1C_607/2021 19.06.2023
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_607/2021  
 
 
Arrêt du 19 juin 2023  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Kneubühler, Président, 
Müller et Merz. 
Greffier : M. Kurz. 
 
Participants à la procédure 
1. A.________, 
2. B.________, 
3. C.________, 
4. D.________, 
5. E.________, 
6. F.________, 
7. G.________, 
tous représentés par Me Stefan Graf, avocat, 
recourants, 
 
contre  
 
Municipalité de Concise, En Chenaux 8, 1426 Concise, représentée par Me Pierre-Yves Brandt, avocat, 
Direction générale du territoire et du logement du canton de Vaud, Service juridique, avenue de l'Université 5, 1014 Lausanne Adm cant VD, 
 
H.________ et I.________, 
 
Objet 
Plan général d'affectation, 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, du 8 septembre 2021 (AC.2019.0305). 
 
 
Faits :  
 
A.  
H.________ et I.________ (ci-après: les propriétaires) sont propriétaires des parcelles nos 1960 et 1961 de la commune de Concise. D'une surface de 1'468 m², respectivement 1'402 m², elles se trouvent à l'est de la rue Le Pavé, au lieu-dit "Clos Marcand", en zone de la périphérie du village selon le plan des zones de 1979 et le règlement communal sur le plan d'extension et la police des constructions, approuvés par le Conseil d'Etat le 3 septembre 1980. 
Le 16 mai 2014, les propriétaires (conjointement avec le propriétaire précédent) ont déposé auprès de la Municipalité de Concise (ci-après la municipalité) deux demandes préalables d'implantation sur les parcelles nos 1960 et 1961, portant sur la construction, sur chacune des parcelles, d'un immeuble de 4 appartements avec couvert à voitures. Mises à l'enquête publique en juin 2014, ces demandes ont suscité plusieurs oppositions, notamment celles de A.________, B.________, F.________, D.________ et G.________, tous (à l'exception du dernier cité) domiciliés au chemin Le Pavé qui borde à l'ouest les deux parcelles. Le Service Immeubles Patrimoine et Logistique (SIPAL; actuellement Direction générale des immeubles et du patrimoine: DGIP) a rendu un préavis négatif en raison des objectifs de sauvegarde de l'Inventaire des sites construits à protéger en Suisse (ISOS) qui considère Concise comme un site bâti d'importance nationale et qui reconnaît au secteur de Clos Marcand une signification prépondérante pour le site construit en tant qu'espace libre ou agricole. Il était demandé que le secteur de Clos Marcand retourne en zone agricole, hormis deux parcelles déjà bâties. 
Par décision du 9 octobre 2014, la municipalité a levé les oppositions et délivré les permis préalables d'implantation. Dans un premier arrêt du 15 décembre 2015, la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal vaudois (CDAP) a admis le recours d'opposants et a renvoyé le dossier à la municipalité pour instruction complémentaire sur l'appréciation de l'esthétique du projet. Les 7 et 15 février 2017, la municipalité a à nouveau délivré les autorisations préalables d'implantation. Statuant par un nouvel arrêt du 9 septembre 2018 sur recours d'opposants, la CDAP a réformé ces décisions en ce sens que les permis préalables d'implantation étaient délivrés à la condition que des croupes de dimensions usuelles, conformes aux règles de l'art, soient aménagées sur les toitures des pignons, et les a confirmées pour le surplus. Par arrêt 1C_520/2018 du 15 octobre 2018, le Tribunal fédéral a déclaré irrecevable le recours formé contre l'arrêt cantonal précité, les opposants n'ayant pas établi que les conditions auxquelles une décision incidente peut être déférée immédiatement au Tribunal fédéral étaient réalisées. 
 
B.  
Dans le cadre de la révision de la planification communale, entreprise dès 2003, le SIPAL/DGIP a considéré, en se fondant sur l'ISOS, qu'il fallait renoncer à la constructibilité du secteur Clos Marcand - hormis les deux parcelles déjà bâties -, en contrepartie de nouvelles surfaces affectées ailleurs en zone à bâtir. Le projet de révision de la planification a ensuite été remanié. Selon le rapport d'aménagement du 16 septembre 2015, le statut de périmètre de centre local accordé à la commune en juin 2015 avait été validé, mais son tracé n'était pas encore finalisé. Ce périmètre incluait les parcelles nos 1960 et 1961. Le plan d'affectation du sol "localité" prévoyait l'affectation de ces parcelles en zone d'extension du village vouée à une certaine densification. Dans le cadre du rapport de synthèse du 6 juin 2016, le SIPAL/DGIP a déploré que l'affectation du secteur Clos Marcand ait été maintenue en dépit de ses demandes. Afin d'éviter d'autres atteintes dans ce périmètre, il demandait que l'ensemble des parcelles situées à l'est du village soit inclus dans la zone agricole protégée I. 
Après une nouvelle révision du projet, il a été décidé de renoncer à la densification, notamment du secteur Clos Marcand. Les parcelles nos 1960 et 1961 sont colloquées en zone de village II avec un indice de surface bâtie (ISB) inchangé de 1/6, le nombre de niveaux étant limité à deux, combles compris. Ce projet a été mis à l'enquête le 23 janvier 2018. Il a donné lieu à deux oppositions, qui ont été levées par décision du Conseil municipal du 25 juin 2018. Une enquête complémentaire a eu lieu en mars 2019, introduisant des modifications concernant la disponibilité des terrains, la taxe sur la plus-value et la zone agricole protégée. Les oppositions formées à cet égard ont également été levées, par décision du 24 juin 2019. 
Le 26 août 2019, le Département du territoire et de l'environnement (DTE, actuellement: Département des institutions et du territoire - DIT) a partiellement approuvé la nouvelle planification, à l'exception d'une parcelle (n° 1967) qui demeurait dans son affectation initiale. 
 
 
C.  
Par arrêt du 8 septembre 2021, la CDAP a rejeté le recours formé par A.________ et six consorts, et a confirmé la décision du DIT du 26 août 2019 et celles du Conseil communal des 25 juin 2018 et 24 juin 2019. Le maintien des deux parcelles litigieuses en zone constructible était compatible avec les objectifs de sauvegarde de l'ISOS; les deux parcelles étaient entourées de bâtiments notés de 4 à 6 au recensement architectural, ce qui n'excluait pas la présence de nouvelles constructions. Lors de son inspection locale, la CDAP avait constaté que la rue Le Pavé était bordée de constructions. L'échappée sur l'environnement (de catégorie "ab" dans la version actuelle de l'ISOS) était préservée dès lors que les parcelles situées à l'est demeuraient non construites. Les deux parcelles étaient situées au centre du village, et propices à une densification mesurée. 
 
D.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ et six consorts demandent au Tribunal fédéral de réformer l'arrêt cantonal en ce sens que les parcelles n° s 1960 et 1961 sont rendues à la zone agricole; subsidiairement, ils concluent à ce que la parcelle n° 1960 soit rendue à la zone agricole, la cause étant renvoyée aux autorités cantonales et communale pour nouvelle instruction et nouvelle décision s'agissant de la parcelle n° 1961; plus subsidiairement, ils demandent le renvoi de la cause aux autorités inférieures pour nouvelles décisions dans le sens des considérants. Ils demandent la tenue d'une inspection locale. Ils requièrent également l'effet suspensif, qui a été accordé par ordonnance du 2 novembre 2021. 
La CDAP renonce à se déterminer et se réfère à son arrêt. La DGTL se réfère aux observations déposées en instance cantonale. Le Conseil communal de Concise conclut au rejet du recours, tout comme H.________ et I.________. Invité à se prononcer, l'Office fédéral du développement territorial estime que la présente cause ne nécessite pas d'observations de sa part. Le Conseil communal de Concise, ainsi que H.________ et I.________ ont ensuite persisté dans leurs conclusions. Les recourants ont maintenu leurs conclusions et persisté dans leur demande d'inspection locale, demandant également une expertise indépendante. Les intimés ont encore déposé de brèves observations. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours est dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) prise en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF) dans le domaine du droit public de l'aménagement du territoire et des constructions (art. 82 let. a LTF). Il est en principe recevable comme recours en matière de droit public selon les art. 82 ss LTF, aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. 
 
1.1. Les recourants ont pris part à la procédure de recours devant le Tribunal cantonal. Ils sont tous propriétaires de biens-fonds situés dans le voisinage immédiat des deux parcelles dont l'affectation est contestée et peuvent ainsi se prévaloir d'un intérêt personnel et digne de protection à l'annulation de l'arrêt attaqué. La qualité pour agir doit dès lors leur être reconnue au sens de l'art. 89 al. 1 LTF.  
 
1.2. Les autres conditions de recevabilité du recours en matière de droit public sont au surplus réunies, de sorte qu'il convient d'entrer en matière.  
 
1.3. Les recourants requièrent la tenue d'une inspection locale afin de démontrer les spécificités propres à chacune des deux parcelles et l'impact de nouvelles constructions sur le site protégé. L'état de fait figurant dans l'arrêt attaqué ne permettrait pas de se représenter la situation des sites du Pavé, du Clos Marcand et du Champ du Village; il comporterait des erreurs d'orientation et retiendrait faussement que le secteur est très construit. L'assertion selon laquelle le dégagement présenté par les parcelles n° s 1960 et 254 ne serait pas visible depuis la rue Le Pavé serait également erronée puisque le dégagement en question est visible depuis le bas ou le haut de la rue; la parcelle n° 1960 surplombe la rue, ce qui renforcerait l'impression de hauteur de toute nouvelle construction.  
 
1.3.1. Selon l'art. 102 LTF, l'instruction de la cause au Tribunal fédéral se limite à un échange d'écritures, sans audition personnelle ni inspection locale, l'autorité précédente devant produire le dossier de la cause.  
 
1.3.2. En l'occurrence, la CDAP a procédé à une inspection locale en date du 13 janvier 2021. S'il n'est pas reproduit in extenso dans l'arrêt attaqué, le procès-verbal de cette opération figure au dossier. Il en ressort clairement que la parcelle n° 1960 surplombe la rue Le Pavé. La hauteur du mur historique a été mesurée entre 1,40 m (au nord) et 2,03 m (au sud); l'échappée en direction du lac, prolongée par la parcelle n° 254, a également été constatée, en particulier depuis l'intersection entre la rue Le Pavé et la route de Provence. Les parties ont été invitées à s'exprimer sur le contenu de ce procès-verbal. Les recourants l'ont fait le 16 février 2021, sans émettre de réserve sur les erreurs d'orientation dont ils se prévalent céans. Celles-ci peuvent au demeurant facilement être rectifiées sur la base des pièces figurant au dossier, dont il ressort clairement que la rue Le Pavé est situé à l'ouest des parcelles litigieuses (c'est sans doute ce qu'entend la cour cantonale lorsqu'elle affirme que les surfaces "bordent à l'ouest la rue Le Pavé") et que l'essentiel des constructions est concentré sur le côté ouest de cette même rue. Les pièces produites en instance cantonale, ainsi que le dossier ISOS relatif à la commune de Concise contiennent suffisamment d'informations pour permettre à la cour de céans de statuer en toute connaissance de cause. Il ne se justifie donc pas de procéder à une inspection locale.  
 
1.3.3. Dans leur écriture du 22 juin 2022, les recourants demandent la réalisation d'une expertise indépendante afin d'envisager une affectation différenciée des deux parcelles. La question de savoir si la planification contestée tient suffisamment compte des considérations de l'ISOS ne nécessite toutefois aucune connaissance spécifique qui justifierait la mise en oeuvre d'une telle expertise.  
 
2.  
Dans un premier grief, les recourants se plaignent de constatations inexactes ou incomplètes des faits. La cour cantonale aurait omis le fait que la rue Le Pavé constitue une voie de communication historique d'importance régionale, mentionnée comme telle sur le nouveau PGA et bénéficiant selon le règlement de mesures de protection. Par ailleurs il ressortirait du procès-verbal du 13 janvier 2021 que les autorités communales et cantonales n'auraient mené aucune réflexion pour tenir compte de l'ISOS et rechercher des alternatives, aucune analyse scientifique n'ayant été commandée sur la question de l'affectation des parcelles. L'arrêt attaqué ignorerait aussi que les parcelles ont été acquises par les propriétaires actuels après le classement ISOS du village de Concise et que ceux-ci étaient donc conscients des risques liés à ce classement, ce dont il y aurait lieu de tenir compte dans la pesée d'intérêts. Les caractéristiques des parcelles seraient incorrectement énoncées: la parcelle n° 1960 surplombe la rue Le Pavé à l'est; cette rue présente une forte déclivité à ce niveau et le mur protégé qui la longe rendrait l'accès impossible; la forte surélévation de la parcelle n° 1960 rendrait impossible une intégration des bâtiments dans le terrain. Enfin, contrairement à ce que retient l'arrêt attaqué, les propriétaires ne sont au bénéfice d'aucun permis de construire, l'autorisation d'implantation n'ayant pas été utilisée à temps. 
 
2.1. Le Tribunal fédéral statue en principe sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF (ATF 142 I 155 consid. 4.4.3). La partie recourante ne peut critiquer les constatations de fait ressortant de la décision attaquée que si celles-ci ont été effectuées en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 145 V 188 consid. 2). Conformément aux art. 42 al. 2 et 106 al. 2 LTF, la partie recourante doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées. A défaut, il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui qui est contenu dans l'acte attaqué (ATF 145 V 188 consid. 2; 137 II 353 consid. 5.1).  
 
2.2. La situation des parcelles n° s 1960 et 1961 est décrite dans le détail dans la partie en fait de l'arrêt attaqué; la forme des parcelles et leur situation surélevée par rapport à la rue Le Pavé, la hauteur du mur sont dûment rappelées (consid. A.-C.), de même que la pente importante de la rue (description ISOS, consid. C.). Les difficultés à construire (mur et forte pente) ressortent des préavis de la DGIP qui sont cités (consid. D. et E.), et l'arrêt attaqué rappelle à plusieurs reprises la position de cette autorité préconisant d'abandonner la constructibilité du secteur litigieux. Les recourants ne sauraient prétendre qu'il n'y aurait eu aucune prise en compte de l'ISOS et de l'inventaire des voies de communication historiques (IVS) : le rapport de synthèse du 26 août 2013, mentionné au consid. F. de l'arrêt attaqué, considère en effet que ces deux inventaires ont été introduits dans le plan et le règlement (consid. F.). L'ISB réduit, choisi pour les deux parcelles en cause, est justifié par le but de protection découlant de l'ISOS. La cour cantonale n'a pas retenu que les propriétaires étaient au bénéfice d'un permis de construire, mais qu'il existait "un projet de construction déjà en cours depuis plusieurs années" (consid. 4), rappelant simplement ainsi l'intérêt privé des propriétaires. Le fait que ceux-ci ont acquis les parcelles après le classement ISOS n'apparaît enfin pas comme un élément pertinent sous l'angle de la pesée d'intérêts (cf. consid. 3.5 in fine).  
En définitive, les éléments relevés par les recourants ont été mentionnés dans l'arrêt attaqué et si la cour cantonale ne leur a pas accordé le poids qu'escomptent les recourants, aucun d'entre eux n'a été arbitrairement omis. Le grief relatif à l'établissement des faits doit être écarté. 
 
3.  
Invoquant les art. 1 et 3 LAT (RS 700), 3 al. 1, 5 et 6 LPN (RS 451) ainsi que 1ss OISOS (RS 451.12), les recourants estiment que l'arrêt attaqué ne tiendrait nullement compte des objectifs de protection de l'ISOS pour les secteurs Clos Marcand et Champ du Village, tels qu'ils ont constamment été rappelés par la DGIP, sans procéder à aucune pondération des intérêts. La CDAP aurait correctement rappelé les objectifs de protection, qui consistent notamment dans la conservation de tous les espaces libres en relation avec l'échappée sur l'environnement (EE V). Elle aurait en revanche ignoré que la rue Le Pavé est recensée comme voie de communication historique régionale impliquant la protection du mur qui longe la parcelle n° 1960. Les objections du SIPAL n'auraient pas été prises en compte. La situation (notamment l'environnement bâti) n'aurait pas changé depuis des décennies. Il serait faux de retenir que le dégagement n'est pas visible depuis la rue: il est en effet visible depuis le haut et le bas de la rue Le Pavé et le mur de soutènement de la rue Le Pavé ne fait que 1,4 m de hauteur; en outre la protection ne se limiterait pas à la vue directe, mais à l'absence de construction. Au regard de la surface réduite des parcelles, l'intérêt au maintien d'espace libre serait prépondérant. Les recourants contestent ensuite l'intégration des parcelles dans le périmètre de centre local, ainsi que le maintien en zone constructible, selon l'ancienne planification devenue obsolète. L'intérêt privé des propriétaires serait inexistant puisque ceux-ci connaissaient au moment de l'acquisition la nécessité d'adapter la planification pour tenir compte des mesures de protection, et qu'aucun projet concret ne serait en cours actuellement. A tout le moins une solution proportionnée devrait être trouvée afin de protéger prioritairement la parcelle n° 1960. Les recourants estiment enfin que la problématique des surfaces d'assolement devrait être examinée. 
 
3.1. Selon l'art. 6 al. 1 LPN, l'inscription d'un objet d'importance nationale dans un inventaire fédéral au sens de l'art. 5 LPN) indique que l'objet mérite spécialement d'être conservé intact ou en tout cas d'être ménagé le plus possible, y compris au moyen de mesures de reconstitution ou de remplacement adéquates. L'effet de protection ne se déploie en principe que dans le cadre de l'accomplissement de tâches fédérales (cf. art. 6 al. 2 en relation avec l'art. 2 LPN). En dehors de ce cadre, la protection des sites est assurée en premier lieu par le droit cantonal. Les inventaires fédéraux doivent toutefois être pris en compte dans les plans d'affectation, dans l'interprétation de notions indéterminées du droit de la construction ainsi que dans toute pesée d'intérêts qui doit être effectuée dans les cas particuliers (cf. en particulier ATF 135 II 209 consid. 2.1; arrêt 1C_643/2020 du 7 janvier 2022 consid. 3.2). Selon la mesure C11 du Plan directeur du canton de Vaud, les inventaires relatifs à la protection du patrimoine culturel sont intégrés dans toutes les planifications et constituent des données de base pour les projets cantonaux, régionaux ou communaux. L'ISOS dispose d'un effet d'alerte, soit un effet qui n'est pas directement contraignant, mais doit être concrétisé par les dispositions adéquates.  
Les autorités en charge de l'aménagement du territoire bénéficient d'une importante liberté d'appréciation dans l'accomplissement de leurs tâches et notamment dans leurs tâches de planification (cf. art. 2 al. 3 LAT). Cette liberté d'appréciation n'est toutefois pas totale. L'autorité de planification doit en effet se conformer aux buts et aux principes d'aménagement du territoire tels qu'ils résultent de la Constitution (art. 75 Cst.) et de la loi (art. 1 et 3 LAT), et assurer des mesures de protection adéquates (ATF 129 II 63 consid. 3.1). 
 
3.2. La fiche ISOS décrit la commune de Concise comme une succession de noyaux distincts s'étendant des rives du lac de Neuchâtel au pied du Mont-Aubert en suivant le cheminement de la rue principale. Elle met en exergue les maisons de maître et les habitations vigneronnes de qualité. Trois périmètres sont distingués: la partie inférieure (P 1), la partie médiane en pente (P 2, catégorie d'inventaire AB et objectif de sauvegarde A), la partie supérieure de la côte à la pente relativement accusée (P 3, catégorie d'inventaire BC, objectif de sauvegarde B). La parcelle n° 1960 est située dans ce dernier périmètre, alors que le n° 1961 se trouve à cheval sur les périmètres P2 et P3. S'agissant des échappées dans l'environnement (EE), l'EE V (catégorie d'inventaire ab, objectif de sauvegarde a) est constituée de "coteau de prés, vignes et vergers montant par paliers vers les forêts au pied du Mont-Aubert, quelques fermes foraines et utilitaires, colonisé par endroit par des habitations individuelles, déb. 21e s.". Cette échappée est située de part et d'autre (ouest et est) des périmètres P2 et P3. Elle est décrite comme suit: "Les abords de la partie supérieure sont encore vierges et offrent des points de vue extraordinaires, tant sur le village lui-même que sur le lac. Seule une rangée de maisons individuelles du début du 21e siècle au caractère fortement intrusif (0.0.15) est venue s'implanter dans la partie supérieure du village, du côté ouest, altérant quelque peu l'atmosphère bucolique qui se dégage de ces vastes espaces. L'entrée orientale du noyau médian a conservé un fort caractère rural avec le jardin potager et le grand verger ceints d'un mur appartenant au domaine du Terraillex (0.0.16) ".  
Selon les explications relatives à l'ISOS (document disponible à l'adresse www.bak.admin.ch, consulté le 6 juin 2023), une échappée dans l'environnement est une aire ne présentant pas de limites clairement définies, mais jouant un rôle important dans le rapport entre espaces construits et paysage, p. ex. premier plan/arrière-plan, terrains agricoles attenants, versant de colline, rives, espace fluvial, nouveaux quartiers. 
 
3.3. Les deux parcelles font certes face à la partie est de l'échappée sur l'environnement V décrite ci-dessus. Leur constructibilité ne porterait toutefois pas directement atteinte à l'échappée en question puisqu'elles se situent en bordure de celle-ci, le long de la rue Le Pavé. Cette rue s'inscrit dans l'axe du tissu villageois; son côté ouest est construit de manière continue; à l'est, plusieurs bâtiments la bordent également (du sud au nord, sur les parcelles n° s 260, 261, 256, 255 et 253). Selon les constatations faites par la cour cantonale lors de son inspection locale, le mur historique qui borde la parcelle n° 1960 présente une hauteur de 1,4 à 2,03 mètres, de sorte que le dégagement n'est à tout le moins pas évident. Durant son inspection, la cour cantonale a ainsi pu constater que le dégagement est visible essentiellement depuis le chemin du Crêt du Truit, soit le chemin qui part perpendiculairement à l'est le long des parcelles n° 253 et 254. Elle s'est enfin rendue plus en amont sur la route de Provence (emplacement illustré dans la fiche ISOS, photographie 12), pour constater qu'il y avait un "léger dégagement" sur le lac, susceptible d'être masqué en cas de construction sur la parcelle n° 1960. L'examen de la photographie susmentionnée montre que le dégagement en question ne peut être considéré comme un "point de vue extraordinaire" tel que l'entend la description de l'ISOS.  
En admettant la constructibilité de la parcelle n° 1960 le long de la rue Le Pavé, l'autorité communale, puis la cour cantonale ont ainsi tenu compte de l'objectif de protection résultant de l'ISOS. Ces considérations valent a fortiori pour la parcelle n° 1961, dont l'emplacement est, de l'aveu même des recourants, moins problématique. 
 
3.4. Le PGA mentionne que la rue Le Pavé est une voie de communication historique d'importance régionale IVS (VD 1065 - avec tracé mentionné à titre indicatif), et l'arrêt attaqué le rappelle également. Le règlement prévoit ainsi que toute intervention susceptible de porter atteinte à ces voies doit être soumise au département cantonal compétent qui peut imposer des mesures de sauvegarde (ch. 6.3 al. 2). Les murs anciens et de soutènement ne doivent en principe être coupés par aucune ouverture nouvelle. Tous travaux les concernant devront faire l'objet d'une autorisation de la Municipalité, laquelle informera le département cantonal (ch. 6.5). Les recourants ne soutiennent pas que ces mesures de protection seraient insuffisantes. C'est donc au stade d'une éventuelle demande d'autorisation de construire que la question d'une atteinte au mur de soutènement devra être examinée, tout comme celle de l'intégration des constructions dans le milieu bâti. A cet égard, la nouvelle planification maintient les possibilités de construire consacrées dans le plan précédent, instituant ainsi pour ces parcelles un régime spécial par rapport au reste de la zone de village II: l'ISB reste à 1/6, et le nombre de niveaux habitables est limité à deux (art. 9.2 al. 2 et 9.6 al. 1 RPGA). L'effet de rehaussement redouté par les recourants est ainsi limité.  
 
3.5. Les recourants semblent se plaindre de l'impossibilité de remettre en cause par voie judiciaire l'intégration des parcelles n° s 1960 et 1961 dans le centre local, relevant que la délimitation des périmètres de centre ne fait pas l'objet d'une mise à l'enquête. Pour autant qu'une telle critique soit recevable, elle devrait être écartée puisque les recourants reprennent simplement sur ce point leurs critiques précédentes, qui ont été écartées ci-dessus. Il apparaît au demeurant que les deux parcelles s'inscrivent dans la continuité du bâti existant, de sorte que leur maintien en zone à bâtir n'est nullement critiquable au regard des règles sur la densification vers l'intérieur du milieu bâti (art. 1 al. 2 let. a bis LAT).  
Le maintien des parcelles en zone à bâtir apparaît ainsi en soi conforme aux exigences du droit fédéral, sans qu'il y ait à s'interroger sur l'intérêt privé des propriétaires concernés au regard de la date de l'acquisition et de l'existence d'un projet actuel. 
 
4.  
Les recourants estiment enfin qu'il conviendrait de vérifier l'affectation des parcelles en cause aux surfaces d'assolement (SDA). L'arrêt attaqué rappelle toutefois à ce propos (consid. H en fait in fine) que les parcelles n° 1960 et 1961 ne sont pas inventoriées en tant que SDA selon l'extrait de l'inventaire cantonal, ce qui a été confirmé lors de l'inspection locale par le représentant de la DGTL. Cela suffit à lever les doutes émis sur ce point par les recourants. 
 
5.  
Sur le vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté. Les frais judiciaires sont mis à la charge des recourants (art. 66 al. 1 LTF). Les intimés H.________ et I.________ obtiennent gain de cause, mais sont assistés d'un architecte, soit un mandataire qui n'est pas chargé professionnellement de la représentation des parties en justice. Ils n'ont donc pas droit à des dépens. La commune, qui agit dans l'exercice de ses attributions officielles, n'a pas non plus droit à des dépens (cf. art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 fr., sont mis à la charge des recourants. 
 
3.  
Il n'est pas alloué de dépens. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et de la Municipalité de Concise, à la Direction générale du territoire et du logement du canton de Vaud, au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, et à l'Office fédéral du développement territorial. 
 
 
Lausanne, le 19 juin 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
Le Greffier : Kurz