2P.69/2006 05.07.2006
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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
2P.69/2006 /fzc 
 
Arrêt du 5 juillet 2006 
IIe Cour de droit public 
 
Composition 
MM. les Juges Merkli, Président, 
Wurzburger et Berthoud, Juge suppléant. 
Greffière: Mme Rochat. 
 
Parties 
Ville de Genève, Département municipal des sports et de la sécurité, recourante, 
représentée par Me Alain Maunoir, avocat, 
 
contre 
 
X.________ S.A., 
intimée, représentée par Me Hans-Ulrich Ming, avocat, 
Tribunal administratif du canton de Genève, rue du Mont-Blanc 18, case postale 1956, 1211 Genève 1. 
 
Objet 
autonomie communale; gestion du domaine public communal, 
 
recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal administratif du canton de Genève du 17 janvier 2006. 
 
Faits: 
A. 
Le 27 avril 2005, X.________ S.A., commerce d'horlogerie, sis à Genève, en zone piétonne, a sollicité l'autorisation d'utiliser le domaine public le 24 mai 2005, entre 17.00 h. et 21.00 h., pour y garer deux voitures de marque "Y.________" devant son magasin dans le cadre du lancement de sa nouvelle collection de montres "Y.A.________". Par décision du 3 mai 2005 dépourvue d'indication des voie et délai de recours et notifiée sous pli simple, le Service des agents de ville et du domaine public de la Ville de Genève (ci-après: le Service communal) a refusé la permission requise en invoquant sa pratique constante de ne pas autoriser des manifestations à caractère purement promotionnel ou commercial sur l'ensemble de son territoire. Dans l'optique de la manifestation promotionnelle prévue le 24 mai 2005, X.________ S.A. a obtenu de la gendarmerie de Genève l'autorisation exceptionnelle de "charger/décharger" pour deux véhicules dans la zone piétonne, de 17.00 h. à 20.00 h. Passant outre le refus d'autorisation du 3 mai 2005, X.________ S.A. a installé devant son arcade, le 24 mai 2005, deux véhicules de marque "Y.________" ainsi que trois oriflammes d'environ 4 mètres de hauteur, fixés sur des plots en béton et portant l'inscription "B.Y.________". 
 
Le 1er juin 2005, le Service communal, se fondant sur la violation de plusieurs dispositions légales et réglementaires cantonales, a infligé à X.________ S.A. une sanction administrative, sous forme d'une amende de 2'000 fr. 
B. 
Statuant sur le recours dirigé contre les décisions précitées du Service communal des 3 mai et 1er juin 2005, le Tribunal administratif du canton de Genève (ci-après: le Tribunal administratif) l'a admis, par arrêt du 17 janvier 2006, et a annulé les deux décisions litigieuses. Il a retenu en substance que le refus d'autorisation du 3 mai 2005 heurtait la liberté économique de X.________ S.A., dont l'intérêt privé l'emportait sur les motifs de sécurité et de tranquillité publiques invoqués par le Service communal, compte tenu de l'emplacement des véhicules en cause et de la limitation dans le temps de l'utilisation accrue du domaine public. Il a conclu qu'aucune amende ne pouvait être infligée à X.________ S.A.; partant, il a renvoyé le dossier à la Ville de Genève, afin qu'elle procède au calcul de la redevance due par X.________ S.A. pour l'usage accru du domaine public occasionné par sa manifestation promotionnelle. 
C. 
Agissant par la voie du recours de droit public, la Ville de Genève demande au Tribunal fédéral, avec suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt du Tribunal administratif du 17 janvier 2006 et de confirmer le bien-fondé des décisions du Service communal des 3 mai et 1er juin 2005. Invoquant la violation de son autonomie communale, elle fait grief au Tribunal administratif d'avoir apprécié de manière insoutenable les intérêts publics et privés en présence et d'avoir annulé l'amende infligée à X.________ S.A. qui avait pourtant délibérément passé outre son refus d'occuper le domaine public communal. 
 
Le Tribunal administratif se rapporte à justice quant à la recevabilité du recours et persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt. X.________ S.A. conclut, avec suite de frais et dépens, au rejet du recours. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
1.1 Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 132 III 291, consid. 1 p. 292; 131 I 266 consid. 2 p. 267, 153 consid. 1 p. 156, 145 consid. 2 p. 147 et les arrêts cités). 
1.2 Sous réserve d'exceptions non réalisées en l'espèce, le recours de droit public ne peut tendre qu'à l'annulation de la décision attaquée (ATF 132 III 291 consid. 1.5 p. 294; 131 I 166 consid. 1.3 p. 169, 137 consid. 1.2 p. 139). Les conclusions de la recourante qui sortent de ce cadre sont dès lors irrecevables. 
1.3 La recevabilité du recours de droit public est notamment subordonnée à l'existence d'un intérêt actuel et pratique à l'admission du recours. Cet intérêt doit encore exister au moment où le Tribunal fédéral statue (ATF 131 I 153 consid. 1.2 p. 157). Il n'est fait exception à ce principe que lorsque la question litigieuse peut se poser à nouveau en tout temps et dans des circonstances semblables et qui, en raison de sa brève durée, échapperait ainsi toujours à la censure de la cour suprême (ATF 129 I 113 consid. 1.7 p. 119; 127 I 164 consid. 1a p. 166 et les arrêts cités). Cette dernière condition est remplie en l'espèce, dans la mesure où la recourante pourrait, à l'avenir, se voir confrontée à des demandes semblables à celle de l'intimée de la part d'autres commerçants, voire même de la part de X.________ S.A. qui a indiqué qu'elle souhaitait organiser d'autres manifestations de promotion, analogues à celle tenue le 24 mai 2005. 
1.4 Une commune a qualité pour agir par la voie du recours de droit public lorsqu'elle intervient en tant que détentrice de la puissance publique et qu'elle invoque une violation de son autonomie (art. 50 Cst.; ATF 131 I 91 consid. 1 p. 93). Dans la mesure où la recourante invoque la violation de son autonomie et qu'elle est touchée par la décision attaquée, non comme le serait un particulier, mais en tant que détentrice de la puissance publique, la qualité pour recourir au sens de l'art. 88 OJ doit lui être reconnue (art. 189 al. 1 lettre b Cst.) Déterminer si, dans un domaine juridique particulier, la commune jouit effectivement d'une autonomie n'est pas une question de recevabilité, mais de fond (ATF 128 I 136 consid. 1.2 p. 139, 3 consid. 1c p. 7; 124 I 223 consid. 1b p. 226 et les références citées). 
2. 
2.1 L'autonomie communale est garantie dans les limites fixées par le droit cantonal (art. 50 Cst.). Selon la jurisprudence, une commune est autonome dans les domaines que le droit cantonal ne règle pas de manière exhaustive et dans lesquels il lui laisse une liberté de décision importante, soit en lui attribuant la compétence d'édicter et d'appliquer ses propres prescriptions, soit en lui réservant une latitude équivalente dans l'application du droit cantonal ou fédéral (ATF 129 I 313 consid. 5.2 p. 320 et les références citées). L'existence et l'étendue de l'autonomie communale dans une matière concrète sont déterminées essentiellement par la constitution et la législation cantonales, voire exceptionnellement par le droit cantonal non écrit et coutumier (ATF 122 I 279 consid. 8b p. 290; 116 Ia 285 consid. 3a p. 287; 115 Ia 42 consid. 3 p. 44). 
2.2 En vertu de l'art. 2 de la loi genevoise du 13 avril 1984 sur l'administration des communes, l'autonomie communale s'exerce dans les limites de l'ordre juridique et plus particulièrement des compétences cantonales et fédérales, ainsi que du pouvoir de surveillance auquel la commune est soumise. L'utilisation du domaine public communal est régie par la loi genevoise du 24 juin 1961 sur le domaine public (LDP; RSGE L 1 05), par le règlement du 21 décembre 1988 concernant l'utilisation du domaine public (RDP; RSGE L 1 10.12) ainsi que, notamment, par la loi genevoise du 28 avril 1967 sur les routes (LRoutes; RSGE L 1 10). 
Selon l'art. 12 LDP, chacun peut, dans les limites des lois et des règlements, utiliser le domaine public conformément à sa destination et dans le respect des droits d'autrui. L'art 13 LDP subordonne à permission - à concession s'ils sont assortis de dispositions contractuelles - l'établissement de constructions ou d'installations permanentes sur le domaine public, son utilisation à des fins industrielles ou commerciales ou toute autre utilisation de celui-ci excédant l'usage commun. Les permissions sont accordées par l'autorité communale qui administre le domaine public, laquelle en fixe les conditions (art. 15 et 17 LDP). Dans les limites de la loi et le respect des conditions liées à l'octroi de la permission, les particuliers disposent d'un droit à l'utilisation du domaine public excédant l'usage commun lorsqu'aucun intérêt prépondérant ne s'y oppose (art. 1 al. 2 RDP). Lors de l'octroi de la permission, l'autorité compétente tient compte des intérêts légitimes du requérant, de ceux des autres usagers du domaine public et des voisins, de ceux découlant des concessions ou droits d'usage exclusifs concédés par les autorités compétentes, ainsi que du besoin d'animation de la zone concernée (art. 1 al. 3 RDP). Les permissions sont délivrées à titre précaire et peuvent être retirées sans indemnité pour de justes motifs, notamment si l'intérêt général l'exige (art. 19 LDP). 
 
L'art. 56 LRoutes prévoit également que toute utilisation des voies publiques qui excède l'usage commun doit faire l'objet d'une permission ou d'une concession préalable, délivrée par l'autorité communale lorsqu'il s'agit d'une voie communale (art. 57 al. 1 LRoutes). L'autorité compétente peut assortir de conditions et même refuser les permissions d'occupation de la voie publique pour tout objet ou installation sur la voie publique qui, par sa couleur, ses dimensions, son éclairage, sa forme ou le genre de sujets présentés, peut nuire au bon aspect d'une localité, d'un quartier, d'une voie publique, d'un site ou d'un point de vue (art. 57 al. 3 LRoutes). 
 
Au vu de ce qui précède, les communes genevoises jouissent en vertu du droit cantonal d'une importante liberté d'appréciation dans la gestion du domaine public communal et, plus particulièrement, dans l'octroi ou le refus de permissions d'utilisation de ce domaine excédant l'usage commun; elles bénéficient donc de la protection de leur autonomie. 
2.3 Dans la mesure où son autonomie est en cause, la commune peut exiger que l'autorité cantonale respecte les limites de sa compétence et qu'elle applique correctement les dispositions du droit fédéral, cantonal ou communal qui règlent la matière. Elle peut, dans ce cadre, faire valoir aussi que les autorités cantonales ont méconnu la portée d'un droit fondamental et considéré à tort que celui-ci avait été violé. En tant qu'il s'agit de l'application du droit constitutionnel fédéral ou cantonal, le Tribunal fédéral revoit librement la décision des autorités cantonales; pour le surplus, son pouvoir d'examen est limité à l'arbitraire, en particulier s'agissant de l'établissement des faits (ATF 128 I 136 consid. 2.2 p. 140/141; 126 I 133 consid. 2 p. 136/137; 114 Ia 168 consid. 2a/b p. 170 et les arrêts cités). 
3. 
La recourante reproche en premier lieu au Tribunal administratif d'avoir méconnu la portée de l'art. 27 Cst. en matière d'usage accru du domaine public. Elle soutient que l'intérêt public à l'absence de trouble de cet usage doit peser d'un poids d'autant plus lourd que l'intimée ne fait pas valoir de liberté idéale et que le but promotionnel visé pouvait être atteint par d'autres moyens que la mise à contribution du domaine public. En outre, les autorisations qu'elle délivre sont généralement réservées à l'extension saisonnière de surfaces d'exploitation ou à une occupation liée à un événement particulier, mais elle n'entre pas en matière pour des actions purement publicitaires, pour lesquelles d'autres moyens peuvent être utilisés. Sa pratique permettant de respecter le principe de l'égalité de traitement entre commerçants, le Tribunal administratif aurait violé le principe de proportionnalité en limitant l'intérêt public au seul respect de la sécurité et de la tranquillité publiques et en privilégiant les intérêts privés de l'intimée, malgré la faible atteinte à la liberté économique de celle-ci. 
3.1 Selon l'art. 27 al. 1 Cst., la liberté économique est garantie. Elle comprend notamment le libre choix de la profession, le libre accès à une activité économique lucrative privée et son libre exercice (art. 27 al. 2 Cst.). Cette liberté protège toute activité économique privée, exercée à titre professionnel et tendant à la production d'un gain ou d'un revenu (ATF 128 I 19 consid. 4c/aa p. 29). Elle protège également le droit de faire de la publicité, en particulier le droit d'apposer de la publicité pour le compte d'un mandant (ATF 128 I 3 consid. 3a p. 9, 295 consid. 5b p. 308 et les références citées). 
 
Conformément à l'art. 36 al. 1 Cst., toute restriction d'un droit fondamental doit être fondée sur une base légale; les restrictions graves doivent être prévues par une loi; les cas de danger sérieux, direct et imminent sont réservés. Toute restriction d'un droit fondamental doit être justifiée par un intérêt public ou par la protection d'un droit fondamental d'autrui (art. 36 al. 2 Cst.) et proportionnée au but visé (art. 36 al. 3 Cst.). Sont autorisées les mesures de police, les mesures de politique sociale ainsi que les mesures dictées par la réalisation d'autres intérêts publics (ATF 125 I 322 consid. 3a p. 326; Andreas Auer/Giorgio Malinverni/Michel Hottelier, Droit constitutionnel suisse, vol. II, 2ème éd. Berne 2006, no 975 ss, p. 457). Sont en revanche prohibées les mesures de politique économique ou de protection d'une profession qui entravent la libre concurrence en vue de favoriser certaines branches professionnelles ou certaines formes d'exploitation (ATF 125 I 209 consid. 10a p. 221, 322 consid. 3a p. 326 et la jurisprudence citée). 
 
Selon la jurisprudence, celui qui, pour l'exercice d'une activité économique, doit faire usage du domaine public peut invoquer la liberté économique garantie par l'art. 27 Cst. Il a dans cette mesure, un "droit conditionnel" à l'octroi d'une autorisation pour un usage commun accru du domaine public (ATF 121 I 279 consid. 2a p. 282; 119 Ia 445 consid. 1a/bb p. 447). Le refus d'une telle autorisation peut constituer une atteinte à la liberté économique (ATF 119 Ia 445 consid. 2a p. 449) et il est soumis à conditions: il doit être justifié par un intérêt public prépondérant - des motifs de police n'entrent assurément pas seuls en considération -, reposer sur des motifs objectifs et respecter le principe de la proportionnalité; la pratique administrative en matière d'autorisation ne doit pas vider de leur substance les droits fondamentaux, en particulier le droit à l'égalité (art. 8 Cst.), ni de manière générale ni au détriment de certains citoyens (ATF 121 I 279 consid. 2a p. 282). En matière de gestion du domaine public, il est dans la nature des choses que les questions d'ordre culturel, d'aménagement du territoire, d'esthétique et de besoins du consommateur local entrent en considération dans la pondération des intérêts en présence. Au demeurant, ces motifs d'intérêt général sont également prévus par la législation genevoise, en particulier par l'art. 57 al. 3 LRoutes, dont les parties ne prétendent pas qu'il revête une portée différente de celle de l'art. 27 Cst., par conséquent seul en cause en l'espèce et dont la violation peut être examinée librement par le Tribunal fédéral. 
3.2 Dans la mesure où la demande d'autorisation de l'intimée visait l'usage commercial du domaine public, il ne se justifie pas d'examiner le poids de l'intérêt public en cause au regard de l'invocation d'une liberté idéale. 
La recourante justifie la distinction qu'elle opère dans l'attribution des autorisations d'usage du domaine public entre les actions publicitaires et les manifestations liées à un événement particulier par le fait que les premières peuvent faire l'objet de publicité par voie d'affichage ou d'annonces dans la presse. A cet égard, il faut constater que l'opération promotionnelle organisée par l'intimée relevait plus d'une manifestation à caractère particulier que d'une action publicitaire traditionnelle, même si de telles opérations revêtent toujours un certain caractère publicitaire. L'intimée a en effet organisé une réception dans sa boutique, de durée limitée, à l'occasion d'un événement ponctuel, soit le lancement d'une collection de montres "Y.A.________". Le parcage sur le domaine public de deux véhicules de marque "Y.________" ne mobilisait pas plus le domaine public que l'installation d'une tente de réception que la recourante autorise généralement pour l'inauguration d'un commerce. Cela suppose toutefois que les véhicules en question ne soient pas mis à la disposition de clients potentiels pour des courses d'essai, auquel cas une demande d'autorisation aurait dû également être présentée par le distributeur de ces véhicules. Bien que la possibilité de procéder à de telles courses ait été évoquée par l'intimée, il ne ressort pas du dossier qu'elles aient effectivement eu lieu. 
 
Au plan du respect du principe de l'égalité de traitement entre commerçants, le tableau établi le 14 septembre 2005, qui récapitule les cas d'octroi et de refus d'autorisations d'usage accru du domaine public, ne permet pas de se convaincre que la pratique de la recourante soit véritablement garante de l'égalité qu'elle cherche à promouvoir. Les autorisations délivrées pendant les trois premiers trimestres de 2005 concernaient l'installation de tentes de réception à l'occasion de l'inauguration d'un commerce ou d'une soirée anniversaire. Les refus avaient plutôt trait à des actions promotionnelles liées au lancement d'un produit. Une telle distinction, fondée sur la cause de la manifestation prévue, n'est pas forcément décisive au plan de l'usage du domaine public. Ainsi, l'installation d'une tente volumineuse, pendant plusieurs jours, entrave-t-elle plus l'utilisation normale du domaine public que l'exposition de deux véhicules automobiles pendant quelques heures. En outre, les manifestations liées à une inauguration ou à un anniversaire revêtent toujours un caractère promotionnel, de sorte que l'identité des buts poursuivis par ces deux types d'événements commande qu'un même traitement leur soit réservé au plan de l'utilisation du domaine public. 
 
La recourante soutient également que le Tribunal administratif a omis de tenir compte, dans la balance des intérêts publics et privés à opérer, de sa volonté de réserver les trottoirs et les rues piétonnes à leur destination première, soit le passage des piétons. Ce grief n'est pas fondé. Le Tribunal administratif a en effet retenu que l'usage accru du domaine public était très limité dans le temps et n'occasionnait aucune gêne aux autres usagers. Il faut assurément inclure les piétons dans l'expression "autres usagers", même s'ils ne sont pas expressément cités dans l'arrêt entrepris. De toute façon, la circulation des piétons n'a pas été sérieusement entravée par la présence, pendant quatre heures, de deux voitures automobiles aisément contournables et c'est à juste titre que le Tribunal administratif a principalement insisté sur les difficultés qu'auraient pu rencontrer les services d'urgence, tels que les pompiers. 
 
Enfin, le fait que le Tribunal administratif a privilégié l'intérêt privé de l'intimée, malgré la faible atteinte à sa liberté économique, ne signifie pas que les intérêts publics, dont la sauvegarde incombe à la recourante, seraient insignifiants. Compte tenu du caractère exceptionnel et limité dans le temps de l'usage du domaine public par l'intimée et de l'absence de toute gêne pour les autres usagers, les intérêts publics défendus par la recourante ont en effet seulement cédé le pas temporairement devant l'intérêt privé de l'intimée à faire usage de sa liberté économique. Dans le cadre très particulier de la manifestation en cause, qui tendait au lancement d'une nouvelle gamme de montres "Y.A.________", et non à attirer l'attention sur une simple opération publicitaire, il n'était dès lors pas contraire au principe de la proportionnalité d'estimer que cet intérêt privé était prépondérant. 
3.3 Au vu de l'ensemble des circonstances, le Tribunal administratif n'a donc pas violé l'autonomie de la recourante en considérant que le refus d'autorisation litigieux était contraire à l'art. 27 Cst. 
4. 
La recourante fait encore grief au Tribunal administratif d'avoir annulé son prononcé d'amende, alors que l'intimée a passé outre son refus d'autorisation du 3 mai 2005. L'attitude de l'intimée n'est certes pas exempte de reproches, mais l'amende infligée le 1er juin 2005 ne pouvait pas être maintenue, dans la mesure où le Tribunal administratif annulait le refus d'autorisation et donnait raison à l'intimée. La situation aurait pu d'ailleurs se présenter sous un angle différent si la recourante avait notifié une décision formelle le 3 mai 2005, contraignant ainsi l'intimée a recourir immédiatement et à solliciter du Tribunal administratif des mesures provisionnelles permettant la tenue de la manifestation projetée. 
A défaut d'encaisser l'amende infligée, la recourante pourra prélever l'émolument prévu par le règlement communal fixant le tarif des empiètements sur le domaine public. 
5. 
Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. La Ville de Genève, qui a agi en tant que détentrice de la puissance publique, est dispensée du paiement de l'émolument judiciaire (art. 156 al. 2 OJ). En revanche, elle est tenue de verser à l'intimée, qui obtient gain de cause, une indemnité à titre de dépens (art. 159 al. 1 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
2. 
Il n'est perçu d'émolument judiciaire. 
3. 
La Ville de Genève versera à l'intimée X.________ S.A. une indemnité de 3'000 fr. à titre de dépens. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataire des parties et au Tribunal administratif du canton de Genève. 
Lausanne, le 5 juillet 2006 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: La greffière: