2C_1007/2018 16.10.2019
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale               
Tribunal federal                      
 
                 
 
 
2C_1007/2018  
 
 
Arrêt du 16 octobre 2019  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. et Mmes les Juges fédéraux Seiler, Président, Aubry Girardin, Donzallaz, Stadelmann et Hänni. 
Greffière : Mme Vuadens. 
 
Participants à la procédure 
1.       Commune de Finhaut, 
2.       Commune de Martigny, 
3.       Commune de Martigny-Combe, 
4.       Commune de Salvan, 
5.       Commune de Trient, 
6.       Commune de Vernayaz, 
toutes représentées par Me Damien Revaz, avocat, 
recourantes, 
 
contre  
 
1.       Etat du Valais, 
       représenté par Me Marie-Claire Pont Veuthey, 
       avocate, 
2.       Chemins de fer fédéraux suisses CFF, 
représentés par Me Luc Jansen, avocat, 
intimés. 
 
Objet 
Redevance hydraulique, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton 
du Valais, Cour de droit public, du 5 octobre 2018 
(A1 13 384, A1 16 201 et A1 16 202). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Les Chemins de fer fédéraux suisses (ci-après: CFF) sont au bénéfice de concessions de forces hydrauliques qui leur ont été octroyées par les communes valaisannes de Finhaut, Martigny, Martigny-Combe, Salvan, Trient et Vernayaz (ci-après: les Communes). Le 1 er décembre 2012, les CFF ont indiqué à chacune desdites communes le montant de redevance hydraulique qu'ils allaient leur verser pour l'année 2012, à savoir 1'561'520 fr. à la commune de Finhaut, 15'680 fr. à la commune de Martigny, 229'120 fr. à la commune de Martigny-Combe, 1'712'960 fr. à la commune de Salvan, 766'800 fr. à la commune de Trient et 476'040 fr. à la commune de Vernayaz. Le 19 décembre 2012 toutefois, les CFF leur ont signifié qu'ils allaient amputer de 60% les montants annoncés le 1 er décembre 2012, pour tenir compte de l'impôt spécial cantonal sur les forces hydrauliques (ci-après: l'impôt spécial), auquel ils s'estimaient désormais assujettis, comme le concluait l'avis de droit qui avait été rédigé sur mandat de l'actuel Département des finances et de l'énergie du canton du Valais (ci-après: le Département cantonal).  
 
A.b. Le 4 novembre 2013, les Communes ont ouvert devant le Tribunal cantonal, Cour de droit public, du canton du Valais (ci-après: le Tribunal cantonal) une action de droit public dirigée contre les CFF et contre l'Etat du Valais (ci-après: le Canton). La cause a été enregistrée sous le n° A1 13 384.  
Contre les CFF, les Communes concluaient à ce que ceux-ci soient condamnés à verser 549'792 fr. à la commune de Finhaut, 9'408 fr. à la commune de Martigny, 137'472 fr. à la commune de Martigny-Combe, 1'009'278 fr. à la commune de Salvan, 460'808 fr. à la commune de Trient et 271'584 fr. à la commune de Vernayaz, avec intérêt à 5% dès le 31 janvier 2013. 
Contre le Canton, les Communes ont conclu à ce qu'il soit constaté que celui-ci n'avait pas le droit d'assujettir les CFF à l'impôt spécial. 
Le Canton a conclu à l'irrecevabilité de l'action à titre principal. A titre subsidiaire, il a proposé son rejet et a pris des conclusions reconventionnelles en paiement contre les Communes en restitution de montants qu'elles avaient perçus des CFF au titre de redevances et qui auraient dû, à son avis, lui être versés au titre de l'impôt spécial. Les CFF ont conclu à l'irrecevabilité de l'action à titre principal; à titre subsidiaire, ils ont conclu à son rejet et à ce que les Communes leur versent 2'286'672 fr. (recte: 2'856'672 fr.; art. 105 al. 2 LTF) dès le 31 janvier 2012, à titre de restitution de l'impôt spécial indûment perçu en 2011. 
 
A.c. Le 27 juin 2014, le Département cantonal a notifié aux CFF trois décisions de taxation portant sur l'impôt spécial dû pour les années 2010, 2011 et 2012.  
Tant les Communes que les CFF ont formé une réclamation contre ces décisions de taxation auprès du Département cantonal, qui a statué le 13 février 2015. Contre ces décisions sur réclamation, les Communes et les CFF ont formé un recours administratif auprès du Conseil d'Etat du canton du Valais, qui a statué le 15 juin 2016 en rejetant le recours des CFF et des Communes après avoir, pour ces dernières, renoncé à se prononcer sur leur qualité pour agir, étant donné le caractère infondé de leurs griefs. Les Communes (cause enregistrée sous n° A1 16 201) et les CFF (cause enregistrée sous n° A1 16 202) ont formé un recours de droit administratif auprès du Tribunal cantonal contre la décision du 15 juin 2016 du Conseil d'Etat. 
 
B.   
Le Tribunal cantonal a joint les causes A1 13 384 (action de droit public), A1 16 201 et A1 16 202 (recours de droit administratif) et statué par arrêt du 5 octobre 2018. Dans la cause A1 13 384, il a " débouté " les Communes, le Canton et les CFF de l'ensemble de leurs conclusions. S'agissant de la cause A1 16 201, il a estimé que le recours de droit administratif des Communes était irrecevable; enfin, il a rejeté le recours formé par les CFF dans la cause A1 16 202. 
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, les Communes demandent au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du 5 octobre 2018 dans les causes A1 13 384 et A1 16 201 et de les renvoyer au Tribunal cantonal pour nouvelle décision, sous suite de frais et dépens. Elles soutiennent en substance que le Tribunal cantonal a violé le droit en considérant qu'elles ne pouvaient pas agir par la voie de l'action de droit public contre le Canton et contre les CFF (cause A1 13 384) et qu'elles n'avaient pas qualité pour recourir pour contester les décisions de taxation d'impôt spécial qui avaient été notifiées aux CFF (cause A1 16 201). 
Le Tribunal cantonal s'est déterminé, contestant la qualité de partie des Communes. Les CFF et le Canton se sont déterminés et concluent au rejet du recours, sous suite de frais et dépens. Les Communes ont répliqué. Le Canton a dupliqué, alors que les CFF ont indiqué renoncer à le faire. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF). Il contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 141 II 113 consid. 1 p. 116). 
 
1.1. L'arrêt attaqué a déclaré irrecevable le recours de droit administratif formé par les Communes contre les décisions de taxation notifiées aux CFF et les a " déboutées " de leurs conclusions dans l'action de droit public contre les CFF et le Canton. L'utilisation du verbe " débouter " est équivoque et doit être interprétée à la lumière des considérants de l'arrêt. Le raisonnement du Tribunal cantonal, s'il ne se caractérise pas par sa limpidité s'agissant de l'action de droit public, permet toutefois de comprendre qu'il estime que les Communes ne peuvent ouvrir action contre le Canton ni en application de la législation fédérale sur l'utilisation des forces hydrauliques ni en vertu du cantonal (consid. 1 à 3 de l'arrêt attaqué) et qu'il en va de même s'agissant de leur action contre les CFF (consid. 5 de l'arrêt attaqué). Une telle motivation équivaut à un refus d'entrer en matière sur l'action déposée par les Communes. L'arrêt attaqué doit ainsi être considéré comme une décision d'irrecevabilité, tant en ce qui concerne le recours de droit administratif que l'action de droit public.  
 
1.2. Dans une procédure administrative, l'auteur d'un recours ou d'une action déclaré irrecevable par une autorité inférieure pour défaut de qualité pour recourir ou pour agir est en principe habilité à contester l'arrêt d'irrecevabilité par un recours en matière de droit public en application de l'art. 89 al. 1 LTF, lorsque l'arrêt au fond aurait pu être déféré au Tribunal fédéral par cette voie de droit (arrêt 2C_711/2018 du 7 juin 2019 destiné à la publication, consid. 1.1 non publié; ATF 135 II 145 consid. 3.2 p. 149; 131 II 497 consid. 1 p. 500). Tel est le cas en l'espèce, dès lors que les causes litigieuses qui ont été jointes dans l'arrêt attaqué concernent le montant de redevances hydrauliques et l'impôt spécial, soit des domaines qui relèvent du droit public (art. 82 let. a LTF), qui ne tombent pas sous le coup de l'une des exceptions de l'art. 83 LTF et dont l'arrêt au fond émanant du Tribunal cantonal aurait pu faire l'objet d'un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral. Le fait que les recourantes soient des communes, à savoir des collectivités publiques dont la recevabilité du recours au Tribunal fédéral est en principe soumise à des conditions partiellement différentes (cf. art. 89 al. 2 let. c et d LTF) et, en lien avec l'art. 89 al. 1 LTF, plus strictes que celles imparties aux particuliers (cf. sur ces conditions, arrêt 2C_282/2017 du 4 décembre 2017 consid. 1.2), n'y change rien. Dans ces circonstances, il convient d'admettre que les communes recourantes disposent d'un intérêt digne de protection à faire vérifier que, sur le plan cantonal, le droit de recourir que leur confère le droit fédéral (cf. art. 111 LTF), voire, le cas échéant, la procédure cantonale, soit garanti. Elles ont donc qualité pour recourir.  
 
1.3. Dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF), rendue par une dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF), le recours, déposé en temps utile (art. 45 al. 1 et 100 al. 1 LTF) et dans les formes requises (art. 42 LTF), est par conséquent recevable.  
 
2.   
L'objet de la contestation devant le Tribunal fédéral ne concerne pas le fond, mais exclusivement la recevabilité (ATF 145 II 168 consid. 2 p. 170 s.; 135 II 145 consid. 3.1 p. 148). En d'autres termes, il ne s'agit pas de se prononcer sur l'éventuel bien-fondé des conclusions au fond formulées par les Communes sur le plan cantonal, mais de déterminer si c'est à juste titre que le Tribunal cantonal a refusé d'entrer en matière. Les recourantes ne s'y trompent pas, puisqu'elles font uniquement grief à l'arrêt attaqué de leur avoir dénié à tort la qualité pour agir. 
Plusieurs procédures sont concernées, qui ont été jointes dans l'arrêt attaqué, à savoir une action directe contre les CFF, une action directe contre le Canton et un recours contre la décision de taxation des CFF. Il convient de vérifier séparément si c'est à juste titre que le Tribunal cantonal a refusé la qualité pour agir, respectivement pour recourir, des Communes pour chacune de ces procédures. 
 
3.   
L'action de droit public ouverte contre les CFF concerne le montant de la redevance hydraulique, les recourantes s'opposant à ce que les CFF réduisent de 60% le montant des redevances pour tenir compte de l'impôt spécial dû au Canton. 
 
3.1. Le Tribunal cantonal a considéré en substance que les recourantes n'avaient pas qualité pour introduire une telle action, car le montant des redevances était lié à l'impôt spécial prélevé par le Canton et mettait en jeu l'application de règles de droit fiscal, de sorte que les conclusions prises contre les CFF sortaient du cadre de l'art. 71 al. 1 de la loi fédérale du 22 décembre 1916 sur l'utilisation des forces hydrauliques (LFH; RS 721.80) et de l'art. 97 al. 1 de la loi valaisanne du 28 mars 1990 sur l'utilisation des forces hydrauliques (LcFH; RS/VS 721.8).  
Les recourantes reprochent au Tribunal cantonal de ne pas avoir admis que le litige les opposant aux CFF, qui portait sur le montant des redevances, relevait non pas du droit fiscal, mais de la concession et tombait ainsi sous le coup de l'art. 71 al. 1 LFH, ce qui ouvrait la voie à une action de droit public. 
 
3.2. L'art. 71 al. 1 LFH prévoit que, sauf disposition contraire de la présente loi ou de l'acte de concession, les contestations entre le concessionnaire et l'autorité concédante au sujet des droits et des obligations découlant de la concession relèvent en première instance de l'autorité judiciaire cantonale, en seconde instance du Tribunal fédéral. L'art. 97 al. 1 de la LcFH reprend en substance le contenu de l'art. 71 al. 1 LFH et n'a sous cet angle pas de portée propre.  
Ces dispositions concernent les différends résultant des relations entre autorité concédante et concessionnaire (cf. ATF 126 II 171 consid. 1b p. 173 s.). Le montant de la redevance hydraulique est une obligation du concessionnaire qui constitue un élément essentiel de la concession (cf. ATF 128 II 112 consid. 10 c p. 126 s.). Un litige à ce sujet concerne donc bien une obligation découlant de la concession au sens de l'art. 71 al. 1 LTF (cf. en ce sens MERKER/ CONRADIN-TRIARCA, in Kommentar zum Energierecht, 2016, Vol. I, n° 32 ad art. 71 WRG et les références). Le litige qui oppose les recourantes aux CFF au sujet du montant de la redevance due entre donc dans le champ d'application de l'art. 71 al. 1 LFH, repris à l'art. 97 al. 1 LcFH. 
Certes, ce montant a des liens avec l'impôt spécial prélevé par le canton du Valais auprès des CFF. Cette interdépendance entre impôt spécial et redevance ne saurait cependant signifier qu'un litige sur la concession opposant les parties relève du droit fiscal, de sorte qu'une action directe n'est plus possible. Un tel raisonnement fait perdre toute portée à l'art. 71 al. 1 LFH
 
3.3. En refusant d'entrer en matière sur leur action, les juges précédents ont privé les recourantes, en tant qu'autorités concédantes, du droit d'accéder au Tribunal fédéral, comme le prévoit aussi l'art. 71 al. 1 LFH. Ce refus emporte donc également une violation de l'art. 111 al. 1 LTF en lien avec l'art. 89 al. 2 let. d LTF, qui prévoit précisément que la qualité de partie à la procédure devant toute autorité cantonale précédente doit être reconnue à quiconque a qualité pour recourir devant le Tribunal fédéral (cf. ATF 144 I 43 consid. 2.1 p. 45 s.; 135 II 145 consid. 5 p. 149 et les références). C'est donc a tort que le Tribunal cantonal a refusé la qualité pour agir des recourantes en lien avec l'action contre les CFF.  
Le recours doit donc être admis sur ce point. 
 
4.   
Au travers de leur action de droit public ouverte contre le Canton, les Communes contestent l'existence du droit de l'Etat du Valais d'assujettir les CFF à l'impôt spécial et concluent à la constatation qu'un tel droit n'existe pas. 
 
4.1. Selon l'arrêt attaqué, pareille action ne tombe pas sous le coup de l'art. 71 al. 1 LFH ni de l'art. 97 al. 1 LcFH, car le litige n'oppose pas le concessionnaire et l'autorité concédante. Or, le droit cantonal qui pose le fondement des actions de droit public, en particulier les art. 82 et 83 de la loi cantonale du 6 octobre 1976 sur la procédure et la juridiction administratives (LPJA; RS/VS 172.6), ne peut l'emporter sur les lois spéciales précitées et ne peut donc servir de fondement à l'action de droit public des Communes contre l'Etat du Valais.  
Les recourantes voient dans ce raisonnement une application arbitraire des art. 82 et 83 LPJA. 
 
4.2. Selon l'art. 82 al. 1 LPJA, le Tribunal cantonal connaît, comme juridiction unique, des actions relatives à des prétentions de nature patrimoniale, fondées sur le droit public, qui ne peuvent être l'objet d'une décision (art. 41 et 72) susceptibles d'un recours relevant de sa compétence. Quant à l'art. 83 al. 1 LPJA, il prévoit que l'action directe devant le Tribunal cantonal est ouverte dans les cas de : a) contestation de nature patrimoniale entre corporations de droit public; b) contestation de nature patrimoniale en relation avec des concessions ou des contrats administratifs auxquels une corporation ou un établissement de droit public est partie.  
On ne comprend pas, et le Tribunal cantonal ne l'explique pas non plus, pourquoi les art. 71 al. 1 LFH et 97 al. 1 LcFH, en tant que lex specialis, excluraient l'application des art. 82 et 83 LPJA. 
En effet, comme il l'a été indiqué, la législation sur les forces hydrauliques prévoit une procédure spéciale pour les litiges opposant le concessionnaire et le concédant. Ces dispositions ont un caractère exhaustif, mais seulement pour cette catégorie de litiges. Rien ne permet d'en déduire qu'elles excluraient toute compétence judiciaire pour les litiges de nature financière qui pourraient survenir entre autorités (en l'occurrence les Communes concédantes et le Canton). Or, les art. 82 et 83 LPJA prévoient précisément une action directe devant le Tribunal cantonal pour ce genre de litiges. En refusant d'entrer en matière sur l'action des Communes contre le Canton, l'arrêt attaqué méconnaît la portée des art. 71 al. 1 LFH (et de l'art. 97 al. 1 LcFH qui le reprend) et procède d'une application insoutenable des art. 82 et 83 LPJA. Il convient donc également d'admettre le recours sur ce point. 
 
5.   
Les Communes ont enfin formé un recours au Tribunal cantonal contre les décisions sur réclamation concernant la taxation portant sur l'impôt spécial pour les années 2010 à 2012 notifiées aux CFF. 
 
5.1. Selon le Tribunal cantonal, l'atteinte subie par les Communes sur le montant des redevances qu'elles encaissent des CFF est liée à l'impôt spécial dû au Canton. Or, l'impact de cet impôt provient de la protection que l'art. 49 al. 1 LFH assure aux intérêts du concessionnaire. Par ailleurs, aucune des lois cantonales ou fédérales qu'énumèrent les recourantes ne leur confère un droit de recours spécifique contre les décisions de taxation en matière d'impôt spécial au concessionnaire, de sorte que leurs conclusions sont irrecevables.  
Les recourantes considèrent que le Tribunal cantonal a violé les art. 89 al. 1 et 89 al. 2 let. c LTF en leur déniant la qualité pour recourir. Selon elles, la taxation des CFF en matière d'impôt spécial les limite dans leur autonomie en réduisant d'autant le montant de leur redevance et porte atteinte à leurs intérêts patrimoniaux spécifiques. 
 
5.2. Ce sont les CFF qui sont les destinataires des décisions de taxation en matière d'impôt spécial, qu'ils ont eux-mêmes contestées devant le Tribunal cantonal. Dans cette procédure, les Communes ne sont que des tiers. Selon la jurisprudence, la qualité pour recourir des tiers n'est admise que restrictivement. Pour avoir qualité pour recourir, le tiers doit être touché directement et se trouver, avec l'objet de la contestation, dans une relation particulière, étroite et digne d'être prise en considération, et avoir un intérêt pratique à l'annulation ou à la modification de la décision qu'il attaque, en ce sens que l'issue de la procédure doit pouvoir influencer sa situation de manière significative (ATF 139 II 279 consid. 2.2 p. 282; 135 II 145 consid. 6.1 p. 150; 172 consid. 2.1 p. 174; 133 V 188 consid. 4.3.3 p. 192 s.). Lorsque comme en l'espèce, le recours intervient en faveur du destinataire de la décision (pro Adressat; ATF 130 V 560 consid. 3.5 p. 564), la qualité pour recourir suppose que le tiers tire lui-même un désavantage immédiat de la décision contestée; à cet égard, le fait qu'il soit créancier du destinataire de la décision ne suffit pas (ATF 137 III 67 consid. 3.5 p. 73 ss; 130 V 560 consid. 3.5 p. 560; arrêt 2C_314/2013 19 mars 2014 consid. 1, in ZBl 116/2015 p. 146).  
L'art. 49 al. 2 LFH prévoit que les usines faisant l'objet d'une concession et l'énergie qu'elles produisent ne peuvent être grevées d'impôts spéciaux. Toutefois, si la législation cantonale fixe une redevance maximum inférieure au taux admis par les prescriptions fédérales, le canton peut percevoir un impôt spécial, pourvu que les deux taxes réunies n'excèdent pas ce taux. 
 
5.3. Il en découle qu'il existe une interdépendance ou à tout le moins un lien étroit entre le montant de la redevance, qui est de compétence communale, et l'impôt spécial, contribution cantonale, puisque l'art. 49 al. 2 LFH prévoit que ces deux charges cumulées ne peuvent excéder les taux admis par les prescriptions fédérales. Les communes sont donc touchées par le montant de l'impôt spécial. Toutefois, cette question ne relève pas de la procédure de taxation des CFF, qui ne fait que concrétiser, à l'égard du contribuable, l'impôt spécial. Ce n'est ainsi pas cette décision qui est susceptible de porter une atteinte directe à l'autonomie communale, voire de léser les Communes dans des prérogatives relevant de leur puissance publique. Cette taxation n'est que la conséquence du litige en amont, qui oppose les Communes créancières de la redevance au Canton, ainsi qu'aux CFF, et qui suppose de savoir si et à quelles conditions un impôt spécial peut être prélevé en vertu de l'art. 49 al. 2 LFH, compte tenu des redevances découlant des concessions passées avec les CFF et perçues jusqu'alors. Or, comme il l'a été vu, les Communes recourantes, précisément en litige avec le Canton et les CFF sur ce point, ont déposé à leur encontre une action de droit public sur laquelle le Tribunal cantonal doit entrer en matière (cf. supra consid. 3 et 4). C'est dans cette procédure qu'il conviendra aux parties de déterminer quelle part due par les CFF relève de l'impôt spécial ou de la redevance. La taxation n'en est que la conséquence.  
En refusant d'entrer en matière sur le recours des Communes en lien avec la taxation des CFF portant sur l'impôt spécial, le Tribunal cantonal n'a donc pas violé l'art. 89 LTF ni partant l'art. 111 al. 1 LTF
 
6.   
Ce qui précède conduit à l'admission partielle du recours. L'arrêt est partiellement annulé en tant qu'il refuse d'entrer en matière sur l'action de droit public ouverte par les recourantes contre respectivement les CFF et l'Etat du Valais et il est confirmé pour le surplus. La cause sera ainsi renvoyée au Tribunal cantonal pour qu'il entre en matière sur cette action. Il appartiendra à ce dernier, selon son issue, d'en tirer les conséquences sur les frais et dépens de sa décision initiale. 
 
7.   
Compte tenu de l'issue du litige, une partie des frais sera mise à la charge des recourantes, dont l'intérêt patrimonial est en cause, à parts égales et solidairement entre elles (art. 66 al. 1, 4 et 5 LTF), et une partie à la charge des CFF et du canton du Valais, dans la mesure où ils succombent (art. 66 al. 1 et 4 LTF). Des dépens réduits seront alloués aux CFF (art. 68 al. 1 LTF); les recourantes et le canton du Valais ne peuvent y prétendre (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est partiellement admis et l'arrêt est partiellement annulé. La cause est renvoyée au Tribunal cantonal pour qu'il statue dans le sens des considérants. 
 
2.   
Les frais, arrêtés à 8'000 fr., sont mis à raison de 4'000 fr. à la charge des recourantes, à parts égales et solidairement entre elles, de 2'000 fr. à la charge des CFF et de 2'000 fr. à la charge du canton du Valais. 
 
3.   
Les recourantes, débitrices solidaires, verseront aux CFF une indemnité de 2'000 fr. à titre de dépens réduits. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué au mandataire des recourantes, au Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour de droit public, ainsi qu'aux mandataires de l'Etat du Valais et des CFF. 
 
 
Lausanne, le 16 octobre 2019 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Seiler 
 
La Greffière : Vuadens