6B_983/2023 21.12.2023
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_983/2023  
 
 
Arrêt du 21 décembre 2023  
 
Ire Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, 
Denys et Pont Veuthey, Juge suppléante. 
Greffière : Mme Brun. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Jean-Pierre Bloch, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens VD, 
intimé. 
 
Objet 
Brigandage qualifié; expulsion; arbitraire, 
 
recours contre le jugement de la Cour d'appel pénale 
du Tribunal cantonal du canton de Vaud, du 10 mai 2023 (n° 177 PE21.014764/VCR). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par jugement du 6 décembre 2022, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne du canton de Vaud a libéré A.________ du chef d'accusation de brigandage qualifié, au sens de l'art. 140 ch. 4 CP, et l'a reconnu coupable du chef d'accusation de brigandage qualifié, au sens de l'art. 140 ch. 2 CP, et de contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants (LStup). Il l'a condamné à une peine privative de liberté de 42 mois, sous déduction de 470 jours de détention avant jugement et de 39 jours de détention dans des conditions illicites, ainsi qu'à une amende de 300 fr. et a renoncé à son expulsion du territoire suisse. 
 
B.  
Par jugement du 10 mai 2023, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois a partiellement admis l'appel du ministère public en ce sens qu'elle a reconnu A.________ coupable de brigandage qualifié au sens de l'art. 140 ch. 4 CP, l'a condamné à une peine privative de liberté de cinq ans et a ordonné son expulsion du territoire suisse pour une durée de cinq ans. Elle a confirmé le jugement pour le surplus. 
La cour d'appel a retenu les faits suivants: 
 
B.a. A.________ est né en 1985 au Kosovo. Il vit en Suisse depuis l'âge de six ans et y a suivi toute sa scolarité obligatoire. Il a ensuite débuté un apprentissage de dessinateur en bâtiment, mais l'a arrêté une année plus tard. Par la suite, il aurait eu sporadiquement quelques emplois. Il vit toutefois, depuis plusieurs années, au bénéfice du Rl et perçoit des revenus tirés d'activités "au noir". A.________ a accumulé des dettes à hauteur de 53'000 francs. Sur le plan personnel, il consomme de temps en temps de la cocaïne et de l'alcool mais dit ne plus souffrir de dépendance comme cela a été le cas par le passé. Divorcé depuis 2021, A.________ est père d'une fille de 12 ans qui est sous la garde de sa mère mais avec laquelle il a conservé de forts liens, bien qu'il ne contribue pas à son entretien. Sa fille vient régulièrement lui rendre visite en détention, renonçant souvent à ses entraînements de basketball pour le voir; elle est très attachée à son père qui était très présent avant son incarcération. A.________ s'est marié au Kosovo en 2008 et reste lié à sa belle-famille. Il a encore un oncle et une tante dans ce pays. Sa famille proche réside en Suisse, en particulier son père et ses frères, dont l'un est handicapé. A.________ s'est par ailleurs occupé de sa mère durant ces trois dernières années, laquelle est décédée du cancer. Elle vivait en Suisse depuis 1991.  
 
B.b. Entre le mois d'août 2019, les faits antérieurs étant prescrits, et le 24 août 2021, date de son interpellation, A.________ a consommé de la cocaïne à raison de deux fois par mois au moins.  
 
B.c. À U.________, le 24 août 2021, vers 00h10, A.________, dans le but de recouvrer une prétendue créance de jeu, a contraint B.________ à lui remettre tout ce qu'il avait sur lui, en le menaçant verbalement, physiquement et en faisant usage d'un cutter. A.________ a asséné à B.________, à tout le moins, trois coups de cutter, lame déployée et de manière appuyée, sur son casque de vélo qu'il portait. Il a ensuite posé, durant environ 10 secondes" son cutter, lame ouverte, contre la gorge de B.________ en lui disant: "je vais te tuer, je vais te tuer" et qu'il allait lui "ouvrir la gueule". En même temps, il lui répétait de tout lui donner et appuyait son poing gauche contre la pomme d'Adam de B.________ qui avait la tête dans un buisson situé derrière lui, l'empêchant de respirer, mais sans pour autant lui provoquer de vision noire ou d'évanouissement. B.________ a ensuite remis son portemonnaie à A.________ qui l'a déposé sur un muret car celui-ci ne contenait pas d'argent. Après avoir fouillé le blouson de la victime, constatant qu'il n'avait pas d'argent, A.________ a reposé son poing contre la pomme d'Adam de B.________ et le cutter contre son cou durant environ 10 secondes en lui disant "donne-moi tout, je vais te tuer". B.________ lui a remis son téléphone et trois flacons de méthadone. Enfin, A.________ lui a intimé de "dégager" et lui a donné un coup de pied dans la cuisse, ce qui a fait tomber B.________ au sol.  
 
C.  
A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral à l'encontre du jugement du 10 mai 2023. Il conclut à sa réforme, en ce sens que le jugement du 6 décembre 2022 rendu par le tribunal correctionnel est confirmé. Subsidiairement, il conclut qu'il est renoncé à son expulsion du territoire suisse. Plus subsidiairement, il conclut au renvoi de la cause à l'autorité inférieure pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Il sollicite en outre le bénéfice de l'assistance judiciaire. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recourant se plaint d'arbitraire dans l'établissement des faits et d'une violation du principe in dubio pro reo en lien avec l'usage du cutter. Il en conclut que seul un brigandage qualifié au sens de l'art. 140 ch. 2 CP devrait être retenu, faute de mise en danger concrète de la vie de B.________.  
 
1.1. Le Tribunal fédéral n'est pas une autorité d'appel, auprès de laquelle les faits pourraient être rediscutés librement. Il est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), à moins que celles-ci n'aient été établies en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, à savoir pour l'essentiel de façon arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. Une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle apparaît discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable et cela non seulement dans sa motivation, mais aussi dans son résultat (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1; 145 IV 154 consid. 1.1; 143 IV 241 consid. 2.3.1). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 148 IV 409 consid. 2.2; 147 IV 73 consid. 4.1.3). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2). Lorsque l'appréciation des preuves et la constatation des faits sont critiquées en référence à la présomption d'innocence ou à son corollaire, le principe in dubio pro reo, ceux-ci n'ont pas de portée plus large que l'interdiction de l'arbitraire (voir ATF 148 IV 409 consid. 2.2; 146 IV 88 consid. 1.3.1).  
 
1.2. La cour cantonale a considéré que, quand bien même un doute subsisterait quant au contact avec le cou, la lame du cutter s'était trouvée à proximité directe, ce d'autant plus que la victime était empoignée et limitée dans sa respiration. Elle a estimé que la situation décrite par les témoins correspondait à une mise en danger mortelle. Enfin, elle a jugé que le prévenu n'était pas crédible lorsqu'il affirmait, après avoir longuement contesté l'usage d'un cutter et entaillé le casque de la victime, avoir placé un doigt entre la lame et le cou de ce dernier.  
 
1.3. En l'espèce, le recourant oppose sa propre appréciation des événements à celle de la cour cantonale dans une démarche purement appellatoire, partant irrecevable (art. 106 al. 2 LTF). C'est le cas lorsque lorsqu'il affirme qu'il n'aurait jamais posé la lame sur la gorge de la victime ou qu'il n'aurait posé que la partie en plastique sur le cou de celle-ci.  
En tant que le recourant s'en prend à l'établissement des faits du jugement de première instance, le grief soulevé est irrecevable, seule la décision cantonale étant susceptible d'être attaquée (cf. art. 80 LTF). Le recourant ne formule aucune critique recevable. 
 
2.  
Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir refusé l'audition de sa fille, en violation de son droit d'être entendu et en contradiction avec les art. 3, 9 et 12 par. 2 de la Convention relative aux droits de l'enfant (CDE; RS 0.107). 
 
2.1. La cour cantonale a jugé que l'audition de la fille du recourant n'était, d'une part, pas utile au traitement de l'appel et, de l'autre, pas justifiée au regard de l'art. 12 par. 2 CDE - qui prévoit que l'enfant peut être entendu dans toute procédure judiciaire l'intéressant - car leur lien étroit est suffisamment établi.  
 
2.2. Le droit d'être entendu, garanti à l'art. 29 al. 2 Cst., comprend notamment celui de produire ou de faire administrer des preuves, à condition qu'elles soient pertinentes et de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1; 143 V 71 consid. 4.1; 142 II 218 consid. 2.3). Le droit d'être entendu n'empêche pas le juge de mettre un terme à l'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de se forger une conviction et que, procédant de manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, il a la certitude qu'elles ne pourraient pas l'amener à modifier son opinion. Le refus d'instruire ne viole ainsi le droit d'être entendu des parties que si l'appréciation anticipée de la pertinence du moyen de preuve offert, à laquelle le juge a procédé, est entachée d'arbitraire (ATF 144 II 427 consid. 3.1.3; 141 I 60 consid. 3.3).  
En principe, la procédure d'appel se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance (cf. art. 389 al. 1 CPP). L'art. 389 al. 3 CPP règle les preuves complémentaires. Ainsi, la juridiction d'appel administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement de l'appel. Le droit d'être entendu, consacré par l'art. 107 CPP, garantit aux parties le droit de déposer des propositions relatives aux moyens de preuves (al. 1 let. e). Conformément à l'art. 139 al. 2 CPP, il n'y a pas lieu d'administrer des preuves sur des faits non pertinents, notoires, connus de l'autorité ou déjà suffisamment prouvés. Cette disposition codifie, pour la procédure pénale, la règle jurisprudentielle déduite de l'art. 29 al. 2 Cst. en matière d'appréciation anticipée des preuves (arrêts 6B_1040/2022 du 23 août 2023 consid. 1.1; 6B_182/2022 du 25 janvier 2023 consid. 1.2). 
 
2.3. A teneur de l'art. 12 CDE, les États parties garantissent à l'enfant qui est capable de discernement le droit d'exprimer librement son opinion sur toute question l'intéressant, les opinions de l'enfant étant dûment prises en considération eu égard à son âge et à son degré de maturité (par. 1). À cette fin, on donnera notamment à l'enfant la possibilité d'être entendu dans toute procédure judiciaire ou administrative l'intéressant, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un représentant ou d'un organisme approprié, de façon compatible avec les règles de procédure de la législation nationale (par. 2). L'art. 12 CDE est une norme directement applicable, dont la violation peut être alléguée devant le Tribunal fédéral (ATF 147 I 149 consid. 3.2; 144 II 1 consid. 6.5; 124 III 90 consid. 3a).  
 
2.4. Il ressort du jugement attaqué que, contrairement à ce qu'affirme le recourant, la cour cantonale n'a pas ignoré l'intensité de la relation qui unit le recourant à sa fille, que ce soit du point de vue du droit d'être entendu du père ou de celui de l'enfant sur la base de l'art. 12 par. 2 CDE. Elle a en effet pris en compte les déclarations du recourant et celles de la mère de l'enfant pour considérer qu'ils avaient conservé de forts liens (cf. arrêt attaqué, p. 11). L'argumentation du recourant n'est dès lors pas propre à démontrer en quoi l'appréciation anticipée de la pertinence du moyen de preuve serait manifestement insoutenable ou qu'elle violerait l'art. 12 par. 2 CDE. Il ne fait qu'opposer sa propre appréciation à celle de la cour cantonale dans une démarche purement appellatoire, partant irrecevable.  
Enfin, en tant que le recourant se prévaut de l'art. 9 CDE, qui dispose que les États parties veillent à ce que l'enfant ne soit pas séparé de ses parents contre leur gré, on se limitera à relever que cette disposition n'est pas pertinente ici. En tout état de cause, le recourant ne saurait déduire un droit à demeurer en Suisse des dispositions de la CDE (cf. ATF 140 I 145 consid. 3.2; 139 I 315 consid. 2.4 et 2.5; arrêt 6B_770/2018 du 24 septembre 2018 consid. 3). 
 
3.  
Le recourant fait grief à la cour cantonale d'avoir violé l'art. 66a al. 2 CP, en lien avec l'art. 8 CEDH, en prononçant son expulsion du territoire suisse. 
 
3.1. Aux termes de l'art. 66a al. 1 let. c CP, le juge expulse de Suisse l'étranger qui est condamné notamment pour brigandage (art. 140 CP), quelle que soit la quotité de la peine prononcée à son encontre, pour une durée de 5 à 15 ans.  
L'art. 66a al. 2 CP prévoit que le juge peut exceptionnellement renoncer à une expulsion lorsque celle-ci mettrait l'étranger dans une situation personnelle grave et que les intérêts publics à l'expulsion ne l'emportent pas sur l'intérêt privé de l'étranger à demeurer en Suisse. À cet égard, il tiendra compte de la situation particulière de l'étranger qui est né ou qui a grandi en Suisse. Les conditions posées par cette disposition sont cumulatives (ATF 144 IV 332 consid. 3.3). 
 
3.2. La clause de rigueur permet de garantir le principe de la proportionnalité (cf. art. 5 al. 2 Cst.; ATF 146 IV 105 consid. 3.4.2; 144 IV 332 consid. 3.3.1). Elle doit être appliquée de manière restrictive (ATF 146 IV 105 consid. 3.4.2; 144 IV 332 consid. 3.3.1). Il convient de s'inspirer des critères énoncés à l'art. 31 de l'ordonnance du 24 octobre 2007 relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative (OASA; RS 142.201) et de la jurisprudence y relative. L'art. 31 al. 1 OASA prévoit qu'une autorisation de séjour peut être octroyée dans les cas individuels d'extrême gravité. L'autorité doit tenir compte notamment de l'intégration du requérant selon les critères définis à l'art. 58a al. 1 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration (LEI; RS 142.20), de la situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants, de la situation financière, de la durée de la présence en Suisse, de l'état de santé, ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance. Comme la liste de l'art. 31 al. 1 OASA n'est pas exhaustive et que l'expulsion relève du droit pénal, le juge devra également, dans l'examen du cas de rigueur, tenir compte des perspectives de réinsertion sociale du condamné (ATF 144 IV 332 consid. 3.3.2). En règle générale, il convient d'admettre l'existence d'un cas de rigueur au sens de l'art. 66a al. 2 CP lorsque l'expulsion constituerait, pour l'intéressé, une ingérence d'une certaine importance dans son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par la Constitution fédérale (art. 13 Cst.) et par le droit international, en particulier l'art. 8 CEDH (arrêts 6B_122/2023 du 27 avril 2023 consid. 1.1.2; 6B_1116/2022 du 21 avril 2023 consid. 3.1.1; 6B_627/2022 du 6 mars 2023 consid. 2.1.1 destiné à la publication).  
 
3.3. L'art. 8 par. 1 CEDH dispose que toute personne a en particulier droit au respect de sa vie privée et familiale. Une ingérence dans l'exercice de ce droit est possible, selon l'art. 8 par. 2 CEDH, pour autant qu'elle soit prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. Selon la jurisprudence, pour se prévaloir du droit au respect de sa vie privée au sens de l'art. 8 par. 1 CEDH, l'étranger doit établir l'existence de liens sociaux et professionnels spécialement intenses avec la Suisse, notablement supérieurs à ceux qui résultent d'une intégration ordinaire. Le Tribunal fédéral n'adopte pas une approche schématique qui consisterait à présumer, à partir d'une certaine durée de séjour en Suisse, que l'étranger y est enraciné et dispose de ce fait d'un droit de présence dans notre pays. Il procède bien plutôt à une pesée des intérêts en présence, en considérant la durée du séjour en Suisse comme un élément parmi d'autres et en n'accordant qu'un faible poids aux années passées en Suisse dans l'illégalité, en prison ou au bénéfice d'une simple tolérance (cf. ATF 134 II 10 consid. 4.3; arrêt 6B_348/2023 du 28 avril 2023 consid. 2.4; 6B_1116/2022 du 21 avril 2023 consid. 3.1.2). Un séjour légal de dix années suppose en principe une bonne intégration de l'étranger (ATF 144 I 266 consid. 3.9). La situation particulière des étrangers nés ou ayant grandi en Suisse, réservée par l'art. 66a al. 2 in fine CP, est prise en compte en ce sens qu'une durée de séjour plus longue, associée à une bonne intégration - par exemple en raison d'un parcours scolaire effectué en Suisse - doit généralement être considérée comme une indication importante de l'existence d'intérêts privés suffisamment forts et donc tendre à retenir une situation personnelle grave. Lors de la pesée des intérêts qui devra éventuellement être effectuée par la suite, la personne concernée doit se voir accorder un intérêt privé plus important à rester en Suisse au fur et à mesure que la durée de sa présence augmente. A l'inverse, on peut partir du principe que le temps passé en Suisse est d'autant moins marquant que le séjour et la scolarité achevée en Suisse sont courts, de sorte que l'intérêt privé à rester en Suisse doit être considéré comme moins fort (ATF 146 IV 105 consid. 3.4.4).  
Par ailleurs, un étranger peut se prévaloir de l'art. 8 par. 1 CEDH (et de l'art. 13 Cst.), qui garantit notamment le droit au respect de la vie familiale, pour s'opposer à l'éventuelle séparation de sa famille, pour autant qu'il entretienne une relation étroite et effective avec une personne de sa famille ayant le droit de résider durablement en Suisse (ATF 144 II 1 consid. 6.1; 139 I 330 consid. 2.1 et les références citées). Les relations familiales visées par l'art. 8 par. 1 CEDH sont avant tout celles qui concernent la famille dite nucléaire, soit celles qui existent entre époux, ainsi qu'entre parents et enfants mineurs vivant en ménage commun (cf. ATF 144 II 1 consid. 6.1; 135 I 143 consid. 1.3.2). Les relations entre enfants adultes et leurs parents ne bénéficient en revanche pas de la protection de l'art. 8 CEDH, sauf s'il existe entre eux une relation de dépendance qui va au-delà de liens affectifs normaux, par exemple en raison d'une maladie ou d'un handicap (ATF 137 I 154 consid. 3.4.2; arrêt 6B_1116/2022 du 21 avril 2023 consid. 3.1.2). Dans la pesée des intérêts, il faut aussi tenir compte de l'intérêt supérieur de l'enfant et de son bien-être (art. 3 CDE; ATF 143 I 21 consid. 5.5.1). En ce qui concerne les enfants du parent concerné par l'expulsion, la jurisprudence tient notamment compte du fait que les parents de l'enfant vivent ensemble et ont la garde et l'autorité parentale conjointe ou que le parent concerné par l'expulsion a la garde exclusive et l'autorité parentale ou qu'il n'a pas du tout la garde et l'autorité parentale et n'entretient donc de contacts avec l'enfant que dans le cadre d'un droit de visite (arrêt 6B_244/2023 du 25 août 2023 consid. 6.3). L'intérêt de l'enfant est particulièrement atteint lorsque l'expulsion entraîne une rupture de l'unité conjugale, c'est-à-dire lorsque les relations familiales sont intactes et que les parents détiennent conjointement l'autorité parentale et la garde de l'enfant et que l'on ne peut raisonnablement exiger des autres membres de la famille, et en particulier de l'autre parent, également titulaire de l'autorité parentale et de la garde, qu'ils partent dans le pays d'origine de l'autre parent. Une expulsion qui conduit à un éclatement d'une famille constitue une ingérence très grave dans la vie familiale (arrêts 6B_244/2023 du 25 août 2023 consid. 6.3; 6B_1116/2022 du 21 avril 2023 consid. 3.1.3). 
 
3.4. En l'espèce, la cour cantonale a estimé que la clause de rigueur ne trouvait pas application, malgré la présence de la fille mineure du recourant en Suisse, compte tenu de la gravité de l'atteinte à l'ordre public et faute d'intégration réussie et de rupture d'une communauté familiale précédemment intacte, puisque le recourant n' a pas la garde de sa fille et qu'il la voyait, avant sa détention, un week-end sur deux, soit dans le cadre d'un droit de visite usuel.  
 
3.5. Le recourant oppose avoir grandi en Suisse, puisqu'il y est arrivé à l'âge de six ans et y a suivi l'ensemble de sa scolarité, ainsi que la présence, en Suisse, de ses proches, soit son père, ses frères et sa fille de 12 ans.  
 
3.6. Dans la mesure où la cour cantonale n'opère pas de distinction entre les deux conditions de l'art. 66a CP, la question de la situation personnelle grave du recourant (première condition) peut souffrir de rester indécise, dès lors que, quand bien même l'intéressé pourrait se prévaloir d'un droit découlant de l'art. 8 par. 1 CEDH sous l'angle du droit au respect de sa vie privée et familiale, l'intérêt public présidant à son expulsion l'emporte sur son intérêt privé à demeurer en Suisse (seconde condition).  
 
3.7. Les intérêts publics à l'expulsion du recourant sont importants. Il a en effet commis une infraction grave pour laquelle il a été condamné à une peine privative de liberté de cinq ans. La faute du recourant est importante. En mettant une lame de cutter sous la gorge de B.________, il a mis en danger la vie de ce dernier pour des motifs futiles.  
 
3.8. En rapport avec l'intérêt privé du recourant à demeurer en Suisse, il est vrai qu'il y a grandi, qu'il y a effectué sa scolarité obligatoire, que sa famille proche y vit, son père, ses frères et sa fille de 12 ans, et qu'il a donc un intérêt à y poursuivre sa vie de famille. Cela étant, il ressort du jugement attaqué (p. 25) qu'il n'a pas achevé de formation, qu'il est sans emploi, qu'il est endetté et qu'il bénéficie du RI. Il a également été condamné pour des infractions à la LStup et à la LCR, de sorte que son intégration ne saurait être qualifiée de bonne malgré le fait qu'il réside en Suisse depuis plus de trente ans.  
S'agissant des liens avec son pays d'origine, ils ne sont pas inexistants. Le recourant parle la langue, il s'y est d'ailleurs marié en 2008 et possède encore de la famille et sa belle-famille à qui il a régulièrement rendu visite. La mère de sa fille s'y rend d'ailleurs régulièrement en vacances, de sorte qu'aucun obstacle majeur ne vient s'interposer à sa réintégration. 
 
3.9. Par ailleurs, si l'on ne peut certes pas ignorer que l'expulsion est susceptible de porter atteinte aux relations entre le recourant et sa fille, il convient de relever que cette mesure reste d'une durée limitée, qu'il demeure envisageable que la vie de famille se poursuive à l'étranger, même si cela ne peut d'emblée être exigé, et que la mesure n'empêchera pas le recourant d'entretenir des contacts avec son enfant par le biais des moyens de télécommunication modernes, voire par le biais de visites de sa fille au Kosovo durant les vacances scolaires.  
 
3.10. En définitive, compte tenu notamment de la gravité des faits reprochés au recourant, de sa mauvaise intégration en Suisse, de la menace qu'il représente pour l'ordre et la sécurité publics et des perspectives qu'il conserve de se réintégrer dans son pays d'origine, l'intérêt public à son éloignement l'emporte sur son intérêt privé à demeurer en Suisse.  
L'une des conditions pour une application de l'art. 66a al. 2 CP faisant ainsi défaut, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral en ordonnant l'expulsion du recourant. 
 
4.  
Le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Comme il était dénué de chances de succès, la demande d'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 64 al. 1 LTF) et le recourant, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF), dont le montant sera toutefois fixé en tenant compte de sa situation financière qui n'apparaît pas favorable. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
La demande d'assistance judiciaire est rejetée. 
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'200 fr. sont mis à la charge du recourant. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 21 décembre 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
La Greffière : Brun