1C_656/2021 10.11.2022
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_656/2021  
 
 
Arrêt du 10 novembre 2022  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Kneubühler, Président, 
Chaix et Müller. 
Greffier : M. Kurz. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
B.________, 
toutes les deux représentées par Me Damien Hottelier, avocat, 
recourantes, 
 
contre  
 
Département de la mobilité, du territoire et de l'environnement du canton du Valais, case postale 478, 1951 Sion, 
intimé, 
 
Commune de St-Gingolph, 
Administration communale, case postale 1, 
1898 St-Gingolph, 
Conseil d'Etat du canton du Valais, 
place de la Planta, Palais du Gouvernement, 1950 Sion. 
 
Objet 
Assainissement pour le bruit routier avec demande d'allègement, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de droit public du Tribunal cantonal du canton du Valais, du 29 septembre 2021 
(A1 21 65). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Le 16 juin 2017, le Département de la mobilité, du territoire et de l'environnement du canton du Valais (le DMTE) a mis à l'enquête le projet d'assainissement du bruit routier présenté par le service cantonal de la mobilité (SDM) pour la route principale suisse H21BO du Bouveret à Saint-Gingolph, sur une longueur totale de 3630 m. Selon le rapport du 8 février 2017 à l'appui de ce projet, les mesures de réduction du bruit sont la pose d'un revêtement routier de type SDA 4 ou SDA 8 selon les tronçons concernés et un abaissement de la vitesse de 70 à 60 km/h sur un tronçon. Le projet a suscité l'opposition, notamment, de B.________ et A.________, propriétaires de la parcelle n° 1116 sur laquelle se trouvent deux maisons individuelles correspondant aux récepteurs sgi.302.i.16 et 17. A cet endroit, le projet prévoit la réduction de la vitesse de 70 à 60 km/h et la pose d'un revêtement peu bruyant SDA 8. Selon le rapport, le fort trafic poids-lourds ne permet pas la pose d'un revêtement SDA 4 moins bruyant. Un abaissement de la vitesse à 50 km/h n'est pas possible en raison de la fonction de route cantonale de transit. La construction d'une paroi antibruit n'est pas possible, car le bruit de la voie ferrée qui longe la route côté lac serait amplifié au niveau des bâtiments; l'impact paysager pour les riverains et les usagers serait important. Un mur d'un hauteur moindre ne protégerait pas les niveaux supérieurs des bâtiments et provoquerait une augmentation du bruit routier pour les bâtiments sis de l'autre côté de la route. Les valeurs limites d'immission (VLI) étant toujours dépassées à l'horizon 2025 pour les deux récepteurs sur la parcelle n° 1116 (63 dB (A) et 61 dB (A) contre 60 le jour; 56 dB (A) et 54 dB (A) contre 50 de nuit), une demande d'allégement a été présentée. 
Par décision du 6 mars 2020, le chef du DMTE a accordé les allégements demandés, précisant que la modification de vitesse avait déjà été réalisée et que la mise en place des nouveaux revêtements devait être traitée prioritairement dans le programme d'entretien; si, au moment des travaux, un revêtement plus efficace existait, répondant à l'état de la technique et économiquement supportable, celui-ci devrait être choisi. 
 
B.  
Par décision du 10 mars 2021, le Conseil d'Etat du canton du Valais a rejeté le recours formé par B.________ et A.________. Il n'y avait pas lieu de fixer de date précise pour le début des travaux de remplacement du revêtement. La renonciation à un revêtement de type SDA 4 était justifiée en raison des contraintes liées au trafic de transit, un tel revêtement ne permettant de toute façon pas de respecter entièrement les VLI. Une limitation supplémentaire de la vitesse ou des mesures constructives ne se justifiaient pas s'agissant d'une route principale à caractère international, la zone ne correspondant pas à un hypercentre. Les autres mesures de protection contre le bruit n'étaient pas économiquement supportables selon l'index WTI, applicable dans ce contexte. 
 
C.  
Par arrêt du 29 septembre 2021, la Cour de droit public du Tribunal cantonal du Valais a partiellement admis le recours formé par les opposantes. Les conclusions tendant à la construction d'une paroi antibruit de 4,2 m de hauteur et à la fermeture des glissières avec pose d'un matériau absorbant n'avaient pas été soumises à l'instance précédente et étaient donc irrecevables. La pose d'un revêtement de type SDA 4 permettait une réduction de 4dB (A), au lieu de 2 pour un revêtement SDA 8. Sa durée de vie était toutefois de 10-15 ans, contre 15-20 ans pour le SDA 8 et ses coûts de mise en oeuvre étaient légèrement supérieurs. Aucun des deux ne permettait un respect des VLI. Le SDA 8 présentait de meilleures propriétés mécaniques et, sur un tronçon au fort trafic - notamment poids lourd - et où aucun contournement n'était prévu, le choix de ce revêtement ne prêtait pas le flanc à la critique. La construction d'une paroi antibruit de 1,5 m de hauteur présentait un WTI de 0,4. Le recours au WTI dans un tel cas (projet d'un coût inférieur à 0,5 million de francs) n'était certes pas obligatoire, mais possible. La pose d'un revêtement phonoabsorbant sur le mur de soutènement en amont de la route ne présentait pas une efficacité suffisante. L'aménagement d'une paroi de 4,2 m était certes économiquement supportable, mais irréalisable en raison de l'impact paysager et pour des raisons de sécurité. S'agissant des délais de réalisation de l'assainissement, le délai légal au 31 mai 2018 était échu et il y avait lieu de renvoyer la cause au Conseil d'Etat afin qu'il complète la décision du DMTE en indiquant un délai concret pour la pose du revêtement phonoabsorbant. 
 
D.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ et B.________ demandent au Tribunal fédéral d'ordonner les réalisations suivantes: la pose d'un revêtement SDA 4 sur le tronçon de route situé en regard de leur propriété et la réalisation d'un mur antibruit de 162 m de long et 4,2 m de hauteur selon la fiche d'allégement du bâtiment i.17; subsidiairement, la paroi de dimension réduite visée dans le complément du 11 décembre 2019, et plus subsidiairement la fermeture des glissières et l'ajout de matériau absorbant, conformément à la recommandation minimale du Service cantonal de l'environnement du 18 juin 2018; plus subsidiairement, elles concluent au renvoi de la cause à l'instance cantonale pour nouvelle décision. 
Le Tribunal cantonal renonce à se déterminer. Le Conseil d'Etat se réfère à l'arrêt attaqué et conclut au rejet du recours, sans autres observations. Le DMTE conclut à l'irrecevabilité, subsidiairement au rejet du recours. Invité à se déterminer, l'Office fédéral de l'environnement (OFEV) considère que la pose d'un seul type de revêtement, soit SDA 4, sur l'ensemble des tronçons sgi.302. b à f et f à j devrait être privilégiée et est économiquement supportable. S'agissant des parois antibruit et de la fermeture des glissières, l'OFEV estime que l'appréciation des instances cantonales ne prête pas le flanc à la critique. Le Conseil d'Etat se réfère, s'agissant de la question du revêtement routier, au résumé exposé dans sa réponse. Les recourants, la cour cantonale et la commune de Saint-Gingolph ont pour leur part renoncé à de nouvelles observations. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
La voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss LTF) est ouverte contre une décision prise en dernière instance cantonale dans une contestation portant sur l'application du droit de l'aménagement du territoire et de la protection de l'environnement. 
 
1.1. Aux termes de l'art. 89 LTF, la qualité pour recourir est reconnue à toute personne atteinte par la décision attaquée et qui dispose d'un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification. Pour satisfaire à ce critère, la partie recourante doit se trouver dans une relation spéciale, étroite et digne d'être prise en considération avec l'objet de la contestation. Le voisin direct de la construction ou de l'installation litigieuse a en principe la qualité pour recourir. Tel est le cas des recourantes, propriétaires d'une parcelle jouxtant la route nationale pour laquelle l'autorité a autorisé des allégements. Elles sont ainsi particulièrement atteintes par la décision attaquée en raison des nuisances de bruit qu'elles subissent et ont un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.  
Comme cela est relevé ci-dessous (consid. 2.1), la question de la recevabilité des conclusions III et V formées devant le Tribunal cantonal (mur antibruit de grande taille et fermeture des glissières) peut demeurer indécise. Il peut en aller de même des conclusions correspondantes formées céans, dans la mesure ou, comme on le verra (cf. consid. 4 et 6 ci-dessous), elles doivent de toute manière être rejetées sur le fond. 
Les autres conditions de recevabilité sont réunies, si bien qu'il y a lieu d'entrer en matière. 
 
2.  
Dans un grief mêlant violation du droit d'être entendu et établissement arbitraire des faits, les recourantes reprochent à la cour cantonale d'avoir jugé irrecevables les conclusions 3 (réalisation d'une paroi antibruit de 4,2 m) et 5 (fermeture des glissières avec pose d'un matériau absorbant) du recours cantonal, faute d'avoir été présentées devant l'instance précédente. Dans leur recours devant le Conseil d'Etat, les recourantes concluaient au réexamen, au complément et à la redéfinition des mesures décidées par le département, ce qui englobait selon elles l'ensemble des installations propres à lutter contre le bruit. En outre, la cour cantonale devait appliquer le droit d'office et examiner, dans la perspective d'un allégement - qui doit demeurer exceptionnel -, l'ensemble des mesures envisageables. 
La cour cantonale aurait par ailleurs considéré qu'une paroi de 4,2 m priverait de la vue sur le lac les habitations situées au-dessus de la route; cette constatation, nouvelle (le Conseil d'Etat ne faisait état que de la vue depuis la route), serait erronée puisque les quartiers sis en amont de la route se situent suffisamment haut pour pouvoir continuer de bénéficier de la vue, le mur de soutènement actuel étant d'une hauteur supérieure à la paroi envisagée. La cour cantonale aurait enfin confirmé l'existence de problèmes de sécurité, sans répondre aux arguments soulevés par les recourantes sur ce point. 
 
2.1. La cour cantonale a certes considéré que les conclusions concernant la paroi antibruit et le comblement des glissières étaient nouvelles et partant irrecevables. Point n'est toutefois besoin de rechercher s'il en résulte une application arbitraire du droit cantonal de procédure - les recourantes ne présentent d'ailleurs aucun grief à ce propos - ou une violation du droit d'être entendu, car la cour cantonale a néanmoins examiné ces deux conclusions sur le fond (consid. 8 de l'arrêt attaqué). Le grief formel est ainsi sans objet.  
 
2.2. Devant le Conseil d'Etat, les recourantes elles-mêmes avaient reconnu (alors qu'elles préconisaient la pose d'un mur de 1,5 m de hauteur), qu'une paroi de 4,2 m de hauteur serait trop grande à leur sens. Devant la cour cantonale, les recourantes ont relevé qu'il existait déjà derrière la route un mur de soutènement de 5 m de hauteur, considérant que l'impact paysager n'était pas particulièrement important. La question de l'impact paysager lié à la hauteur de la paroi antibruit proposée n'était donc ni nouvelle, ni inattendue, et les recourantes se sont exprimées à ce propos de sorte que leur droit d'être entendues a été respecté.  
S'agissant de l'argument relatif à la sécurité routière, la cour cantonale s'est prononcée en relevant que le débouché depuis l'accès à l'Ecole des Missions (soit un ensemble de bâtiments situés sur la parcelle n° 1117, à l'est de celle des recourantes) par un pont enjambant la voie de chemin de fer, serait rendu dangereux par la présence de la paroi antibruit placée juste au nord de la route. Cela constitue du point de vue formel une motivation suffisante, que les recourantes peuvent attaquer en toute connaissance de cause en faisant notamment valoir les objections qui n'auraient selon elles pas été suffisamment traitées. Il n'y a dès lors pas non plus sur ce point de violation du droit d'être entendu. 
 
2.3. Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Selon les art. 97 al. 1 LTF, le recourant ne peut critiquer les constatations de fait que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire - ou en violation du droit au sens des art. 95 LTF et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause. Lorsque la partie recourante entend s'en prendre aux faits ressortant de l'arrêt entrepris, elle doit établir de manière précise la réalisation de ces conditions, c'est-à-dire qu'elle doit exposer, de manière circonstanciée, que les faits retenus l'ont été d'une manière absolument inadmissible, et non seulement discutable ou critiquable (cf. art. 106 al. 2 LTF). A défaut, il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui qui est contenu dans l'acte attaqué (ATF 145 V 188 consid. 2; 137 II 353 consid. 5.1). Le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur les critiques de nature appellatoire (ATF 145 IV 154 consid. 1.1).  
 
2.3.1. Les recourantes relèvent que la paroi antibruit serait implantée parallèlement au mur de soutènement qui longe la route à cet endroit et est d'une hauteur supérieure (environ 5 m). Ils relèvent également que la seule villa qui borde la route en amont se situe largement au-dessus de la route de sorte que la vue serait préservée. Il n'en demeure pas moins que la paroi antibruit en question devrait être implantée au nord de la route (côté lac), soit du côté opposé au mur de soutènement, de sorte qu'il est vraisemblable que la vue sur le lac, depuis les parcelles en amont, s'en trouverait à tout le moins partiellement réduite. Pour leur part, les recourantes se contentent d'affirmations sur la configuration des lieux, sans prétendre ni démontrer que les faits retenus se trouveraient en contradiction avec l'une ou l'autre des pièces du dossier. Le grief doit donc être écarté.  
 
2.3.2. S'agissant de la sécurité du débouché de l'accès menant à la parcelle n° 1117, la cour cantonale ne s'est certes pas prononcée sur les arguments des recourantes (débouché sur la route quelques mètres après l'emplacement de la paroi, possibilité de réduire la hauteur à cet emplacement). S'agissant du premier point, la présence d'une paroi avant et après le débouché en question est susceptible d'entraver la visibilité tant des usagers de la route que de ceux du chemin d'accès. Une réduction de hauteur de la paroi antibruit diminuerait immanquablement l'effet recherché de réduction du bruit, en particulier sur la parcelle n° 1117.  
L'argument principal retenu par la cour cantonale à l'encontre d'une paroi antibruit de grande hauteur tient au fait que ladite paroi serait placée entre la route et la voie CFF, de sorte que le bruit de cette dernière, malgré une conception fortement absorbante, serait amplifié au niveau des bâtiments. Il s'agit là de l'objection essentielle, tenant directement à la protection contre le bruit. Dans ces conditions, les autres objections de fait soulevées par les recourantes apparaissent secondaires, de sorte que la question de savoir s'il y a sur ces points une constatation erronée des faits ou une violation du droit d'être entendu peut demeurer indécise. 
 
3.  
Invoquant l'art. 13 al. 2 de l'ordonnance fédérale sur la protection contre le bruit (OPB, RS 814.41), les recourantes relèvent qu'un allégement doit demeurer l'exception, et l'assainissement la règle. Elles relèvent que la pose d'un revêtement de type SDA 4 a été considérée comme économiquement supportable et que l'argument tiré d'une moindre résistance mécanique relèverait également du caractère économiquement supportable puisqu'il implique une durée de vie inférieure. La différence de traitement avec la localité du Bouveret (située à quelques dizaines de mètres), où un revêtement SDA 4 est prévu, ne se justifierait pas: le projet d'évitement ne sera pas réalisé avant de nombreuses années et la densité d'habitations serait identique. 
 
3.1. Selon l'art. 16 al. 1 de la loi fédérale sur la protection de l'environnement (LPE, RS 814.01), les installations fixes existantes, telles que les routes nationales (cf. art. 2 al. 1 OPB), qui ne satisfont pas aux prescriptions légales applicables à la protection de l'environnement doivent être assainies. Selon l'art 13 al. 2 OPB, les installations seront assainies: a) dans la mesure où cela est réalisable sur le plan de la technique et de l'exploitation et économiquement supportable, et b) : de telle façon que les valeurs limites d'immission ne soient plus dépassées. Des allégements peuvent être accordés si l'assainissement entraverait de manière excessive l'exploitation ou entraînerait des frais disproportionnés ou si des intérêts prépondérants, notamment dans les domaines de la protection des sites, de la nature et du paysage, de la sécurité de la circulation et de l'exploitation ainsi que de la défense générale, s'opposent à l'assainissement (art. 17 LPE et 14 OPB). L'octroi d'allégements permettant le dépassement des VLI dans une situation concrète a pour conséquence que les riverains devront vivre à l'avenir aussi avec des nuisances sonores nocives pour la santé, ce pour une durée indéterminée, et constitue l'ultima ratio (arrêt 1C_589/2014 du 3 février 2016 consid. 5.5, in DEP 2016 p. 319). Il constitue une autorisation dérogatoire qui ne peut être délivrée que dans des cas particuliers et qui doit être appliquée de manière restrictive (ATF 138 II 379 consid. 5; arrêts 1C_183/2019 du 17 août 2020 consid. 4.2; 1C_350/2019 du 16 juin 2020 consid. 4.1). Elle présuppose que toutes les mesures d'assainissement entrant en considération, qui ne présentent pas de désavantages majeurs et qui n'apparaissent pas manifestement disproportionnées, ainsi que leurs effets doivent être suffisamment étudiés (arrêts 1C_74/2012 du 19 juin 2012 consid. 3.1, non publié dans l'ATF 138 II 379, 1C_183/2019 du 17 août 2020 consid. 4.2).  
Une mesure d'assainissement est économiquement supportable si ses coûts se situent dans un rapport raisonnable par rapport à ses effets. Pour les installations de transports publiques, il faut effectuer une pesée des intérêts entre les coûts et l'utilité d'une mesure. A cette fin, il s'agit d'évaluer notamment l'ampleur du dépassement des valeurs limites d'exposition, les réductions possibles du bruit et le nombre de personnes concernées par le bruit et de les comparer avec les coûts attendus des différentes mesures de protection, le nombre des riverains touchés par du bruit dépassant les VLI devant être maintenu le plus bas possible (arrêt 1A.172/2004 du 21 septembre 2004 consid. 4.2). Si la pesée des intérêts aboutit à une disproportion entre les coûts et l'utilité de l'assainissement, un allégement doit être accordé. 
L'OFEV et l'OFROU ont édité une aide à l'exécution pour l'assainissement du bruit (SCHGUANIN/ZIEGLER, Manuel du bruit routier, aide à l'exécution pour l'assainissement, décembre 2006), complétée par la publication de l'OFEV (BICHSEL/MUFF, Caractère économiquement supportable et proportionnalité des mesures de protection contre le bruit, Optimisation de la pesée des intérêts, Berne 2006). Il s'agit de directives destinées à assurer une application uniforme du droit et à expliciter son interprétation. Elles ne dispensent pas l'autorité de se prononcer à la lumière des circonstances du cas d'espèce (ATF 133 II 305 consid. 8.1, 121 II 473 consid. 2b et les références). La méthode proposée pour juger de la proportionnalité d'une mesure de protection contre le bruit compare les coûts d'une telle mesure avec son utilité. Le rapport entre l'utilité et le coût de la mesure (l'efficience) et le degré de réalisation des objectifs par rapport aux valeurs limites prescrites par l'OPB (l'efficacité) sont mis en balance selon la formule suivante: efficacité x efficience / 25. Un score de 1 est considéré comme suffisant (et la mesure comme économiquement supportable), un score inférieur à 0,5 est très mauvais, et un WTI de 4 est considéré comme très bon. Une mesure présentant un score inférieur à 1 est considérée comme disproportionnée du point de vue de la limitation des émissions (arrêts 1C_183/2019 du 17 août 2020 consid. 4.3, 1C_480/2010 du 23 février 2011 consid. 4.4). 
 
3.2. La pose d'un revêtement peu bruyant fait partie des mesures de limitation à la source qu'il convient de privilégier selon l'art. 13 al 3 OPB (ATF 138 II 379 consid. 5.6). Selon les instances précédentes, le revêtement SDA 8 permet une réduction moyenne de 2 dB (A) pour une vitesse de 50-60 km/h, alors que le revêtement SDA 4 permet une réduction de 4 dB (A). Le revêtement SDA 4 est toutefois moins résistant et sa durée de vie est de l'ordre de 10-15 ans contre 15-20 ans pour le revêtement SDA 8. En outre, les coûts de mise en oeuvre sont également légèrement supérieurs (40 fr./m² contre 35-40 fr./m²). Le revêtement SDA 4 doit ainsi être installé aux endroits où une réduction importante de bruit est nécessaire, alors que le SDA 8 doit être privilégié sur les tronçons soumis à des contraintes mécaniques plus élevées.  
 
3.3. En l'occurrence, les deux types de revêtement ont été considérés comme économiquement supportables. La pose du revêtement SDA 4 dans ce secteur permettrait une réduction supplémentaire de l'ordre de 2 dB (A), et de se rapprocher ainsi des VLI de jour et de nuit (61 et 54 dB (A) sans toutefois les atteindre (60 et 50 dB (A) pour un DS II). Les instances précédentes ont toutefois renoncé à la pose d'un revêtement de ce type au motif que l'usure serait plus rapide en raison notamment du trafic poids-lourds qui emprunte le tronçon. Un tel revêtement est en revanche prévu sur le tronçon suivant (sgi.302.b à f) ainsi que sur la traversée du Bouveret, car un projet de contournement, respectivement un tunnel d'évitement, permettraient d'escompter à terme une moindre charge de trafic dans ces secteurs.  
L'OFEV se fonde sur un rapport de mesurage du 15 janvier 2020 (CPX-Messungen Strassenbeläge; Messbericht 2020) qui a notamment pour objet de vérifier le comportement dans le temps des différents revêtements. Il en ressort que la réduction de bruit constatée avec le revêtement SDA 4, pour des routes à forte charge de trafic avec 8 % de poids-lourds, est de - 6,3 dB après 4 ans et et de - 4,4 dB après sept ans, sans nécessité de le remplacer. La réduction de bruit par un tel revêtement est d'autant plus forte pour les véhicules lourds, la proportion de tels véhicules dans le cas d'espèce étant estimée à 10 % le jour et 5 % la nuit. 
Dans la mesure où les deux revêtements sont considérés comme économiquement supportables (cette évaluation tenant compte des frais de mise en place et de la durée de vie), la légère différence de coût et de durabilité ne saurait constituer un désavantage majeur et ne justifie pas de renoncer à une mesure qui permet de réduire l'exposition au bruit de manière sensible et de s'approcher du respect des VLI. Le recours doit dès lors être admis sur ce point. L'OFEV estime que la pose d'un revêtement phonoabsorbant de type SDA 4 devrait être imposée sur l'entier du tronçon sgi.302.f à sgi.302.j. Une telle conclusion irait cependant au-delà de l'objet du litige et des conclusions des recourantes (art. 107 al. 1 LTF), limités à la parcelle n° 1116, soit la partie du tronçon sgi.302.i qui concerne directement les recourantes. Toutefois, une solution uniforme paraît s'imposer pour l'ensemble des tronçons sgi.302.f à sgi.302.j, pour lesquelles les mêmes objections ont été retenues à l'encontre de la pose d'un revêtement de type SDA 4. Comme le relève l'OFEV dans ses observations, l'uniformité du revêtement sur un tronçon donné est importante dès lors que les changements de structure (jointures entre les différents revêtements) génèrent des effets sonores perceptibles et dérangeants, qu'il convient en principe d'éviter. Il ne se justifie donc a priori pas d'aménager, au seul niveau de la parcelle des recourantes, un court tronçon isolé revêtu d'un matériau différent, car cela pourrait engendrer des nuisances supplémentaires pour d'autres riverains. 
Il y a lieu par conséquent de compléter le renvoi de la cause au Conseil d'Etat afin que ce dernier fixe non seulement le délai pour la pose du revêtement phonoabsorbant, mais définisse également si la pose d'un revêtement SDA 4 se justifie sur l'ensemble du tronçon sgi.302.f à sgi.302.j, et, dans la négative, qu'il détermine la portion de route qui devra être équipée de la sorte. 
 
4.  
Les recourantes persistent ensuite à demander l'installation d'une paroi antibruit de 4,2 m de hauteur et de 162 m de longueur. Elles contestent les arguments retenus à l'encontre de cette installation, qui tiennent à la réflexion du bruit de la ligne de chemin de fer, à la sécurité du débouché de la parcelle n° 1117 et à l'aspect paysager. Elles relèvent que le trafic ferroviaire est très limité sur la ligne (deux passages par heure), que les aspects paysagers ne suffiraient pas à renoncer à la mesure, et reprennent leurs objections quant aux questions de sécurité. 
Selon le jugement attaqué, la paroi antibruit serait en soi économiquement supportable puisque l'indice WTI est de 1,4. Toutefois, les inconvénients relevés par les instances précédentes ne sauraient être sous-estimés. En dépit des objections des recourantes, l'atteinte paysagère est évidente, s'agissant d'un tronçon de route qui borde le lac et qui comporte plusieurs habitations en amont. La présence d'une haute paroi le long de la route est par ailleurs susceptible de compromettre la sécurité du débouché de l'accès de la parcelle n° 1117, soit un pont qui enjambe les voies CFF. Les recourantes estiment que la limitation de la paroi au regard de leur parcelle limiterait le problème, mais elles méconnaissent que l'indice WTI a été établi en tenant compte d'une diminution du bruit pour cinq bâtiments (sgi.302.i.1, 16, 17, j.4 et j.1) qui n'existerait plus pour les deux derniers en cas de suppression de la portion de 49 m. Comme cela est relevé ci-dessus, une diminution de hauteur partielle aurait elle aussi comme effet de diminuer la protection contre le bruit en particulier sur la parcelle n° 1117. Au regard de ces inconvénients, un WTI de 1,4, ne justifie pas la réalisation d'une mesure dont l'efficacité doit enfin être relativisée par la prise en compte de la réduction de bruit supplémentaire résultant de la pose d'un revêtement SDA 4 à cet endroit. L'arrêt attaqué est par conséquent conforme, sur ce point, au droit fédéral. 
 
5.  
S'agissant d'une paroi antibruit de moindres dimensions, les recourantes critiquent la méthode d'évaluation selon l'indice WTI, en relevant qu'il y aurait lieu d'évaluer le coût de la mesure non pas en tenant compte de la diminution de la valeur locative d'un logement, mais au regard des coûts de la santé résultant de l'exposition au bruit. En l'occurrence, le coût de la paroi (135'000 fr.) équivaudrait, pour les deux récepteurs, à 17'000 fr. par occupant. Comme cela est relevé ci-dessus, l'évaluation du caractère économique selon le WTI (en l'occurrence 0,4, soit mauvais) correspond aux buts de protection de la LPE en prenant en compte l'efficacité de la mesure par rapport à ses coûts, et en assurant une pratique homogène sur l'ensemble du territoire. Les recourantes ne proposent d'ailleurs aucune méthode alternative qui serait préférable au regard du but recherché par la LPE. 
 
6.  
S'agissant de la fermeture des glissières, les recourantes relèvent qu'il s'agirait simplement de remplacer les barrières et leur support alors que le revêtement de la route doit de toute façon être changé. Les recourantes prétendent que le SEN aurait proposé cette solution dans son préavis du 18 juin 2018. En réalité, le service cantonal avait simplement exigé du SDM qu'il examine, sur les parties bordées d'une glissière côté nord, la faisabilité et l'opportunité (sous l'angle acoustique, compte tenu des réflexions éventuelles du bruit du chemin de fer et en fonction des autres intérêts à préserver) du remplacement de celle-ci par une glissière fermée (charges et conditions, ch. 5). Le SDM a alors mandaté un bureau d'ingénieurs pour la réalisation d'un rapport complémentaire. Celui-ci a été rendu le 11 décembre 2019 et conclut au caractère irréalisable d'un remplissage de la glissière existante: celle-ci est trop basse pour ajouter un élément en-dessous sans devoir reposer le système de retenue; les éléments de protection contre les motards ne ferment pas complètement la glissière; il n'est pas possible de poser un élément type plexiglas sans refaire le système de fixation; la pose de tout élément augmentant les réflexions sur les bâtiments situés en face est exclue. Les recourantes se contentent de prétendre que le remplacement des barrières serait économiquement supportable et techniquement réalisable, ce que le rapport précité vient contredire. Dans la mesure où il est suffisamment motivé (et pour autant que la conclusion correspondante soit recevable), cet ultime grief doit être écarté, tout comme le grief d'arbitraire soulevé en fin de recours et qui n'a aucune portée propre dans une cause entièrement régie par le droit fédéral. 
 
7.  
Sur le vu de ce qui précède, le recours est partiellement admis. L'arrêt attaqué est réformé en ce sens que la cause est renvoyée au Conseil d'Etat non seulement pour la fixation du délai de mise en oeuvre (ch. 2 du dispositif de l'arrêt attaqué), mais aussi pour qu'il définisse le tronçon de la route sur lequel sera posé un revêtement de type SDA 4. Le recours est rejeté pour le surplus. Les recourantes, qui obtiennent partiellement gain de cause avec l'assistance d'un avocat, ont droit à des dépens réduits, à la charge de l'Etat du Valais (art. 68 al. 2 LTF). Les frais judiciaires, eux aussi réduits, sont mis à la charge des recourantes (art. 66 al. 1 et 4 LTF). La cause est pour le surplus renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision sur les frais. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est admis partiellement. L'arrêt attaqué est réformé en ce sens que la cause est renvoyée au Conseil d'Etat non seulement pour la fixation du délai de mise en oeuvre (ch. 2 du dispositif de l'arrêt attaqué), mais aussi pour qu'il définisse le tronçon de la route H21BO sur lequel sera posé un revêtement de type SDA 4. Le recours est rejeté pour le surplus. 
 
2.  
Les frais judiciaires réduits, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge des recourantes. 
 
3.  
Une indemnité de dépens réduite de 2'000 fr. est allouée aux recourantes, à la charge de l'Etat du Valais. 
 
4.  
La cause est renvoyée à la cour de droit public du Tribunal cantonal du canton du Valais pour nouvelle décision sur les frais de l'instance cantonale. 
 
5.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Commune de St-Gingolph, au Conseil d'Etat du canton du Valais, à la Cour de droit public du Tribunal cantonal du canton du Valais, et à l'Office fédéral de l'environnement. 
 
 
Lausanne, le 10 novembre 2022 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
Le Greffier : Kurz