante, à l'Autorité intercantonal des jeux d'argent (Gespa), au Tribunal intercantonal des jeux d'argent et à l'Office fédéral de la justice OFJ. 
 
 
Lausanne, le 1er juin 2023 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Juge présidant : Y. Donzallaz 
 
Le Greffier : A. de Chambrier