5A_508/2022 08.12.2022
Avis important:
Les versions anciennes du navigateur Netscape affichent cette page sans éléments graphiques. La page conserve cependant sa fonctionnalité. Si vous utilisez fréquemment cette page, nous vous recommandons l'installation d'un navigateur plus récent.
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
5A_508/2022  
 
 
Arrêt du 8 décembre 2022  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Herrmann, Président, 
von Werdt et Schöbi. 
Greffière : Mme de Poret Bortolaso. 
 
Participants à la procédure 
A.A.________ et B.A.________, 
tous les deux représentés par Me Alain Ribordy, avocat, 
recourants, 
 
contre  
 
Président du Tribunal civil de l'arrondissement de la Veveyse, 
avenue de la Gare 33, 1618 Châtel-St-Denis, 
intimé, 
 
1. C.________, 
représenté par Me Denis Schroeter, avocat, 
2. D.________, 
3. E.________, 
4. Fondation F.________, 
 
Objet 
récusation (action négatoire, art. 641 al. 2 CC et dommages-intérêts), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg, Ie Cour d'appel civil, du 3 juin 2022 
(101 2022 27). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Le 1er octobre 2020, B.A.________ et A.A.________ ont introduit une requête en conciliation auprès du Président du Tribunal civil de l'arrondissement de la Veveyse (ci-après: président du tribunal civil) dans le cadre d'une action négatoire (art. 641 al. 2 CC) et d'une action en dommages-intérêts (art. 41 CO) dirigée à l'encontre de C.________, D.________, H.________, E.________ et la Fondation F.________ (dossier xxx).  
Les actions visent à ce que C.________ soit condamné à retirer tous les panneaux de signalisation indiquant la possibilité d'utiliser la route propriété de B.A.________ comme chemin de randonnée pédestre ou comme itinéraire à raquette et à verser aux demandeurs une somme de 48'276 fr. 70 avec intérêts à 5% l'an dès le 25 juillet 2020. Les autres défendeurs doivent quant à eux être condamnés solidairement à retirer de l'application " F.________ " le secteur de la route précitée pour le réseau pédestre et à raquettes. 
 
A.b. Faisant suite à l'autorisation de procéder délivrée le 17 novembre 2020, les consorts A.________ ont poursuivi la cause par le dépôt d'une demande au fond auprès du Tribunal civil de l'arrondissement de la Veveyse (ci-après: le tribunal civil), en date du 3 mars 2021.  
Le 19 août 2021, C.________ a notamment conclu à la disjonction de l'action négatoire et de l'action en dommages-intérêts. 
Le 7 octobre 2021, B.A.________ et A.A.________ s'y sont opposés. 
Ils ont également formulé une interdiction de postuler à l'encontre du mandataire de C.________, indiquant que celui-là était également mandataire de la commune de U.________ dans une procédure administrative connexe. Estimant que la commune devrait sanctionner l'installation illégale de panneaux de signalisation appartenant à C.________, B.A.________ et A.A.________ relevaient que cette double représentation conduirait à la " violation manifeste de l'interdiction des conflits d'intérêts ". 
 
B.  
Le 20 octobre 2021, B.A.________ et A.A.________ ont requis la récusation du président du tribunal civil G.________. 
 
B.a. Ils exposaient que celui-ci avait présidé le Tribunal pénal de l'arrondissement de la Veveyse (ci-après: le tribunal pénal) dans le contexte d'une procédure pénale impliquant A.A.________ en qualité de prévenu, étant notamment reproché à celui-ci d'avoir procédé à l'enlèvement de plusieurs panneaux indicateurs (art. 105 al. 2 LTF); le 31 août 2021, ce tribunal avait rendu un jugement reconnaissant A.A.________ coupable d'appropriation illégitime mineure au sens des art. 137 ch. 2 al. 2 et 172 ter al. 1 CP au détriment de C.________. Cette condamnation avait nécessité de trancher des questions préjudicielles de droit civil et retenait que le passage piétons sur le chemin traversant les pâturages de la famille A.________ ne causait pas de dommages, en sorte qu'il s'inscrivait dans le cadre de l'art. 699 CC et que les panneaux ne faisaient que rappeler leur droit aux piétons et aux randonneurs. Selon les consorts A.________, ce jugement préjugerait ainsi de la décision à rendre dans la procédure civile, dont l'issue ne serait désormais plus indécise.  
 
B.b. Le 25 octobre 2021, le président du tribunal civil a transmis la demande de récusation à la juge suppléante du tribunal civil, relevant en substance que la demande était tardive et devait être rejetée.  
 
B.c. Le 18 janvier 2022, le tribunal civil a rejeté la demande de récusation, tout en retenant qu'elle avait cependant été formulée à temps.  
 
B.d. Statuant le 3 juin 2022 sur le recours formé par les consorts A.________, la I e Cour d'appel civil du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg l'a rejeté et confirmé la décision de la juridiction précédente par substitution de motifs, en jugeant la demande tardive.  
 
C.  
Le 30 juin 2022, B.A.________ et A.A.________ (ci-après: les recourants) déposent un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre cette décision. Ils concluent à l'annulation de la décision attaquée, à la récusation du président G.________ dans le dossier xxx du tribunal civil, les frais et dépens des procédures cantonale et fédérale étant mis à la charge des intimés solidairement entre eux, subsidiairement à la charge de l'État de Fribourg s'agissant de la procédure devant le Tribunal de céans. 
E.________ et la Fondation F.________ ne se sont pas déterminées sur le recours; la cour cantonale, la présidente du Tribunal civil et D.________ ont indiqué n'avoir aucune observation à formuler; C.________ demande le rejet du recours dans la mesure où il est recevable. 
Les parties n'ont procédé à aucun échange d'écritures complémentaires. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
L'arrêt de la cour cantonale est une décision incidente relative à une demande de récusation; elle peut faire l'objet d'un recours en matière civile (art. 72 al. 1 et art. 92 al. 1 LTF) et doit être immédiatement attaquée conformément à l'art. 92 al. 2 LTF
Les conditions de recevabilité du recours en matière civile sont pour le surplus satisfaites (art. 75 al. 1 et 2; 76 al. 1 let. a et b; 100 al. 1 LTF), également à raison de la valeur litigieuse (art. 74 al. 1 let. b LTF); la demande de récusation s'insère en effet dans le contexte d'une action négatoire, doublée d'une action en dommages-intérêts dont les conclusions sont à elles seules supérieures à 30'000 fr. 
 
2.  
 
2.1. Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 s. LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), sans être lié ni par les motifs de l'autorité précédente, ni par les moyens des parties; il peut donc admettre le recours en se fondant sur d'autres arguments que ceux invoqués par la partie recourante, comme il peut le rejeter en opérant une substitution de motifs (ATF 145 V 215 consid. 1.1; 144 III 462 consid. 3.2.3; 143 V 19 consid. 2.3). Le Tribunal fédéral ne connaît par ailleurs de la violation de droits fondamentaux que si un tel grief a été expressément invoqué et motivé de façon claire et détaillée (" principe d'allégation ", art. 106 al. 2 LTF; ATF 146 IV 114 consid. 2.1; 144 II 313 consid. 5.1; 142 II 369 consid. 2.1).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ceux-ci ont été constatés de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Le recourant qui soutient que les faits ont été établis d'une manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 144 II 246 consid. 6.7; 143 I 310 consid. 2.2 et la référence), doit se conformer au principe d'allégation susmentionné (art. 106 al. 2 LTF; cf. supra consid. 2.1). Une critique des faits qui ne satisfait pas à cette exigence est irrecevable (ATF 145 IV 154 consid. 1.1).  
 
3.  
Les recourants invoquent d'abord la violation de leur droit d'être entendus (art. 29 al. 2 Cst.), reprochant à l'autorité cantonale d'avoir fondé sa décision sur une nouvelle motivation, sans leur donner la possibilité de se déterminer à cet égard. 
 
3.1. Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. confère au justiciable, entre autres prérogatives, le droit de s'exprimer sur tous les éléments pertinents avant qu'une décision touchant sa situation juridique soit rendue. Le droit d'être entendu se rapporte surtout à la constatation des faits. Cette disposition constitutionnelle ne comporte pas, en principe, le droit de se prononcer sur l'appréciation juridique des faits ni, plus généralement, sur l'argumentation juridique à retenir, de sorte que l'autorité n'a pas à soumettre aux parties, pour prise de position, le raisonnement qu'elle envisage de suivre. Ce droit doit être toutefois reconnu lorsqu'elle entend fonder sa décision sur un motif juridique qui n'a jamais été évoqué dans la procédure antérieure et dont aucune des parties ne s'est prévalue, ni ne pouvait supputer la pertinence (ATF 145 IV 99 consid. 3.1; 145 I 167 consid. 4.1 et les références).  
 
3.2. Statuant sur le recours des recourants, la cour cantonale a retenu la tardiveté de la demande de récusation que ceux-ci avaient déposée, en estimant que les motifs de récusation invoqués étaient connus le 27 avril 2021 déjà, à savoir à une date antérieure à celle retenue par le premier juge - soit: le 13 octobre 2021 - et à celle alléguée par le magistrat concerné dans ses déterminations - soit: le 7 octobre 2021 au plus tard, voire une date antérieure en référence aux demandes du recourant tendant à la suspension de la procédure pénale jusqu'à droit connu sur la procédure civile (art. 105 al. 2 LTF; déterminations du 25 octobre 2021, p. 2).  
L'on en retient que le caractère tardif du dépôt de la demande de récusation avait ainsi déjà été discuté devant la première instance, même si celle-ci l'avait cependant écarté au profit d'un manque de prévention du magistrat concerné. Ce motif juridique n'était donc pas inédit, en sorte que les recourants ne sont pas fondés à invoquer leur droit d'être entendus sous cet angle. 
 
4.  
Sur le fond, il s'agit de déterminer avant tout si la demande de récusation déposée par les recourants est tardive, ainsi qu'en a jugé la cour cantonale. 
 
4.1.  
 
4.1.1. L'art. 47 al. 1 CPC dresse une liste de motifs de récusation. Les magistrats et les fonctionnaires judiciaires sont récusables dans les situations décrites aux let. a à e, notamment s'ils ont agi dans la même cause à un autre titre, en particulier comme membre d'une autorité, comme conseil juridique d'une partie, comme expert, comme témoin ou comme médiateur (let. b); à cet égard, l'expression " dans la même cause " doit être examinée de manière formelle; elle implique l'identité des personnes, de l'objet du litige et de la procédure (arrêts 4A_52/2021 du 26 août 2021 consid. 2.1; 5A_489/2017 du 29 novembre 2017 consid. 3.2; cf. ATF 143 IV 69 consid. 3.1, en matière pénale).  
Le magistrat est aussi récusable, selon l'art. 47 al. 1 let. f CPC, s'il est " de toute autre manière " suspect de partialité. Cette disposition doit être appliquée dans le respect des principes de la garantie d'un tribunal indépendant et impartial instituée par les art. 6 par. 1 CEDH et 30 al. 1 Cst., qui ont, de ce point de vue, la même portée (ATF 140 III 221 consid. 4.2; 139 III 433 consid. 2.2 in fine). L'intervention dans une autre cause peut, suivant les circonstances, éveiller le soupçon de partialité et justifier une récusation selon l'art. 47 al. 1 lit. f (ATF 131 I 113 consid. 3.4 et les références; arrêts 4A_327/2017 du 31 août 2017 consid. 5.2; 5A_489/2017 du 29 novembre 2017 consid. 3.2). La jurisprudence a renoncé à résoudre définitivement la question de savoir si le cumul des fonctions contrevient ou non aux art. 30 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH; elle exige cependant que l'issue de la cause ne soit pas prédéterminée, mais qu'elle demeure au contraire indécise quant à la constatation des faits et à la résolution des questions juridiques. Il faut en particulier examiner les circonstances dans lesquelles le juge a précédemment traité l'affaire, prendre en compte les questions successives à trancher et mettre en évidence leur éventuelle analogie ou leur interdépendance, ainsi que l'étendue du pouvoir de décision du juge à leur sujet (ATF 138 I 425 consid. 4.2.1 et les références; arrêts 4A_327/2017 précité ibid.; 5A_600/2014 du 12 décembre 2014 consid. 2.2).  
 
4.1.2. Aux termes de l'art. 49 al. 1 CPC, la partie qui entend obtenir la récusation d'un magistrat ou d'un fonctionnaire judiciaire la demande au tribunal aussitôt qu'elle a eu connaissance du motif de récusation. A défaut, elle est déchue du droit de s'en prévaloir ultérieurement (parmi plusieurs: ATF 141 III 210 consid. 5.2; 139 III 120 consid. 3.2.1). L'art. 49 CPC ne fixe pas de délai pour solliciter la récusation, mais précise qu'elle doit être requise " aussitôt " après la connaissance du motif invoqué, ce qui rejoint les exigences des art. 36 al. 1 LTF et 58 al. 1 CPP (arrêt 4A_172/2019 du 4 juin 2019 consid. 4.1.3 et la référence).  
En matière civile, le Tribunal de céans a laissé ouverte la question de savoir si " aussitôt " pouvait signifier plus de dix jours (arrêt 4A_600/2015 du 1er avril 2016 consid. 6.3); il a en revanche jugé qu'une requête formée 40 jours après la connaissance du motif de récusation était manifestement incompatible avec l'art. 49 al. 1 CPC (arrêt 4A_104/2015 du 20 mai 2015 consid. 6). En matière pénale, les réquisits temporels de l'art. 58 al. 1 CPP sont considérés satisfaits lorsque la demande de récusation est déposée dans les six et sept jours qui suivent la connaissance de la cause de récusation, tandis qu'ils ne le sont pas lorsqu'elle est formée trois mois, deux mois, deux à trois semaines ou vingt jours après que son auteur a pris connaissance du motif de récusation (arrêts 1B_65/2022 du 18 mars 2022 consid. 3.1; 1B_367/2021 du 29 novembre 2021 consid. 2.1 et les arrêts cités). Les circonstances d'espèce ainsi que le stade de la procédure doivent notamment être prises en compte (arrêts 1B_65/2022 précité ibid.; 1B_647/2020 du 20 mai 2021 consid. 2.1); considérer que le droit de demander la récusation est perdu doit être apprécié avec retenue (arrêts 1B_65/2022 précité ibid. et les références; 1B_536/2021 du 28 janvier 2022 consid. 3.1). 
 
4.2. La demande de récusation est ici fondée sur l'art. 47 al. 1 let. f CPC, du fait de l'intervention du magistrat concerné dans la procédure pénale. Elle ne s'appuie pas sur l'art. 47 al. 1 let. a CPC comme paraissent s'y référer les recourants.  
Les deux instances cantonales ont évalué différemment le caractère tardif de la demande. 
 
4.2.1. Le tribunal civil l'a écarté en retenant que les recourants fondaient le motif de récusation sur le jugement pénal du 31 août 2021, notifié le 7 octobre 2021, et en admettant qu'ils en avaient pris connaissance le 13 octobre 2021. En déposant leur requête le 20 octobre suivant, les recourants avaient agi dans les délais.  
 
4.2.2. La cour cantonale a en revanche retenu que la demande était tardive, développant son analyse en deux temps. Si elle a d'abord retenu que la motivation de l'autorité de première instance faisait application de la retenue exigée par la jurisprudence fédérale pour retenir la tardiveté du dépôt d'une demande de récusation et pouvait ainsi être confirmée, elle a ensuite relativisé le raisonnement tenu par le tribunal civil. Contrairement à l'autorité de première instance, la cour cantonale a en effet considéré que le motif de récusation qu'invoquaient les recourants leur était connu antérieurement à la prise de connaissance du jugement pénal. Elle a relevé à cet égard que, dans le contexte de la procédure pénale, le recourant s'était prévalu de l'art. 14 CP, alléguant qu'en procédant à l'enlèvement des panneaux indicateurs, il avait agi sous le couvert d'un acte autorisé par loi. La cour cantonale en a déduit que le recourant n'ignorait pas que, pour trancher cette question, le tribunal pénal, dont il savait depuis le 27 avril 2021 qu'il était présidé par G.________, devrait ainsi se saisir de questions civiles, lesquelles faisaient précisément l'objet de la procédure initiée avec sa mère sous la présidence du même magistrat; la suspension de la procédure pénale avait d'ailleurs été réclamée, dans la perspective des questions civiles qui allaient également y être abordées. La récusation du président du tribunal pénal n'avait alors pourtant pas été réclamée: les recourants avaient attendu le jugement pénal, défavorable au recourant, pour demander la récusation dudit magistrat, en sa qualité de président du tribunal civil. Selon les juges cantonaux, cette demande aurait incontestablement dû intervenir plus tôt, en sorte que le comportement des recourants, contraire à la bonne foi et constitutif d'un abus de droit, n'était pas protégé.  
 
4.3. Les recourants soulignent que la suspension de la procédure pénale avait été rejetée en raison du fait que la procédure civile n'était pas suffisamment avancée. Il était certes possible, mais pas certain, que le lien qu'effectuait le recourant entre les deux procédures allait être admis par le tribunal pénal et que celui-ci allait se prononcer sur la licéité des panneaux de randonnées. En reprochant aux recourants de ne pas avoir requis la récusation du magistrat à ce stade, la décision revenait à les inciter à déposer une demande de récusation à titre préventif, avec pour conséquence qu'il leur aurait été reproché un comportement dilatoire, abusif et procédurier. Les motifs de récusation énoncés dans la demande du 20 octobre 2021 étaient clairement fondés sur un considérant du jugement pénal rendu le 31 août 2021 par le magistrat dont ils souhaitaient la récusation.  
C.________ rappelle qu'il suffit qu'un doute existe sur l'impartialité du juge pour requérir la récusation. Dans la mesure où les recourants connaissaient l'influence réciproque des deux procédures, ils ne pouvaient attendre l'issue de l'une - ici, la procédure pénale - pour demander la récusation du magistrat dans l'autre - en l'occurrence, la procédure civile. C.________ soutient que les recourants auraient ainsi pris le risque de laisser juger le magistrat dans la cause pénale alors qu'ils devaient agir de manière préventive s'ils estimaient qu'une décision pénale négative leur porterait préjudice de la procédure civile. 
 
4.4.  
 
4.4.1. Les critiques des recourants sont fondées. Ils ne contestent certes pas qu'ils savaient, dès le 27 avril 2021, que G.________ présiderait la procédure pénale dans le contexte de laquelle le recourant A.A.________ était prévenu. A ce stade, ils venaient toutefois de déposer leur demande au fond auprès du tribunal civil, à savoir le 3 mars 2021, après avoir obtenu l'autorisation de procéder le 17 novembre 2020 (let. A.b supra). Si des liens pouvaient à l'évidence être reconnus entre les deux procédures, il ne ressort pas de l'état de fait que le magistrat concerné aurait procédé à un/des acte/s permettant de retenir son éventuelle prévention, respectivement son défaut d'impartialité à juger l'une des causes du fait de son intervention dans l'autre. Fin avril 2021, seul pouvait en réalité être soulevé le risque que cette prévention pût se révéler ultérieurement. Prétendre des recourants qu'ils introduisent leur demande de récusation dès la connaissance des doubles qualités du juge G.________ constitue ainsi une exigence prématurée.  
 
4.4.2. En admettant que la prise de connaissance du jugement pénal fût le révélateur du motif de récusation - ce qui n'est pas contesté par les parties -, il convient alors de déterminer si la demande de récusation a été déposée dans les délais. Cette conclusion du tribunal civil, implicitement confirmée par l'arrêt attaqué dans la première partie de son raisonnement (consid. 4.2.2 supra), est remise en cause par C.________ dans ses déterminations devant la Cour de céans.  
Pour l'essentiel, C.________ tente de revenir sur la date de prise de connaissance de la décision pénale du 31 août 2021, notifiée aux recourants le 7 octobre suivant. Les premiers juges ont arrêté cette date au 13 octobre 2021, telle que l'alléguaient les recourants, estimant qu'ils n'étaient pas en mesure de contester cette affirmation; dite date a été reprise en seconde instance cantonale. Or l'on ne peut considérer que cet élément factuel aurait été établi arbitrairement et les remarques de C.________, certes pertinentes (notamment quant au délai de près d'une semaine entre la notification de la décision et la prise de connaissance de son contenu), ne suffisent pas à retenir une erreur manifeste sur ce point. Il faut en conséquence admettre qu'en demandant la récusation du magistrat concerné le 20 octobre suivant, les recourants ont agi dans les délais; ainsi que l'a retenu la cour cantonale, cette conclusion fait application de la retenue jurisprudentielle sus-exposée (consid. 4.1.2 supra).  
 
5.  
Il s'agit dès lors de déterminer le bien-fondé de la demande de récusation. 
 
5.1. Cette question n'a pas été examinée par la cour cantonale, vu le rejet de dite demande pour cause de tardiveté.  
L'autorité de première instance l'a en revanche analysée en concluant que le tribunal pénal n'avait fait que considérer de manière préjudicielle l'éventualité d'un droit du prévenu d'arracher et de s'approprier des panneaux indicateurs qui ne se trouvaient pas sur sa propriété. Le tribunal pénal n'avait pas examiné de façon exhaustive la légitimité du passage piétonnier, ni l'éventuel dommage à la propriété des recourants. La question de savoir si l'art. 699 CC constituait une base légale suffisante pour permettre l'utilisation de la route de la requérante comme chemin de randonnée devrait être examinée dans le contexte de l'action négatoire; les dommages allégués dans l'action civile concernaient au demeurant des dommages causés par le déneigement de la route et non par le passage des piétons sur celle-ci (art. 105 al. 2 LTF; décision de première instance, p. 7). 
 
5.2. L'on relèvera avant tout que la question du dommage allégué n'est pas nécessairement déterminante dans l'action négatoire, seule l'est en effet sous cet angle celle du trouble illicite à la propriété. La réserve du tribunal civil quant aux dommages allégués n'est donc pas pertinente.  
Dans leur action civile, les recourants visent à obtenir l'enlèvement des panneaux indicateurs dans la mesure où ils estiment que ceux-ci participent à l'atteinte à la propriété qu'ils allèguent. Dans le contexte de cette action négatoire, se pose ainsi la question de savoir si les passages de randonneurs qu'induisent ces panneaux, et dont les intéressés se plaignent, sont autorisés - et donc licites -, notamment en référence à l'art. 699 CC. Or ainsi que le relèvent les recourants, le juge G.________, appelé à statuer dans la cause pénale impliquant A.A.________, a expressément considéré que les passages contestés ne causaient pas de dommages aux pâturages, qu'ils s'inscrivaient dans le cadre de l'art. 699 CC et que les panneaux que l'intéressé s'était appropriés ne faisaient que rappeler leur droit au piétons et randonneurs. Même si elle n'a pas expressément été formulée, la conclusion qui peut se déduire de ce raisonnement est la licéité apparente des passages piétonniers sur les chemins traversant les pâturages appartenant à la recourante. Comme le relève à juste titre C.________, suivant en cela la motivation des premiers juges, ce raisonnement a certes été tenu à titre préjudiciel et est fondé sur une motivation très sommaire. Il n'en demeure pas moins qu'il se prononce partiellement sur des griefs qui sont soulevés dans l'action civile introduite par les recourants. Ainsi que le soutiennent ceux-ci à juste titre, c'est précisément ici qu'une éventuelle prévention du juge G.________ dans la cause civile ne peut être écartée, à tout le moins sous l'angle de l'art. 699 CC, disposition dont les intéressés excluent qu'elle permette le passage qu'ils contestent. 
 
6.  
Il s'ensuit que c'est à tort que la demande de récusation formulée par les recourants a été rejetée; leur recours doit en conséquence être admis et l'arrêt cantonal annulé. E.________ et la Fondation F.________ ne se sont pas prononcées sur la demande de récusation et l'on ne peut affirmer que la décision sur la récusation a été rendue à leur détriment; les frais et dépens ne peuvent ainsi être mis à leur charge (arrêt 4A_425/2012 du 26 février 2013 consid. 4.2 non publié in ATF 139 III 120; BOVEY, in Commentaire de la LTF, 3e éd. 2022, n. 39; cf. également arrêt 5A_837/2021 du 12 avril 2022 consid. 4). C.________ s'est en revanche déterminé sur le recours; en s'identifiant à la décision entreprise, elle doit en assumer le risque et supporter les frais judiciaires et les dépens (art. 66 al. 1 et 68 al. 1 et 2 LTF). Il appartiendra à l'autorité cantonale de statuer à nouveau sur les frais et dépens de la procédure cantonale (art. 67 et 68 al. 5 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est admis, l'arrêt cantonal annulé et réformé en ce sens que la demande de récusation formée par les recourants est admise. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de C.________. 
 
3.  
Une indemnité de 2'500 fr., à verser aux recourants à titre de dépens, est mise à la charge de C.________. 
 
4.  
La cause est renvoyée à la cour cantonale pour qu'elle statue à nouveau sur les frais et dépens de la procédure antérieure. 
 
5.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à C.________, à D.________, à E.________, à la Fondation F.________ et au Tribunal cantonal de l'État de Fribourg, I e Cour d'appel civil.  
 
 
Lausanne, le 8 décembre 2022 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Herrmann 
 
La Greffière : de Poret Bortolaso