1A.130/2006 28.07.2006
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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
1A.130/2006 /col 
 
Arrêt du 28 juillet 2006 
Ire Cour de droit public 
 
Composition 
MM. les Juges Aemisegger, Juge présidant, 
Reeb et Eusebio. 
Greffier: M. Kurz. 
 
Parties 
A.________, 
recourante, représentée par Me Denis Merz, avocat, 
 
contre 
 
Office fédéral de la justice, Office central USA, Bundesrain 20, 3003 Berne. 
 
Objet 
Entraide judiciaire internationale en matière pénale avec les USA, 
 
recours de droit administratif contre la décision de l'Office fédéral de la justice, Office central USA, 
du 23 mai 2006. 
 
Faits: 
A. 
En exécution d'une demande d'entraide judiciaire formée le 21 septembre 2001 par les Etats-Unis d'Amérique, l'Office fédéral de la Justice, Office central USA, a notamment ordonné le blocage du compte détenu par la société A.________ auprès de la banque X.________, ainsi que la saisie de la documentation y relative. Par arrêt du 3 mai 2002 (1A.70/2002), le Tribunal fédéral a confirmé ces décisions. 
B. 
Le 16 septembre 2005, l'Office central a interpellé les autorités américaines sur la nécessité de maintenir le blocage du compte. Au terme de plusieurs prises de position, l'Office central a refusé, le 24 février 2006, de lever la saisie, en relevant qu'en dépit d'un abandon de poursuites contre les principaux inculpés - après un accord avec les lésés -, l'enquête demeurait dirigée, notamment, contre B.________, administrateur président de A.________; les avoirs déposés sur le compte étaient susceptibles d'être confisqués, en tant que rétribution d'une activité illégale. 
Par décision incidente du 23 mai 2006, l'Office central a déclaré irrecevable l'opposition formée par A.________ contre sa décision du 24 février 2006. L'opposante ne démontrait pas l'existence d'un préjudice irréparable. L'Office central a néanmoins procédé à un examen sur le fond; il a considéré que l'autorité américaine, soit la SEC, n'avait pas fini son enquête, laquelle pouvait aboutir à une décision de confiscation si aucun accord n'était conclu avec les lésés. Il y avait toutefois lieu de fixer un délai de trois mois aux autorités américaines afin qu'elles ouvrent une procédure de confiscation, à défaut de quoi le blocage serait levé. 
C. 
A.________ forme un recours de droit administratif. Elle conclut à l'annulation de la décision du 23 mai 2006, à la levée du blocage du compte, subsidiairement au renvoi de la cause à l'OFJ pour nouvelle décision. 
L'OFJ se réfère à sa décision. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité du recours de droit administratif. 
1.1 La décision attaquée est un prononcé d'irrecevabilité. En effet, même s'il examine les conditions du maintien de la mesure de blocage et pose à l'autorité requérante un délai pour agir en confiscation, l'Office central n'en a pas moins considéré qu'il n'existait pas de dommage irréparable au sens de l'art. 11 LTEJUS. Le dispositif de la décision attaquée ne laisse subsister aucun doute à ce sujet, et la recourante ne peut, par conséquent, que contester les considérations émises à titre principal sur ce point. 
1.2 Selon les art. 11 LTEJUS et 80g al. 2 EIMP, une décision incidente - telle une saisie ou le refus de lever celle-ci - ne peut faire l'objet d'un recours ou d'une opposition immédiats que si elle cause à l'intéressé un préjudice irréparable. Selon la jurisprudence, il incombe au recourant d'indiquer, dans l'acte de recours, en quoi consiste le préjudice prétendument subi, et pourquoi ce préjudice ne serait pas réparé par un prononcé annulant, le cas échéant, la décision de clôture qui interviendra ultérieurement. Le préjudice susceptible d'entrer en considération consiste, par exemple, dans l'impossibilité de satisfaire à des obligations contractuelles échues (paiement de salaires, intérêts, impôts, prétentions exigibles, etc.), dans le fait d'être exposé à des actes de poursuite ou de faillite, ou à la révocation d'une autorisation administrative, ou dans l'impossibilité de conclure des affaires sur le point d'aboutir. La seule nécessité de faire face à des dépenses administratives courantes ne suffit pas, en règle générale, à rendre vraisemblable un préjudice immédiat et irréparable (ATF 128 II 353 consid. 3). 
1.3 En l'occurrence, l'Office central a nié l'existence d'un préjudice irréparable. L'opposante avait produit des factures pour 133'556 fr. au total; elle se prétendait menacée d'expulsion de ses locaux, et ses administrateurs pouvaient être personnellement responsables du défaut de paiement des cotisations sociales. Toutefois, l'opposante disposait notamment d'un compte qui avait été libéré peu après la saisie, et il n'était pas crédible qu'elle ne possède pas au moins un compte courant pour la conduite de ses affaires. Elle ne produisait pas d'informations vérifiables sur sa situation financière, tel par exemple qu'un rapport de son réviseur. 
1.4 Dans son recours de droit administratif et dans la lettre qui l'accompagne, la recourante insiste sur les difficultés financières auxquelles elle devrait faire face, en particulier le paiement de charges sociales; ses administrateurs seraient déjà intervenus par d'importants apports de fonds. La recourante ne dit toutefois rien sur les autres ressources dont elle pourrait bénéficier en dehors du compte séquestré. Or, une société dont les avoirs sont soumis à une mesure de saisie ne saurait se contenter, pour démontrer l'existence d'un préjudice irréparable, d'alléguer ses obligations contractuelles échues. Elle doit en outre rendre à tout le moins vraisemblable qu'elle ne dispose pas d'autres avoirs ou de créances qui lui permettraient de s'acquitter de ses obligations. L'Office central a considéré que la situation financière de la recourante n'était pas suffisamment établie, et la recourante ne fournit aucune information supplémentaire qui permettrait d'arriver à une autre conclusion. 
2. 
Il s'ensuit que le prononcé d'irrecevabilité ne viole pas le droit fédéral, et que le recours de droit administratif doit être rejeté, aux frais de la recourante. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est rejeté. 
2. 
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge de la recourante. 
3. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire de la recourante et à l'Office fédéral de la justice (B 0129106). 
Lausanne, le 28 juillet 2006 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
Le juge présidant: Le greffier: