2D_43/2015 10.12.2015
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
2D_43/2015  
 
{T 0/2}  
   
   
 
 
 
Arrêt du 10 décembre 2015  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Zünd, Président, 
Seiler et Aubry Girardin. 
Greffière Mme Vuadens. 
 
Participants à la procédure 
X.________ SA, 
représentée par Me Marc Balavoine, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
1. Transports Publics Genevois, 
2. TPG Vélo SA, 
tous représentés par Me Bertrand R. Reich, avocat, 
intimés. 
 
Objet 
Marché public; effet suspensif et mesures provisionnelles, 
 
recours contre la décision de la Cour de justice de la 
République et canton de Genève, Chambre administrative, du 17 juillet 2015. 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Le 6 mars 2012, les Transports publics genevois (ci-après: TPG), établissement de droit public cantonal, ont lancé un appel d'offres sur le marché d'achat des fournitures en procédure ouverte. Le marché portait sur la mise en oeuvre d'un système de location automatisé de vélos en libre service (ci-après: VLS) dans le canton de Genève. Les documents de l'appel d'offres indiquaient que la décision d'adjudication serait prise à la fin du mois de septembre 2012. Ils comprenaient en outre un certain nombre de réserves des TPG, qui prévoyaient notamment que le contrat ne serait signé qu'une fois que les TPG auraient reçu une garantie de financement de l'ensemble du projet par les communes et l'Etat de Genève et que si le projet était abandonné avant la conclusion du contrat, aucune indemnité ne serait versée.  
 
La société de droit français X.________ SA a soumissionné. Le 25 septembre 2012, les TPG l'ont informée que le marché avait été adjugé à la Société de Vélos en Libre-Service sise au Canada pour un montant de 6'182'713 fr., X.________ étant placée au 2e rang sur cinq offres évaluées. Cette décision n'a pas fait l'objet d'un recours. 
 
Le 6 février 2013, les TPG ont révoqué leur décision d'adjudication, au motif que l'adjudicataire n'offrait plus les garanties de bienfacture, de solvabilité et de correction en affaires auxquelles ils pouvaient s'attendre. Le recours interjeté par la société canadienne à l'encontre de cette décision a finalement été retiré. 
 
A.b. Parallèlement à la procédure de marché public, soit le 31 mai 2012, les TPG ont créé la société TPG Vélo SA (ci-après: TPG/Vélo) dont le but est l'exploitation, la gestion et la maintenance d'un système de vélos en libre-service, ainsi que la vente de différents produits et services y relatifs.  
 
Le même jour, l'Etat de Genève a conclu avec TPG/Vélo un contrat de prestations conférant à cette dernière une indemnité de fonctionnement lui permettant de mettre en oeuvre le volet de mise à disposition du public du projet VLS. 
 
Le 7 juin 2012, le Conseil d'Etat a transmis au Grand Conseil un projet de loi accordant une indemnité à TPG/Vélo dans le cadre du contrat de prestations la liant à l'Etat de Genève portant sur la prestation de vélos en libre service pour les années 2013 et 2014 (ci-après: PL 10'989). 
 
Le 28 juin 2012, le Grand Conseil a renvoyé le projet pour examen à la Commission des finances, qui a rendu un rapport jugeant le projet approximatif, de même que son financement, et mettant en évidence des problèmes relatifs à la solidité financière de la société canadienne qui avait obtenu le marché tendant à la fourniture du matériel. 
 
Le 25 janvier 2013, le Grand Conseil a examiné ce rapport et, après un débat animé, l'a renvoyé à la Commissions des finances. 
 
Le 26 juin 2014, le Conseiller d'Etat en charge du Département de l'environnement, des transports et de l'agriculture (ci-après: le Département) a écrit aux TPG pour lui indiquer que le financement n'était assuré qu'à un tiers à ce stade et qu'avant la décision du Grand Conseil sur le PL 10'989, aucun risque ne devait être pris lié à l'adjudication du marché public en cours. La gestion du projet VLS devait être prise en charge par TPG/Vélo en collaboration avec les services de l'Etat concernés et les communes participant au projet. 
 
Le 9 octobre 2014, le Grand Conseil a examiné le nouveau rapport de la Commission des finances sur le PL 10'989 qui, après un nouveau débat nourri, lui a été renvoyé une nouvelle fois pour étude complémentaire. 
 
B.   
Par courrier du 8 juin 2015, les TPG ont indiqué à X.________ SA qu'ils avaient décidé d'interrompre l'appel d'offres engagé le 6 mars 2012. Le projet VLS était désormais porté par une entité tierce, formellement indépendante des TPG. N'étant plus en charge du projet, ils ne renouvelleraient pas l'appel d'offres. Cette décision ne préjugeait en rien d'un éventuel processus de mise en concurrence par l'entité qui portait désormais le projet. 
 
X.________ SA a recouru contre cette décision auprès de la Chambre administrative de la Cour de justice genevoise (ci-après: la Cour de justice), en demandant son annulation et l'adjudication du projet VLS en sa faveur, subsidiairement à ce que la cause soit retournée aux TPG pour nouvelle décision et, plus subsidiairement encore, à ce que le caractère illicite de cette décision soit constaté. A titre préalable, elle a sollicité la restitution de l'effet suspensif et à ce qu'il soit fait interdiction aux TPG et à TPG/Vélo de commencer un nouvel appel d'offres ayant pour objet la mise en oeuvre d'un système de location automatisé de vélos en libre-service à Genève. 
 
Par décision du 17 juillet 2015, la Cour de justice a refusé de restituer l'effet suspensif au recours de X.________ SA et rejeté la requête de mesures provisionnelles. 
 
C.   
A l'encontre de cette décision, X.________ SA interjette un recours constitutionnel subsidiaire au Tribunal fédéral. Sous suite de frais et dépens, elle conclut à l'annulation de la décision attaquée et, principalement, à ce que l'effet suspensif à son recours sur le plan cantonal soit accordé et, sous forme de mesures provisionnelles, à ce qu'il soit fait interdiction aux TPG et à TPG/Vélo de commencer un appel d'offres ayant pour objet la mise en oeuvre d'un système de location automatisé de vélos en libre-service à Genève, sous la menace de la peine prévue à l'art. 292 CP, cette interdiction devant être immédiatement exécutoire et rester en vigueur jusqu'à droit jugé au fond. A titre subsidiaire, elle propose le renvoi de la cause à la Cour de justice pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
 
A titre préalable, X.________ SA demande à ce que le Tribunal fédéral, à titre de mesures superprovisionnelles et provisionnelles, accorde l'effet suspensif à son recours à l'encontre de la décision du 17 juillet 2015 et fasse interdiction aux TPG et à TPG/Vélo de commencer un appel d'offres ayant pour objet la mise en oeuvre d'un système de location automatisé de vélos en libre-service à Genève, sous la menace de la peine prévue à l'art. 292 CP, cette interdiction devant être immédiatement exécutoire et rester en vigueur jusqu'à droit jugé au fond. 
 
La Cour de justice n'a pas formulé d'observations, s'en rapportant à justice quant à la recevabilité du recours et déclarant persister dans sa décision. Dans leurs déterminations, les TPG et TPG/Vélo concluent, s'agissant des demandes de mesures provisionnelles formées devant le Tribunal fédéral, à ce que celles-ci soient déclarées sans objet à raison du rejet du recours, respectivement de son irrecevabilité, subsidiairement à ce qu'elles soient rejetées. Sur le fond, ils demandent que le recours soit déclaré irrecevable quant à sa forme et rejeté dans la mesure de sa recevabilité quant au fond. 
 
X.________ SA n'a pas formulé d'observations finales, mais a transmis au Tribunal fédéral un courrier du 9 octobre 2015 adressé au mandataire des TPG et TPG/Vélo, ce dernier ayant pour sa part envoyé en copie à la Cour de céans sa réponse datée du 14 octobre 2015. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Le Tribunal fédéral examine librement et avec une pleine cognition la recevabilité des recours portés devant lui (art. 29 al. 1 LTF; ATF 139 V 42 consid. 1 p. 44). 
 
1.1. La décision entreprise porte sur deux aspects : d'une part, elle refuse de restituer l'effet suspensif au recours cantonal déposé par la recourante contre la décision du 8 juin 2015 relative à l'interruption de l'appel d'offres des TPG et, d'autre part, elle rejette la requête de mesures provisionnelles tendant à ce qu'il soit interdit aux TPG ou à TPG/Vélo de commencer un autre appel d'offres. Sous ces deux aspects, la décision attaquée constitue une décision incidente au sens de l'art. 93 LTF (cf. ATF 138 III 76 consid. 1.2 p. 79 sur l'effet suspensif; arrêt 2C_611/2011 du 16 décembre 2011 consid. 2 sur les mesures provisionnelles). Ne concernant ni la compétence ni une demande de récusation (cf. art. 92 LTF), elle ne peut faire séparément l'objet d'un recours au Tribunal fédéral, qu'il s'agisse d'un recours ordinaire ou d'un recours constitutionnel subsidiaire (art. 117 LTF), qu'aux conditions prévues à l'art. 93 al. 1 LTF. Selon cette disposition, les décisions préjudicielles ou incidentes peuvent faire l'objet d'un recours immédiat au Tribunal fédéral dans deux cas de figure, à savoir si elles sont propres à causer un préjudice irréparable (let. a) ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (let. b). Cette seconde hypothèse n'est à l'évidence pas remplie. En effet, tant en ce qu'il porte sur la restitution de l'effet suspensif qu'en ce qui concerne l'interdiction de procéder à un nouvel appel d'offres durant la procédure, le recours ne concerne pas le fond du litige, de sorte que son admission ne saurait mettre fin à la procédure qui concerne le bien-fondé de l'interruption de la procédure d'appel d'offres entamée en mars 2012 (cf. arrêt 2C_97/2015 du 28 avril 2015 consid. 1.3.1). La recevabilité du recours est donc subordonnée à l'existence d'un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF.  
 
1.2. Selon la jurisprudence, le préjudice irréparable doit être de nature juridique et ne pas pouvoir être ultérieurement réparé par une décision finale favorable au recourant (ATF 137 V 314 consid. 2.2.1 p. 317 et les arrêts cités). Un dommage de pur fait, comme la prolongation de la procédure ou un accroissement des frais de celle-ci, n'est en principe pas suffisant (ATF 137 V 314 consid. 2.2.1 p. 317), sauf si le recourant expose et rend vraisemblable que l'ordonnance de suspension contestée entraînera une violation du principe de célérité (ATF 138 III 190 consid. 6 p. 192) Il appartient au recourant d'expliquer en quoi la décision incidente qu'il attaque remplit les conditions de l'art. 93 LTF (ATF 134 III 426 consid. 1.2 p. 429 et les arrêts cités), à moins que celles-ci ne fassent d'emblée aucun doute (ATF 136 IV 92 consid. 4).  
 
1.3. La recourante estime qu'elle subit un préjudice irréparable sans distinguer entre le refus de restituer l'effet suspensif à son recours et le refus de lui accorder les mesures provisionnelles requises. Elle se prévaut de l'ATF 134 II 192 consid. 1.4 et indique que son préjudice irréparable consiste dans le risque que les TPG ou TPG/Vélo procèdent à un nouvel appel d'offres.  
 
1.3.1. Dans l'ATF 134 II 192 consid. 1.4, la Cour de céans a précisé qu'aussi longtemps que la décision d'adjudication existe, le pouvoir adjudicateur ne doit pas conclure un contrat avec une autre entreprise ayant le même contenu, pas plus qu'il ne peut entamer une nouvelle procédure de marché public portant sur le même objet. Partant, le refus de restituer l'effet suspensif à un recours déposé par l'adjudicataire contre la révocation de l'adjudication et l'interruption de la procédure a pour résultat de permettre au pouvoir adjudicateur, déjà avant l'entrée en vigueur de la décision finale, de procéder à un nouvel appel d'offres et, le cas échéant, de conclure le contrat avec un tiers. Même si les chances de l'adjudicataire dans la procédure révoquée d'obtenir le contrat sont faibles en raison de la liberté contractuelle, celui-ci subit tout de même un préjudice irréparable en raison de la décision incidente sur effet suspensif, dès lors qu'en cas d'attribution du marché à un tiers, il ne pourrait plus prétendre qu'à des dommages-intérêts. Partant, les conditions permettant de recourir directement au Tribunal fédéral au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF sont remplies (cf. également à ce sujet, CLÉA BOUCHAT, L'effet suspensif en procédure administrative, 2015, p. 376 n. 1027).  
 
1.3.2. La présente cause a pour objet la décision des TPG d'interrompre l'appel d'offres engagé le 6 mars 2012. Cette procédure s'est soldée par une adjudication qui a ensuite été révoquée, de sorte que la recourante, arrivée au deuxième rang, pourrait éventuellement prétendre au marché si la procédure se poursuivait (cf. ETIENNE POLTIER, Droit des marchés publics, 2014, p. 232 et la référence à MARTIN BEYELER, Der Geltungsanspruch des Vergaberechts, 2012, p. 1532 ss). En refusant de restituer l'effet suspensif, la Cour de justice maintient les effets de la décision d'interruption du premier marché public par les TPG et prive donc la recourante de la possibilité précitée. Il découle en outre du refus des mesures provisionnelles que les TPG et/ou TPG/Vélo peuvent librement recommencer une nouvelle procédure de marché public portant sur des prestations identiques ou à tout le moins similaires. Même si la recourante ne serait pas empêchée de faire une offre dans le cadre de cette nouvelle procédure, elle n'aurait pas de garantie d'obtenir le marché et, si celui-ci était attribué à une autre entreprise, il ne lui resterait qu'une action en dommages-intérêts en lien avec la première procédure, dont l'issue est pour le moins aléatoire.  
 
Dans cette mesure, tant le refus de restituer l'effet suspensif que le refus d'accorder des mesures provisionnelles tendant à empêcher la mise en place d'une nouvelle procédure de marché public sont de nature à causer à la recourante un préjudice irréparable. Celle-ci peut donc déposer un recours immédiat au Tribunal fédéral à l'encontre de la décision attaquée en application de l'art. 93 al. 1 let. a LTF
 
1.4. Le recours contre une décision incidente est soumis à la même voie de droit que celle qui est ouverte contre la décision principale (ATF 137 III 380 consid. 1.1 p. 382). La présente cause relève des marchés publics, domaine qui peut faire l'objet d'un recours en matière de droit public aux conditions de l'art. 83 let. f LTF, dont il appartient à la partie recourante de démontrer la réalisation (cf. arrêt 2C_876/2014 du 4 septembre 2015 consid. 1.2 destiné à la publication et les arrêts cités). La recourante non seulement ne se prévaut pas de l'art. 83 let. f LTF, mais déclare expressément vouloir former un recours constitutionnel subsidiaire. Partant, il y a lieu d'envisager le recours sous cet angle uniquement.  
 
1.5. Formé contre une décision rendue par une autorité judiciaire cantonale supérieure de dernière instance (art. 114 et 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF), le présent recours a été déposé en temps utile (art. 117 et 100 al. 1 LTF) et dans les formes prescrites (art. 42 LTF), par la recourante qui, en tant que destinataire de la décision attaquée susceptible de lui causer un préjudice juridique irréparable (cf. supra consid. 1.3.2), a qualité pour recourir au sens de l'art. 115 LTF. Il convient partant d'entrer en matière.  
 
1.6. Les faits nouveaux étant irrecevables (cf. art. 99 al. 1 LTF par renvoi de 117 LTF), il n'y a pas lieu de tenir compte des courriers échangés entre les parties en octobre 2015.  
 
2.   
Conformément à l'art. 116 LTF, le recours constitutionnel ne peut être formé que pour violation des droits constitutionnels. Le Tribunal fédéral n'examine de tels griefs que s'ils ont été invoqués et motivés ("principe d'allégation", art. 106 al. 2 LTF, applicable par renvoi de l'art. 117 LTF), à savoir expressément soulevés et exposés de manière claire et détaillée (ATF 138 I 225 consid. 2.1 et 2.3; 133 IV 286 consid. 1.4 p. 287). Le recourant qui se plaint de la violation d'un droit constitutionnel ne peut donc se borner à critiquer la décision attaquée comme il le ferait en instance d'appel, où l'autorité de recours jouit d'une libre cognition; il ne peut, en particulier, se contenter d'opposer sa thèse à celle de l'autorité cantonale, mais doit remettre en cause les considérants de la décision attaquée sous des aspects relevant des droits constitutionnels (ATF 140 III 264 consid. 2.3; 134 II 349 consid. 3 p. 351 s.; arrêt 2C_1034/2015 du 23 novembre 2015 consid. 2.3). 
 
3.  
 
3.1. Lorsqu'une autorité judiciaire se prononce sur l'effet suspensif ou d'autres mesures provisoires, elle peut se limiter à la vraisemblance des faits et à l'examen sommaire du droit (examen prima facie), en se fondant sur les moyens de preuve immédiatement disponibles, tout en ayant l'obligation de peser les intérêts respectifs des parties (ATF 139 III 86 consid. 4.2 p. 91; 131 III 473 consid. 2.3 p. 476). Elle dispose à cet égard d'un large pouvoir d'appréciation et peut tenir compte de l'issue prévisible de la procédure au fond, pour autant que celle-ci soit claire (ATF 130 II 149 consid. 2.2; 129 II 286 consid. 3; arrêt 2C_293/2013 du 21 juin 2013 consid. 4.2, non publié in ATF 139 I 189,). Le Tribunal fédéral n'examine qu'avec retenue l'appréciation à laquelle a procédé l'instance précédente. Il n'annule une décision sur mesures provisionnelles que si la pesée des intérêts à son origine est dépourvue de justification adéquate et ne peut être suivie, soit en définitive si elle paraît insoutenable (arrêts 2C_1034/2015 du 23 novembre 2015 consid. 3.1; 2C_567/2015 du 24 juillet 2015 consid. 2.2; s'agissant spécifiquement de mesures provisionnelles en lien avec un marché public, arrêt 2C_611/2011 du 16 décembre 2011 consid. 4.2).  
 
3.2. La Cour de justice a rappelé que la procédure de marché public en cause avait fait l'objet d'une décision d'adjudication qui avait été révoquée par la suite, de sorte que l'adjudication s'était réouverte et quela recourante pouvait entrer en ligne de compte pour une attribution. Toutefois, conformément aux dispositions légales applicables, une procédure d'adjudication pouvait être interrompue pour de justes motifs ou des raisons importantes. Cette condition semblait réalisée. En effet, le financement du projet VLS qui avait fait l'objet de l'appel d'offres n'était aucunement assuré, puisque les budgets nécessaires n'étaient pas votés et s'avéraient fortement contestés par le Grand Conseil. En outre, les organes politiques compétents pour voter les financements avaient fait part de leur volonté de ne les délivrer que si le marché public était ouvert plus largement qu'en 2012 à de nouvelles technologies. L'objection de la recourante selon laquelle les TPG cherchaient à se dérober à leurs obligations, en lançant une nouvelle procédure par l'intermédiaire de TPG/Vélo a été jugée a priori sans pertinence pour statuer sur le bien-fondé de la décision litigieuse d'interrompre le marché en cours. La Cour de justice en a conclu que les chances de succès du recours étaient ténues. En outre, l'intérêt public à la mise en place d'un système de location automatisée de vélos en libre-service dans le canton de Genève au bénéfice d'un financement adéquat l'emportait sur l'intérêt privé de la recourante à l'obtention d'un marché dont la réalisation était aléatoire faute de financement. Dans ces circonstances, il ne se justifiait pas de restituer l'effet suspensif au recours. Selon la Cour de justice, la décision d'interruption déployant ses effets, il n'y avait pas lieu d'interdire parallèlement et de manière abstraite aux TPG de lancer une nouvelle offre par voie de mesures provisionnelles. Quant àTPG/Vélo, aucun intérêt public ne pouvait l'empêcher, en tant que société tierce qui n'intervenait pas juridiquement dans l'adjudication litigieuse, de lancer un nouvel appel d'offres.  
 
4.   
S'agissant du refus de restituer l'effet suspensif, la recourante se plaint d'une application arbitraire des articles 17 al. 2 de l'Accord intercantonal sur les marchés publics du 25 novembre 1994 (AIMP; RS/GE L 6 05) et 58 al. 2 du Règlement cantonal du 17 décembre 2007 sur la passation des marchés publics (RMP; RS/GE L 6 05.01). Elle soutient en substance que c'est de manière arbitraire que la décision attaquée considère que les conditions posées par ces dispositions pour accorder l'effet suspensif n'étaient pas remplies en l'espèce, tant sous l'angle de l'issue prévisible de son recours que sous celui de la pesée des intérêts. 
 
4.1. Appelé à revoir l'interprétation d'une norme sous l'angle restreint de l'arbitraire, le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité précédente que si elle apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain (ATF 137 I 1 consid. 2.4 p. 5; arrêt 8C_1077/2009 du 17 décembre 2010 consid. 5.3), ce qu'il appartient au recourant de démontrer (art. 106 al. 2 et 117 LTF; cf. arrêt 2C_1006/2014 du 24 août 2015 consid. 4.3.1 destiné à la publication et les arrêts cités).  
 
4.2. En matière de marché public, le recours n'a en principe pas d'effet suspensif (cf. art. 17 al. 1 AIMP et art. 58 al. 1 RMP qui réserve toutefois le recours contre une sanction). L'art. 17 al. 2 AIMP prévoit toutefois que l'autorité de recours peut, d'office ou sur demande, accorder l'effet suspensif à un recours, pour autant que celui-ci paraisse suffisamment fondé et qu'aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s'y oppose, ce qui correspond aussi à l'art. 58 al. 2 RMP.  
 
4.3. Sur le plan cantonal, la procédure au fond porte sur la licéité de la décision du 9 juin 2015 des TPG d'interrompre le marché, que conteste la recourante.  
 
4.3.1. Selon l'art. 13 let. i AIMP, les dispositions cantonales d'exécution doivent garantir la possibilité d'interrompre et de répéter la procédure de passation en cas de justes motifs uniquement. Sur cette base, le législateur genevois a adopté l'art. 47 al. 1 RMP qui prévoit que la procédure peut être interrompue pour de justes motifs ou raisons importante notamment lorsqu'un abandon ou une modification importante du projet est nécessaire (let. c).  
 
4.3.2. Il ressort des faits constatés dans l'arrêt attaqué que la concrétisation du système VLS, tel que prévu dans le marché public interrompu le 9 juin 2015, posait problème. Le Grand Conseil avait refusé à deux reprises, les 25 janvier 2013 et 9 octobre 2014 le projet de loi (PL 10'989) y relatif, renvoyant chaque fois la cause à la Commission des finances. Il reprochait tant au projet qu'à son financement d'être approximatifs et il a en particulier demandé une étude complémentaire sur les différentes options qui se présentaient sur le plan technologique, eu égard aux expériences menées dans d'autres cantons jusqu'en 2015. En outre, le Conseiller d'Etat du Département concerné a écrit, le 26 juin 2014, aux TPG pour attirer leur attention sur les manques dans le projet et sur le fait que le financement de l'exploitation n'était assuré que pour un tiers à ce stade.  
 
Sur la base de ces éléments factuels qui lient la Cour de céans (art. 118 LTF), on ne voit pas que l'on puisse reprocher à la Cour de justice d'avoir considéré, dans le cadre de l'examen prima facie qui s'impose au stade des mesures provisionnelles (cf. supra consid. 3.1), que l'interruption de la procédure par les TPG reposait sur des raisons importantes au sens de l'art. 47 al. 1 let. c RMP se fondant sur les difficultés de financement du projet et sur la nécessité de tenir compte de l'évolution technologique survenue depuis 2012. 
 
4.3.3. La recourante ne peut être suivie lorsqu'elle considère que les motifs précités ne permettent pas de justifier l'interruption du marché.  
 
S'agissant des évolutions technologiques, elle se contente d'opposer sa propre appréciation à celle de la Cour de justice en affirmant que ces évolutions étaient plutôt vagues et auraient pu être intégrées dans le futur contrat passé à la suite de l'appel d'offres de 2012. Une telle argumentation appellatoire est irrecevable. Elle perd au demeurant de vue que le Grand Conseil a lui-même refusé le projet présenté et l'a renvoyé pour qu'il soit tenu compte des progrès technologiques, ce qui démontre le caractère déterminant de cet aspect pour le pouvoir législatif. 
 
Contestant l'incidence des difficultés de financement sur l'interruption du marché, la recourante soutient que celles-ci existaient déjà en 2012, mais que cela n'a pas empêché les TPG de continuer la procédure de marché public jusqu'en juin 2015 et que, malgré ces difficultés, les intimés s'apprêtaient à lancer une nouvelle procédure d'adjudication sur le même objet. Cette démonstration ne permet pas davantage de qualifier d'insoutenable la position de l'arrêt attaqué. En effet, ce n'est pas parce que le financement n'était pas encore assuré en 2012, lors du lancement du marché public, qu'il est choquant de considérer que si, trois ans plus tard, les fonds n'étaient toujours pas garantis et que le projet avait subi deux échecs devant le Grand Conseil, les TPG avaient un juste motif d'interrompre le marché. Par ailleurs, le fait qu'une nouvelle procédure de marché public puisse éventuellement être lancée par TPG/Vélo n'est, compte tenu des éléments qui précèdent et en particulier du souhait du pouvoir législatif de tenir compte des progrès technologiques, pas suffisant pour retenir à ce stade que l'interruption du marché serait contraire à la bonne foi de la part des TPG et viserait en premier lieu à évincer la recourante. 
 
On ne peut partant reprocher à la Cour de justice, dans le cadre de l'examen prima facie qui s'impose s'agissant de mesures provisionnelles, d'avoir procédé à une appréciation insoutenable en considérant que le recours contre la décision d'interruption de la procédure ne paraissait pas fondé. 
 
4.4. Conformément au texte des art. 17 al. 2 AIMP et 58 al. 2 RMP, cela suffit à justifier le refus de restituer l'effet suspensif, sans qu'il y ait lieu de s'interroger au surplus si des intérêts publics ou privés s'opposaient à une telle mesure.  
 
Au demeurant, la position de la Cour de justice, selon laquelle l'intérêt public à la mise en place d'un système de VLS à Genève au bénéfice d'un financement adéquat l'emporte sur l'intérêt privé de la recourante à obtenir un marché dont la réalisation est aléatoire faute de financement, échappe à toute critique sous l'angle de l'arbitraire. La recourante s'égare lorsqu'elle nie tout intérêt digne de protection des TPG, alors que l'intérêt public en jeu ne se limite pas à cette entreprise, mais est celui de la collectivité dans son ensemble de bénéficier d'un système de VLS dont le financement peut être accepté et qui correspond aux dernières avancées technologiques. Quant à l'intérêt privé de la recourante à obtenir la continuation de la procédure de 2012, celle-ci semble oublier que, même si les TPG lui adjugeaient le marché, cela ne signifie pas qu'elle exécuterait le contrat. Selon l'appel d'offres, la signature de celui-ci était subordonnée à l'acceptation de son financement et il était aussi prévu que si le projet était abandonné avant la conclusion du contrat, aucune indemnité ne serait due. On ne voit donc pas en quoi la recourante pourrait jouir en pratique d'un intérêt déterminant à obtenir la continuation de la procédure. 
 
4.5. Par conséquent, en refusant de restituer l'effet suspensif au motif que le recours paraissait infondé et que la recourante ne pouvait se prévaloir d'un intérêt personnel prépondérant à ce que les effets de la décision d'interruption du marché soient suspendus durant la procédure, la Cour de justice n'a pas appliqué de manière arbitraire les articles 17 al. 2 AIMP et 58 al. 2 RMP/GE.  
 
5.   
La recourante s'en prend également au refus de donner suite à sa demande de mesures provisionnelles, en invoquant l'arbitraire dans l'application de l'art. 21 de la loi genevoise du 12 septembre 1985 sur la procédure administrative (LPA; RS/GE E 5 10). 
 
5.1. Selon l'art. 21 al. 1 LPA, l'autorité peut d'office ou sur requête ordonner des mesures provisionnelles en exigeant au besoin des sûretés. De telles mesures tendent à garantir que le régime qui sera définitivement établi par la décision finale ne soit pas privé d'effet (PIERRE MOOR/ETIENNE POLTIER, Traité de droit administratif, vol. II, 3e éd. 2011, p. 306). Les mesures provisionnelles et l'effet suspensif (qui est du reste une catégorie de mesures provisionnelles) peuvent se recouper et avoir les mêmes effets (cf. par exemple en matière de marché public, arrêt 2C_1161/2013 du 27 février 2014 consid. 5.3).  
 
5.2. En l'espèce, la recourante a demandé, à titre provisionnel, à la Cour de justice qu'il soit fait interdiction aux TPG et à TPG/Vélo de "commencer un appel d'offre" ayant pour objet la mise en oeuvre d'un système de location automatisé de VLS à Genève. On peut se demander, comme le relèvent les intimés, si cette requête est rédigée de façon suffisamment précise pour être admissible, dès lors que l'on ne sait pas si, par l'utilisation des termes "commencer un appel d'offre" la recourante vise déjà les travaux préparatoires d'un nouveau marché public ou seulement la publication de l'appel d'offres.  
 
Cette question peut demeurer indécise, car les mesure provisionnelles sollicitées se recoupent avec la problématique de la restitution de l'effet suspensif, de sorte que l'on ne saurait reprocher à la Cour de justice d'être tombée dans l'arbitraire en traitant les deux questions de la même manière et en rejetant les requêtes de la recourante. En effet, le refus de restituer l'effet suspensif signifie en pratique que la décision d'interruption de la procédure de marché public peut déployer immédiatement ses effets. La conséquence principale de cette décision est de permettre la mise en place d'une nouvelle procédure, que ce soit par les TPG ou par une entité distincte, soitTPG/Vélo. Interdire, par la voie de mesures provisionnelles, de recommencer la procédure reviendrait ainsi de facto à accorder, au moins partiellement l'effet suspensif au recours. Les motifs pour lesquels le Tribunal fédéral a qualifié de non arbitraire le refus de la Cour de justice de restituer l'effet suspensif au recours s'appliquent donc également pour justifier son refus d'accorder les mesures provisionnelles sollicitées. Il suffit d'y renvoyer pour démontrer que, sous cet angle également, la décision attaquée ne procède pas d'une application insoutenable de l'art. 21 LPA
 
6.   
Le recours doit donc être rejeté, dans la mesure où il est recevable, ce qui rend sans objet la demande de mesures superprovisionnelles et provisionnelles requises par la recourante. 
 
 
7.   
Compte tenu de l'issue du litige, les frais seront mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens aux intimés en application de l'art. 68 al. 3 LTF. Ceux-ci obtiennent en effet gain de cause dans l'exercice de leurs attributions officielles à savoir en qualité de pouvoir adjudicateur pour les TPG (cf. arrêt 2C_203/2014 du 9 mai 2015 consid. 3.2) et, s'agissant de TPG/Vélo, en qualité d'organisation succédant à ces derniers et visée en tant qu'éventuel pouvoir adjudicateur dans la mise en place d'un nouveau marché public. 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 6'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative. 
 
 
Lausanne, le 10 décembre 2015 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Zünd 
 
La Greffière Vuadens