2C_98/2023 14.06.2023
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_98/2023  
 
 
Arrêt du 14 juin 2023  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz et Hänni. 
Greffière : Mme Jolidon. 
 
Participants à la procédure 
A.________ Sàrl, 
représentée par Me Mathias Micsiz, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Direction générale de la santé, Office du médecin cantonal, 
avenue des Casernes 2, 1014 Lausanne Adm cant VD, 
intimée. 
 
Objet 
Pompes funèbres; qualité pour recourir du dénonciateur, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du 
canton de Vaud, Cour de droit administratif et 
public, du 11 janvier 2023 (GE.2022.0257). 
 
 
Faits :  
 
A.  
La société A.________ Sàrl a adressé à l'Office du médecin cantonal du canton de Vaud (ci-après: l'Office du médecin cantonal), qui est rattaché au Département de la santé et de l'action sociale du canton de Vaud (ci-après: le Département de la santé), deux lettres datées respectivement du 30 août 2022 et du 28 septembre 2022: elle y faisait état d'"irrégularités constatées" et dénonçait des "entorses à la concurrence", ainsi que des procédés publicitaires irréguliers de la part d'une entreprise concurrente. 
 
B.  
 
B.a. L'Office du médecin cantonal, par courrier du 6 octobre 2022, a déclaré prendre "bonne note des allégations avancées au sujet des pratiques publicitaires" et a indiqué qu'il y donnerait les "suites utiles". Il a également souligné que la gestion des signalements n'était pas une procédure administrative au sens formel et que le dénonciateur n'y possédait pas la qualité de partie.  
 
B.b. A.________ Sàrl a attaqué le courrier du 6 octobre 2022 de l'Office du médecin cantonal devant la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal cantonal). Par arrêt du 11 janvier 2023, cette autorité a laissé ouvert le point de savoir si ce courrier constituait une décision, jugeant que, de toute façon, le recours était irrecevable. Elle a en substance considéré qu'en tant que dénonciatrice A.________ Sàrl ne possédait pas une "position juridique" sur la base de laquelle la qualité pour recourir pouvait lui être reconnue à l'aune de l'art. 75 de la loi vaudoise du 28 octobre 2008 sur la procédure administrative (LPA-VD; RS/VD 173.36); elle a également souligné que la personne qui dénonçait une entreprise de pompes funèbres était soumise à la règle générale de l'art. 13 al. 2 LPA/VD, selon laquelle cette personne n'a pas la qualité de partie dans la procédure administrative; la procédure de surveillance disciplinaire, qui était susceptible d'être ouverte contre des entreprises concurrentes de A.________ Sàrl, n'avait pas pour but de servir des intérêts privés; au surplus, une sanction administrative à l'encontre de la concurrente n'aurait qu'un effet indirect sur la situation de fait ou de droit de ladite société.  
 
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ Sàrl demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, de réformer l'arrêt du 11 janvier 2023 du Tribunal cantonal en ce sens que la décision du 6 octobre 2022 de l'Office du médecin cantonal est annulée, celui-ci étant invité à instruire la cause et à transmettre les résultats au Département de la santé, afin qu'une décision formelle soit rendue; subsidiairement, de renvoyer la cause au Tribunal cantonal pour une nouvelle décision dans le sens des considérants. 
Le Médecin cantonal conclut au rejet du recours. Le Tribunal cantonal se réfère à son arrêt. 
 
Considérant en droit :  
 
 
1.  
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF [RS 173.110]) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 147 I 89 consid. 1, 333 consid. 1). 
 
1.1. Dans une procédure administrative, l'auteur d'un recours déclaré irrecevable pour défaut de qualité pour recourir notamment est habilité à contester l'arrêt d'irrecevabilité par un recours en matière de droit public, lorsque l'arrêt au fond aurait pu être déféré au Tribunal fédéral par cette voie de droit (ATF 135 II 145 consid. 3.2; arrêt 2C_711/2018 du 7 juin 2019 consid. 1.1, non publié in ATF 145 II 328).  
Dans le canton de Vaud, l'exploitation d'entreprises de pompes funèbres est soumise à autorisation (cf. art. 73a al. 1 de la loi vaudoise du 29 mai 1985 sur la santé publique [LSP/VD; RS/VD 800.01]) et celles-ci doivent respecter des règles et usages professionnels définis par le Conseil d'Etat du canton de Vaud (cf. art. 73b LSP/VD) qui sont définis dans le règlement vaudois du 12 septembre 2012 sur les décès, les sépultures et les pompes funèbres (RDSPF/VD; RS/VD 818.41.1). La matière relève donc du droit public (art. 82 let. a LTF) et ne tombe pas sous le coup des exceptions de l'art. 83 LTF
 
1.2. L'intéressée, destinataire de l'arrêt attaqué refusant d'entrer en matière sur son recours, a un intérêt digne de protection à en demander l'annulation, cela indépendamment et sans préjudice du motif d'irrecevabilité retenu par l'autorité précédente, qui constitue l'objet de la contestation devant le Tribunal fédéral (ATF 145 II 168 consid. 2). Partant, elle possède la qualité pour recourir dans la présente procédure au sens de l'art. 89 al. 1 LTF.  
 
1.3. Au surplus, l'arrêt attaqué a été rendu par une autorité judiciaire cantonale supérieure de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF) et il revêt un caractère final pour la recourante (art. 91 let. b LTF; cf. arrêt 2C_214/2018 du 7 décembre 2018 consid. 1.3). Le recours en matière de droit public, déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF), est ainsi recevable.  
 
1.4. Conformément à l'art. 99 al. 1 LTF, le Tribunal fédéral ne peut pas prendre en compte la pièce postérieure à l'arrêt entrepris et ses annexes que la recourante a fait parvenir, le 1er mars 2023, au Tribunal fédéral.  
 
2.  
 
2.1. Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral examine librement la violation du droit fédéral (cf. art. 95 let. a, ainsi que 106 al. 1 LTF), sous réserve des exigences de motivation figurant aux art. 42 et 106 al. 2 LTF relatives aux griefs portant sur la violation des droits fondamentaux (cf. ATF 145 I 121 consid. 2.1). Il y procède en se fondant sur les faits constatés par l'autorité précédente (cf. art. 105 al. 1 LTF), à moins que ces faits n'aient été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (cf. art. 105 al. 2 LTF).  
Le recourant qui entend s'écarter des constatations de fait de l'autorité précédente (cf. art. 97 al. 1 LTF) doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées (art. 106 al. 2 LTF) et la correction du vice susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). A défaut, il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait divergent de celui qui est contenu dans l'acte attaqué. 
 
2.2. L'argumentation du recours tendant à démontrer que l'intéressée possède la qualité pour recourir devant le Tribunal cantonal (cf. infra consid. 6) est en partie fondée sur des faits qui ne ressortent pas de l'arrêt attaqué, sans que l'intéressée ne se plaigne d'une constatation manifestement inexacte de ceux-ci. En conséquence, le Tribunal fédéral ne pourra pas en tenir compte et statuera sur la base des faits tels qu'ils ressortent de cet arrêt.  
 
 
3.  
Le litige porte sur le point de savoir si l'intéressée, qui a dénoncé une société concurrente à l'Office du médecin cantonal, avait la qualité pour recourir devant le Tribunal cantonal, ce que cette autorité a nié, déclarant le recours irrecevable. 
 
4.  
La recourante se plaint d'un déni de justice (art. 29 al. 1 Cst.). Elle relève que, si la correspondance qu'elle avait échangée avec l'Office du médecin cantonal dans le cadre de sa dénonciation portait, notamment, sur sa qualité de partie à la procédure administrative, elle n'attaquait pas ce point dans son recours devant le Tribunal cantonal qui tendait à l'annulation de la décision du courrier du 6 octobre 2022 au motif que l'Office du médecin cantonal n'était pas compétent pour statuer, seul le Département de la santé l'étant. Ainsi, selon elle, les juges précédents ne devaient pas se prononcer sur cette qualité qui constituait le fond de la cause, mais uniquement sur la compétence dudit office en la matière. 
 
4.1. Aux termes de l'art. 29 al. 1 Cst., toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable. Il y a déni de justice formel lorsqu'une autorité n'applique pas ou applique d'une façon incorrecte une règle de procédure, de sorte qu'elle ferme l'accès à la justice au particulier qui, normalement, y aurait droit. L'autorité qui se refuse à statuer, ou ne le fait que partiellement, viole l'art. 29 al. 1 Cst. (ATF 144 II 184 consid. 3.1; 141 I 172 consid. 5 et les références citées).  
 
4.2. Il ressort de l'arrêt attaqué que la recourante a demandé au Tribunal cantonal d'annuler "la décision rendue le 6 octobre 2022 par la Direction générale de la santé, Office du Médecin cantonal" et d'inviter cette autorité à instruire les signalements effectués, puis à transmettre la cause au Département de la santé, afin que celui-ci rende une décision formelle. Comme pour tout recours, le Tribunal cantonal devait examiner la recevabilité de celui-ci et donc la qualité pour recourir de l'intéressée. Il est arrivé à la conclusion qu'en tant que dénonciatrice celle-ci ne possédait pas cette qualité (cf. art. 75 LPA-VD), ni celle de partie à la procédure selon l'art. 13 al. 2 LPA/VD. Les juges précédents devaient procéder à cette analyse, quels que soient les moyens soulevés par la recourante, puisque la recevabilité d'un recours est déterminée d'office (cf. art. 6 al. 1 LPA/VD). Partant, le grief relatif au déni de justice est rejeté.  
 
5.  
Selon la recourante, le Tribunal cantonal a violé son obligation de motiver l'arrêt attaqué (cf. art. 29 Cst.), en n'examinant pas les arguments soulevés quant à la situation de concurrence régnant sur le marché des pompes funèbres; l'analyse de ces arguments était pourtant indispensable pour apprécier sa qualité pour recourir. 
 
5.1. Le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., implique notamment, pour l'autorité, l'obligation de motiver sa décision, afin que, d'une part, le destinataire puisse la comprendre, l'attaquer utilement s'il y a lieu et, d'autre part, que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle. Le juge doit ainsi mentionner, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que la partie intéressée puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 143 IV 40 consid. 3.4.3; 142 I 135 consid. 2.1). Il ne doit toutefois pas se prononcer sur tous les moyens des parties; il peut se limiter aux questions décisives pour l'issue du litige (ATF 147 IV 249 consid. 2.4; 142 II 154 consid. 4.2).  
 
5.2. Après avoir fait état de la jurisprudence relative à l'intérêt digne de protection qui peut être reconnu à des concurrents qui contestent une autorisation délivrée à un tiers, notamment lorsque ceux-ci se trouvent dans une relation particulièrement étroite, l'autorité précédente a constaté l'absence de circonstances spéciales propres à engendrer un tel intérêt en faveur de la recourante. Elle a relevé, d'une part, que l'Office du médecin cantonal n'avait pas exclu de prendre des mesures et, d'autre part, qu'un litige en matière de concurrence déloyale devait être tranché selon le droit privé.  
 
5.3. S'il est donc vrai que le Tribunal cantonal n'a pas détaillé les arguments avancés par la recourante relatifs à la situation de concurrence prévalant dans le domaine des pompes funèbres et ne s'est pas prononcé sur chacun d'eux, il s'est déterminé sur l'argument de la concurrence dans le cadre de l'examen de la qualité pour recourir de l'intéressée. Il n'a notamment pas eu besoin d'examiner en détail le marché en cause car il a estimé que la condition de l'avantage pratique, nécessaire à la reconnaissance de la qualité pour recourir, n'était pas remplie, au motif qu'une sanction à l'encontre de la concurrente n'aurait qu'un effet indirect sur la situation de la recourante, ce qui ne saurait constituer une violation de l'obligation de motiver (cf. supra consid. 5.1). Par conséquent, le grief relatif à la motivation de l'arrêt attaqué est rejeté.  
 
6.  
Mentionnant l'art. 75 LPA/VD, ainsi que les art. 89 et 111 LTF, l'intéressée prétend qu'elle possédait la qualité pour recourir à l'encontre du courrier du 6 octobre 2022 de l'Office du Médecin cantonal devant le Tribunal cantonal. Le canton de Vaud aurait adopté une réglementation poursuivant des objectifs de politique économique, en prescrivant le libre choix de l'entreprise de pompes funèbres et en interdisant certains actes de concurrence et certains procédés publicitaires. De ce fait, la recourante se trouverait en relation étroite avec ses concurrents, serait particulièrement touchée par l'absence de respect de normes topiques régissant l'activité en cause et, partant, jouirait d'un intérêt digne de protection à ce qu'il soit mis fin aux agissements dénoncés. Le compérage qu'elle avait constaté reviendrait à favoriser ses concurrents directs. Finalement, la potentielle procédure civile lui serait fermée: d'une part, celle-ci requiert un intérêt digne de protection (cf. art. 59 al. 2 let. a CPC) identique à celui de l'art. 75 let. a LPA/VD qui lui est précisément nié dans la présente procédure; d'autre part, il serait peu probable que ses concurrents soient tenus civilement responsables du fait que le personnel des morgues des hôpitaux remette leurs coordonnées aux familles des défunts. La procédure pénale paraitrait de même difficilement envisageable. 
 
6.1. Bien qu'elle cite l'art. 75 LPA/VD qui détermine la qualité pour recourir devant le Tribunal cantonal (cf. art. 99 LPA/VD), la recourante ne se prévaut pas d'une application arbitraire de cette disposition. Elle invoque l'art. 111 LTF et allègue que sa qualité pour recourir doit être examinée à l'aune de l'art. 89 al. 1 LTF (ATF 144 I 43 consid. 2.1; arrêt 2C_76/2022 du 10 juin 2022 consid. 4). C'est donc sous cet angle qu'il convient d'analyser le moyen.  
 
6.2. Aux termes de l'art. 111 LTF, la qualité de partie à la procédure devant toute autorité cantonale précédente doit être reconnue à quiconque a qualité pour recourir devant le Tribunal fédéral (al. 1); l'autorité qui précède immédiatement le Tribunal fédéral doit pouvoir examiner au moins les griefs visés aux art. 95 à 98 LTF (al. 3). Il résulte de cette disposition que la qualité pour recourir devant les autorités cantonales ne peut pas s'apprécier de manière plus restrictive que la qualité pour recourir devant le Tribunal fédéral (cf. ATF 144 I 43 consid. 2.1; 138 II 162 consid. 2.1.1).  
 
6.3. A teneur de l'art. 89 al. 1 LTF, a qualité pour recourir en matière de droit public quiconque a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire (let. a), est particulièrement atteint par la décision attaquée (let. b) et a un intérêt digne de protection à l'annulation ou à la modification de celle-ci (let. c).  
L'intérêt digne de protection suppose que la personne qui l'invoque soit touchée de manière directe, concrète et dans une mesure et avec une intensité plus grandes que la généralité des administrés (cf. ATF 140 II 315 consid. 4.2). La partie recourante doit se trouver dans une relation spéciale, étroite et digne d'être prise en considération avec l'objet de la contestation. Elle doit également retirer un avantage pratique de l'annulation ou de la modification de la décision contestée qui permette d'admettre qu'elle est touchée dans un intérêt personnel se distinguant nettement de l'intérêt général, de manière à exclure l'action populaire (ATF 144 I 43 consid. 2.1; 139 II 499 consid. 2.2). Cet intérêt pratique peut être de nature économique, matérielle ou idéale (cf. ATF 121 II 39 consid. 2 c/aa, 171 consid. 2b; 120 Ib 48 consid. 2a). 
 
6.4. La jurisprudence considère que, dans une procédure non contentieuse, la seule qualité de plaignant ou de dénonciateur ne donne pas le droit de recourir contre la décision prise à la suite de la dénonciation et ne confère donc pas la qualité de partie dans cette procédure. En effet, ce type de procédure a pour but d'assurer l'exercice correct de l'activité soumise à surveillance dans l'intérêt public et non de défendre des intérêts privés des particuliers (cf. ATF 135 II 145 consid. 6.1; 132 II 250 consid. 4.4). Pour jouir d'une telle qualité, le dénonciateur doit non seulement se trouver dans un rapport étroit et spécial avec la situation litigieuse, mais aussi pouvoir invoquer un intérêt digne de protection à ce que l'autorité de surveillance intervienne (ATF 135 II 145 consid. 6.1; 133 II 468 consid. 2; principes récemment rappelés in arrêt 2C_759/2022 du 13 décembre 2022 consid. 1.3).  
 
6.5. Dans le canton de Vaud, en vertu de l'art. 73a al. 1 LSP/VD et 75 al. 1 RDSPF/VD, l'exploitation d'une entreprise de pompes funèbres est soumise à l'autorisation du département compétent. Le Conseil d'Etat soumet les entreprises de pompes funèbres à des règles et usages professionnels (cf. art. 73b LSP/VD). Les entreprises de pompes funèbres, les membres de leur personnel et leurs représentants ne sont pas autorisés à rechercher ou solliciter la clientèle sur la voie publique, en particulier aux abords et à l'intérieur des établissements sanitaires et des bureaux administratifs (let. a) ni à chercher à influencer par quelque moyen que ce soit le personnel d'un établissement sanitaire ou d'une commune en vue d'obtenir des avantages qui limiteraient le libre choix de l'entreprise dont doivent bénéficier les familles des personnes décédées (let. b) (art. 79 al. 1 RDSPF/VD); les établissements sanitaires et les autorités garantissent à tout moment, aux proches des personnes décédées, le libre choix de l'entreprise de pompes funèbres aux services de laquelle ils désirent recourir et tiennent à leur disposition la liste des entreprises de pompes funèbres du canton que leur transmet régulièrement le département (art. 79 al. 2 RDSPF/VD). L'art. 81 RDSPF/VD énumère les procédés publicitaires autorisés respectivement interdits. Le département compétent peut ordonner, dans certains cas, une sanction allant de l'avertissement au retrait définitif de l'autorisation d'exploiter (cf. art. 191 LSP/VD cum art. 82 RDSPF/VD et 71 du règlement vaudois du 26 janvier 2011 sur l'exercice des professions de la santé [REPS/VD; RS/VD 811.01.1]).  
 
6.6. Contrairement à ce que soutient la recourante, on ne saurait considérer qu'elle se trouve dans une relation étroite et spéciale avec l'objet du litige. Tout d'abord, l'intéressée ne peut être suivie, lorsqu'elle affirme que la réglementation en cause instaure des objectifs de politique économique, au motif qu'elle prescrit le libre choix de l'entreprise de pompes funèbres (art. 79 al. 2 RDSPF/VD) et impose certaines règles, c'est-à-dire qu'elle interdit de solliciter la clientèle sur la voie publique, de chercher à influencer le personnel d'un établissement sanitaire ou d'une commune en vue d'obtenir des avantages (art. 79 al. 1 RDSPF/VD), ainsi que de faire appel à certains procédés publicitaires (art. 81 al. 2 RDSPF/VD). Ces dispositions ne font qu'instaurer un cadre à l'exercice de l'activité des pompes funèbres. Celle-ci s'exerce dans des conditions particulières qui nécessitent que les entreprises offrent des garanties dans leur façon de procéder vis-à-vis des clients. Dans ces circonstances, la réglementation de cette activité doit tenir compte des exigences se rapportant notamment à un but d'intérêt public et à l'éthique. Elle n'implique pas que toute entreprise qui dénonce un manquement d'un concurrent à l'autorité possède, en raison des seuls objectifs de la législation, un lien spécifique avec la procédure découlant de la dénonciation.  
En outre, le rapport entre les concurrents de cette branche d'activité ne peut être qualifié d'étroit. Il s'agit d'une concurrence ordinaire entre les différents acteurs d'un même marché. Cette position de concurrence ordinaire ne saurait conférer un lien spécial avec l'objet de la contestation portant sur la vérification du respect de la loi par un concurrent. A cet égard, la jurisprudence citée par la recourante, où la qualité pour recourir a été reconnue à des concurrents (ATF 141 II 262 consid. 3.2; 98 Ib 226 consid. 2; arrêt 2C_1024/2016 du 23 février 2018, etc.), ne saurait s'appliquer in casu: il s'agissait en effet de procédures en matière d'autorisation (d'exploiter ou autre) ou d'avantages accordés dans des situations particulières, tels que les cartels, et pas de procédure disciplinaire en lien avec des manquements aux devoirs de la profession, tels qu'ils sont définis par le droit cantonal. L'intéressée se prévaut, plus particulièrement, de deux arrêts du Tribunal fédéral dans lequel le dénonciateur possédait la qualité de partie (ATF 142 II 80 consid. 1.4) respectivement un intérêt digne de protection quant à l'issue de la procédure (arrêt 2C_214/2018 du 7 décembre 2018). Toutefois, à nouveau, ces deux arrêts ne concernaient pas une procédure disciplinaire (décision susceptible de remettre en cause la réglementation de la profession de pharmacien pour le premier; procédure, initiée par le voisin d'un établissement public, destinée à faire cesser des nuisances pour le second). Partant, ils ne sont pas pertinents pour la présente cause et l'intéressée ne peut rien en tirer. 
 
6.7. Au regard de ce qui précède, la recourante ne bénéficie pas d'un intérêt digne de protection, au sens de l'art. 89 LTF.  
 
6.8. On peut encore relever qu'il est douteux que, comme le prétend l'intéressée, la voie de la procédure civile, notamment pour concurrence déloyale, lui soit fermée. En effet, on ne voit pas pour quelle raison la qualité pour agir lui serait niée, l'intérêt digne de protection (cf. art. 59 al. 2 let. a CPC) étant apprécié à l'aune de critères différents en droit privé.  
 
6.9. En conclusion, la qualité pour recourir, au sens de l'art. 89 al. 1 LTF, ne peut être reconnue à la recourante. Dès lors, l'arrêt cantonal lui niant cette qualité à l'encontre du courrier du 6 octobre 2022 de l'Office du médecin cantonal est conforme à cette disposition. Il ne consacre pas une conception plus restrictive de la qualité pour recourir, si bien que l'art. 111 al. 1 LTF est respecté.  
 
7.  
Au regard de ce qui précède, le recours est rejeté. 
La recourante, qui succombe, doit supporter les frais judiciaires (cf. art. 66 al. 1 et al. 5 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante, ainsi qu'au Médecin cantonal et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public. 
 
 
Lausanne, le 14 juin 2023 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente: F. Aubry Girardin 
 
La Greffière: E. Jolidon