5A_510/2023 16.11.2023
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
5A_510/2023  
 
 
Arrêt du 16 novembre 2023  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Herrmann, Président, 
Escher et Bovey. 
Greffier : M. Piccinin. 
 
Participants à la procédure 
A.________ SA, 
représentée par Me Nicolas Jeandin, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Tribunal de première instance du canton de Genève, place du Bourg-de-Four 1, 1204 Genève, 
intimé. 
 
Objet 
sursis concordataire provisoire, 
 
recours contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, du 26 juin 2023 (C/25764/2022, ACJC/862/2023). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________ SA est une société anonyme, au capital social de 100'000 fr., inscrite au Registre du commerce genevois le 6 septembre 2010, qui a pour but le négoce, l'importation (trading) d'huiles végétales, de céréales et de tout autre produit agricole.  
Elle a pour administrateur unique B.________. 
 
A.b. Le 23 décembre 2022, A.________ SA a saisi le Tribunal de première instance de Genève (ci-après: Tribunal) d'une requête en ajournement de faillite, pour une durée de six mois, et conclu à ce qu'il lui soit donné acte de ce que sa requête valait dépôt de l'avis au juge au sens des art. 725 al. 2 et 725a al. 1 CO.  
Elle a fait valoir qu'en dépit d'un modèle d'affaires sain, la modification du cours de l'huile végétale en avril 2021 avait causé une augmentation " fulgurante " de son surendettement. 
Elle a produit diverses pièces. 
Du rapport de l'organe de révision C.________ SA du 16 décembre 2022 sur le bilan intermédiaire au 30 septembre 2022 aux valeurs de continuation et de liquidation de la société, résulte un surendettement aux deux valeurs de continuation et de liquidation de la société, présentés en francs suisses et en dollars américains, de 5'494'710 fr. 16 aux valeurs de continuation et de 7'340'575 fr. 08 aux valeurs de liquidation. 
Le compte de pertes et profits montre un bénéfice net de 608'112 fr. 31 en 2020 et une perte de 11'552'209 fr. 22 en 2021, et le bilan des capitaux propres de 4'737'801 fr. 13 en 2020 et un surendettement de 6'547'257 fr. 07 en 2021. 
Dans le rapport de l'auditeur indépendant figurent la mention d'un surendettement de 6'468'989 fr. 53 au 31 décembre 2021 passé à 5'494'710 fr. 16 au 30 septembre 2022, ainsi qu'un nombre de collaborateurs constant de 2 jusqu'au 30 septembre 2022. 
Selon un tableau établi par A.________ SA, l'endettement vis-à-vis de trois créanciers (désignés comme les plus importants), de 865'8670,31 USD au 30 septembre 2022, devrait être réduit à 3'612'460,15 USD au 31 décembre 2023 puis à zéro au 31 décembre 2024. 
Des projections chiffrées, intitulées " business plan ", font état, pour les années 2022 à 2025, d'un bénéfice net avant impôt supérieur à quatre millions de dollars américains, alors qu'il était inférieur à deux millions de dollars américains au 31 décembre 2022. 
S'agissant de l'évolution du passif, les projections chiffrées montrent un surendettement de 5'153'000 USD au 31 décembre 2022 et de 1'052'000 USD au 31 décembre 2023, tout surendettement disparaissant au 31 décembre 2024. 
 
A.c. Lors de ses audiences des 9 et 23 mars 2023, le Tribunal a entendu l'administrateur unique de A.________ SA ainsi que D.________, directeur financier de la holding (entité chypriote) détenant la précitée.  
L'administrateur de A.________ SA a déclaré que la société n'avait jamais eu d'activités depuis U.________, qu'elle n'avait plus d'employés, que les personnes qui oeuvraient pour elle se trouvaient en Russie, que les contrats étaient préparés par une société russe appartenant aux actionnaires, que les produits étaient versés sur des comptes bancaires ouverts en Suisse et qu'il n'y avait pas de comptabilité en Suisse. Les rentrées suffisaient largement à couvrir les frais courants, les charges ne consistant qu'en des honoraires de l'administrateur et les frais d'avocat pour la procédure. Le processus d'assainissement devrait consister en la continuation des activités, car les affaires étaient bonnes, et la négociation d'abandon de créances avec les créanciers. 
Le témoin D.________, directeur, a déclaré qu'il représentait l'actionnaire de A.________ SA, dont il a affirmé être un organe de fait. La réduction du surendettement avait commencé depuis début 2022 grâce au trading de l'huile de tournesol. Au titre des mesures d'assainissement envisagées, il a précisé que des contrats avaient été conclus avec certains créanciers, ce qui allait continuer. La société avait très bonne réputation, de sorte qu'il était optimiste quant à l'accroissement du chiffre d'affaires. A.________ SA ne comptait que deux employés de sorte qu'il n'y avait pas matière à réduire les charges de fonctionnement. À son sens, la seule solution pour régler les dettes était que la société continue à fonctionner pour générer du chiffre d'affaires. L'actionnaire réfléchissait à recapitaliser la société, sans détermination de délai. Il y avait un espoir de négocier dans les deux ou trois mois à venir des postpositions de créances. Les exercices avaient toujours été bénéficiaires, sauf en 2021 en raison de la conjoncture. Le témoin a estimé à deux ans le temps nécessaire pour faire disparaître le surendettement, sans recapitalisation. 
Des comptes non audités ont été produits, qui montrent un surendettement, valeur de continuation, de 5'606'262 fr. 41 au 31 décembre 2022 et de 5'263'053 fr. 72 au 28 février 2023, ainsi qu'une liste de contrats conclus par A.________ SA entre décembre 2022 et mars 2023. 
 
A.d. À l'issue de l'audience du 23 mars 2023, A.________ SA a ajouté des conclusions subsidiaires à sa requête, par lesquelles elle sollicitait un sursis concordataire provisoire de quatre mois non publié pour le cas où le Tribunal estimait qu'un ajournement au sens de l'art. 725a CO était exclu en raison de la novelle entrée en vigueur le 1er janvier 2023 (complété d'office selon l'art. 105 al. 2 LTF).  
 
B.  
 
B.a. Par jugement du 17 avril 2023, expédié pour notification aux parties le même jour, le Tribunal a préalablement donné acte à A.________ SA de son avis de surendettement du 23 décembre 2022, cela fait dit qu'il n'y avait pas lieu à ajournement de la faillite, rejeté la requête de sursis concordataire formée à titre subsidiaire, prononcé la faillite de la précitée avec effet au 17 avril 2023 à 14h00, arrêté les frais judiciaires à 2'080 fr., compensés avec l'avance versée en 1'160 fr., mise à la charge de la société susmentionnée, condamnée en outre à verser 920 fr. à l'Etat de Genève, et a débouté celle-ci de toutes autres conclusions.  
Il a été en substance retenu que n'étaient réalisées ni les exigences formelles (faute de plan d'assainissement suffisamment détaillé, documenté et crédible) ni les exigences matérielles de l'art. 293 LP (vu notamment l'ampleur du surendettement fin 2022, l'absence de toute perspective concrète d'augmentation du capital, l'impossibilité de réduire les frais de fonctionnement, la poursuite de l'activité de trading comme seule perspective de réduction du passif). 
 
B.b. Le 28 avril 2023, A.________ SA a recouru contre ce jugement, en concluant à son annulation et, cela fait à l'ajournement de faillite, au prononcé d'un sursis concordataire provisoire pour quatre mois, non rendu public, et à la désignation d'un commissaire provisoire, frais à la charge de l'Etat de Genève.  
 
B.c. Par arrêt du 26 juin 2023, communiqué aux parties le lendemain, la Cour de justice du canton de Genève (ci-après: Cour de justice) a rejeté le recours et confirmé le jugement précité, la faillite de A.________ SA prenant effet le 26 juin 2023 à 12 heures.  
 
C.  
Par acte du 7 juillet 2023, A.________ SA exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 26 juin 2023, en concluant à son annulation et, cela fait, à ce qu'il soit statué à nouveau dans le sens des conclusions prises dans son appel. Elle a sollicité à titre préalable l'octroi de l'effet suspensif. 
Des déterminations sur le fond n'ont pas été requises. 
 
D.  
Par ordonnance présidentielle du 10 juillet 2023, l'effet suspensif a été accordé à titre superprovisoire. 
Par ordonnance subséquente du 4 août 2023, la requête d'effet suspensif a été admise en lien avec le caractère exécutoire du prononcé de faillite et sa force de chose jugée, les éventuelles mesures conservatoires prises par l'Office en application des art. 162 ss, 170, 174 al. 3 et 221 ss LP demeurant en vigueur. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
La décision attaquée confirme le rejet d'une requête d'un sursis provisoire et le prononcé d'une faillite. Il s'agit d'une décision finale (art. 90 LTF; arrêts 5A_556/2021 du 20 septembre 2022 consid. 1.1; 5A_866/2015 du 2 mai 2016 consid. 1.1 et l'arrêt cité, non publié à l'ATF 142 III 364) rendue sur recours en dernière instance cantonale (art. 75 LTF) et sujette au recours en matière civile (art. 72 al. 2 let. a LTF). Le recours est ouvert indépendamment de la valeur litigieuse (art. 74 al. 2 let. d LTF). La recourante, agissant en temps utile (art. 100 al. 1 LTF), a succombé devant la juridiction précédente et dispose d'un intérêt digne de protection à faire modifier l'acte entrepris; elle a ainsi qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF). 
 
2.  
 
2.1. La décision par laquelle le juge refuse le sursis provisoire et prononce la faillite ne constitue pas une mesure provisionnelle. Contre cette décision, le recourant peut donc former un recours en matière civile pour violation du droit, tel qu'il est délimité par l'art. 95 LTF (ATF 142 III 364 consid. 2.3). Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Cela étant, eu égard à l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, il n'examine en principe que les griefs soulevés; il n'est pas tenu de traiter, à l'instar d'une autorité de première instance, toutes les questions juridiques pouvant se poser, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui (ATF 140 III 86 consid. 2; 137 III 580 consid. 1.3; 135 III 397 consid. 1.4). L'art. 42 al. 2 LTF exige par ailleurs que le recourant discute les motifs de la décision entreprise et indique précisément en quoi il estime que l'autorité précédente a méconnu le droit (ATF 140 III 86 consid. 2). Le recourant doit se déterminer par rapport aux considérants de l'arrêt querellé; il ne peut se contenter de reprendre presque mot pour mot l'argumentation formée devant l'autorité cantonale (ATF 145 V 161 consid. 5.2; 142 I 99 consid. 1.7.1; 134 II 244 consid. 2.1 et 2.3). En outre, le Tribunal fédéral ne connaît de la violation de droits fondamentaux que si un tel grief a été invoqué et motivé par le recourant (" principe d'allégation ", art. 106 al. 2 LTF; ATF 139 I 229 consid. 2.2; 137 II 305 consid. 3.3; 135 III 232 consid. 1.2, 397 consid. 1.4 in fine), c'est-à-dire s'il a été expressément soulevé et exposé de façon claire et détaillée (ATF 135 III 232 consid. 1.2; 133 II 249 consid. 1.4.2). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 140 III 264 consid. 2.3 et les références).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF); il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été constatés de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influencer le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). La partie recourante qui soutient que les faits ont été établis d'une manière manifestement inexacte (art. 97 al. 1 LTF), à savoir arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 137 III 268 consid. 1.2), doit démontrer, par une argumentation précise, en quoi consiste la violation (art. 106 al. 2 LTF; ATF 134 II 244 consid. 2.2).  
 
3.  
Selon l'arrêt attaqué, la recourante reprochait uniquement au premier juge d'avoir rejeté ses conclusions subsidiaires en octroi d'un sursis concordataire provisoire. Ce magistrat avait retenu qu'il n'y avait manifestement aucune perspective d'assainissement, ce que la recourante contestait au vu des pièces et explications qu'elle avait fournies. On cherchait pourtant en vain dans celles-ci de quoi comprendre comment une société commerciale pouvait produire un chiffre d'affaires, alors que de son aveu même elle ne comptait pas (ou plus) d'employés, et n'avait pas d'activités opérationnelles à U.________, la totalité des contrats étant préparés par une entité étrangère avant une signature de l'administrateur. À teneur de la déclaration de ce dernier, seuls les produits, versés sur des comptes bancaires ouverts en Suisse, semblaient avoir un lien concret avec le siège de la société. 
Au demeurant, il n'avait pas été déposé de véritable plan d'assainissement provisoire, au sens de la doctrine. Aucun titre ne venait soutenir l'affirmation, reposant seulement sur des tableaux et listes dépourvus de commentaires, selon laquelle de nouveaux contrats auraient été conclus, seule mesure permettant de réduire le surendettement à en croire la recourante, mesure qui aurait déjà fait effet entre le 30 septembre 2022 et mars 2023. Contrairement à l'avis de la recourante, la déclaration du témoin D.________, qui était au service de la holding qui détenait la précitée, ne pouvait être appréciée qu'avec circonspection, ainsi que l'avait fait le premier juge, et n'apparaissait ainsi pas suffisante pour pallier ce manque de plan d'assainissement provisoire; les perspectives de recapitalisation évoquées paraissaient pour le surplus peu sérieuses au vu de la situation politique actuelle et de l'actionnariat russe de la société, et des autres motifs développés par le Tribunal, que la cour cantonale a fait siens. 
La cour cantonale a ainsi considéré que, compte tenu des circonstances d'espèce, comme l'avait retenu le Tribunal, il n'existait manifestement aucune perspective d'assainissement: la conséquence légale en était le prononcé de la faillite. 
 
4.  
 
4.1. La recourante se plaint, dans une partie qu'elle intitule " En fait ", de ce que l'arrêt attaqué n'est pas conforme aux exigences de l'art. 112 al. 1 LTF, dans la mesure où il passe totalement sous silence les faits et pièces fournis dans son mémoire cantonal.  
L'art. 112 al. 1 LTF dont se prévaut la recourante s'adresse à l'autorité cantonale qui statue immédiatement avant le recours au Tribunal fédéral. Il ne peut donc être invoqué comme tel par la partie recourante, laquelle doit faire valoir la violation de son droit à une motivation suffisante avec lequel l'art. 112 al. 1 LTF se recoupe (cf. arrêts 5A_725/2022 du 5 avril 2023 consid. 5.1; 4A_63/2022 du 5 août 2022 consid. 3.1; 4A_110/2021 du 28 février 2022 consid. 3.1; 5A_266/2020 du 26 mai 2020 consid. 4.1). 
Il suit de là qu'en tant qu'elle invoque l'art. 112 al. 1 LTF, la critique de la recourante ne mérite pas de plus amples développements. Il n'y a par ailleurs pas lieu de prendre en considération les prétendus allégués de son mémoire cantonal que la recourante reprend tels quels devant le Tribunal fédéral à la suite de cette critique, étant donné qu'aucun grief d'arbitraire dans leur omission n'est soulevé et que la recourante n'expose pas en quoi chacun de ces allégués serait susceptible d'influer sur le sort de la cause (cf. supra consid. 2.2). 
 
4.2. Cela étant, dans une critique qui rejoint en partie celle de violation de l'art. 112 al. 1 LTF, la recourante se prévaut également d'une violation de l'art. 29 al. 2 Cst. sous l'angle de son droit à une décision motivée. Elle reproche à la cour cantonale d'avoir confirmé le prononcé de première instance sans prendre en compte l'ensemble des éléments portés devant elle. Selon la recourante, la cour cantonale se serait pour l'essentiel limitée à énumérer quelques-unes des pièces qu'elle avait produites et à procéder, sur cette base, à des affirmations lapidaires. Elle avait ignoré les pièces et explications fournies et ne faisait aucune mention concernant les modalités d'assainissement en dépit de l'aspect fondamental que revêtait cette question. Cette manière de procéder l'empêchait de percevoir quels faits avaient été retenus. Outre l'absence de considération concernant les modalités d'assainissement, l'arrêt attaqué ne se prononçait pas sur l'évolution des éléments comptables présentés et son incidence sur les procédés d'assainissement à examiner par le juge du concordat. Ces éléments contrevenaient à son droit d'être entendue.  
 
4.3. Le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti à l'art. 29 al. 2 Cst. implique notamment, pour l'autorité, l'obligation de motiver sa décision, afin que le destinataire puisse la comprendre, l'attaquer utilement s'il y a lieu et afin que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle. Le juge doit ainsi mentionner, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 143 IV 40 consid. 3.4.3; 142 I 135 consid. 2.1). Il n'est pas tenu de discuter tous les arguments soulevés par les parties, mais peut se limiter à l'examen des questions décisives pour l'issue du litige (ATF 147 IV 249 consid. 2.4). Dès lors que l'on peut discerner les motifs qui ont guidé la décision de l'autorité, le droit à une décision motivée est respecté, la motivation pouvant d'ailleurs être implicite et résulter des différents considérants de la décision (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1).  
 
4.4. En l'occurrence, il résulte de l'arrêt entrepris que la cour cantonale a confirmé l'appréciation du Tribunal portant sur l'absence manifeste de perspectives d'assainissement au motif que les pièces et explications fournies en lien avec l'absence de salariés et d'activités opérationnelles à U.________ ne permettaient pas de comprendre comment un chiffre d'affaires pouvait être généré et qu'un véritable plan d'assainissement provisoire n'avait pas été déposé.  
Bien que succinctement rédigés, ces motifs sont suffisants pour comprendre pourquoi la cour cantonale a confirmé le rejet du sursis concordataire provisoire - seul point litigieux en appel (cf. supra consid. 3 in initio) - et la recourante a été en mesure de les attaquer (cf. infra consid. 5). Il y a lieu de relever qu'en tant qu'elle fait ici grief à la cour cantonale de n'avoir pas tenu compte dans son appréciation de l'ensemble des éléments portés devant elle, en particulier les éléments comptables, la recourante confond le défaut de motivation, qui relève du droit d'être entendu, avec le désaccord que la motivation présentée a suscité chez elle et qui relève du fond (ATF 145 III 324 consid. 6.1 et les références). 
Partant, le grief de violation du droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.) doit être rejeté, dans la mesure de sa recevabilité. 
 
5.  
 
5.1.  
 
5.1.1. L'octroi du sursis provisoire ne doit pas être soumis à des exigences élevées (ATF 147 III 226 consid. 3.1.1; Message du 8 septembre 2010 concernant la modification de la LP [droit de l'assainissement], FF 2010 5895 ch. 2.7). Au contraire du sursis définitif où il faut " une perspective d'assainissement ou d'homologation d'un concordat " au sens d'une condition positive (art. 294 al. 1 et 3 LP; ATF 147 III 226 consid. 3.1.3), le sursis provisoire doit être accordé, sauf s'il apparaît clairement dès le départ qu'il n'existe aucune perspective d'assainissement ou d'homologation d'un concordat (ATF 147 III 226 consid. 3.1.3; arrêt 5A_495/2016 du 11 novembre 2016 consid. 3.1). Ce n'est que dans les cas voués à l'échec ou désespérés, c'est-à-dire là où cette mesure ne représenterait qu'une perte de temps et de moyens au détriment des créanciers, que le juge du concordat doit le refuser (ATF 147 III 226 consid. 3.1.3 et les auteurs cités; OGer ZH, 21.11.2016, PS160185, in ZR 115/2016 p. 279; Stauber/Talbot, Die Praxis des Nachlassgerichts Zürich zum revidierten Sanierungsrecht, PJA 2017, p. 879).  
 
5.1.2. À teneur de l'art. 293 let. a LP, la procédure concordataire peut être ouverte par requête du débiteur, accompagnée des documents suivants: un bilan à jour, un compte de résultats et un plan de trésorerie ou d'autres documents présentant l'état actuel et futur de son patrimoine, de ses résultats ou de ses revenus ainsi qu'un plan d'assainissement provisoire. Le débiteur doit motiver et justifier sa requête.  
Le plan d'assainissement doit être disponible par écrit (art. 293 let. a LP; KÄLIN, Der Sanierungsplan nach OR und nach SchKG, PJA 2016 (cité ci-après PJA 2016), p. 438; BAUER/LUGINBÜHL, in Basler Kommentar, SchKG II, 3e éd. 2021, no 23e ad art. 293 LP). Il sert de base au juge pour vérifier si un assainissement ou une homologation d'un concordat n'est pas voué à l'échec (FF 2010 5894 ch. 2.7; Kälin, Anforderung an den Sanierungsplan, in Sanierung und Insolvenz von Unternehmen IX: Neue Entwicklungen, 2019, p. 16; LE MÊME, PJA 2016, p. 437; B AUER/LUGINBÜHL, op. cit., no 23e ad art. 293 LP), étant entendu que l'évaluation de l'absence de perspectives d'assainissement relève du pouvoir d'appréciation du juge (art. 4 CC; ATF 147 III 226 consid. 3.1.3 et les références citées; ZR 115/2016 p. 278). À cette fin, il mentionnera en premier lieu si le sursis provisoire est demandé pour un assainissement au sens strict ou pour préparer un concordat (FF 2010 5894 ch. 2.7; BAUER/LUGINBÜHL, op. cit., no 23e ad art. 293 LP; HUNKELER, in Kurzkommentar, SchKG, 2e éd. 2014, no 14 ad art. 293 LP; STAUBER/TALBOT, op. cit., p. 876; UMBACH-SPAHN/KESSELBACH/BURKHALTER, in Schulthess Kommentar, SchKG, 4e éd. 2017, no 23 ad art. 293 LP). Dans l'hypothèse où un assainissement au sens strict est visé comme en l'occurrence (cf. infra consid. 5.3.1), il indiquera comment y parvenir, en fournissant au moins des explications rudimentaires sur les mesures d'assainissement envisagées (apport de nouveaux fonds, augmentations de capital, négociations fructueuses avec les créanciers sur des abandons volontaires de créances, cessions de rang de créanciers, restructurations ou reprise d'entreprise, vente d'actifs, fusion, restructuration, etc.), sur la faisabilité de ces mesures ainsi que sur les conséquences financières attendues (UMBACH-SPAHN/KESSELBACH/BURKHALTER, op. cit., no 22 ad art. 293 LP; HUNKELER, op. cit., no 14 ad art. 293 LP; STAUBER/TALBOT, op. cit., p. 876; BAUER/LUGINBÜHL, op. cit., no 23e ad art. 293 LP; voir aussi FF 2010 5894 ch. 2.7). 
 
5.2. Soulevant un grief d'arbitraire dans l'appréciation des preuves, la recourante estime que la considération de la cour cantonale relative à l'absence de réalisation d'un chiffre d'affaires serait entachée d'une contradiction insurmontable dans la mesure où ladite cour constatait en même temps dans l'état de fait qu'elle avait perçu des produits sur ses comptes en Suisse et qu'elle avait réalisé un bénéfice net " inférieur à 2 millions de dollars américains au 31 décembre 2022". Ce constat était d'autant plus insoutenable que les pièces du dossier, parmi lesquelles en particulier les états financiers produits en première instance sous pièce 12, décriraient précisément le chiffre d'affaires et les postes de charges y relatifs. Etait tout aussi arbitraire la constatation portant sur l'absence de démonstration de la conclusion de nouveaux contrats nécessaires à la réduction du surendettement, un bénéficie d'un peu moins de 2'000'000 USD ne pouvant pas avoir été généré sans nouveaux contrats. Enfin, il était clairement contraire au dossier de retenir qu'elle n'avait pas produit de plan d'assainissement au motif qu'elle s'était limitée à produire des tableaux et listes dépourvus de commentaires; les modalités de l'assainissement avaient été explicitées (réduction des frais administratifs, poursuite du business model avec des aménagements pour diminuer le risque lié à la volatilité du prix de l'huile de tournesol, négociations de rééchelonnement avec certains créanciers, négociations en cours en vue d'obtenir des postpositions provisoires, possible recapitalisation de la société). Selon la recourante, ces constats de la cour cantonale aboutissaient à un résultat choquant puisqu'ils servaient de fondement factuel au refus de l'autorité cantonale d'octroyer un sursis concordataire. Le Tribunal fédéral devait ainsi compléter l'état de fait, en retenant qu'elle " continu[ait] à générer un chiffre d'affaires en dépit de la quasi-disparition de frais mis à [sa] charge, grâce à la poursuite de ses affaires concrétisée par la conclusion de transactions commerciales, et que les mesures d'assainissement proposées par ses soins ont été dûment décrites et documentées ".  
Invoquant également une violation des art. 293 let. a et 293a LP en lien avec la motivation de la cour cantonale relative à l'absence de véritable plan d'assainissement, la recourante fait valoir que l'état de fait rectifié en application de l'art. 105 al. 2 LTF permettait d'établir qu'elle avait valablement présenté un tel plan, assorti de pièces, d'explications et de diverses mesures envisagées, à la lumière desquelles il n'était pas possible de conclure à l'absence de tout espoir d'aboutir à une solution concordataire. Cela découlait notamment du fait qu'elle avait dégagé un bénéfice, qu'elle poursuivait ses activités et qu'elle avait déjà réussi à réduire son endettement " depuis 2022", ce qui était documenté et même constaté à demi-mots par la cour cantonale. De même, il ressortait du dossier qu'elle avait présenté un business plan et des tableaux de prévisions, des documents assortis de l'énumération de diverses mesures d'assainissement, dont certaines déjà en cours comme par exemple les négociations de rééchelonnement avec certains créanciers. Même à vouloir lui reprocher un certain manque de précision ou de complétude des documents et explications fournies, ce qui était fréquent à ce stade, l'on ne voyait pas comment ces éléments permettaient d'aboutir au constat de l'absence manifeste de toute perspective d'assainissement autorisant le juge à prononcer une faillite plutôt qu'un sursis provisoire.  
 
5.3.  
 
5.3.1. À titre liminaire, il sera relevé que si la recourante reproche à la cour cantonale d'avoir conclu " à l'absence de tout espoir d'aboutir à une solution concordataire ", il ne ressort ni de l'arrêt entrepris ni des critiques formulées dans le recours que la recourante aurait sollicité un sursis provisoire dans le but de préparer un concordat, seule la mise en oeuvre d'un assainissement au sens strict en vue de parer au surendettement y est discutée.  
 
5.3.2. Contrairement à ce que soutient la recourante, il n'apparaît pas contradictoire de considérer qu'une société qui perçoit uniquement des produits sur ses comptes bancaires et qui, par ce seul biais, fait un bénéfice ne réalise pas de chiffre d'affaires, en ce sens qu'elle ne perçoit pas de montants provenant de ses propres activités.  
À cet égard, la critique de la recourante ne permet pas de considérer que la cour cantonale aurait versé dans l'arbitraire en constatant qu'elle ne réalisait pas de chiffre d'affaires, respectivement qu'elle n'avait aucune activité. Tout d'abord, elle ne conteste pas n'avoir aucun (ou plus aucun) employé ni ses déclarations sur l'absence d'activités opérationnelles à U.________ et de comptabilité en Suisse. Puis, si elle explique que les " pièces du dossier " décriraient précisément le chiffre d'affaires et les postes de charges y relatifs, elle fonde ces explications exclusivement sur les allégués repris de son mémoire cantonal dans la partie " en fait " du présent recours, soit sur des faits qui ont été déclarés irrecevables (cf. supra consid. 4.1 in fine), étant au surplus relevé qu'il n'est pas possible, à la lecture de l'arrêt querellé, de déterminer le contenu de la pièce 12 à laquelle la recourante se réfère plus spécifiquement, faute d'un grief d'arbitraire dans l'établissement des faits valablement soulevé (cf. supra consid. 2.2). En outre, elle n'établit pas avoir conclu de nouveaux contrats. Sa seule considération, dénuée de développement, selon laquelle un bénéfice de 2'000'000 USD en 2022 n'aurait pas été réalisé sans la conclusion de nouveaux contrats est purement appellatoire; ne satisfaisant nullement aux exigences accrues de motivation en la matière (cf. supra consid. 2.2), elle ne saurait remettre en cause le constat de la cour cantonale sur l'absence de titre permettant de prouver la conclusion de nouveaux contrats. 
 
5.3.3. Cela étant, il résulte de l'argumentation de la recourante que celle-ci prétend avoir présenté des pièces, des explicitations et diverses mesures envisagées. Or, en tant qu'elle soutient que cela ressortirait de " l'état de fait rectifié en application de l'art. 105 al. 2 LTF ", sa critique apparaît dénuée de fondement, dès lors que les conditions pour compléter l'état de fait dans le sens voulu par la recourante ne sont pas réalisées (cf. supra consid. 5.3.2). Par ailleurs, si la recourante indique avoir énoncé devant les autorités précédentes plusieurs mesures d'assainissement, la liste qu'elle présente ne ressort pas de l'arrêt querellé, mais est, là également, reprise des allégués retranscrits de son mémoire cantonal dans la partie " en fait " du présent recours (cf. supra consid. 4.1). Dût-on admettre que la recourante avait effectivement invoqué les mesures mentionnées qu'elle n'établit de toute manière pas avoir exposé dans les grandes lignes en instance cantonale - un tel exposé faisant également défaut devant le Tribunal fédéral - comment ces prétendues mesures étaient réalistes et permettaient de conduire à un assainissement, au regard de son absence d'activité. Le fait qu'elle relève avoir présenté un " business plan " et des " tableaux de prévisions " n'apparaît à ce propos pas déterminant; en effet, l'arrêt entrepris (p. 3) retient qu'il s'agit de projections chiffrées et la recourante ne démontre pas, en soulevant valablement un grief d'arbitraire, que ces documents - ni d'ailleurs tout autre document - contiendraient une description des mesures d'assainissement envisagées, accompagnées d'explications rudimentaires permettant d'apprécier leurs conséquences financières et leur plausibilité  
(cf. supra consid. 5.1.2). 
Il ressort certes de l'état de fait de l'arrêt entrepris que, selon le rapport de l'auditeur indépendant, son surendettement s'est réduit de 6'468'989 fr. au 31 décembre 2021 à 5'494'710 fr. 16 au 30 septembre 2022. L'on ne saurait toutefois reprocher à la cour cantonale d'avoir abusé de son pouvoir d'appréciation en jugeant sur cette seule base qu'il n'existait manifestement aucune perspective d'assainissement, la recourante ne démontrant aucunement que ce bénéfice résulterait de la mise en oeuvre des mesures d'assainissement proposées et qu'ainsi il y aurait lieu de compter avec la réalisation d'un bénéficie à l'avenir. 
Au vu de ce qui précède, les critiques relatives à l'absence manifeste de perspectives d'assainissement doivent être rejetées, dans la mesure où elles sont recevables. Il en va de même en ce qui concerne l'absence de véritable plan d'assainissement provisoire, dès lors qu'au surplus la recourante ne conteste pas la motivation de la cour cantonale selon laquelle la déclaration du témoin D.________ n'était pas suffisante pour pallier ce manque de plan. 
 
6.  
En définitive, le recours est rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, aux frais de la recourante (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
L'effet suspensif ordonné en instance fédérale se rapportant tant à la force exécutoire qu'à la force de chose jugée du prononcé de faillite, il convient de fixer à nouveau la date de l'ouverture de la faillite (cf. ATF 118 III 37 consid. 2b; arrêts 5A_818/2019 du 31 janvier 2020 consid. 5; 5A_778/2015 du 16 décembre 2015 consid. 4 et l'arrêt cité). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté, dans la mesure de sa recevabilité. 
 
2.  
La faillite de A.________ SA prend effet le 16 novembre 2023 à 15h30. 
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 5'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, à l'Office des faillites du canton de Genève, à l'Office cantonal des poursuites de Genève, au Registre foncier de la République et canton de Genève et à l'Office du registre du commerce du canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 16 novembre 2023 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Herrmann 
 
Le Greffier : Piccinin