1B_253/2021 22.10.2021
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1B_253/2021  
 
 
Arrêt du 22 octobre 2021  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Kneubühler, Président, Jametti, Haag, Müller et Merz. 
Greffier : M. Parmelin. 
 
Participants à la procédure 
1. A.________, 
2. B.________ et C.________, 
tous représentés par Me Lionel Halpérin, avocat, 
recourants, 
 
contre  
 
République D.________, représentée par 
Me Urs Feller, avocat, 
intimée, 
 
Ministère public de la Confédération, Guisanplatz 1, 3003 Berne. 
 
Objet 
Procédure pénale; accès au dossier, 
 
recours contre la décision de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral du 5 mai 2021 (BB.2020.274-276). 
 
 
Considérant en fait et en droit :  
 
1.  
Le 3 juin 2011, le Ministère public de la Confédération a ouvert une procédure pénale contre inconnus des chefs de blanchiment d'argent qu'il a étendue le 1 er septembre 2011 à l'infraction de participation ou soutien à une organisation criminelle à l'encontre notamment de A.________, B.________ et C.________. Par décision du 5 septembre 2011, confirmée sur recours, il a admis la qualité de partie plaignante à la procédure de la République D.________.  
Par ordonnance du 26 octobre 2020, le Ministère public de la Confédération a accordé à la République D.________ le droit de consulter les pièces essentielles du dossier de la procédure pénale caviardées selon les considérants, sans l'autoriser à en lever des copies ni à prendre des notes. 
La Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral a rejeté le recours formé contre cette décision par A.________, B.________ et C.________ au terme d'une décision rendue le 5 mai 2021 que ces derniers ont déférée au Tribunal fédéral par la voie du recours en matière de droit public en concluant à son annulation et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
Les recourants ont déposé une écriture complémentaire le 29 juin 2021. Invités à se déterminer, le Ministère public de la Confédération conclut à l'irrecevabilité du recours alors que l'intimée et la Cour des plaintes ont renoncé à déposer des observations. 
Les recourants ont répliqué. 
 
2.  
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis. 
 
2.1. La Cour des plaintes considère que sa décision n'est pas sujette à recours, comme elle l'a indiqué au pied de celle-ci, en vertu de l'art. 79 LTF. Les recourants soutiennent pour leur part que la voie du recours en matière de droit public selon l'art. 84 LTF serait ouverte s'agissant d'une décision rendue en matière d'entraide pénale internationale. Ils se réfèrent à cet égard à la jurisprudence du Tribunal fédéral parue aux ATF 139 IV 194 et confirmée dans un arrêt non publié rendu le 7 octobre 2014 dans la cause 1C_368/2014, qui considère que l'accès au dossier pénal accordé à un Etat étranger, partie plaignante dans la procédure pénale, peut comporter des risques de transmission intempestive de renseignements susceptibles d'être utilisés à leur préjudice dans une procédure en cours dans cet Etat. Aussi, même si elle a pour cadre une procédure pénale, la décision qui accorde un tel accès est rendue en application des règles sur l'entraide judiciaire internationale en matière pénale et peut être contestée par un recours en matière de droit public selon l'art. 84 LTF, indépendamment de l'existence d'une procédure d'entraide judiciaire pendante au moment de statuer sur l'accès au dossier pénal. La Cour de céans ne saurait souscrire à cette argumentation à la lumière de la jurisprudence récente rendue en la matière (cf. arrêt 1B_350/2020 du 28 mai 2021 consid. 1 destiné à la publication).  
 
2.2. La décision attaquée a été rendue dans le cadre de la procédure pénale instruite par le Ministère public de la Confédération entre autres contre les recourants des chefs de blanchiment d'argent et de participation ou soutien à une organisation criminelle. L'octroi, sous certaines conditions, à la République D.________, en qualité de partie plaignante, du droit de consulter les pièces essentielles du dossier pénal sous une forme caviardée, confirmé sur recours par la Cour des plaintes, se fonde sur les dispositions topiques du Code de procédure pénale, soit les art. 101 ss CPP. La Cour des plaintes a en outre constaté de manière incontestée qu'aucune demande d'entraide judiciaire internationale en matière pénale n'était actuellement pendante avec la République D.________, même si elle n'a pas exclu qu'une nouvelle requête soit adressée aux autorités suisses par les autorités égyptiennes, de sorte que les règles et les dispositions de la loi fédérale sur l'entraide internationale en matière pénale ne s'appliquaient pas (consid. 1.1 et 2.3.1). Quoi qu'il en soit, l'existence d'une procédure d'entraide judiciaire pendante devant les autorités suisses importe peu. Elle ne ferait pas perdre son caractère principal (" seinen vorrangigen Charakter ") à la procédure pénale dans laquelle les dispositions relatives au droit d'accès au dossier doivent être mises en oeuvre dans le respect des principes applicables en matière d'entraide judiciaire (cf. art. 54 CPP; arrêts 1B_350/2020 du 28 mai 2021 consid. 1.7, destiné à la publication, et 1B_225/2020 du 6 août 2020 consid. 3.1).  
Ainsi, seule la voie du recours en matière pénale au sens des art. 78 ss LTF est ouverte pour contester la décision attaquée à l'exclusion du recours en matière de droit public fondé sur l'art. 84 LTF
A teneur de l'art. 79 LTF, le recours en matière pénale est irrecevable contre les décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral, sauf si elles portent sur des mesures de contrainte. Tel n'est pas le cas en l'espèce de la décision attaquée qui porte sur l'étendue de l'accès au dossier consenti par le Ministère public de la Confédération à l'intimée, partie plaignante dans la procédure pénale ouverte contre les recourants. Le fait que cet accès ait été dans un premier temps bloqué et suspendu ou que certains biens des recourants auraient fait l'objet de séquestres au cours de la procédure pénale ne permet pas de retenir que la décision litigieuse aurait un lien suffisamment étroit avec une mesure de contrainte et que l'exception prévue à l'art. 79 LTF n'entrerait pas en considération. 
Le législateur a clairement voulu limiter les possibilités de recours à l'autorité judiciaire suprême de la Confédération aux décisions de la Cour des plaintes concernant des mesures de contrainte, s'agissant de mesures graves qui portent atteinte aux droits fondamentaux et qui doivent pouvoir être contrôlées par le Tribunal fédéral au même titre que les décisions cantonales similaires (Message du Conseil fédéral du 28 février 2001 concernant la révision totale de l'organisation judiciaire fédérale, FF 2001 ch. 2.2.3 p. 4030/4031). L'absence de toute voie de droit ordinaire ou extraordinaire en vue de faire contrôler si les décisions incidentes de la Cour des plaintes relatives à l'accès au dossier pénal par la partie plaignante est conforme au droit et ne viole pas les droits fondamentaux des prévenus; elle ne constitue pas une lacune qu'il y aurait lieu de combler par la voie prétorienne. Les art. 29a et 30 al. 1 Cst. n'imposent pas un double degré de juridiction, mais se bornent à exiger que la décision du Ministère public de la Confédération rendue à cet égard puisse être déférée devant un organe judiciaire indépendant, qui jouit d'une pleine cognition en fait et en droit (ATF 133 IV 278 consid. 2.2), ce qui est le cas de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral. Les recourants n'indiquent d'ailleurs pas quelle norme légale, constitutionnelle ou conventionnelle leur conférerait un droit de contester la décision litigieuse devant un tribunal de la juridiction supérieure. Un double degré de juridiction en matière pénale n'est reconnu expressément qu'en faveur des personnes condamnées (cf. art. 32 al. 3 Cst., art. 2 du protocole n° 7 à la CEDH et art. 14 al. 5 du Pacte ONU II). Il ne saurait donc être question de faire une exception à l'art. 79 LTF pour ce motif. Le fait que les questions de la consultation du dossier pénal par la partie plaignante et de son incidence sur la situation des prévenus dans une procédure civile ou pénale pendante ou susceptible d'être ouverte à leur encontre à l'étranger ne pourraient être soumises à l'examen du Tribunal fédéral que dans le cadre d'une procédure pénale cantonale n'impose pas d'ouvrir une voie de recours exceptionnelle pour des raisons tirées d'une pratique unifiée en la matière entre les autorités cantonales et fédérales et corriger une inégalité de traitement entre les prévenus qui a été décidée consciemment par le législateur. 
Les recourants se prévalent enfin en vain de l'enjeu et de l'importance de la question litigieuse et des conséquences juridiques de la décision attaquée. Le législateur a en effet précisé dans la loi lorsqu'il entendait déroger à l'irrecevabilité d'un recours aux motifs que celui-ci soulève une question juridique de principe (art. 74 al. 2 let. a, 83 let. f ch. 2 et 85 al. 2 LTF) ou qu'il concerne un cas particulièrement important (cf. art. 84 LTF). Or, il n'a pas prévu pareille exception pour les recours en matière pénale dirigés contre les décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral qui ne concernent pas des mesures de contrainte. 
 
3.  
Le recours en matière droit de public, traité comme un recours en matière pénale, doit être déclaré irrecevable aux frais des recourants qui succombent (art. 65 et 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens à l'intimée, assistée d'un mandataire professionnel, qui n'a pas déposé d'observations. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est irrecevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge des recourants. 
 
3.  
Il n'est pas alloué de dépens. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties, au Ministère public de la Confédération et à la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral. 
 
 
Lausanne, le 22 octobre 2021 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
Le Greffier : Parmelin