1C_396/2022 07.07.2023
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_396/2022  
 
 
Arrêt du 7 juillet 2023  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Kneubühler, Président, 
Haag et Merz. 
Greffier : M. Kurz. 
 
Participants à la procédure 
1. A.A.________ et B.A.________, 
2. C.________, 
3. D.________, 
4. E.________, 
5. F.________, 
tous représentés par Me Stéphane Grodecki, 
recourants, 
 
contre  
 
1. G.________ SA, 
représentée par Me Dominique Burger, avocate, 
2. H.________, 
intimées, 
 
Département du territoire de la République et canton de Genève, Office des autorisations de construire, Service des affaires juridiques, case postale 22, 1211 Genève 8. 
 
Objet 
Autorisation de construire, accès suffisant. 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, du 31 mai 2022 (ATA/581/2022 - A/3311/2020-LCI). 
 
 
Faits :  
 
A.  
H.________ est propriétaire des parcelles contiguës n° s 970 et 1058 de la commune de Grand-Saconnex, au 4, chemin des Manons. Les parcelles ont fait l'objet d'un contrat de vente à terme en faveur de la société G.________ SA. Le 17 mai 2019, G.________ SA a déposé une demande d'autorisation de construire portant sur un habitat groupé de 18 logements sur trois niveaux sur la parcelle n° 970, d'une surface brute de plancher totale de 2'319 m², soit un indice d'utilisation du sol de 48% en raison d'un standard de très haute performance énergétique, avec report des droits à bâtir de la parcelle n° 1058. Le projet comporte en outre un garage souterrain pour 27 voitures et 5 motos. Le projet a donné lieu à des préavis, favorables ou sous conditions, après diverses demandes de modifications (Direction des autorisations de construire, Commission d'architecture, Office de l'agriculture et de la nature, police du feu, Office cantonal des transports - OCT -, service de l'air, du bruit et des rayonnements non ionisants - SABRA -, Office de l'urbanisme). En revanche, la commune s'est prononcée défavorablement à plusieurs reprises, s'agissant notamment de l'accès par le chemin des Manons. Elle demandait la création d'une servitude de passage public pour tous véhicules de 2 mètres de largeur afin d'élargir à terme le chemin en question, aux frais du constructeur, ainsi qu'une servitude de passage public pour les itinéraires piétons et vélos. 
Le 15 septembre 2020, le Département cantonal du territoire a délivré l'autorisation de construire (ainsi que l'autorisation de démolir le bâtiment existant), précisant en particulier que le plan et l'acte de constitution de la servitude de passage devaient être déposés avant l'ouverture du chantier. 
 
B.  
Par acte du 15 octobre 2020, B.A.________ et A.A.________, C.________, D.________, E.________ et F.________ (ci-après: les opposants) ont saisi le Tribunal administratif de première instance du canton de Genève (ci-après: le TAPI) d'un recours contre l'autorisation de construire. Ils relevaient en particulier que le chemin des Manons, étroit et dépourvu de trottoir, ne permettait pas le croisement et que le trafic supplémentaire généré par le projet compromettait la sécurité des habitants du quartier. Un élargissement du chemin n'était ni concrètement envisagé, ni réalisable puisqu'il devait s'étendre sur un tronçon qui était en copropriété. 
Par jugement du 8 décembre 2021, le TAPI a rejeté le recours. Il a en particulier considéré qu'il n'était pas nécessaire d'attendre l'issue de la procédure civile intentée par les opposants et tendant à interdire l'utilisation de la parcelle n° 868 (partie du chemin des Manons en copropriété). Il ne se justifiait pas non plus de procéder à un transport sur place. Les griefs relatifs à la densification ont été écartés. S'agissant de l'accès, il était juridiquement garanti puisque le chemin des Manons était une dépendance de la parcelle n° 970. Rectiligne et assurant une bonne visibilité, ce chemin servait déjà d'accès à plusieurs parcelles depuis de nombreuses années et pouvait accueillir une augmentation mesurée du trafic. L'OCT n'avait d'ailleurs formulé aucune réserve à ce propos et les explications fournies dans le rapport I.________ du 30 novembre 2020 produit par la constructrice étaient convaincantes. 
 
C.  
Par arrêt du 31 mai 2022, la Chambre administrative de la Cour de justice du canton de Genève a rejeté le recours formé par les opposants, après avoir elle aussi refusé de procéder à un transport sur place et de suspendre la procédure jusqu'à droit jugé dans la procédure civile. Il n'y avait aucune contradiction entre le préavis de l'OCT et le rapport de I.________. Il existait de nombreuses possibilités de croisement des véhicules sur toute la longueur du chemin - qui constituait une voie de desserte uniquement - plusieurs élargissements et places d'évitement étant en outre prévus. Les éventuels empiétements sur des fonds privés résultaient d'une pratique déjà instaurée. L'élargissement du chemin, en vertu de la servitude mentionnée dans l'autorisation de construire, permettrait d'améliorer la situation, déjà conforme aux exigences de l'art. 19 LAT (RS 700). 
 
D.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, les opposants précités demandent au Tribunal fédéral de réformer l'arrêt cantonal en ce sens que l'autorisation de construire est annulée. Ils demandent l'effet suspensif, qui a été accordé par ordonnance du 31 août 2022. 
La Chambre administrative persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt. Le Département cantonal du territoire conclut au rejet du recours. G.________ SA conclut également au rejet du recours. H.________ n'a pas déposé de déterminations. Les recourants ont répliqué et maintenu leurs conclusions. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Formé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF) en matière de droit public des constructions (art. 82 let. a LTF), le recours est recevable comme recours en matière de droit public au sens des art. 82 ss LTF, aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. Les recourants, qui ont participé à la procédure devant la cour cantonale, habitent tous à proximité directe du projet litigieux. Ils sont particulièrement touchés par l'arrêt attaqué et ont un intérêt digne de protection à en obtenir l'annulation. Ils disposent dès lors de la qualité pour recourir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF. Les conclusions présentées sont recevables au regard de l'art. 107 LTF
Il convient donc d'entrer en matière. 
 
2.  
Dans un premier grief, les recourants invoquent l'art. 112 LTF. Ils estiment que la cour cantonale ne pouvait se contenter de résumer la procédure et d'énoncer certains faits comme établis, sans toutefois discuter les éléments de preuve. Pour refuser de procéder à un transport sur place, elle se serait fondée sur les photographies figurant au dossier (photographies et photomontages), sans préciser lesquelles d'entre elles ont été retenues comme probantes et pourquoi. La cour se serait aussi fondée sur les photographies figurant dans le système d'information du territoire genevois (SITG), sans préciser quels faits auraient été ainsi établis, ainsi que sur le rapport I.________, sans indiquer en quoi celui-ci serait pertinent pour l'établissement des faits. 
 
2.1. A teneur de l'art. 112 al. 1 let. b LTF, les décisions qui peuvent faire l'objet d'un recours devant le Tribunal fédéral doivent contenir les motifs déterminants de fait et de droit. Il doit ressortir clairement de la décision quel est l'état de fait retenu sur lequel elle se fonde et quel est le raisonnement juridique qui a été suivi (cf. ATF 141 IV 244 consid. 1.2.1; 138 IV 81 consid. 2.2; 135 II 145 consid. 8.2; arrêt 2C_409/2022 du 8 septembre 2022 consid. 7.1). Sur tous les points de fait décisifs, l'autorité précédente doit indiquer ce qu'elle retient ou écarte et ce qu'elle considère comme douteux. Il faut que l'on sache quels sont les faits admis et quels sont les faits écartés; les conséquences tirées des points douteux doivent aussi apparaître. L'autorité cantonale doit ainsi dresser un état de fait sur la base duquel elle-même, puis le Tribunal fédéral, vont raisonner en droit (arrêt 2C_409/2022 du 8 septembre 2022 consid. 7.1 et les références). La constatation incomplète des faits pertinents au regard de l'art. 112 al. 1 let. b LTF constitue une violation du droit fédéral au sens de l'art. 95 let. a LTF, question qui est examinée librement par le Tribunal fédéral (ATF 135 II 145 consid. 8.2; arrêt 2C_409/2022 du 8 septembre 2022 consid. 7.1).  
 
2.2. L'état de fait de l'arrêt attaqué contient de nombreux éléments relatifs au chemin d'accès. Il est ainsi précisé (consid. 2 en fait) que le chemin des Manons est accessible seulement par son extrémité ouest, et se termine à l'est par un chemin non goudronné; il ne comporte pas de trottoir et dessert, sur environ 300 mètres, les 26 parcelles qui le bordent; la parcelle n° 970 se situe sur les premiers 40 à 90 mètres de ce tronçon depuis le débouché à l'ouest. Comme le relève ensuite la cour cantonale (consid. 2b en droit), la largeur et les autres caractéristiques du chemin ressortent clairement des plans figurant au dossier, en particulier les plans mis à l'enquête. La référence aux photographies est suffisamment claire puisqu'elle concerne celles qui ont été produites par les recourants dans leur recours cantonal, "notamment au droit du n° 4 face aux nos 5, 7, 11 et 13, avec et sans véhicules engagés sur la chaussée", ainsi que les illustrations figurant dans l'étude I.________ et les photographies (état avant le projet) et images de synthèse (état après réalisation) produites le 7 février 2022 par l'intimée devant la cour cantonale. S'agissant des photographies aériennes extraites du système SITG, elles peuvent comme on le verra ci-dessous être considérées comme des faits notoires (cf. ATF 143 IV 380 consid. 1.1.1; arrêt 1C_547/2020 du 15 septembre 2021 consid. 2.1), et n'ont manifestement apporté à la cour cantonale qu'une simple vue d'ensemble de la situation (infra consid. 3).  
La cour cantonale a ainsi exposé dans le détail les faits retenus, pièces à l'appui, ainsi que les raisons pour lesquelles elle s'est estimée suffisamment renseignée. Pour leur part, les recourants sont à même de contester les faits tels qu'ils ont été retenus, sur la base des mêmes pièces. Les exigences de l'art. 112 LTF sont ainsi respectées. 
 
 
3.  
Invoquant ensuite leur droit d'être entendus, les recourants considèrent que la cour cantonale ne pouvait faire l'économie d'un transport sur place. Ayant estimé devoir consulter les photographies aériennes du SITG, elle aurait ainsi admis que le dossier n'était pas complet. La cour cantonale aurait consulté et utilisé les photographies en question sans en informer préalablement les parties, de sorte qu'il en résulterait une seconde violation du droit d'être entendu. 
 
3.1. Le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., comprend notamment le droit pour la personne intéressée de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s'exprimer sur son résultat lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre. Selon la jurisprudence, le droit d'être entendu n'empêche toutefois pas l'autorité de mettre un terme à l'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient pas l'amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1; 140 I 285 consid. 6.3.1). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, il appartient à la partie recourante de démontrer, par une argumentation circonstanciée, que ce refus d'instruire procède d'arbitraire.  
 
3.2. Le simple fait que la cour cantonale ait consulté le SITG n'implique évidemment pas qu'elle se soit considérée comme insuffisamment renseignée. Comme cela est relevé ci-dessus, le dossier contenait déjà toutes les données nécessaires - en particulier les plans précis mis à l'enquête et des photographies - sur la configuration actuelle des lieux, notamment la largeur du chemin qui constitue comme le relève la cour cantonale le sujet essentiel de la contestation, ainsi que les mesures d'amélioration prévues par le projet. Il ne ressort d'ailleurs pas de l'arrêt attaqué que la consultation du SITG ait apporté un quelconque élément supplémentaire allant au-delà d'une simple vue d'ensemble. Au vu du contenu du dossier, le refus de se rendre sur place n'est donc pas arbitraire.  
 
3.3. Les autorités ne sont pas obligées d'accorder explicitement aux parties un droit d'être entendues sur des faits notoires. Dans ce sens, on entend par faits notoires des informations qui peuvent être vérifiées par des publications accessibles à chacun, à l'instar des informations bénéficiant d'une empreinte officielle facilement accessibles sur Internet et provenant de sources non controversées (cf. ATF 143 IV 380 consid. 1.2 et plus particulièrement, pour les photographies ou cartes extraites d'un site officiel, arrêts 1C_290/2021 du 15 septembre 2022 consid. 7.2 et 1C_582/2018 du 23 décembre 2019 consid. 2.4). Tel est le cas du SITG, qui est un organisme fondé sur un réseau de partenaires publics (dont l'Etat et la Ville de Genève) ayant pour but de coordonner, centraliser et diffuser largement les données relatives au territoire genevois. Au demeurant, comme cela est relevé ci-dessus, la consultation des cartes aériennes n'a manifestement pas apporté d'élément déterminant pour l'issue de la cause. Par ailleurs, les recourants n'ont pas non plus fait valoir devant le Tribunal fédéral que ces prises de vue ne reflétaient pas la réalité. S'agissant de l'absence d'accident sur le chemin des Manons, il s'agissait d'un fait déjà invoqué par le département devant le TAPI, et que les recourants n'avaient pas remis en cause; une confirmation au moyen d'une consultation du SITG n'était dès lors pas nécessaire, s'agissant d'un fait non contesté. Il s'ensuit que le droit d'être entendu des recourants n'a pas été violé.  
 
4.  
Les recourants se plaignent ensuite d'établissement arbitraire des faits. La cour cantonale a retenu que des croisements étaient possibles sur le chemin des Manons et que des zones de croisement allaient être aménagées dans le cadre du projet. Elle aurait ainsi méconnu que le rapport I.________ indique que les normes VSS ne sont pas respectées sur les 80 premiers mètres du tronçon et ne tiendrait pas compte de l'augmentation du trafic induite par le projet. En réplique, les recourants soutiennent que le caractère rectiligne du chemin n'aurait pas été établi par l'instance précédente, et que la problématique du trafic n'aurait pas été abordée. 
 
4.1. Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF (ATF 148 I 160 consid. 3; 142 I 155 consid. 4.4.3). La partie recourante ne peut critiquer les constatations de fait ressortant de la décision attaquée que si celles-ci ont été effectuées en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 148 I 160 consid. 3). Il y a arbitraire (art. 9 Cst.) dans l'établissement des faits ou l'appréciation des preuves si le juge n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, s'il a omis, sans raison sérieuse, de tenir compte d'un moyen important propre à modifier la décision attaquée ou encore si, sur la base des éléments recueillis, il a fait des déductions insoutenables (cf. ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1; 144 II 281 consid. 3.6.2). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, la partie recourante doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées. A défaut, il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui qui est contenu dans l'acte attaqué (ATF 148 I 160 consid. 3; 145 V 188 consid. 2; 137 II 353 consid. 5.1).  
 
4.2. La cour cantonale a d'abord constaté que le chemin des Manons était utilisé de manière stable depuis plusieurs années comme voie d'accès unique pour l'ensemble des habitations qu'il dessert, sans aucun accident pour les années 2019 à 2021. Cela contredisait l'affirmation des recourants selon laquelle aucun croisement n'était possible pour les véhicules. S'agissant du rapport I.________, celui-ci comporte une estimation du trafic supplémentaire (soit 270-330 déplacements motorisés par jour, contre 150-210 actuellement), pour conclure que le nombre de véhicules durant les heures de pointe restera faible (soit 35-40). Selon les mesures effectuées sur place, la largeur du chemin varie entre 3 m et 4,3 m. A l'endroit où la largeur est minimale, soit au niveau des nos 5-7 du chemin, un empiètement n'est pas possible des deux côtés, alors que la largeur minimale selon les normes VSS serait dans ce cas de 4,4 m pour une route d'accès et de 3,4 m pour un chemin d'accès. La largeur à cet endroit n'est donc pas conforme aux normes VSS. Toutefois, le caractère rectiligne du chemin (qui ressort également clairement des plans figurant au dossier) permet aux automobilistes d'anticiper d'éventuels croisements. Ce cas se présente à plusieurs endroits, avec des largeurs toutefois supérieures à 3,4 m, soit conformes pour un chemin d'accès. Le rapport relève qu'il existe déjà de nombreuses possibilités de croisement au niveau des espaces de stationnement et des accès aux fonds privés.  
L'arrêt attaqué retient ainsi que si les normes VSS ne sont pas respectées sur l'entier du chemin, de nombreuses possibilités de croisement existent et seront complétées par les élargissements prévus au niveau de la parcelle concernée. Ces considérations de fait sont conforme au rapport I.________ et les recourants se contentent de dénégations générales, sans se référer à des éléments particuliers du dossier. Il n'y a donc aucun arbitraire dans l'établissement des faits. 
 
5.  
Se plaignant d'arbitraire dans l'application du droit cantonal (en l'occurrence l'art. 14 de la loi cantonale sur la procédure administrative - LPA, RS/GE E 5 10), les recourants estiment que l'instance cantonale aurait dû suspendre la procédure de recours jusqu'à droit connu sur la procédure civile qu'ils ont intentée. La question du droit d'usage de la voie d'accès au sens du droit civil serait déterminante sous l'angle de l'accessibilité selon les art. 19 et 22 LAT
 
5.1. Selon l'art. 14 al. 1 LPA, lorsque le sort d'une procédure administrative dépend de la solution d'une question de nature civile, pénale ou administrative relevant de la compétence d'une autre autorité et faisant l'objet d'une procédure pendante devant ladite autorité, la suspension de la procédure administrative peut, le cas échéant, être prononcée jusqu'à droit connu sur ces questions.  
 
5.2. La cour cantonale rappelle pertinemment que cette disposition est de nature potestative et confère à l'autorité administrative un certain pouvoir d'appréciation lui permettant de choisir la solution la plus opportune. Elle rappelle également l'objet du procès civil, qui tend à interdire l'emploi du chemin des Manons, copropriété des 26 propriétaires de parcelles adjacentes, en raison de l'usage accru par l'un des copropriétaires au détriment des autres. La présente cause porte sur l'existence d'un accès suffisant au sens des art. 19 al. 1 et 22 al. 2 let. b LAT. Cette question doit être examinée au moment de l'octroi de l'autorisation de construire sur la base de critères techniques et juridiques. D'un point de vue juridique, s'il apparaît vraisemblable que la parcelle en cause dispose d'un accès suffisant en vertu du droit privé, l'autorisation de construire peut être délivrée et il appartient aux opposants au projet de démontrer que tel ne serait pas le cas (cf. arrêts 1C_52/2017 du 24 mai 2017 consid. 5.4; 1C_245/2014 du 10 novembre 2014 consid. 4.1; ZEN-RUFFINEN/GUY-ECABERT, Aménagement du territoire, construction, expropriation, 2001, n. 705 p. 326 s.).  
En l'occurrence, le chemin des Manons est constitué en copropriété dont la propriétaire de la parcelle n° 970 dispose d'une part. Son droit d'usage n'est en l'état actuel pas limité, ce qui suffit à admettre l'existence d'un titre juridique suffisant. L'action civile intentée par les recourants tend à modifier la situation juridique actuelle et ne porte dès lors pas sur une question préjudicielle au sens de l'art. 14 al. 1 LPA. Il n'y a dès lors aucun arbitraire sur ce point (cf. pour cette notion ATF 145 I 108 consid. 4.4.1; 144 I 170 consid. 7.3). 
 
6.  
Invoquant enfin sur le fond les art. 19 et 22 LAT, les recourants persistent à considérer que la parcelle n° 970 ne disposerait pas d'un accès suffisant. Le chemin ne respecte pas les normes VSS, et la possibilité de croiser en empiétant sur les fonds privés ne serait pas établie en l'absence de droits réels correspondants. En outre, la procédure civile en cours remettrait en cause l'existence d'un accès pour les 18 logements prévus. 
 
6.1. Conformément à l'art. 22 al. 2 let. b LAT, l'autorisation de construire n'est délivrée que si le terrain est équipé. Tel est le cas selon l'art. 19 al. 1 LAT lorsqu'il est desservi d'une manière adaptée à l'utilisation prévue par des voies d'accès. Une voie d'accès est adaptée à l'utilisation prévue lorsqu'elle est suffisante d'un point de vue technique et juridique pour accueillir tout le trafic de la zone qu'elle dessert (ATF 121 I 65 consid. 3a). La loi n'impose ainsi pas des voies d'accès idéales; il faut et il suffit que, par sa construction et son aménagement, une voie de desserte soit praticable pour le trafic lié à l'utilisation du bien-fonds et n'expose pas ses usagers ni ceux des voies publiques auxquelles elle se raccorderait à des dangers excessifs (cf. ATF 121 I 65 consid. 3a; arrêts 1C_368/2021 du 29 août 2022 consid. 3.1; 1C_88/2019 du 23 septembre 2019 consid. 3.1). Par ailleurs, la sécurité des usagers doit être garantie sur toute sa longueur, la visibilité et les possibilités de croisement doivent être suffisantes et l'accès des services de secours (ambulance, service du feu) et de voirie doit être assuré (ATF 121 I 65 consid. 3a; arrêts 1C_368/2021 du 29 août 2022 consid. 3.1; 1C_56/2019 du 14 octobre 2019 consid. 3.1). Il est à cet égard suffisant que, pour entrer en force, l'autorisation de construire soit assortie de la condition que l'accès routier est garanti (arrêts 1C_341/2020 du 18 février 2022 consid. 3.3.1; 1C_589/2020 du 25 mars 2021 consid. 3.1).  
Les autorités communales et cantonales disposent en ce domaine d'un important pouvoir d'appréciation, que le Tribunal fédéral se doit de respecter (ATF 121 I 65 consid. 3a; arrêt 1C_209/2022 du 25 août 2022 consid. 6.1). 
 
6.2. La cour cantonale n'a pas ignoré que le chemin des Manons n'est pas conforme aux normes VSS en plusieurs endroits. Cela ne suffit toutefois pas pour qualifier l'accès d'insuffisant. Le chemin, d'une largeur variable entre 3 m et 4,3 m, avec des zones plus larges au niveau des accès privés, est en effet déjà utilisé comme desserte pour 26 logements, selon les constatations du rapport I.________. Le même rapport relève que le caractère rectiligne du chemin permet d'anticiper aisément les croisements, et que de nombreuses possibilités existent pour effectuer ces manoeuvres au niveau des places de stationnement et des accès. La création de 18 nouveaux logements est certes susceptible de générer quelques difficultés ponctuelles, mais l'augmentation du trafic, en particulier aux heures de pointe, est qualifiée de faible (35 à 40 déplacements/heure contre 20-35 actuellement) et ne concerne que les 80 premiers mètres du chemin depuis sa jonction avec la Voie-du-Coin. Le projet prévoit en outre la création de deux voies d'évitement supplémentaires, susceptibles d'améliorer la situation.  
Quant au procès civil intenté par les recourants, il ne permet pas de remettre en cause l'appréciation selon laquelle l'accès peut être qualifié de suffisant au moment de l'octroi de l'autorisation de construire. 
L'appréciation des instances précédentes est ainsi conforme au droit fédéral et le grief doit être rejeté. 
 
7.  
Sur le vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté. Les frais judiciaires sont mis à la charge des recourants qui succombent (art. 66 al. 1 LTF), de même que l'indemnité de dépens allouée à l'intimée G.________ SA, qui a procédé devant le Tribunal fédéral et obtient gain de cause avec l'assistance d'un avocat (art. 68 al. 2 LTF). Il n'est pas alloué d'autres dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 fr., sont mis à la charge des recourants. 
 
3.  
Une indemnité de dépens de 4'000 fr. est allouée à l'intimée G.________ SA, à la charge solidaire des recourants. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Département du territoire de la République et canton de Genève et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative. 
 
 
Lausanne, le 7 juillet 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
Le Greffier : Kurz