7B_2/2023 12.03.2024
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
7B_2/2023  
 
 
Arrêt du 12 mars 2024  
 
IIe Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Abrecht, Président, 
Hurni et Hofmann. 
Greffière : Mme Paris. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Samantha Rieder, avocate, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public du Jura bernois-Seeland, rue du Débarcadère 20, 2503 Bienne. 
 
Objet 
Procédure pénale; levée de scellés, 
 
recours contre la décision de la Présidente du Tribunal régional des mesures de contrainte Jura bernois-Seeland du 6 mars 2023 (ARR 23 72 VAO). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Dans le cadre d'une procédure pénale dirigée contre A.________ pour délits de chauffard et infractions à la LCR (art. 90 al. 2, 3 et 4 LCR), le Ministère public du canton de Berne, Région Jura bernois-Seeland (ci-après: le Ministère public) a saisi et mis en sûreté un téléphone mobile iPhone, une tablette iPad, deux clés USB et un disque dur externe W Elements. A cette occasion, le prévenu a indiqué qu'il refusait que les autorités pénales examinent le contenu de l'ensemble des objets saisis et a demandé leur mise sous scellés, au motif que les différents appareils contenaient des données privées qu'il ne souhaitait pas partager. 
Par ordonnance du 8 février 2023, le Ministère public a ordonné le placement sous scellés des objets saisis lors de la perquisition du 7 février 2023. Par demande du 13 février 2023, le Ministère public a requis du Tribunal régional des mesures de contrainte Jura bernois-Seeland (ci-après: le TMC) la levée des scellés apposés sur les objets saisis lors de la perquisition au domicile du prévenu. 
 
B.  
P ar décision du 6 mars 2023, le TMC a admis la demande de levée de scellés, précisant que le Ministère public pouvait conserver à sa disposition les objets en cause, ainsi que l'intégralité de leurs données concernant la période du 10 au 14 septembre 2021. 
 
C.  
Par acte rédigé en allemand, A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre la décision du 6 mars 2023, en concluant principalement à sa réforme, en ce sens que la demande de levée de scellés du Ministère public soit rejetée. A titre subsidiaire, il conclut à l'annulation de la décision attaquée et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision au sens des considérants. 
Invités à se déterminer, le TMC et le Ministère public ont tous deux renvoyé à la décision du 6 mars 2023. Ces déterminations ont été transmises pour information au recourant. 
En raison de la réorganisation interne du Tribunal fédéral, le recours a été transmis à la IIe Cour de droit pénal, en fonction depuis le 1er juillet 2023. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Si l'acte de recours a été rédigé en allemand, comme le permet l'art. 42 al. 1 LTF, il n'y a pas, en l'espèce, de raison suffisante pour déroger à la règle générale selon laquelle l'arrêt est rendu dans la langue de la décision attaquée (cf. art. 54 LTF). 
 
2.  
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 149 IV 9 consid. 2; 146 IV 185 consid. 2). 
 
2.1. Dans le cadre d'un recours en matière pénale, le Tribunal fédéral contrôle uniquement l'application correcte par l'autorité cantonale du droit fédéral en vigueur au moment où celle-ci a statué (cf. art. 453 al. 1 CPP; ATF 145 IV 137 consid. 2.6 ss; 129 IV 49 consid. 5.3). Il n'y a donc pas lieu de prendre en compte les modifications de la loi en matière de scellés entrées en vigueur le 1er janvier 2024, la décision attaquée ayant été rendue le 6 mars 2023 (cf. arrêts 7B_1008/2023 du 12 janvier 2024 consid. 2.2; 7B_997/2023 du 4 janvier 2024 consid. 1.2).  
 
2.2. Conformément à l'art. 393 al. 1 let. c CPP, un recours n'est ouvert contre les ordonnances du TMC que dans les cas prévus par ledit code (cf. art. 380 CPP). Aux termes de l'art. 248 al. 3 let. a CPP, cette autorité statue définitivement sur la demande de levée des scellés au stade de la procédure préliminaire. Le code ne prévoit pas de recours cantonal contre les décisions rendues par le TMC dans le cadre de la procédure de levée des scellés. La voie du recours en matière pénale au Tribunal fédéral est ainsi en principe directement ouverte contre de tels prononcés (art. 80 al. 2 in fine LTF; ATF 143 IV 462 consid. 1; arrêt 1B_635/2022 du 15 juin 2023 consid. 2.1).  
 
2.3.  
 
2.3.1. L'ordonnance entreprise ne met pas un terme à la procédure pénale. Elle a donc un caractère incident. Dans une telle situation, le recours au Tribunal fédéral n'est ouvert qu'en présence d'un risque de préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF, l'art. 93 al. 1 let. b LTF n'étant généralement pas applicable en matière pénale (ATF 144 IV 127 consid. 1.3; 143 IV 462 consid. 1). Le préjudice irréparable se rapporte à un dommage de nature juridique qui ne puisse pas être réparé ultérieurement par un jugement final ou une autre décision favorable au recourant (ATF 147 IV 188 consid. 1.3.2; 144 IV 127 consid. 1.3.1). Il incombe au recourant qui attaque une décision incidente d'alléguer les faits qu'il considère comme propres à fonder sa qualité pour recourir et ceux permettant de démontrer l'existence d'un préjudice irréparable lorsque celui-ci n'est pas d'emblée évident (cf. art. 42 al. 2 LTF; ATF 148 IV 155 consid. 1.1; 141 IV 284 consid. 2.3; arrêt 1B_426/2022 du 29 novembre 2022 consid. 1.2).  
 
2.3.2. Une décision de levée des scellés est en principe susceptible de causer un préjudice irréparable lorsque, selon le recourant, la levée des scellés porterait atteinte à des secrets protégés, soit notamment au secret professionnel de l'avocat et/ou au secret commercial ou d'affaires (ATF 143 IV 462 consid. 1; arrêts 1B_612/2022 du 15 mai 2023 consid. 2.1; 1B_564/2022 du 14 février 2023 consid. 2.3; 1B_282/2021 du 23 novembre 2021 consid. 2.1). Il appartient à celui qui a demandé la mise sous scellés de démontrer, de manière suffisante, l'existence du secret invoqué (cf. art. 42 al. 2 LTF; ATF 147 IV 453 consid. 1.4.8; 145 IV 273 consid. 3.2; arrêts 7B_44/2023 du 24 août 2023 consid. 1.2.3; 1B_426/2022 du 29 novembre 2022 consid. 1.2) ou l'intérêt privé prépondérant au maintien du secret dont il se prévaut (ATF 145 IV 273 consid. 3.3).  
 
2.3.3. Il appartient généralement au juge du fond de rendre une décision sur l'exploitabilité d'un moyen de preuve, ainsi que de procéder à son appréciation, eu égard notamment aux questions en lien avec les faits et la culpabilité; l'interdiction d'utilisation des éléments de preuves prétendument obtenus de manière contraire aux art. 140 et 141 CPP - qui impose, le cas échéant, la restitution ou le retrait du dossier des moyens de preuve concernés - n'entre en considération, au cours de la procédure préliminaire de levée des scellés (art. 248 al. 3 let. a CPP), que si l'illicéité est manifeste (ATF 143 IV 387 consid. 4.4; 142 IV 207 consid. 9.8; arrêt 1B_443/2018 du 28 janvier 2019 consid. 1.2). L'intéressé doit alors faire valoir un intérêt juridiquement protégé particulièrement important à un constat immédiat du caractère inexploitable de la preuve (ATF 144 IV 127 consid. 1.3.1; 143 IV 387 consid. 4.4).  
 
2.3.4. En l'espèce, pour démontrer la recevabilité de son recours, le recourant se contente de faire valoir qu'il s'est fondé sur "des intérêts privés au maintien du secret" pour demander la mise sous scellés des objets saisis. Il n'étaye toutefois nullement son argumentation quant au secret dont il se prévaut, conformément à son devoir de motivation en la matière (cf. consid. 2.3.2 supra). L'arrêt 1B_412/2021 auquel il se réfère pour fonder la recevabilité de son recours ne lui est d'aucun secours dans la mesure où, dans cette affaire, la configuration n'était pas la même, le Ministère public étant la partie recourante. Il s'ensuit que par son argumentation, le recourant ne démontre pas en quoi la décision attaquée serait susceptible de lui causer un préjudice irréparable. Un tel préjudice n'apparaît au demeurant pas d'emblée évident.  
 
2.3.5. Dans ces circonstances, il ne sera pas entré en matière sur les griefs du recourant développés en lien avec la perquisition, en particulier l'absence de soupçons suffisants et le caractère inexploitable d'images prétendument privées (cf. les griefs y relatifs soulevés cependant au fond, p. 8 à 12 du mémoire de recours), lesquels présupposent que le recours en matière pénale sur la question principale - soit la levée de scellés - soit recevable (cf. arrêt 7B_47/2023 du 21 septembre 2023 consid. 4.2 et les références). Le recourant ne fait au demeurant valoir aucun intérêt juridiquement protégé qui justifierait le constat immédiat du caractère inexploitable des preuves en cause, permettant d'admettre exceptionnellement l'existence d'un préjudice irréparable (cf. consid. 2.3.3 supra).  
 
2.4. Le recours se révèle ainsi irrecevable.  
 
3.  
Le recourant, qui succombe, supportera les frais judiciaires (cf. art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est irrecevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué au recourant, au Ministère public du Jura bernois-Seeland et à la Présidente du Tribunal régional des mesures de contrainte Jura bernois-Seeland. 
 
 
Lausanne, le 12 mars 2024 
 
Au nom de la IIe Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Abrecht 
 
La Greffière : Paris