2C_1051/2022 14.12.2023
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_1051/2022  
 
 
Arrêt du 14 décembre 2023  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mmes et MM. les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz, 
Hänni, Hartmann et Ryter. 
Greffier : M. de Chambrier. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Me Manon Freitag, avocate, 
recourante, 
 
contre  
 
1. Service de l'Economie de la République et canton de Neuchâtel, 
av. de la Gare 2, 2000 Neuchâtel, 
2. Département de l'économie, de la sécurité et de la culture de la République et canton de Neuchâtel, Service juridique, 
Château, rue de la Collégiale 12, 2000 Neuchâtel. 
 
Objet 
Allocation d'aide extraordinaire destinée aux entreprises touchées par les mesures contre l'épidémie du Covid-19, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel, Cour de droit 
public, du 18 novembre 2022 (CDP.2021.361). 
 
 
Faits :  
 
A.  
A.________ est titulaire de l'entreprise individuelle B.________. 
Dans le cadre des mesures de soutien à l'économie mises en place dans le contexte de l'épidémie de coronavirus (COVID-19), elle a sollicité du Service de l'économie de la République et canton de Neuchâtel (ci-après: le Service cantonal) l'octroi d'une aide financière à fonds perdu pour les entreprises du secteur de l'hôtellerie-restauration. 
Par décision du 23 décembre 2020, le Service cantonal lui a communiqué qu'elle n'en remplissait pas les conditions dès lors qu'elle faisait l'objet de poursuites pour des charges sociales et/ou arriérés envers les collectivités publiques antérieurs au 28 février 2020. Ce prononcé n'a pas été contesté. 
 
B.  
En date du 21 janvier 2021, le Service cantonal a informé A.________ d'une adaptation du dispositif neuchâtelois avec des conditions d'éligibilité différentes pour l'obtention de soutiens aux cas de rigueur. L'intéressée a dès lors déposé une nouvelle demande. 
Par courrier du 18 mars 2021, le Service cantonal a informé A.________ qu'après instruction du dossier, elle avait droit à une aide financière pour son entreprise et lui a transmis une convention à retourner dûment signée. Cette convention exposait que l'intéressée avait droit à une aide financière de 21'448.79 francs et que ce montant était porté en déduction de ses dettes d'impôt ascendant à 55'182.85 francs, par compensation, de sorte que le solde de l'aide à fonds perdu à lui verser était nul. 
Par lettre du 8 avril 2021 adressée au Service cantonal, A.________ a contesté la compensation de sa créance et a demandé le prononcé d'une décision. 
Par décision du 27 avril 2021, le Service cantonal a confirmé que l'entreprise de l'intéressée était éligible à l'aide en cas de rigueur pour un montant calculé à hauteur de 21'448.79 francs et que ce montant était entièrement compensé conformément aux calculs exposés dans la convention. 
Par décision du 11 octobre 2021, le Département de l'économie et de l'action sociale de la République et canton de Neuchâtel (ci-après: le Département cantonal) a rejeté le recours formé par A.________ à l'encontre de la décision du 27 avril 2021 du Service cantonal. 
Par arrêt du 18 novembre 2022, le Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel (ci-après: le Tribunal cantonal) a rejeté le recours interjeté par l'intéressée contre la décision du 11 octobre 2021 du Département cantonal. 
 
C.  
A.________ dépose un recours en matière de droit public devant le Tribunal fédéral. Elle demande la réforme de l'arrêt du 18 novembre 2022 du Tribunal cantonal, en ce sens que l'aide financière pour cas de rigueur d'un montant de 21'448.79 francs qui lui a été allouée ne peut pas faire l'objet d'une compensation par l'Etat. Subsidiairement, elle requiert l'annulation de l'arrêt attaqué. 
Le Tribunal cantonal et le Département cantonal se réfèrent aux motifs de l'arrêt attaqué et concluent au rejet du recours. Le Service cantonal dépose des déterminations et conclut au rejet du recours. Le Secrétariat d'Etat à l'économie formule des observations. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 148 I 160 consid. 1). 
 
1.1. L'art. 83 let. k LTF dispose que le recours en matière de droit public est irrecevable contre les décisions en matière de subventions auxquelles la législation ne donne pas droit. La jurisprudence a précisé que l'exception de l'art. 83 let. k LTF ne concernait pas les décisions qui ne portaient pas sur l'octroi initial d'une subvention, mais sur son remboursement. En pareil cas, le recours en matière de droit public est recevable, parce que le bénéficiaire est atteint dans sa situation juridique, même s'il n'existe, le cas échéant, aucun droit à la subvention en cause (arrêts 2C_996/2022 du 23 mai 2023 consid. 1.2; 2C_713/2022 du 13 février 2023 consid. 1.2; 2C_644/2020 du 24 août 2021 consid. 1.1; 2C_201/2018 du 15 octobre 2018 consid. 1.1 et les références).  
 
1.2. En l'occurrence, par convention transmise à la recourante le 18 mars 2021, le Service cantonal a alloué à celle-ci une aide financière à fonds perdu d'un montant de 21'448.79 francs, sur la base du droit cantonal, en particulier de l'arrêté du Conseil d'Etat neuchâtelois du 15 janvier 2021 portant sur une aide financière extraordinaire pour les cas de rigueur octroyée aux entreprises particulièrement impactées par les effets des mesures. Conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral, une telle aide financière est une subvention au sens de l'art. 83 let. k LTF (cf. arrêts 2C_401/2022 du 2 novembre 2022 consid. 1.2; 2C_8/2022 du 28 septembre 2022 consid. 1.2). Cependant, l'objet du litige ne porte pas sur le principe de l'octroi de cette subvention ou sur son montant, mais sur la possibilité pour le Service cantonal de compenser le montant octroyé avec des arriérés d'impôts de la recourante. Partant, la problématique soumise au Tribunal fédéral ne porte pas sur l'octroi d'une subvention, de sorte que l'exception de l'art. 83 let. k LTF ne saurait s'appliquer en l'espèce. La voie du recours en matière de droit public est donc en principe ouverte.  
 
1.3. Pour le reste, le recours est dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) rendue par une autorité cantonale supérieure de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF). Il a en outre été déposé en temps utile (art. 46 al. 1 let. c et 100 al. 1 LTF) et dans les formes prescrites par la loi (art. 42 LTF), par la destinataire de l'arrêt attaqué qui a qualité pour recourir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF.  
 
2.  
 
2.1. Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral examine librement la violation du droit fédéral (art. 95 let. a et 106 al. 1 LTF), alors qu'il ne revoit le droit cantonal, sous réserve d'exceptions non réalisées en l'espèce (cf. art. 95 LTF), que sous l'angle de la violation des droits fondamentaux - en particulier l'arbitraire. Les griefs de violation de ces droits sont soumis à des exigences de motivation accrue (cf. art. 106 al. 2 LTF). La partie recourante doit indiquer les principes constitutionnels qui n'auraient pas été respectés et expliquer de manière claire et précise en quoi ces principes auraient été violés (ATF 146 I 62 consid. 3; 142 II 369 consid. 2.1; 141 I 36 consid. 1.3).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF (ATF 142 I 155 consid. 4.4.3). En l'espèce, à l'appui de ses écritures, la recourante se réfère à l'état de fait de l'arrêt attaqué, sans prétendre que celui-ci aurait été établi de manière arbitraire.  
En conséquence, le Tribunal fédéral statuera exclusivement sur la base des faits constatés par le Tribunal cantonal. 
 
3.  
La recourante invoque une violation de l'art. 12 de la loi fédérale du 25 septembre 2020 sur les bases légales des ordonnances du Conseil fédéral visant à surmonter l'épidémie de COVID-19 (Loi COVID-19; RS 818.102). Elle estime que l'application du droit cantonal faite par l'instance précédente serait contraire à cette disposition. 
 
3.1. L'art. 12 al. 1 Loi COVID-19, dans sa teneur en vigueur lorsque le Service cantonal a rendu sa décision le 27 avril 2021, prévoit: "A la demande d'un ou de plusieurs cantons, la Confédération peut soutenir les mesures de ces cantons pour les cas de rigueur destinées aux entreprises individuelles, aux sociétés de personnes ou aux personnes morales ayant leur siège en Suisse (entreprises) qui ont été créées ou ont commencé leur activité commerciale avant le 1er octobre 2020, avaient leur siège dans le canton le 1er octobre 2020, sont particulièrement touchées par les conséquences de l'épidémie de COVID-19 en raison de la nature même de leur activité économique et constituent un cas de rigueur, en particulier les entreprises actives dans la chaîne de création de valeur du secteur événementiel, les forains, les prestataires du secteur des voyages, de la restauration et de l'hôtellerie ainsi que les entreprises touristiques". L'art. 12 al. 1 quater let. a Loi COVID-19 ajoute que la Confédération verse aux cantons une participation financière à hauteur de 70% des mesures pour les cas de rigueur visées à l'alinéa 1er de la loi qu'ils destinent aux entreprises réalisant un chiffre d'affaires annuel de 5 millions de francs au plus.  
 
3.2. L'art. 19 Loi COVID-19 charge le Conseil fédéral de régler l'exécution des mesures prévues par cette loi. Sur la base de cette disposition, le Conseil fédéral a arrêté, le 25 novembre 2020, l'ordonnance concernant les mesures pour les cas de rigueur destinées aux entreprises en lien avec l'épidémie de COVID-19 (Ordonnance COVID-19 cas de rigueur 2020; OMCR 20; RS 951.262). Cette ordonnance fixe les conditions auxquelles doivent répondre les mesures pour les cas de rigueur destinées aux entreprises prises par les cantons, pour que la Confédération participe aux coûts et aux pertes que ces mesures occasionnent à un canton (cf. art. 1er de l'ordonnance). Le droit fédéral règle donc uniquement les conditions dans lesquelles la Confédération participe financièrement aux mesures cantonales pour les cas de rigueur pour les années 2020 et 2021 (arrêt 2C_8/2022 du 28 septembre 2022 consid. 1.3.4).  
 
3.3. En revanche, ni la Loi COVID-19 ni l'OMCR 20 n'obligent les cantons à accorder des aides financières pour les cas de rigueur sous certaines conditions. Comme le précise le message du Conseil fédéral du 17 février 2021 relatif à une modification de la Loi COVID-19 (FF 2021 285, ch. 4), les cantons définissent eux-mêmes leurs programmes pour les cas de rigueur, en particulier les conditions d'éligibilité et les prestations (cf. également art. 12 et 13 OMCR 20). Selon les explications de l'Administration fédérale des finances, l'objectif principal de l'ordonnance est de définir les conditions dans lesquelles la Confédération participe aux mesures cantonales dans les cas de rigueur. En modifiant la Loi COVID-19, le législateur a introduit une nouvelle structure de financement à l'art. 12 de la loi COVID-19: la Confédération prend en charge le 70% des coûts des mesures pour cas de rigueur destinées aux entreprises dont le chiffre d'affaires annuel n'excède pas 5 millions de francs. Pour ces entreprises, les cantons décident librement s'il faut prendre des mesures pour les cas de rigueur et, le cas échéant, sous quelle forme; la participation financière de la Confédération est simplement conditionnée au respect de certaines exigences minimales. Cette liberté que les cantons ont souhaitée explicitement leur permet d'adapter lesdites mesures aux particularités cantonales (cf. commentaires de l'Administration fédérale des finances du 31 mars 2021 de l'ordonnance concernant les mesures pour les cas de rigueur destinées aux entreprises en lien avec l'épidémie de COVID-19, p. 2).  
 
3.4. Sur le plan cantonal, à Neuchâtel, l'aide financière aux entreprises a fait l'objet de plusieurs mesures. L'arrêté du Conseil d'Etat du 11 décembre 2020 portant sur l'octroi d'une aide financière spécifique aux établissements de l'hôtellerie-restauration dans le cadre des impacts économiques liés à l'épidémie de COVID-19 et l'arrêté d'exécution du Département cantonal portant sur la procédure de mise en oeuvre et les conditions d'octroi dans le cadre de l'aide COVID-19 spécifique pour l'hôtellerie-restauration du 15 décembre 2020 ont défini les conditions et la mise en oeuvre d'un soutien extraordinaire pour les entreprises du domaine spécifique de l'hôtellerie-restauration. En parallèle, le Conseil d'Etat a adopté un arrêté du 11 décembre 2020 portant sur une aide financière extraordinaire pour les cas de rigueur octroyée aux entreprises particulièrement impactées par les effets des mesures. Cet arrêté se fondait notamment sur la loi cantonale du 29 septembre 2015 sur l'appui au développement économique (LADE/NE) et sur son règlement d'exécution du 21 décembre 2016 (RELADE/NE), ainsi que sur la loi cantonale du 1er février 1999 sur les subventions (LSub/NE) et sur son règlement d'application du 5 février 2003 (RELSub/NE). Il prévoyait que, afin de prévenir et limiter les conséquences économiques liées à la situation induite par l'épidémie de COVID-19, et conformément à la possibilité inscrite à l'art. 12 Loi COVID-19, un soutien extraordinaire pour les cas de rigueur était octroyé aux entreprises particulièrement affectées par l'épidémie de par la nature même de leur activité économique (art.1). Il chargeait le Département cantonal de déterminer les conditions d'octroi et de remboursement (art. 5 al. 1, 1ère phrase).  
Cet arrêté a été abrogé par un nouvel arrêté portant le même titre, du 15 janvier 2021. Tout en reprenant très largement le texte du précédent arrêté et en se fondant sur les mêmes textes légaux, ce nouveau texte élargit les conditions d'octroi, en introduisant une disposition, à savoir l'art. 6 al. 2, précisant que, en dérogation à l'art. 7 RELADE/NE, une aide financière peut être octroyée même si le bénéficiaire a des dettes auprès d'organismes publics. Dans ce cas, l'art. 16a RELSub/NE s'applique. Selon l'art. 7 RELADE/NE, aucune aide n'est versée si le porteur du projet, ou le propriétaire de celui-ci a des fonctions dirigeantes, a des dettes auprès d'organismes publics (al. 3). 
Selon l'art. 16a RELSub/NE "Compensation des aides financières", avant tout versement d'une aide financière, l'autorité compétente informe le service financier de l'octroi de la subvention (al. 1); le service financier compense l'aide financière avec les dettes échues dues à l'Etat et informe l'autorité compétente du montant compensé (al. 2). 
 
3.5. En l'espèce, la recourante estime que le Tribunal cantonal a retenu à tort que le Service cantonal pouvait compenser l'aide financière pour cas de rigueur qui lui a été allouée avec ses arriérés d'impôts sur la base de l'art. 16a RELSub/NE. Elle considère que la compensation opérée par le Service cantonal revient à détourner une subvention fédérale dont l'objectif est d'éviter la faillite d'une entreprise menacée par l'inactivité qui lui a été imposée par l'Etat. On ne saurait suivre ce raisonnement. Comme mentionné ci-dessus, les cantons étaient libres de mettre en place des subventions pour les entreprises dont le chiffre d'affaires annuel n'excédait pas 5 millions de francs, comme la recourante. Ils n'en avaient pas l'obligation. D'ailleurs, dans un premier temps, la recourante n'était pas éligible à une telle aide, car débitrice de l'Etat. Suite à la modification de l'arrêté cantonal précité, elle a pu bénéficier d'une aide financière aux conditions imposées par le droit cantonal. Quoi qu'elle en dise, elle bénéficie bien d'une aide financière, même en cas de compensation. En effet, elle se trouve enrichie du montant de l'allocation financière qui lui a été octroyée, ses dettes fiscales ayant diminué d'autant, la recourante ne prétendant au demeurant pas que les créances fiscales de l'Etat neuchâtelois seraient contestées ou infondées. Sa situation financière est donc plus saine, ce qui l'éloigne d'une possible faillite et ce qui correspond au but poursuivi par l'art. 12 Loi COVID-19. Le droit fédéral n'imposant pas aux cantons une forme particulière pour l'allocation de l'aide financière, on ne perçoit pas en quoi l'arrêt attaqué serait contraire à l'art. 12 Loi COVID-19. Dans ses déterminations, le Secrétariat d'Etat à l'économie a d'ailleurs confirmé que la décision attaquée était conforme au droit fédéral.  
Ce grief, mal fondé, doit être écarté. 
 
4.  
La recourante invoque, de manière peu claire, une violation du principe de la primauté du droit fédéral (art. 49 Cst.), en lien avec l'art. 93 LP, ainsi qu'avec l'art. 5a OMCR 20. Elle estime que l'application de l'art. 16a RELSub/NE aux aides financières pour cas de rigueur serait contraire à ces dispositions. 
 
4.1. Selon l'art. 49 al. 1 Cst., le droit fédéral prime le droit cantonal qui lui est contraire. Ce principe constitutionnel de la primauté du droit fédéral fait obstacle à l'adoption ou à l'application de règles cantonales qui éludent des prescriptions de droit fédéral ou qui en contredisent le sens ou l'esprit, notamment par leur but ou par les moyens qu'elles mettent en oeuvre, ou qui empiètent sur des matières que le législateur fédéral a réglementées de façon exhaustive (ATF 146 II 309 consid. 4.1 et les références). Cependant, quand bien même la législation fédérale est considérée comme exhaustive dans un domaine donné, une loi cantonale peut subsister dans le même domaine, en particulier si elle poursuit un autre but que celui recherché par le droit fédéral. Le principe de la force dérogatoire n'est pas non plus violé dans la mesure où la loi cantonale vient renforcer l'efficacité de la réglementation fédérale (ATF 133 I 110 consid. 4.1). En outre, même si, en raison du caractère exhaustif de la législation fédérale, le canton ne peut plus légiférer dans une matière, il n'est pas toujours privé de toute possibilité d'action. Ce n'est que lorsque la législation fédérale exclut toute réglementation dans un domaine particulier que le canton perd toute compétence pour adopter des dispositions complétives, quand bien même celles-ci ne contrediraient pas le droit fédéral ou seraient même en accord avec celui-ci (ATF 143 I 403 consid. 7.1; 143 I 109 consid. 4.2.2 et les références).  
 
4.2. En l'occurrence, la recourante estime que l'arrêt attaqué applique le droit cantonal de manière contraire à l'art. 93 LP, qui garantit au débiteur et à sa famille la possibilité de mener une existence décente et qui limite en conséquence la saisie de certains biens. D'après elle, cette disposition s'appliquerait par analogie en l'espèce et empêcherait toute compensation de l'aide financière sur la base de l'art. 16a RELSub/NE, lorsque celle-ci serait susceptible de mettre en péril une entreprise en la privant de liquidités pour faire face à ses charges courantes. Force est de constater que l'on ne saurait suivre le raisonnement de la recourante. Tout d'abord, on ne voit pas en quoi l'art. 93 LP serait applicable par analogie en l'espèce, dans la mesure où il s'applique aux débiteurs faisant l'objet de poursuites auxquels on saisit des biens et non lorsque, comme en l'espèce, on alloue des fonds à un tiers et que l'on procède à une compensation. En effet, comme précédemment mentionné, la recourante se trouve enrichie après que l'autorité a procédé à une compensation du montant de l'aide financière, ce qui l'éloigne d'une potentielle faillite. Or, tel n'est pas le cas lors d'une saisie au sens de l'art. 93 LP. Partant, on ne perçoit pas en quoi l'arrêt attaqué serait contraire à l'art. 93 LP et violerait le principe de primauté du droit fédéral.  
 
4.3. La recourante estime encore que l'art. 5a OMCR 20, dans sa version en vigueur en janvier 2021, qui prévoit que, pour bénéficier d'une aide financière, l'entreprise doit avoir confirmé au canton que le recul de son chiffre d'affaires entraîne d'importants coûts fixes non couverts, interdirait d'utiliser le mécanisme de compensation prévu par l'art. 16a RELSub/NE. D'après elle, il faut déduire de l'art. 5a OMCR 20 que les aides financières versées doivent servir exclusivement à payer ses coûts fixes non couverts. Or, comme l'a relevé le Secrétariat d'Etat à l'économie dans ses déterminations, l'art. 5a OMCR 20 ne fait que fixer une condition d'octroi de l'aide par la Confédération au canton et ne régit pas l'affectation qui est faite de cette aide. En outre, conformément à l'art. 5b OMCR 20, l'art. 5a OMCR 20 n'est pas applicable aux entreprises qui ont été obligées de fermer en raison des mesures sanitaires, comme c'est le cas de la recourante. Ainsi, l'art. 5a OMCR 20 n'étant pas applicable à la situation de la recourante, on ne saurait retenir que l'arrêt attaqué est contraire à cette disposition.  
 
4.4. Au vu de ce qui précède, le grief de violation du principe de la primauté du droit fédéral en lien avec l'art. 93 LP et l'art. 5a OMCR 20 doit être rejeté.  
 
5.  
Invoquant l'art. 9 Cst., la recourante se plaint de la violation de l'interdiction de l'arbitraire dans l'application du droit cantonal. Elle fait également valoir en lien avec l'interdiction de l'arbitraire une violation du droit à l'égalité de traitement garanti par l'art. 8 Cst. 
Ce dernier grief ne revêt pas de portée propre par rapport au grief de violation de l'interdiction de l'arbitraire. En effet, l'inégalité de traitement constitue une forme particulière d'arbitraire, consistant à traiter de manière inégale ce qui devrait l'être de manière semblable ou inversement (ATF 129 I 346 consid. 6; arrêts 2C_330/2013 du 10 septembre 2013 consid. 4.1; 2C_200/2011 du 14 novembre 2011 consid. 5.1). Les reproches formulés par la recourante dans ces griefs seront donc traités ensemble sans distinction (arrêt 2C_1042/2022 du 22 juin 2023 consid. 3). 
 
5.1. Appelé à revoir l'interprétation d'une norme cantonale sous l'angle restreint de l'arbitraire, le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité cantonale de dernière instance que si celle-ci apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain. En revanche, si l'application de la loi défendue par l'autorité cantonale ne s'avère pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la législation en cause, cette interprétation sera confirmée, même si une autre solution - éventuellement plus judicieuse - paraît possible (ATF 145 I 108 consid. 4.4.1). En outre, pour qu'une décision soit annulée au titre de l'arbitraire, il ne suffit pas qu'elle se fonde sur une motivation insoutenable; encore faut-il qu'elle apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 144 I 113 consid. 7.1). Le grief d'application arbitraire du droit cantonal est soumis aux exigences de motivation qualifiées définies à l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 142 II 369 consid. 2.1).  
 
5.2. En l'occurrence, la recourante estime que le Tribunal cantonal ne pouvait pas appliquer l'art. 16a RELSub/NE en l'espèce. Cette disposition s'appliquerait, selon elle, exclusivement aux subventions et pas aux aides financières pour cas de rigueur. Dans l'arrêt attaqué, le Tribunal cantonal a retenu, en se référant à l'art. 2 LSub/NE, que cette loi et son règlement s'appliquaient à toutes les subventions versées en vertu du droit cantonal et donc également aux aides financières pour cas de rigueur prévues par l'arrêté du Conseil d'Etat du 15 janvier 2021. Il a encore relevé que, même si le champ d'application de la LSub/NE ne s'étendait pas auxdites aides financières, l'art. 16a RELSub/NE resterait applicable, en raison du renvoi exprès à cette disposition par l'art. 6 al. 2 de l'arrêté du Conseil d'Etat du 15 janvier 2021. Le raisonnement de la recourante pour démontrer l'arbitraire repose exclusivement sur la prémisse que ces dispositions cantonales seraient contraires au droit fédéral. Or, tel n'est pas le cas (cf. supra consid. 4). Partant, on ne perçoit pas en quoi l'arrêt cantonal serait arbitraire en tant qu'il retient que l'art. 16a RELSub/NE est applicable en l'espèce.  
Ce grief doit dès lors être rejeté. 
 
5.3. Par ailleurs, la recourante fait valoir que le régime d'aides financières mis en place dans le canton de Neuchâtel serait moins favorable que dans d'autres cantons et créerait ainsi une inégalité de traitement entre entreprises sises dans des cantons distincts. En particulier, le canton de Neuchâtel a prévu certaines aides financières sous forme de prêts, obligeant ainsi le bénéficiaires à les rembourser, alors que d'autres cantons auraient uniquement mis en place des aides à fonds perdu, plus avantageuses pour le bénéficiaire. Dans l'arrêt attaqué, le Tribunal cantonal a constaté que l'aide financière octroyée à la recourante était à fonds perdu. En conséquence, on ne voit pas en quoi le fait que le droit neuchâtelois prévoit aussi des aides sous forme de prêt serait constitutif d'une violation du principe de l'égalité de traitement en ce qui concerne la recourante.  
 
5.4. En outre, selon la recourante, le système de compensation ressortant du droit neuchâtelois n'existerait pas dans d'autres cantons et ne serait pas appliqué à toutes les entreprises, ce qui serait également constitutif d'une violation du principe de l'égalité de traitement. Force est de constater qu'il ressort de l'arrêt attaqué, d'une manière qui lie le Tribunal fédéral (art. 105 al. 2 LTF), que la recourante n'a pas établi qu'il existerait une telle différence de traitement entre entreprises.  
Au surplus, le principe de l'égalité de traitement ne peut se rapporter qu'au domaine de compétence d'une seule et même collectivité publique (ATF 138 I 321 consid. 5.3.6; 133 I 249 consid. 3.4; 125 I 173 consid. 6d). 
Cette critique doit partant également être écartée. 
 
 
6.  
Il découle de ce qui précède que le recours doit être rejeté. 
Les frais judiciaires sont mis à la charge de la recourante qui succombe (cf. art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'500 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué à la mandataire de la recourante, au Service de l'Economie, au Département de l'économie, de la sécurité et de la culture et au Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel, Cour de droit public, ainsi qu'au Secrétariat d'Etat à l'économie. 
 
 
Lausanne, le 14 décembre 2023 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
Le Greffier : A. de Chambrier