5A_718/2022 23.11.2022
Avis important:
Les versions anciennes du navigateur Netscape affichent cette page sans éléments graphiques. La page conserve cependant sa fonctionnalité. Si vous utilisez fréquemment cette page, nous vous recommandons l'installation d'un navigateur plus récent.
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
5A_718/2022  
 
 
Arrêt du 23 novembre 2022  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Herrmann, Président, 
von Werdt et Bovey. 
Greffière : Mme Hildbrand. 
 
Participants à la procédure 
A.A.________, 
représenté par Me Robert Assaël, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
B.A.________, 
représentée par Me Sonia Ryser, avocate, 
intimée. 
 
Objet 
mesures protectrices de l'union conjugale (effet suspensif), 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice du canton de Genève, Chambre civile, du 17 août 2022 
(C/7971/2021 ACJC/1057/2022). 
 
 
Considérant en fait et en droit :  
 
1.  
Par arrêt du 17 août 2022, la Présidente de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève (ci-après: présidente) a rejeté la requête formée par A.A.________ en suspension du caractère exécutoire attaché au dispositif du jugement de mesures protectrices de l'union conjugale rendu le 27 juin 2022 par le Tribunal de première instance du canton de Genève dans la cause l'opposant à son épouse B.A.________. 
 
2.  
Par acte du 9 septembre 2022, A.A.________ exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 17 août 2022. Il conclut principalement à son annulation et à sa réforme en ce sens que l'effet suspensif soit prononcé s'agissant des points 8, 9, 11 et 12 du dispositif du jugement du 27 juin 2022, à savoir les chiffres du dispositif portant sur les contributions dues à l'entretien de son épouse et de leur fille commune. Subsidiairement, il conclut à l'annulation de dit arrêt et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
Invitées à se déterminer, la présidente s'en est rapportée à justice et l'intimée a conclu principalement à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement au rejet de la requête d'effet suspensif à l'appel déposé par le recourant le 11 juillet 2022. Le recourant a répliqué le 24 octobre 2022. L'intimée n'a pas dupliqué. 
 
3.  
 
3.1. La décision entreprise, qui refuse de suspendre l'exécution d'une ordonnance de mesures protectrices de l'union conjugale, est une décision incidente rendue en matière civile (art. 72 al. 1 LTF), susceptible de recours au Tribunal fédéral bien qu'émanant d'une autorité cantonale de dernière instance n'ayant pas statué sur recours, mais en qualité d'instance cantonale unique (ATF 143 III 140 consid. 1.2; 137 III 475 consid. 1 et la référence). Elle ne peut être attaquée par un recours au Tribunal fédéral qu'aux conditions particulières de l'art. 93 al. 1 LTF (arrêts 5A_478/2020 du 14 août 2020 consid. 1; 5A_665/2018 du 18 septembre 2018 consid. 1, non publié aux ATF 144 III 469). Le recours contre une décision incidente est soumis à la même voie de droit que celle qui est ouverte contre la décision principale (ATF 137 III 380 consid. 1.1). Dès lors que seules des questions relatives aux contributions d'entretien et à la provisio ad litem sont encore litigieuses devant l'autorité précédente, l'affaire est de nature pécuniaire; la valeur litigieuse (art. 51 al. 1 let. c et al. 4 LTF) atteint le seuil requis (art. 74 al. 1 let. b LTF). Sous réserve de la réalisation des conditions de l'art. 93 al. 1 LTF, le recours en matière civile interjeté en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et en la forme prévue par la loi (art. 42 al. 1 LTF), par une partie qui a succombé dans ses conclusions en instance cantonale (art. 76 LTF), est en principe recevable au regard des dispositions qui précèdent.  
 
3.2. Aux termes de l'art. 93 al. 1 let. a LTF, les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours si elles peuvent causer un préjudice irréparable. Selon la jurisprudence, un tel préjudice n'est réalisé que s'il cause au recourant un inconvénient de nature juridique, qui ne puisse pas être réparé ultérieurement par un jugement final ou une autre décision qui lui serait favorable (ATF 142 III 798 consid. 2.2; 141 III 80 consid. 1.2; 141 IV 284 consid. 2.2). De jurisprudence constante, le fait d'être exposé au paiement d'une somme d'argent n'entraîne, en principe, aucun préjudice de cette nature (ATF 138 III 333 consid. 1.3.1 et la référence; parmi plusieurs: arrêts 5A_853/2021 du 8 novembre 2021 consid. 1.2.1; 5A_12/2019 du 26 février 2019 consid. 1.2; 5A_858/2017 du 6 avril 2018 consid. 2.2). Il n'y a d'exception que si le paiement de la somme litigieuse expose la partie recourante à d'importantes difficultés financières ou si, en cas d'admission du recours, le recouvrement du montant acquitté paraît aléatoire en raison de la solvabilité douteuse du créancier (arrêt 5A_853/2021 précité ibid. et les références). La question de la recevabilité du recours sous l'angle de l'art. 93 al. 1 LTF est douteuse, bien que le recourant fasse valoir qu'il ne percevrait plus d'indemnités de l'assurance chômage depuis le mois de mai 2022, de sorte que le paiement des montants litigieux l'exposerait à un important risque de faillite personnelle et à la perte de son logement. Quoi qu'il en soit, cette question peut en l'espèce demeurer indécise, dès lors que le recours doit de toute manière être rejeté pour les motifs exposés ci-après (cf. infra consid. 5 et 6).  
 
4.  
 
4.1. La décision sur l'effet suspensif constitue des mesures provisionnelles au sens de l'art. 98 LTF (ATF 134 II 192 consid. 1.5; 5A_665/2018 du 18 septembre 2018 consid. 1, non publié aux ATF 144 III 469). Dans ce cas, la partie recourante ne peut dénoncer que la violation de droits constitutionnels. Le Tribunal fédéral n'examine de tels griefs que s'ils ont été invoqués et motivés par le recourant (" principe d'allégation ", art. 106 al. 2 LTF), c'est-à-dire s'ils ont été expressément soulevés et exposés de manière claire et détaillée (ATF 147 I 73 consid. 2.1; 146 III 303 consid. 2; 142 III 364 consid. 2.4). Le recourant qui se plaint de la violation d'un droit fondamental ne peut donc se borner à critiquer la décision attaquée comme il le ferait en instance d'appel, où l'autorité de recours jouit d'une libre cognition; il ne peut, en particulier, se contenter d'opposer sa thèse à celle de l'autorité cantonale, mais doit démontrer ses allégations par une argumentation précise (ATF 134 II 349 consid. 3; 133 II 396 consid. 3.2). Le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur les critiques de nature appellatoire (ATF 146 IV 114 consid. 2.1; 142 III 364 consid. 2.4; 140 III 264 consid. 2.3).  
 
4.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Dans l'hypothèse d'un recours soumis à l'art. 98 LTF, le recourant qui entend invoquer que les faits ont été établis de manière manifestement inexacte ne peut obtenir la rectification ou le complètement des constatations de fait de l'arrêt cantonal que s'il démontre la violation de droits constitutionnels, conformément au principe d'allégation susmentionné (cf. supra consid. 2.1). Le recourant ne peut se limiter à contredire les constatations litigieuses par ses propres allégations ou par l'exposé de sa propre appréciation des preuves; il doit indiquer de façon précise en quoi ces constatations sont arbitraires au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 147 I 73 consid. 2.2; 133 II 249 consid. 1.4.3). Une critique des faits qui ne satisfait pas à cette exigence est irrecevable (art. 106 al. 2 LTF; ATF 145 IV 154 consid. 1.1; 140 III 264 consid. 2.3 et les références).  
 
5.  
Le recourant se plaint d'un établissement arbitraire des faits et d'une appréciation arbitraire des preuves (art. 9 Cst.) ainsi que de la violation de l'art. 315 al. 5 CPC
 
5.1. L'appel n'a pas d'effet suspensif lorsqu'il a pour objet des décisions portant sur des mesures provisionnelles (art. 315 al. 4 let. b CPC). En vertu de l'art. 315 al. 5 CPC, l'exécution des mesures provisionnelles peut exceptionnellement être suspendue si la partie concernée risque de subir un préjudice difficilement réparable. Le dommage difficilement réparable de l'art. 261 al. 1 let. b CPC est principalement de nature factuelle; il concerne tout préjudice, patrimonial ou immatériel, et peut même résulter du seul écoulement du temps pendant le procès. Il en va de même pour le dommage difficilement réparable de l'art. 315 al. 5 CPC. Il s'agit pour l'un comme pour l'autre d'une condition matérielle, respectivement de la protection juridique provisoire dans la première disposition et de la suspension de l'exécution de la mesure ordonnée dans la seconde. Le dommage est constitué, pour celui qui requiert les mesures provisionnelles, par le fait que, sans celles-ci, il serait lésé dans sa position juridique de fond et, pour celui qui recourt contre le prononcé de telles mesures, par les conséquences matérielles qu'elles engendrent. Saisie d'une demande d'effet suspensif au sens de l'art. 315 al. 5 CPC, l'autorité cantonale d'appel doit ainsi procéder à une nouvelle pesée des intérêts entre les deux préjudices difficilement réparables, celui du demandeur à l'action si la mesure n'était pas exécutée immédiatement et celui qu'entraînerait pour le défendeur l'exécution de cette mesure (ATF 138 III 378 consid. 6.3 et les références).  
 
5.2. La présidente a retenu que le recourant avait motivé sa requête uniquement en relation avec les difficultés financières qu'il subirait à devoir payer immédiatement les arriérés de contributions d'entretien de 21'070 fr., montant correspondant aux sommes de 3'210 fr. d'arriérés de contribution concernant sa fille pour la période du 1 er mai 2021 au 31 mai 2022 (ch. 8 du dispositif) et de 17'860 fr. concernant les arriérés de contribution en faveur de l'intimée pour la même période (ch. 11 du dispositif), de sorte que les pensions courantes n'étaient pas concernées. Elle a ensuite relevé que le recourant s'était contenté d'alléguer que le paiement de cet arriéré lui causerait un préjudice difficilement réparable, augmentant un risque de faillite personnelle et de perte du logement familial, sans apporter plus de précisions. Il avait toutefois produit un extrait de son compte bancaire auprès de la Banque C.________ affichant un solde de 151'926 fr. 50 au 5 juillet 2022, lui permettant aisément de s'acquitter des arriérés de contributions d'entretien susmentionnés. Elle en a déduit qu'il n'apparaissait donc pas, prima facie, que le paiement de l'arriéré de contributions de 21'070 fr. exposerait le recourant à d'importantes difficultés financières. Elle arrivait à une conclusion identique même en rajoutant à ce montant la somme de 10'000 fr. de provisio ad litem, ainsi que les pensions courantes des mois de juin et juillet 2022 de sa fille et de son épouse, qui portaient la somme à 50'500 fr.  
 
5.3. Il convient d'emblée de relever que le grief de violation de l'art. 315 al. 5 CPC est irrecevable dans la mesure où il ne satisfait pas aux exigences de motivation de l'art. 106 al. 2 LTF, le recourant n'ayant soulevé aucun grief d'arbitraire.  
S'agissant du grief d'arbitraire dans l'établissement des faits et dans l'appréciation des preuves, le recourant rappelle, au sujet de sa propre situation financière, être en fin de droit au chômage et n'avoir comme seuls revenus que le montant mensuel de 6'818 fr. 25 issu de la location de la maison dont il est propriétaire. Compte tenu de ses charges mensuelles de 15'793 fr. 25, il subirait ainsi un déficit de 8'444 fr. 60 et ne serait aucunement en mesure de s'acquitter des arriérés de contributions d'entretien qu'on lui réclame. Sur ce point, la cour cantonale a toutefois constaté que le recourant disposait d'un compte bancaire affichant un solde de 151'926 fr. 50 lui permettant de s'acquitter des arriérés de contributions d'entretien litigieux. En tant que le recourant lui oppose qu'il devrait puiser dans ce compte pour subvenir à ses besoins et continuer à s'acquitter des charges liées à l'emprunt hypothécaire, il ne démontre pas d'arbitraire dans la motivation cantonale, étant rappelé que la question du paiement de ces montants devra encore être tranchée dans l'arrêt sur appel à intervenir et qu'il ne s'agit donc ici que de déterminer si le fait que leur paiement puisse être exigé immédiatement exposerait le recourant au risque de subir un préjudice difficilement réparable. Compte tenu de la fortune attribuée au recourant et dont il ne conteste pas l'existence sauf à affirmer qu'il en aura besoin pour subvenir à ses besoins à l'avenir, on ne discerne pas d'arbitraire en tant que la cour cantonale a considéré que, prima facie, il n'apparaissait pas que le paiement de l'arriéré de contributions d'entretien exposerait le recourant à d'importantes difficultés financières.  
Pour ce qui est de la situation financière de l'intimée, le recourant affirme qu'elle serait bien meilleure que la sienne puisqu'elle réaliserait un revenu de 5'576 fr. 10 provenant de sa société et qu'elle pourrait par ailleurs disposer librement de la fortune ascendant à 139'517 fr. de dite société dont elle est l'unique actionnaire. Ses charges seraient au demeurant plus faibles que les siennes et elle n'accuserait aucun déficit. A l'appui de ses allégations, le recourant ne mentionne toutefois aucun moyen de preuve qui en attesterait et dont la présidente aurait arbitrairement omis de tenir compte. Un tel procédé consistant en définitive uniquement à opposer sa propre appréciation des faits à celle de l'autorité précédente est irrecevable. Le recourant ne conteste au demeurant pas le constat de la présidente selon lequel il n'avait fourni aucun élément apte à rendre vraisemblable qu'il ne pourrait pas obtenir le remboursement de montants payés indûment. 
Sur la question des contributions d'entretien courantes, le recourant estime que la présidente a considéré arbitrairement qu'il n'avait pas motivé sa requête d'effet suspensif sur ce point " tant il [était] vrai que le raisonnement développé pour les contributions d'entretien passées [valait] a fortiori pour les courantes ". Par son affirmation, le recourant admet implicitement ne pas avoir spécifiquement motivé son incapacité à payer les pensions courantes. Au demeurant, un débiteur peut parfaitement être en mesure d'assumer le montant mensuel correspondant à l'entretien courant tout en ne disposant pas de liquidités suffisantes pour s'acquitter d'un arriéré important, de sorte que son argumentation n'apparaît pas convaincante et n'est de toute évidence pas à même de démontrer un quelconque arbitraire dans la motivation cantonale. En définitive, le recourant ne parvient donc pas à démontrer que la cour cantonale aurait procédé à une pesée arbitraire des intérêts en présence pour refuser l'octroi de l'effet suspensif à son appel.  
 
6.  
Il suit de ce qui précède que le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité. Les frais judiciaires sont mis à la charge du recourant qui succombe (art. 66 al. 1 LTF). Il versera en outre une indemnité de dépens à l'intimée qui s'est déterminée (art. 68 al. 1 LTF). 
 
 
par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Une indemnité de 2'500 fr., à payer à l'intimée à titre de dépens, est mise à la charge du recourant. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 23 novembre 2022 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Herrmann 
 
La Greffière : Hildbrand