5A_863/2022 06.07.2023
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
5A_863/2022  
 
 
Arrêt du 6 juillet 2023  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Herrmann, Président, 
von Werdt et Bovey. 
Greffière : Mme Bouchat. 
 
Participants à la procédure 
A.A.________, 
représentée par Me Alain Schweingruber, avocat, 
recourante, 
 
contre 
 
Autorité de protection de l'enfant et de l'adulte (APEA), 
rue de la Préfecture 12, 2800 Delémont, 
 
B.A.________ et C.A.________ par leur curatrice, 
E.________, Service régional du district de Delémont, 
 
D.________, 
 
Objet 
changement de curateur des enfants, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour administrative du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura du 29 septembre 2022 (ADM 89 / 2022 + AJ 90 / 2022). 
 
 
Faits :  
 
A.  
A.A.________ et D.________ se sont mariés au U.________ en 2004. Le père vit depuis 1996 en Suisse et la mère l'y a rejoint en 2006. De cette union, sont nées deux filles B.A.________, née en 2011, et C.A.________, née en 2013. 
Début 2016, les parties se sont séparées. 
Par jugement du 11 mars 2016, la Juge civile du Tribunal de première instance du canton du Jura (ci-après : la juge civile) a, par voie de mesures protectrices de l'union conjugale, attribué à la mère la garde provisoire sur les enfants, maintenu la mesure de curatelle éducative (art. 308 al. 1 CC) instituée en 2013 en faveur des enfants, en l'étendant à la surveillance des relations personnelles père-enfants (art. 308 al. 2 CC), et homologué la convention passée entre les parties, laquelle prévoyait, notamment, l'exercice du droit de visite du père au Point Rencontre, sous surveillance de la curatrice, E.________, assistante sociale au sein du Service régional du district de Delémont, avec possibilité d'extension à un droit de visite usuel. Une procédure pénale a également été ouverte contre le père pour voies de fait, injure et menaces. 
Durant l'été 2019, à la suite du départ du père au U.________ pendant plus d'un mois, la mère s'est trouvée en difficulté, devant notamment assumer son travail et la gestion des enfants. Depuis lors, elle a catégoriquement refusé que le père voie ses deux filles. Au mois d'août 2019, elle a déposé une demande unilatérale en divorce. 
Par décision de mesures provisionnelles du 10 février 2020, la juge civile a notamment retiré le droit de désigner la résidence habituelle des enfants aux parents, ordonné le placement des deux enfants au I.________ de V.________ dès le 1er mars 2020 au plus tôt, et chargé l'autorité de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après : l'APEA), respectivement la curatrice, dudit placement et de l'exercice du droit de visite des parents. La juge civile a notamment considéré que la garde ne pouvait pas être attribuée à la mère, compte tenu de son opposition à l'exercice du droit de visite du père et de son déni des intérêts et des besoins de ses enfants; les violences physiques du père sur B.A.________ n'étaient pour le surplus objectivées par aucun constat ou signalement d'un professionnel de l'enfance, malgré le suivi des enfants depuis plusieurs années. 
Le 9 décembre 2020, la Dre F.________, psychologue FSP, a déposé un rapport d'expertise pédopsychiatrique, au terme duquel elle a conclu à la poursuite du placement des enfants et au maintien de la mesure de curatelle. 
En janvier 2021, à la suite des déclarations de B.A.________, selon lesquelles son père aurait été violent envers elle lors de l'exercice de son droit de visite (à la question de sa fille de savoir pourquoi il buvait, il l'aurait menacée avec un couteau si elle en parlait), son droit a été limité, en ce sens qu'il serait dorénavant exercé dans l'enceinte du I.________. 
Il ressort également d'un rapport non daté du centre précité, transmis fin mai 2021 par la curatrice à la juge civile, que les enfants ont relaté des évènements inquiétants au sujet de leur père en novembre 2020. 
Par jugement du 30 juin 2021, la juge civile a notamment prononcé le divorce des parties, attribué à ceux-ci l'autorité parentale conjointe, tout en leur retirant le droit de déterminer le lieu de vie des enfants, respectivement la garde sur ceux-ci, dit que le droit de visite des deux parents sur les enfants serait fixé par la curatrice, ordonné le maintien du placement des enfants auprès du I.________, pour une durée indéterminée, et de la curatelle éducative au sens de l'art. 308 al. 1 et 2 CC, et dit que la curatrice évaluerait régulièrement la prise en charge des enfants et l'exercice du droit de visite des parents, en particulier celui du père. 
 
B.  
Par décision du 11 mai 2022, le Président de l'APEA de la République et canton du Jura a rejeté la requête déposée par la mère en changement de curateur. 
 
Par arrêt du 29 septembre 2022, la Cour administrative du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura a rejeté le recours formé par la mère. 
 
C.  
Par acte du 3 novembre 2022, A.A.________ interjette un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre l'arrêt précité, en concluant à l'annulation et la réforme de celui-ci en ce sens que la curatrice est révoquée et remplacée sans délai. La recourante requiert également l'assistance judiciaire. 
 
Des observations n'ont pas été requises. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours est dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) de nature non pécuniaire, prise par un tribunal cantonal supérieur statuant sur recours (art. 75 al. 1 et 2 LTF), dans le domaine de la protection de l'enfant (art. 72 al. 2 let. b ch. 6 LTF). Le recours a été interjeté en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et en la forme prévue par la loi (art. 42 LTF), par une partie qui a pris part à la procédure devant l'autorité précédente (art. 76 al. 1 let. a LTF), qui est particulièrement touchée par la décision attaquée et qui dispose d'un intérêt digne de protection à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée en tant qu'elle conclut à la révocation et au remplacement de la curatrice de ses enfants (art. 76 al. 1 let. b LTF). Le présent recours est dès lors recevable dans la mesure qui précède. 
 
2.  
 
2.1.  
Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit au sens des art. 95 s. LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Cela étant, eu égard à l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, il n'examine en principe que les griefs soulevés; il n'est pas tenu de traiter, à l'instar d'une autorité de première instance, toutes les questions juridiques qui peuvent se poser, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui. Le recourant doit par conséquent discuter les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi l'autorité précédente a méconnu le droit (ATF 142 III 364 consid. 2.4 et la référence). Le Tribunal fédéral ne connaît par ailleurs de la violation de droits fondamentaux que si un tel grief a été expressément invoqué et motivé de façon claire et détaillée (" principe d'allégation ", art. 106 al. 2 LTF; ATF 146 IV 114 consid. 2.1; 144 II 313 consid. 5.1). 
 
Sous réserve des cas visés à l'art. 95 let. c à e LTF, le grief de violation du droit cantonal ne peut pas être soulevé dans un recours devant le Tribunal fédéral. En revanche, il est toujours possible de faire valoir que la mauvaise application du droit cantonal constitue une violation du droit fédéral, en particulier qu'elle est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. ou contraire à d'autres droits constitutionnels. Dans ce cas, conformément au principe d'allégation précité, le recourant doit désigner la norme cantonale qui aurait été violée arbitrairement et exposer en quoi consiste cette violation (arrêt 5A_812/2020 du 17 août 2022 consid. 6.1 et les références). 
 
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ceux-ci ont été constatés de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Le recourant qui soutient que les faits ont été établis d'une manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 147 I 73 consid. 2.2; 144 II 246 consid. 6.7; 143 I 310 consid. 2.2 et la référence), doit satisfaire au principe d'allégation susmentionné (art. 106 al. 2 LTF; cf. supra consid. 2.1), étant rappelé qu'en matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (ATF 147 V 35 consid. 4.2; 143 IV 500 consid. 1.1 et la référence). Le recourant ne peut pas se borner à contredire les constatations litigieuses par ses propres allégations ou par l'exposé de sa propre appréciation des preuves; il doit indiquer de façon précise en quoi ces constatations sont arbitraires au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 133 II 249 consid. 1.4.3). Une critique des faits qui ne satisfait pas à cette exigence est irrecevable (ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2; 145 IV 154 consid. 1.1).  
 
3.  
La recourante se plaint d'une violation de l'art. 423 al. 1 CC dans la mesure où la cour cantonale n'aurait pas libéré la curatrice de ses fonctions malgré l'existence de justes motifs. Elle invoque à cet effet des difficultés relationnelles entre la curatrice et elle (cf. infra consid. 3.2), le parti pris de la curatrice à son encontre (cf. infra consid. 3.3), l'absence de prise en compte de la parole des enfants (cf. infra consid. 3.4) et enfin, le lien marital unissant la curatrice au directeur du foyer dans lequel les enfants sont placés (cf. infra consid. 3.5).  
 
 
3.1. L'art. 423 al. 1 CC, applicable dans le cas présent par renvoi de l'art. 314 al. 1 CC, dispose que l'autorité de protection de l'adulte libère le curateur de ses fonctions s'il n'est plus apte à remplir les tâches qui lui sont confiées (ch. 1) ou s'il existe un autre juste motif de libération (ch. 2). Ce dernier fait référence aux éléments qui portent atteinte au rapport de confiance entre le mandataire, l'enfant, ses parents ou l'autorité, comme par exemple des actes de représentation contraires à la loi, des abus de pouvoir, le non-respect de la personnalité des intéressés ou des violations moins graves mais répétées des devoirs légaux. Certains conflits ou une perturbation insurmontable de la relation entre l'enfant, le système parental et le mandataire peuvent aussi constituer de tels justes motifs. Il faut cependant faire preuve de prudence sur ce dernier point : les difficultés dans les rapports personnels avec le mandataire trouvent souvent leur origine dans le fait même que ces rapports sont imposés par l'autorité et sont indépendantes de la personnalité du mandataire (Droit de la protection de l'enfant, Guide pratique, COPMA Conférence en matière de protection des mineurs et des adultes, éd. 2017, Droit de la protection de l'enfant, n. 4.76, pp. 150 s.). Dans l'application de cette disposition, l'autorité de protection de l'adulte jouit d'un large pouvoir d'appréciation (ATF 143 III 65 consid. 6; arrêts 5A_469/2018 du 14 décembre 2018 consid. 2; 5A_391/2016 du 4 octobre 2016 consid. 5.2.2; 5A_954/2013 du 11 août 2014 consid. 4).  
 
 
3.2.  
 
3.2.1. S'agissant des difficultés relationnelles entre la curatrice et la mère, la juridiction précédente a retenu que leurs rapports s'étaient péjorés depuis l'été 2019, après que la mère a refusé tout contact entre le père et ses enfants à son retour de U.________ et que la curatrice a préconisé le placement des enfants, lequel a finalement eu lieu en mars 2020. La cour cantonale a exposé qu'avant de suggérer une telle mesure, la curatrice avait à plusieurs reprises demandé à la mère de permettre au père d'exercer son droit de visite; des mesures superprovisionnelles avaient d'ailleurs été ordonnées dans ce sens et le père avait même déposé plainte contre elle à ce sujet. La juridiction précédente a ainsi estimé que la curatrice n'avait pas agi à l'encontre des intérêts des deux enfants, la mesure de placement se justifiant essentiellement en raison de la relation très tendue entre les parents, qui, sans la présence d'un tiers fort, risquait d'aboutir à une rupture encore plus définitive des liens père-filles, ce qui aurait été délétère pour le développement psychique de celles-ci.  
 
La cour cantonale a considéré que les difficultés relationnelles entre la curatrice et la mère étaient plutôt liées au mandat même de la curatrice et au fait que les rapports entre elles étaient imposés par l'autorité; elles étaient ainsi indépendantes de la personnalité du mandataire et, rien ne permettait de retenir, comme l'avait jugé l'APEA, qu'elles ne surviendraient pas avec un autre curateur. 
 
S'agissant des actes de violences du père sur la mère et les enfants, la cour cantonale a relevé qu'il n'apparaissait pas, contrairement à ce que faisait valoir la mère, que la curatrice ait occulté les événements violents relatés. En effet, la curatrice avait, en février 2020, confirmé que la mère lui avait parlé de maltraitances physiques de la part du père sur elle et les enfants, sans toutefois en avoir observé elle-même ni personne (pédiatre, logopédiste, psychomotricienne). Par ailleurs, en janvier 2021, à la suite des déclarations de B.A.________, selon lesquelles son père avait été violent avec elle lors d'une visite, la curatrice avait limité l'exercice de son droit, afin qu'il se déroule dorénavant au I.________. Ce n'est que fin octobre 2021, au vu de l'évolution de la relation, que le père avait pu emmener ses filles à l'extérieur. 
 
La juridiction précédente a encore relevé qu'il était vrai que les propos tenus par la curatrice en novembre 2021 - à savoir que le discours de la mère à l'égard du père était très disqualifiant et que celui des enfants était le reflet de leur mère - pouvaient être difficiles à entendre; ceux-ci n'étaient cependant pas susceptibles de créer une rupture insurmontable du rapport de confiance. Selon la curatrice, la mauvaise collaboration avec la mère s'expliquait par le fait que celle-ci était tournée sur ses propres attentes et non pas sur le bien-être des filles, en valorisant notamment le placement et l'évolution positive de celles-ci ou en soutenant la relation père/enfants. Or, ces propos ne contredisaient pas les conclusions de l'experte, laquelle expliquait notamment que l'attitude de la mère ne devait pas être vue sous l'angle d'une manipulation perverse délibérée, mais plutôt comme un mode de fonctionnement répondant à un besoin d'être reconnue dans sa souffrance et prenant la forme parfois d'un syndrome d'aliénation parentale sans en être un. Partant, la juridiction précédente a considéré que les difficultés relationnelles entre la mère et la curatrice étaient plutôt liées au mandat en tant que tel et non à la personne de la curatrice. 
 
 
3.2.2. La recourante expose que, contrairement à ce que la cour cantonale a considéré, ses difficultés relationnelles avec la curatrice ne seraient pas liées au mandat, mais bien à celle-ci. Si elles avaient été indépendantes de la personnalité du mandataire, celles-ci seraient selon elle survenues immédiatement à l'institution de la mesure.  
 
La recourante allègue qu'elles seraient en réalité dues à l'absence de prise en compte par la curatrice de ses déclarations concernant le comportement violent du père à l'égard notamment des enfants, datant à tout le moins de l'été 2019. Elle prétend à cet égard avoir dû attendre que ses filles soient placées au I.________ pour que " l'encadrement du foyer constate les faits de violence ".  
 
Elle reproche également à la curatrice de ne pas avoir mis en place un droit de visite surveillé au I.________, laissant les enfants à la merci de leur père. Elle allègue que la curatrice aurait fait preuve de légèreté dans sa tâche, se contentant pendant trop longtemps des dénégations du père. Son rôle de curatrice lui imposait selon elle d'enquêter, en entendant les enfants par exemple. La recourante invoque ainsi une perte totale de confiance envers la curatrice. 
 
S'agissant du rapport d'expertise pédopsychiatrique du 9 décembre 2020, la recourante soutient que l'autorité précédente n'aurait pas dû se fonder dessus, dès lors qu'il ne portait pas sur " ces faits en particulier ", mais sur les besoins des enfants et aurait été établi avant que les actes de violence soient constatés par le I.________.  
 
Enfin, elle aurait omis de déterminer s'il existait des motifs de révocation du mandataire. Partant, l'arrêt litigieux violerait le droit, en tant qu'il se fonderait notamment sur des motifs étrangers à l'objet du litige pour tenter de justifier l'attitude de la curatrice. 
 
 
3.2.3. En l'espèce, les considérations de la recourante relatives à l'origine de ses difficultés relationnelles ne sont pas de nature à démontrer - au vu de la chronologie des événements non contestés par l'intéressée et qui lient donc le Tribunal fédéral (cf. supra, consid. 2.2) - que la cour cantonale aurait abusé de son large pouvoir d'appréciation (art. 4 CC) en retenant que la curatrice n'était pas à l'origine de celles-ci. Certes, l'arrêt litigieux ne fait pas état de problèmes particuliers avec l'ancien curateur, dont le mandat a été repris en septembre 2014 par l'actuelle curatrice. Cela étant, la péjoration des relations entre les deux intéressées apparaît directement liée aux mesures proposées par la curatrice. Les tensions sont en effet survenues lors de l'été 2019, après que la mère a refusé tout contact entre le père et ses enfants à son retour de U.________ et que la curatrice a préconisé le placement de ceux-ci, lequel a été ordonné en février 2020.  
 
En tant que la recourante soutient ensuite que l'inaction de la curatrice, malgré les accusations portées contre le père durant l'été 2019, serait à l'origine des difficultés relationnelles précitées, sa critique prend appui sur des faits qui ne ressortent pas de l'arrêt attaqué, sans que l'on trouve trace d'un quelconque grief de constatation manifestement inexacte des faits, motivé à satisfaction (art. 106 al. 2 LTF; cf. supra consid. 2.2). En effet, selon l'arrêt entrepris, les premières accusations de la recourante datent de 2020, soit la même année que le placement des enfants. Pour le surplus, force est de constater qu'à l'instar de ce que l'autorité cantonale a retenu, la curatrice n'a pas occulté les événements relatés par les enfants en novembre 2020, au vu notamment des mesures prises en janvier 2021 limitant le droit de visite du père.  
 
Il en va de même lorsqu'elle reproche à la curatrice d'avoir fait preuve de légèreté en se contentant pendant trop longtemps des dénégations du père, dès lors qu'il est établi que la curatrice a réagi. Par ailleurs, en tant que la mère reproche à la curatrice de ne pas avoir mis en place un droit de visite surveillé au I.________, laissant, selon ses dires, les enfants à la merci de leur père, sa critique ne s'en prend pas aux motifs de l'arrêt entrepris - qui retient que le droit de visite s'est exercé de janvier à octobre 2021 dans l'enceinte du I.________, toutefois sans surveillance de l'équipe éducative, la structure n'ayant pas pour mission ni philosophie la surveillance des droits de visite - et est donc irrecevable.  
 
Quant au grief relatif à la prise en compte du rapport d'expertise pédopsychiatrique du 9 décembre 2020, l'appréciation des preuves opérée par la cour cantonale est exempte d'arbitraire. Si l'expertise en question a effectivement été mise en oeuvre dans le cadre du placement des enfants, il n'en demeure pas moins que le rapport était à même de renseigner l'autorité de protection, l'experte ayant examiné à cette occasion le mode de fonctionnement de la mère. 
 
Partant, pour autant que recevables, les critiques sont rejetées. 
 
 
3.3.  
 
3.3.1. La cour cantonale a ensuite considéré que la recourante ne pouvait pas être suivie lorsqu'elle affirmait que la curatrice avait un " parti pris " justifiant sa libération. Elle a rappelé à cet effet, d'une part, les mesures prises par l'intéressée en janvier 2021 à la suite des accusations de violences et, d'autre part, les propos de celle-ci en faveur de la mère, à savoir qu'il était réducteur de penser que le placement était dû aux doléances de celle-ci, car si l'entrave du droit de visite était un indicateur fort pour le placement, il était lié à la problématique familiale.  
 
Quant aux critiques concernant le refus de la curatrice d'avoir recours à un autre interprète que M. G.________ - lequel serait un ami du père -, l'autorité cantonale a retenu qu'il ressortait du dossier que celui-ci fonctionnait en tant que tel depuis 2013 et que le grief de la partialité ne paraissait pas a priori avoir été formellement soulevé, mis à part dans le cadre de l'expertise, par le dépôt d'une requête de récusation (art. 56 al. 3 de la loi de procédure et de juridiction administrative et constitutionnelle du canton du Jura [Cpa; RSJU 175.1]) auprès de l'APEA, et ce dès la connaissance du motif de récusation. Pour le surplus, elle a estimé que ces difficultés étaient également indépendantes de la personnalité de la curatrice.  
 
L'argument de la mère lié au refus de la curatrice d'étendre son droit de visite durant les vacances d'été 2022 - lequel a été confirmé par l'APEA le 27 juin 2022 - ne permettait pas non plus, selon la cour cantonale, d'imputer les tensions à la curatrice. Elle a relevé que la mère était à l'origine des problèmes relatifs à l'organisation de son voyage au U.________ cet été-là, dès lors qu'elle avait entrepris des démarches (achat de billets non remboursables) sans en référer au préalablement à la curatrice ni au père des enfants. 
 
 
3.3.2. La recourante soutient que le parti pris de la curatrice serait également un motif justifiant sa libération. Elle expose que les motifs retenus pour l'exclure ne seraient pas pertinents, dès lors que l'intéressée se serait limitée à faire ce qui était attendu d'elle.  
 
Elle allègue également que celle-ci aurait refusé de faire intervenir un autre traducteur que M. G.________, pourtant connu comme étant un ami du père. Prenant appui sur un courrier adressé à l'APEA le 17 décembre 2021, elle allègue avoir trouvé une personne disposée à servir d'interprète. Pour le surplus, elle soutient que l'art. 56 al. 3 Cpa invoqué par l'autorité cantonale ne serait pas applicable aux interprètes. 
 
Quant aux vacances d'été 2022, elle fait valoir que la lecture de l'autorité précédente ne serait pas correcte; selon elle, la curatrice lui aurait demandé de produire la preuve d'un voyage, pour ensuite lui refuser son accord en lui reprochant d'avoir acheté des billets d'avion. 
 
 
3.3.3. En tant que la recourante allègue que le fait que la curatrice ait, à la suite notamment des accusations de B.A.________ contre son père, réagi en prenant certaines mesures, ne permettrait pas d'écarter l'existence d'un parti pris, elle ne démontre nullement que l'autorité précédente aurait abusé de son large pouvoir d'appréciation en s'appuyant par exemple sur un élément ne devant jouer aucun rôle.  
 
Quant aux critiques relatives au refus de la curatrice de recourir à un autre interprète, la recourante ne soulève aucune violation du droit fédéral en rapport avec le droit cantonal invoqué, à savoir l'art. 56 al. 3 Cpa, de sorte que son grief est irrecevable (cf. supra, consid. 2.1). Au demeurant, elle ne s'en prend pas aux motifs de la cour cantonale qui retient que cette question est indépendante de la personnalité de la curatrice.  
 
Est également irrecevable son grief concernant le refus de la curatrice d'étendre son droit de visite durant les vacances d'été 2022, la recourante se bornant à contredire de manière appellatoire les constatations litigieuses par ses propres allégations (cf. supra, consid. 2.2).  
 
Enfin, les reproches de la recourante concernant le prétendu parti pris de la curatrice en lien avec les rendez-vous médicaux des enfants pendant leur placement se basent sur des faits qui ne ressortent pas de l'arrêt querellé, dès lors que l'autorité cantonale a retenu que la prétendue interdiction signifiée à la mère de sortir du I.________ avec ses enfants pour se rendre aux rendez-vous médicaux des 17 et 27 août 2021 auprès du Dr H.________, obligeant celle-ci à les annuler, n'était pas établie. Ils sont donc également irrecevables (cf. supra, consid. 2.2).  
 
 
3.4.  
 
3.4.1. Selon la cour cantonale, l'argument de la mère relatif à l'absence de prise en compte, par la curatrice, de la parole des deux filles, du fait qu'elles seraient influencées par leur mère, ne pouvait être suivi. Elle a rappelé à ce titre, d'une part, que les enfants avaient été entendus par l'APEA les 28 janvier et 1er février 2022, soit avant que la décision de première instance ne soit prise et, d'autre part, que l'APEA, dans sa décision, avait motivé le rejet de sa requête tout en tenant compte des déclarations des filles concernant leurs rapports avec la curatrice. Elle a ajouté que si la curatrice se questionnait effectivement sur leur discours - estimant qu'il était le reflet de leur mère - il apparaissait aussi clairement qu'elle les écoutait lorsqu'elles relataient des évènements violents et ne manquait pas de réagir.  
 
 
3.4.2. Selon la recourante, le changement de curateur serait justifié en raison du fait que, pendant plusieurs mois, l'intéressée n'aurait pas tenu compte des déclarations des enfants, s'agissant notamment du comportement prétendument violent du père ou de la demande de levée du placement émise par les deux filles. Elle ajoute que leur droit d'être entendues n'impliquerait pas uniquement " qu'elles soient reçues par la curatrice ", mais également que celle-ci s'explique de manière circonstanciée lorsqu'elle s'écarte de leur propos.  
 
 
3.4.3. Là encore, la recourante se fonde sur des éléments factuels, à savoir la prétendue non prise en compte des déclarations des enfants, ne ressortant pas de l'arrêt déféré; il n'en sera donc pas tenu compte. Au demeurant, pour autant que cela soit établi, l'on peine à saisir sur quelle base la recourante se fonde lorsqu'elle reproche à l'APEA de ne pas avoir exigé de la curatrice qu'elle s'explique sur cette question précise. En outre, il ne ressort pas de l'arrêt attaqué que la recourante aurait sollicité l'audition de la curatrice sur ce point. Pour autant que recevable, le grief est rejeté.  
 
 
3.5.  
 
3.5.1. S'agissant du lien marital existant entre la curatrice et le directeur du foyer, la cour cantonale a nié le fait que la décision de placement des enfants avait été guidée par les intérêts pécuniaires de son directeur, respectivement de la curatrice, précisant qu'il était notoire que les délais d'attente pour trouver une place dans un tel établissement étaient importants. Ainsi, rien ne permettait de conclure à un manque d'objectivité de la part de la curatrice.  
Quant à l'ATF 143 III 65, la situation n'était pas en tous points similaire. D'une part, la curatrice n'avait pas à se prononcer, pour l'instant du moins, sur la poursuite du placement, mesure que la mère ne contestait pas dans le cas présent. D'autre part, on ne pouvait comparer une relation pouvant exister entre une curatrice et des parents nourriciers au lien marital entre une curatrice et le directeur d'un foyer, lequel ne s'occupait pas personnellement des enfants placés. Elle a encore rappelé que la mesure avait été prononcée par la juge civile, et non par la curatrice, laquelle avait simplement recommandé le placement des filles dans ce foyer, dès lors qu'il était adapté à leurs besoins. 
 
3.5.2. La recourante soutient qu'il serait vain de tenter de faire croire que la décision de placement des enfants émanerait de l'autorité et non de la curatrice, étant donné que ce serait sur la base des indications de cette dernière que la mesure aurait été prononcée. Elle se prévaut à ce titre d'un risque de collusion et de conflit d'intérêts évident et ajoute que le lien marital serait hautement problématique puisqu'aucune évaluation crédible ou rapport neutre du placement en question n'aurait été effectuée, respectivement établi, depuis le début de la mesure.  
Elle expose, s'agissant de l'ATF 143 III 65 consid. 6.2, que la cour cantonale aurait méconnu cette jurisprudence et qu'il serait évident qu'il existerait un lien manifeste entre le directeur du foyer, dont l'intérêt consiste à avoir un foyer accueillant autant d'enfants que possible, et la curatrice chargée du placement des enfants. Elle serait, selon elle, également dans l'erreur lorsqu'elle retient que la curatrice n'a pas à se prononcer sur la poursuite du placement, la décision du 10 février 2020 chargeant l'APEA respectivement la curatrice dudit placement démontrerait le contraire. Elle ajoute que le principe de proportionnalité commanderait une évaluation régulière du placement. Or, dès lors que le dossier civil serait clos, il reviendrait à la curatrice d'évaluer la mesure et d'établir un rapport destiné à l'APEA. Enfin, elle prétend que le conflit d'intérêts serait manifeste et que ce faisant, l'arrêt querellé violerait le droit fédéral. 
 
3.5.3. En lien avec ses critiques selon lesquelles d'une part la décision de placement des enfants émanerait de la curatrice et non de l'autorité et qu'aucune évaluation crédible n'aurait été effectuée, et d'autre part qu'il serait évident qu'il existerait un lien manifeste entre les deux intéressés dans la mesure précitée, la recourante se borne à contredire les constatations litigieuses par ses propres allégations, ce de manière appellatoire. Au surplus, elle ne démontre pas, par son argumentation, que la cour cantonale aurait abusé de son large pouvoir d'appréciation, en considérant notamment que la décision de placement n'était pas guidée par les intérêts pécuniaires des deux intéressés. Contrairement à ce que la recourante prétend, il n'appartient pas à la curatrice de décider de la levée ou du maintien du placement des enfants, mesure que la recourante n'a au demeurant pas contestée, l'intéressée ayant seulement été chargée, selon jugement de divorce du 30 juin 2021, d'évaluer régulièrement leur prise en charge et l'exercice du droit de visite des parents.  
Pour le surplus, la recourante ne peut rien tirer de l'ATF 143 III 65. Dans cet arrêt (cf. consid. 6.2), un juste motif - à savoir la rupture du lien de confiance entre d'une part la mère biologique, dont l'enfant était placé, et d'autre part le curateur - avait été retenu, ce qui avait abouti à la libération du mandataire. Il en va différemment dans le cas présent où le lien marital litigieux n'a pas permis de conclure à un manque d'objectivité de la part de la curatrice. Ce constat scelle le sort du grief qui est ainsi rejeté pour autant que recevable. 
 
Enfin, en tant que la recourante soutient que le principe de la proportionnalité commanderait que la mesure de placement soit évaluée régulièrement et que l'on chercherait en vain dans le dossier un tel rapport de la curatrice, il ne ressort pas de l'arrêt litigieux que la recourante aurait émis cette critique devant l'autorité cantonale. Faute de satisfaire au principe de l'épuisement des instances cantonales sur ce point (art. 75 al. 1 LTF; ATF 143 III 290 consid. 1.1 et les références), ce moyen doit être considéré comme nouveau et, partant irrecevable (arrêt 5A_771/2018 du 28 mars 2019 consid. 4.3 et les références). Au demeurant, la recourante n'expose pas en quoi le principe de la proportionnalité imposerait ici la reddition d'un rapport et se contente d'affirmer qu'une évaluation spécifique serait nécessaire, ce qui n'est pas de nature à démontrer une violation du droit fédéral. 
 
Au vu de ce qui précède, les griefs de la recourante fondés sur l'art. 423 CC doivent être écartés, l'arrêt querellé ne violant pas le droit fédéral. 
 
4.  
En conclusion, le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. Les conclusions de la recourante étant d'emblée vouées à l'échec, il convient de rejeter sa requête d'assistance judiciaire et de la condamner aux frais judiciaires (art. 64 al. 1 et 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
La requête d'assistance judiciaire de la recourante est rejetée. 
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'500 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux participants à la procédure, à l'Autorité de protection de l'enfant et de l'adulte (APEA), et à la Cour administrative du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura. 
 
 
Lausanne, le 6 juillet 2023 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Herrmann 
 
La Greffière : Bouchat