1C_576/2022 05.12.2023
Avis important:
Les versions anciennes du navigateur Netscape affichent cette page sans éléments graphiques. La page conserve cependant sa fonctionnalité. Si vous utilisez fréquemment cette page, nous vous recommandons l'installation d'un navigateur plus récent.
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_576/2022  
 
 
Arrêt du 5 décembre 2023  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Kneubühler, Président, 
Chaix et Merz. 
Greffière : Mme Arn. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Maîtres Nicolas Wisard et Samuel Brückner, avocats, 
recourante, 
 
contre  
 
B.________, 
représentée par Me Jacques Fournier, avocat, 
intimée, 
 
Commune de Val de Bagnes, Administration communale, case postale 1, 1934 Le Châble VS, 
représentée par Me Léonard Bruchez, avocat, 
Conseil d'Etat du canton du Valais, 
place de la Planta, Palais du Gouvernement, 1950 Sion. 
 
Objet 
Révocation d'une autorisation de construire, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour de droit public, du 27 septembre 2022 (A1 21 223 et A1 21 228). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par décision du 16 février 2012, le Conseil municipal de Bagnes (devenue commune de Val de Bagnes le 1 er janvier 2021 ensuite de sa fusion avec celle de Vollèges) a délivré à B.________ l'autorisation de construire un chalet de 800 m 2 habitables sur quatre niveaux (sous-sol, entresol, étage et combles) avec piscine intérieure, garage et places de parc extérieures, sur la parcelle n° 3093 du cadastre municipal de Bagnes, dont la prénommée est propriétaire. Ce bien-fonds, situé au lieu-dit "C.________", est classé en zone touristique T3 de Verbier.  
Le recours formé par feu D.________, propriétaire de la parcelle voisine n° 3062, contre cette autorisation de construire a été admis par le Conseil d'Etat en date du 19 juin 2012. Ce prononcé a ensuite été annulé par arrêt du 20 novembre 2013 de la Cour de droit public du Tribunal cantonal du canton du Valais (ci-après: Tribunal cantonal ou cour cantonale) saisi par B.________ et E.________ SA, auteur du projet; la cour cantonale a considéré que le projet litigieux constituait un bâtiment à deux corps échelonnés et que la hauteur devait ainsi être mesurée séparément pour chacun d'eux; elle a donc renvoyé la cause au Conseil d'Etat. Ce dernier a admis, en date du 16 mars 2016, le recours des hoirs de feu D.________, pour non respect de la hauteur et de la longueur maximales du bâtiment fixées pour cette zone. Par arrêt du 13 janvier 2017, le Tribunal cantonal a admis le recours de la propriétaire et de E.________ SA, a réformé la décision du Conseil d'Etat et confirmé l'autorisation de construire du 16 février 2012; seules les questions de hauteur et de longueur du bâtiment étaient abordées. Par arrêt 1C_422/2017 du 5 mars 2018, le Tribunal fédéral a déclaré irrecevable le recours que A.________ avait interjeté à l'encontre de ce prononcé. 
 
B.  
La construction du chalet a commencé à la fin septembre/début octobre 2020, une fois accomplies les diverses formalités requises à cet effet. 
Par deux écritures datées du 28 août 2020, dont la constructrice ignorait l'existence lorsque le chantier a été ouvert, A.________ a demandé à la Commune de Bagnes de révoquer le permis du 16 février 2012, sans toutefois réclamer l'arrêt des travaux. Elle a motivé cette demande en alléguant que l'autorisation de construire n'était pas valable dans la mesure où elle concernait une résidence secondaire, étant donné que B.________ et sa famille résidaient à U.________ et ne séjournaient qu'occasionnellement à Verbier. En parallèle A.________ a requis le Conseil d'Etat de suspendre le début des travaux en sa qualité d'autorité de surveillance en matière de constructions jusqu'à ce que le caractère principal ou secondaire du logement en cause soit établi, ce que cette autorité a refusé le 5 mai 2021. 
Le 27 juillet 2021, la Commune de Val de Bagnes (ci-après: la Commune) a rendu une décision accordant l'accès au dossier à A.________ (chiffre 1 du dispositif), constatant l'illicéité du permis de construire du 16 février 2012 (chiffre 2), mais renonçant à révoquer cette autorisation et donc à ordonner l'arrêt des travaux (chiffre 3), en application de l'art. 32 de la loi valaisanne du 6 octobre 1976 sur la procédure et la juridiction administratives (LPJA; RS/VS 172.6) 
 
C.  
Le 5 août 2021, A.________ a contesté, auprès du Conseil d'Etat, le refus de la Commune de révoquer le permis de construire et a requis l'arrêt immédiat des travaux, en produisant notamment des photographies du chantier prises le 30 juillet 2021. 
Le 24 août 2021, B.________ a également formé recours contre la décision communale du 27 juillet 2021 en tant qu'elle constatait l'illicéité du permis. 
Le 25 août 2021, le Conseil d'Etat a ordonné à titre superprovisionnel l'arrêt des travaux jusqu'à droit connu sur le sort du recours. Par décision du 22 septembre 2021, le Conseil d'Etat a rejeté le recours de B.________, mais a admis celui de A.________. Il a réformé la décision communale en prononçant la révocation de l'autorisation de construire du 16 février 2012 (ch. 4 de ce prononcé) et renvoyé l'affaire à la Commune pour nouvelle décision au sens des considérants, à savoir que celle-ci devra décider si une procédure de régularisation était envisageable (ch. 6 de ce prononcé). Le Conseil d'Etat a également ordonné l'arrêt immédiat des travaux, en précisant que cet ordre était immédiatement exécutoire et qu'un recours n'aurait pas d'effet suspensif (ch. 5 de ce prononcé). Il a notamment considéré que l'intérêt public à l'application de la législation sur les résidences secondaires primait la protection de la bonne foi et les intérêts financiers de la constructrice. 
 
D.  
B.________ et la Commune de Val de Bagnes ont recouru séparément auprès du Tribunal cantonal contre la décision précitée du Conseil d'Etat. A titre de moyens de preuve, B.________ a notamment déposé de nombreuses pièces, dont différentes factures, contrats et listes de paiements étayant les 2'500'000 fr. qu'elle déclarait avoir investis jusqu'ici dans la réalisation du chalet. 
Par décision du 7 décembre 2021, le Tribunal cantonal a rejeté les requêtes de mesures superprovisionnelles (finalisation des travaux de maçonnerie, pose de la charpente) et provisionnelles (mise hors d'air du bâtiment) demandées par B.________, mais a autorisé cette dernière à effectuer diverses interventions de sécurisation et de protection. Après avoir joint les deux causes, le Tribunal cantonal a, par arrêt du 27 septembre 2022, admis les recours et réformé la décision du Conseil d'Etat en ce sens que la décision communale est confirmée à l'exception de son chiffre 2 relatif au constat d'illlicéité du permis de construire. En substance, le Tribunal cantonal a retenu que l'autorisation en question se rapportait à une résidence secondaire et qu'elle était contraire au droit (cf. arrêt attaqué consid. 3.2). Il a cependant considéré que les conditions pour révoquer l'autorisation de construire n'étaient pas réalisées (cf. arrêt attaqué consid. 4). Enfin, le Tribunal cantonal a annulé le constat d'illicéité du permis de construire, les parties ne démontrant pas avoir un intérêt justifiant un prononcé constatatoire (cf. arrêt attaqué consid. 5). 
 
E.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt du Tribunal cantonal, de confirmer la décision du Conseil d'Etat du 22 septembre 2021 et de renvoyer la cause à la Commune pour qu'elle examine si une régularisation de la construction est possible. Elle a également sollicité la restitution de l'effet suspensif au présent recours, en ce sens que l'ordre d'arrêt des travaux prononcé par le Conseil d'Etat perdure jusqu'à droit connu sur son recours. 
Par ordonnance du 23 novembre 2022, le Président de la Ire Cour de droit public du Tribunal fédéral a admis la requête d'effet suspensif, traitée comme une requête de mesure provisionnelle, sous réserve des travaux de pose de la charpente qui pouvaient se poursuivre aux risques et périls de l'intimée. 
Invité à se prononcer sur le fond, le Tribunal cantonal y renonce. Le Conseil d'Etat conclut à l'admission du recours et à la confirmation de sa décision du 22 septembre 2022. La Commune conclut au rejet du recours. L'intimée conclut à l'irrecevabilité du recours et subsidiairement à son rejet. Invité à se prononcer, l'Office fédéral du développement territorial (ARE) laisse au Tribunal fédéral le soin de déterminer si la non-conformité de l'autorisation de construire à la législation sur les résidences secondaires constitue in casu un motif suffisant pour révoquer l'autorisation de construire. Un second échange d'écritures, ainsi qu'un troisième, ont eu lieu, au terme desquels les parties ont maintenu leurs conclusions. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Dirigé contre une décision finale prise en dernière instance cantonale dans le domaine du droit public des constructions, le recours est en principe recevable comme recours en matière de droit public selon les art. 82 ss LTF, aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. La recourante, qui a pris part à la procédure cantonale de recours, est voisine du projet en cours de construction sur la parcelle de l'intimée. Elle dispose en l'occurrence de la qualité pour recourir en vertu de l'art. 89 al. 1 LTF contre l'arrêt entrepris confirmant le refus de la Commune de révoquer le permis de construire délivré à l'intimée et d'ordonner l'arrêt des travaux. Les autres conditions de recevabilité sont réunies, si bien qu'il y a lieu d'entrer en matière sur le recours. 
 
2.  
Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral examine librement la violation du droit fédéral (cf. art. 95 let. a et 106 al. 1 LTF). Sauf dans les cas cités expressément à l'art. 95 LTF, le recours devant le Tribunal fédéral ne peut en revanche pas être formé pour violation du droit cantonal en tant que tel. Il est néanmoins possible de faire valoir que la mauvaise application du droit cantonal constitue une violation du droit fédéral, en particulier qu'elle est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. ou contraire à d'autres droits constitutionnels (ATF 145 I 108 consid. 4.4.1 et les arrêts cités). Le Tribunal fédéral n'examine toutefois le moyen tiré de la violation d'une norme de rang constitutionnel que si le grief a été invoqué et motivé de manière précise (art. 106 al. 2 LTF; cf. ATF 142 V 577 consid. 3.2). 
Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), à moins que ceux-ci n'aient été établis de façon manifestement inexacte - c'est-à-dire arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 148 IV 356 consid. 2.1; 147 IV 73 consid. 4.1.2) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Si la partie recourante entend s'écarter des constatations de fait de l'autorité précédente, elle doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées et la correction du vice susceptible d'influer sur le sort de la cause (cf. art. 97 al. 1 LTF; ATF 148 IV 356 consid. 2.1; 147 IV 73 consid. 4.1.2). Le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur des critiques de type appellatoire portant sur l'état de fait ou sur l'appréciation des preuves (ATF 148 IV 356 consid. 2.1; 147 IV 73 consid. 4.1.2). 
 
3.  
Dans une première partie de son mémoire, la recourante présente son propre exposé des faits pertinents de la cause et les compléments qu'il conviendrait d'apporter à l'état de fait retenu par le Tribunal cantonal. Une telle manière de procéder, dans la mesure où les faits exposés s'écartent des constatations de l'instance précédente ou les complètent, sans qu'il soit indiqué et démontré que ceux-ci seraient manifestement inexacts ou arbitraires, est irrecevable (cf. consid. 2 ci-dessus). Il n'y a ainsi pas lieu de compléter l'état de fait de l'arrêt cantonal dans le sens voulu par la recourante. 
 
4.  
En l'espèce, comme relevé par l'instance précédente, le permis de construire le chalet litigieux a été délivré le 16 février 2012 et n'était donc initialement pas soumis à l'interdiction de construire de nouvelles résidences secondaires (cf. ATF 139 II 243 consid. 11.1; 139 II 263 consid. 7). Ce permis de construire a toutefois été contesté par la voie d'un recours et tombait dès lors sous le coup de la loi fédérale du 20 mars 2015 sur les résidences secondaires (LRS; RS 702), en vertu de l'art. 25 al. 2 de cette loi entrée en vigueur dans l'intervalle le 1 er janvier 2016. Les instances précédentes ont constaté, dans le cadre de la présente procédure, que l'autorisation de construire litigieuse - entrée en force en mars 2018 à la suite de l'arrêt du Tribunal fédéral (arrêt 1C_422/2017 du 5 mars 2018) - se rapportait à une résidence secondaire (cf. art. 2 al. 4 LRS) et qu'elle était donc matériellement contraire au droit. Au terme d'une pesée des intérêts entre l'intérêt à une application correcte du droit objectif et l'intérêt à la sécurité juridique, respectivement à la protection de la confiance, le Tribunal cantonal et la Commune ont tous deux considéré, contrairement au Conseil d'Etat, qu'il convenait de renoncer à révoquer l'autorisation de construire litigieuse.  
Dans son recours, la recourante critique la pesée des intérêts effectuée par le Tribunal cantonal. Elle estime que la révocation du permis doit s'imposer au vu de l'importance de l'intérêt public poursuivi par la LRS et de l'absence de bonne foi de la constructrice intimée. A ses yeux, cette dernière ne peut pas être considérée comme étant de bonne foi dès lors qu'à peine 3 semaines après l'ouverture du chantier, elle avait connaissance de la demande de révocation du permis. Elle soutient par ailleurs que la question au centre de la présente procédure relève directement de l'application de la LRS et donc du droit fédéral. A titre subsidiaire, elle affirme que l'annulation de la révocation du permis de construire consacre une violation arbitraire de l'art. 32 LPJA. 
 
4.1. Selon la jurisprudence, les mesures de politique d'aménagement tendant à favoriser la construction de résidences principales et à limiter celle de résidences secondaires poursuivent un intérêt public important lié à l'utilisation rationnelle du territoire et à la protection de la nature (ATF 144 II 367 consid. 3.4). La prolifération de résidences secondaires dans les régions touristiques produit des effets indésirables du point de vue de l'aménagement du territoire: elle favorise un gaspillage du territoire à bâtir et exerce une pression sur les prix du terrain au détriment de la population locale dont elle entraîne l'exode. Il existe ainsi un intérêt public important à prévenir la construction excessive de résidences secondaires inoccupées pendant la plus grande partie de l'année, évitant du même coup la création d'infrastructures surdimensionnées et sous-utilisées (ATF 135 I 233 consid. 3.3 et les arrêts cités).  
 
4.2. L'art. 32 LPJA, intitulé "Révocation ou modification", prévoit que, pour autant que des prescriptions légales spéciales, la nature de l'affaire, le principe de la bonne foi ou d'autres principes généraux du droit reconnus ne s'y opposent pas, l'autorité peut d'office ou sur demande: soit révoquer une décision viciée lorsque d'importants intérêts publics, qu'il n'est pas possible de préserver autrement, le demandent (al. 1 let. a), soit modifier ou annuler une décision correcte lorsque les conditions dont la loi fait dépendre sa validité ne sont plus remplies en raison d'un changement notable de la loi ou des circonstances (al. 1 let. b); une décision peut être révoquée même si elle est formellement passée en force (al. 2).  
La jurisprudence fédérale a, par ailleurs, dégagé des principes qui permettent de déterminer si et à quelles conditions une décision administrative ayant acquis force de chose décidée peut être réexaminée à la demande d'un particulier ou être révoquée par l'autorité qui l'a rendue. Les exigences de la sécurité du droit ne l'emportent sur l'intérêt à une application correcte du droit objectif que si la décision en cause a créé un droit subjectif au profit de l'administré, si celui-ci a déjà fait usage d'une autorisation obtenue ou encore si la décision est le fruit d'une procédure au cours de laquelle les divers intérêts en présence ont fait l'objet d'un examen approfondi. Cette règle n'est cependant pas absolue et la révocation peut intervenir même dans une des trois hypothèses précitées, le cas échéant moyennant le versement d'une indemnité, lorsqu'elle est commandée par un intérêt public particulièrement important (ATF 144 III 285 consid. 3.5; 137 I 69 consid. 2.3; 127 II 306 consid. 7a; 121 II 273 consid. 1a et les réf. cit.). A l'inverse, les exigences de la sécurité du droit peuvent être prioritaires même lorsqu'aucune de ces trois hypothèses n'est réalisée (arrêts 1C_465/2022 du 4 avril 2023 consid. 4.1; 1C_355/2010 du 19 novembre 2010 consid. 5.1 et 2A.737/2004 du 30 mars 2005 consid. 3.4 in Pra 2006 n° 26 p. 184). En principe, l'intérêt à la protection de la confiance l'emporte lorsque l'intéressé a déjà fait usage de l'autorisation de construire qui lui a été délivrée, pour autant que des investissements sensibles aient été consentis et qui ont conduit à la création d'une situation qui ne peut être redressée d'une manière conforme à la nouvelle réglementation que par la destruction d'ouvrages réalisés de bonne foi (arrêts 1C_465/2022 du 4 avril 2023 consid. 4.1; 1C_355/2010 du 19 novembre 2010 consid. 5.1). Celui qui a agi dolosivement ou violé ses obligations en induisant l'administration en erreur au moment de demander l'autorisation litigieuse ne saurait en principe s'opposer à la révocation, à moins que cette mesure ne soit contraire au principe de la proportionnalité (ATF 93 I 390 consid. 2; arrêt 1C_355/2010 du 19 novembre 2010 consid. 5.1). L'autorité compétente doit également observer ces principes dans l'application qu'elle fait des dispositions cantonales relatives à la révocation des autorisations de construire (arrêts 1C_465/2022 du 4 avril 2023 consid. 4.1; 1C_355/2010 du 19 novembre 2010 consid. 5.1 et la référence). 
 
4.3. La question de la licéité du permis de construire au regard de la loi sur les résidences secondaires (LRS) relève certes du droit fédéral, comme le souligne la recourante. La LRS ne contient toutefois pas de disposition particulière sur la révocation des décisions entrées en force. La révocation du permis de construire litigieux est en l'occurrence régie par le droit cantonal, à savoir l'art. 32 al. 1 let. a LPJA, lequel correspond aux principes généraux développés par la jurisprudence fédérale en matière de révocation des décisions (cf. arrêt 1C_8/2019 du 20 mai 2019 consid. 4.2). L'art. 32 al. 1 let. a LPJA, tout comme la jurisprudence fédérale, exige dans tous les cas une pesée des intérêts en présence. Dans ce cadre, le Tribunal fédéral peut tenir compte librement de l'intérêt poursuivi par la LRS, tout en respectant la marge d'appréciation devant être laissée aux cantons (arrêt 1C_740/2013 du 6 mai 2015 consid. 8.3 et les réf. cit.).  
En l'occurrence, le Tribunal cantonal a retenu, à l'instar du Conseil d'Etat, que le chalet litigieux se trouvait à un stade avancé de réalisation. Le Conseil d'Etat a notamment constaté que, selon les photographies prises le 30 juillet 2021, les fondations et les sous-sols étaient déjà construits et que, selon celles transmises le 27 août 2021, plusieurs étages avaient été construits et que le gros oeuvre était quasiment terminé. Compte tenu des photographies figurant au dossier cantonal, le Tribunal cantonal pouvait admettre sans arbitraire que les travaux se trouvaient à un stade avancé de réalisation, respectivement que le permis de construire avait été largement utilisé. Contrairement à ce que soutient la recourante, le fait que l'ouvrage se trouvait à un stade avancé de réalisation doit être pris en considération. En effet, dans une telle configuration, une révocation du permis de construire ne peut, selon la jurisprudence fédérale précitée, entrer en ligne de compte que si elle est commandée par un intérêt public particulièrement important. Tel peut notamment être le cas lorsque la construction autorisée met en danger la sécurité ou la santé des personnes, la protection des eaux (cf. ATF 127 II 306 consid. 7a; arrêt 1C_8/2019 du 20 mai 2019 consid. 4.2) ou encore si elle porte gravement atteinte à un paysage ou à un site protégé (cf. ATF 103 Ib 204 consid. 4; arrêt 1C_740/2013 du 6 mai 2015 consid. 8.3; arrêt P.709/1982 consid. 5b du 1er juin 1983 in ZBl 1984 p. 127). 
Sur ce point, le Tribunal cantonal a considéré, contrairement au Conseil d'Etat, que si les intérêts publics poursuivis pas la LRS étaient certes importants, ils ne pouvaient pas être placés, dans le cadre d'une procédure de révocation, au même rang que les intérêts visant à protéger les personnes ou les animaux, à éviter une mise en danger de l'environnement, voire à altérer des sites ou des paysages protégés. En l'occurrence, la cour cantonale a retenu que la construction litigieuse n'est pas située dans un secteur isolé de la commune; elle se trouve au contraire dans une zone destinée à la construction, à proximité immédiate d'autres habitations. En ce sens, la construction ne participe pas au gaspillage du territoire et ne porte pas atteinte au paysage puisque le secteur considéré est déjà construit. En outre et pour les mêmes raisons, l'impact sur la création d'infrastructures est réduit. Dans ces conditions, en l'absence d'intérêts particulièrement importants au sens de la jurisprudence précitée, la cour cantonale pouvait considérer que les intérêts publics poursuivis par la LRS - certes importants en eux-mêmes - ne permettaient pas de justifier la révocation du permis de construire litigieux, confirmé sur recours jusqu'au Tribunal fédéral et dont il avait été fait usage. La révocation ne s'imposait pas non plus en regard de l'intérêt à la sécurité du droit, respectivement à la protection de la confiance. 
De plus, la recourante remet en cause en vain la bonne foi de l'intimée. L'arrêt entrepris relève que la constructrice a requis et obtenu de bonne foi le permis de bâtir litigieux qui a vainement été contesté jusqu'au Tribunal fédéral. Il sied de relever à cet égard que lorsque la constructrice a demandé et obtenu le permis de construire en première instance en février 2012, la LRS - et donc l'art. 25 LRS - n'était pas encore en vigueur. Par la suite, durant la procédure de recours, la problématique de la LRS n'a jamais été abordée par les autorités successives amenées à se prononcer sur la légalité du permis de construire. Sur ce point, comme l'a souligné à juste titre le Tribunal cantonal, l'application de la LRS à un permis de construire délivré avant le 11 mars 2012 n'allait pas de soi, dès lors que la solution consacrée par l'art. 25 al. 1 LRS (en vigueur depuis le 1 er janvier 2016) rompait avec les principes que la jurisprudence fédérale avait précédemment établis, à savoir que l'art. 75b Cst. - limitant la construction de résidences secondaires - ne s'appliquait pas aux autorisations délivrées comme en l'espèce avant le 11 mars 2012, même si, en raison d'une procédure de recours, elles n'entraient en force qu'après cette date (cf. ATF 139 II 243 consid. 11.6; 139 II 263 consid. 3); en outre, la solution fixée par l'art. 25 al. 1 LRS était critiquée par la doctrine et, lorsque le Tribunal fédéral a clarifié, dans un arrêt de principe daté du 24 mai 2018 (ATF 144 II 326), la question de l'application temporelle de la LRS, la procédure contentieuse relative à l'autorisation de construire litigieuse était terminée. On ne saurait, dans ces conditions, mettre en cause la bonne foi de l'intimée. Il faut au contraire insister sur la configuration particulière du cas d'espèce, avec une procédure judiciaire s'étendant sur plusieurs années et occupant toutes les instances judiciaires du pays. Dans ce cas très particulier, l'intimée pouvait exceptionnellement faire prévaloir le droit subjectif déduit de l'autorisation de construire sur la correcte application du droit objectif relatif à l'affectation de son chalet.  
A l'instar de la cour cantonale, il y lieu à cet égard de relever que la recourante, qui était elle-même assistée d'un avocat, n'a pas invoqué la violation de la loi sur les résidences secondaires dans le cadre de la procédure de recours contre le permis litigieux. Dès lors pourrait se poser la question de la bonne foi procédurale de la recourante qui n'a fait valoir cette argumentation que dans le cadre de la présente demande de révocation du permis de construire. Cette question n'est toutefois pas déterminante pour l'issue du litige et n'a donc pas besoin d'être approfondie. 
Par ailleurs, quoi qu'en dise la recourante, on ne saurait reprocher à la constructrice d'avoir commencé, puis poursuivi de mauvaise foi les travaux autorisés: elle n'a pris connaissance de la demande de révocation qu'en date du 23 octobre 2020; la Commune n'a alors pas ordonné à titre de mesure provisoire l'arrêt immédiat des travaux, ni d'ailleurs le Conseil d'Etat saisi d'une telle demande par la recourante; la Commune a, dans sa décision du 27 juillet 2021, finalement renoncé à révoquer ladite autorisation de construire. Le fait que la demande de révocation aurait été communiquée à la constructrice trois semaines après l'ouverture effective du chantier n'est pas déterminant, dès lors que celle-ci bénéficiait d'une autorisation de construire entrée en force, qui avait été vainement contestée jusqu'au Tribunal fédéral. 
 
4.4. Il ressort de ce qui précède, que la décision attaquée, qui confirme la décision communale de ne pas révoquer l'autorisation de construire, ne contrevient pas aux principes généraux découlant de la jurisprudence fédérale.  
 
5.  
Le recours doit par conséquent être rejeté dans la mesure où il est recevable, aux frais de la recourante qui succombe (art. 66 al. 4 LTF). Elle versera en outre des dépens à l'intimée, qui obtient gain de cause avec l'assistance d'un avocat (art. 68 al. 1 et 2 LTF). Il n'est pas alloué de dépens à la Commune (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Une indemnité de 3'000 fr. à payer à l'intimée à titre de dépens est mise à la charge de la recourante. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties, à la Commune de Val de Bagnes, au Conseil d'Etat du canton du Valais, au Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour de droit public, ainsi qu'à l'Office fédéral du développement territorial. 
 
 
Lausanne, le 5 décembre 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
La Greffière : Arn