6B_951/2023 29.01.2024
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_951/2023  
 
 
Arrêt du 29 janvier 2024  
 
Ire Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux 
Muschietti, Juge présidant, 
van de Graaf et von Felten. 
Greffière : Mme Klinke. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Guy Zwahlen, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
1. Ministère public de la République et canton de Genève, 
route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, 
2. B.B.________, 
représenté par Me Karim Raho, avocat et curateur, 
intimés. 
 
Objet 
Tentative de meurtre; arbitraire, etc., 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice 
de la République et canton de Genève, 
Chambre pénale d'appel et de révision, 
du 23 juin 2023 (P/11895/2020 AARP/225/2023). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par jugement du 4 novembre 2022, le Tribunal correctionnel genevois a classé les faits visés sous chiffres 1.2.3 et 1.3 de l'acte d'accusation (antérieurs au 4 novembre 2019). Il a reconnu A.________ coupable de tentative de meurtre (art. 111 cum 22 CP), lésions corporelles simples (art. 123 ch. 1 et 2 al. 2 et 3 CP), menaces (art. 180 al. 1 et 2 let. a CP), voies de fait (art. 126 al. 1 et 2 let. a et b CP), violation du devoir d'assistance et d'éducation (art. 219 al. 1 CP), séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI) et activité lucrative sans autorisation (art. 115 al. 1 let. c LEI). Il l'a condamné à une peine privative de liberté de six ans, sous déduction de 852 jours de détention avant jugement, et à une amende de 2'000 francs. Il a ordonné son expulsion pour une durée de cinq ans avec signalement dans le système d'information Schengen (SIS). A.________ a été condamné à payer à titre de réparation du tort moral: 35'000 fr. à B.B.________, avec intérêts à 5 % dès le 6 juillet 2020; 5'000 fr. à C.B.________ et 1'000 fr. à D.B.________, avec intérêts à 5 % dès le 1er janvier 2018.  
 
B.  
Par arrêt du 23 juin 2023, statuant sur appel de A.________, la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice genevoise l'a rejeté et a confirmé le jugement de première instance. 
Elle a retenu en substance l'état de fait suivant. 
 
B.a. A.________, ressortissant salvadorien, né en 1985, est divorcé et père de deux enfants: D.B.________, née en 2010, ainsi qu'une fille majeure résidant au Salvador. Il est arrivé en 2014 en Suisse et a été rejoint en 2015 par son épouse, C.B.________, leur fille, D.B.________, ainsi que son beau-fils, B.B.________, né en 2006.  
 
B.b. Selon les faits non contestés à ce stade, A.________ a, au domicile familial, entre 2015 et le 5 juillet 2020, frappé son épouse à plusieurs reprises, notamment en lui assénant des coups de poing au ventre et au visage et lui a tiré les cheveux.  
Dans le même contexte spatio-temporel, il a frappé sa fille (alors âgée de 5 à 10 ans), au moyen d'une ceinture et l'a giflée, jusqu'à la faire saigner. 
Il a également, à réitérées reprises, porté des coups, poing fermé, à B.B.________ sur le crâne, au ventre et au sternum et l'a frappé à l'aide d'une ceinture, d'un manche en fer sur le dos ou les fesses, ou d'une spatule en bois sur la paume des mains. 
Entre 2015 et le 5 juillet 2020, A.________ a menacé, à réitérés reprises, son épouse, d'enlever D.B.________, et l'a avertie que si elle appelait la police, il ne resterait pas longtemps loin d'elle et de B.B.________, et se vengerait, ce qui l'a effrayée. 
Entre mai 2016 et le 6 juillet 2020, A.________ a frappé, à de nombreuses reprises, B.B.________, l'a dénigré et critiqué continuellement. 
 
B.c. A U.________, le 6 juillet 2020 vers minuit, sur le palier de l'appartement familial, après que C.B.________ l'eut informé de ce qu'elle avait contacté un organisme d'aide aux victimes de violences conjugales, A.________ est devenu très agressif et a essayé de la tirer à l'intérieur. Comme elle refusait d'entrer tant qu'il était furieux, il l'a poussée au niveau de la poitrine, a fermé violemment la porte sur elle, l'atteignant à l'épaule droite. Il a ensuite tenté d'attraper le téléphone de son épouse, laquelle descendait les escaliers en courant, pour l'empêcher de joindre la police. Il lui a arraché l'appareil des mains et l'a saisie par les cheveux avant de la tirer jusqu'à leur logement. A.________ a occasionné à son épouse des ecchymoses et deux dermabrasions.  
 
B.d. S'agissant des événements encore litigieux, à la base de la condamnation pour tentative de meurtre commise au préjudice de B.B.________, la cour cantonale a retenu les faits suivants.  
Dans le prolongement des faits décrits supra (let. B.c), A.________ a saisi le poignet droit de B.B.________ pour s'emparer du couteau (lame de 20 cm) dont il s'était muni pour défendre sa mère, et lui a occasionné une ecchymose (6 cm par 4 cm).  
A.________ a alors tenté d'asséner plusieurs coups de couteau à B.B.________ que celui-ci a esquivés, puis l'a visé à l'abdomen et blessé à l'annulaire gauche. Pris de douleur, B.B.________ a ramené ses mains contre sa poitrine, et A.________ l'a blessé à l'avant-bras gauche. Paniqué, le garçon a couru vers le balcon et A.________ lui a porté un coup au niveau du cuir chevelu. B.B.________ s'est échappé en glissant le long de la paroi extérieure de l'immeuble depuis le balcon. 
De la sorte, A.________ a occasionné à B.B.________ trois plaies à bords nets au niveau du cuir chevelu (région occipitale gauche) (trois centimètres de long pour une béance maximale d'un centimètre et une profondeur de 0.5 cm, se prolongeant en estafilade sur 0.5 cm); de la face postérieure du tiers moyen de l'avant-bras gauche (oblongue, en forme de goutte, mesurant 0.7 x 0.3 cm, prolongée du côté médial par une dermabrasion rougeâtre, fine, assimilable à une estafilade, oblique vers le bas et la droite du corps, mesurant 4.5 x 0.1 cm); et de la face postéro-médiale du quatrième doigt de la main gauche, en regard de l'articulation inter-phalangienne distale, en forme de "U", mesurant 1 x 0.6 cm, tangentielle, avec un lambeau cutané distal recouvrant la plaie; ainsi que de fines dermabrasions, ecchymoses et érythèmes. 
Selon les experts, les lésions, y compris défensives (bras et main gauche) étaient " superficielles et peu profondes ", ce qui pouvait résulter de la faible intensité de l'attaque ou de l'attitude de la victime (notamment de ses mouvements ou esquives).  
Depuis septembre 2020, B.B.________ a présenté un fort absentéisme scolaire, aggravé depuis Pâques 2021, et a souffert de dépression (suivi psychothérapeutique nécessaire), d'un syndrome de stress post-traumatique avec hyper vigilance, flashbacks, cauchemars, d'un retrait social important (grande insécurité, méfiance des autres) et de symptômes psychotiques de persécution (très forte anxiété et peur de sortir et de croiser du monde). Il a été hospitalisé aux HUG du 26 mai à mi-août 2021 (idées suicidaires, symptômes psychotiques avec délires de persécution) et dès le 25 août 2021, après des comportements hétéro-agressifs. 
 
B.e. A.________ n'a pas d'antécédents judiciaires en Suisse, mais a purgé une peine de prison de 2010 à 2014 dans son pays natal.  
 
C.  
A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt cantonal du 23 juin 2023. Il conclut en substance à son annulation en tant qu'il est reconnu coupable de tentative de meurtre, condamné à une peine de 6 ans et à une expulsion de Suisse pour une durée de 5 ans, avec signalement dans le système SIS. Il conclut à ce qu'il soit reconnu coupable de lésions corporelles simples en état d'excès de légitime défense sur la personne de B.B.________ et à ce qu'une peine privative de liberté de 3 ans soit fixée, son expulsion de Suisse n'étant pas ordonnée. Subsidiairement, A.________ conclut, avec suite de frais et dépens, à l'annulation de l'arrêt cantonal et au renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision. Il sollicite en outre le bénéfice de l'assistance judiciaire. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recourant conteste s'être rendu coupable de tentative de meurtre et estime avoir commis des lésions corporelles simples en état d'excès de légitime défense au préjudice de son beau-fils. Il s'en prend à l'établissement des faits et se prévaut d'une violation du principe in dubio pro reo. Il invoque en outre une violation de l'art. 111 CP.  
 
1.1. Le Tribunal fédéral n'est pas une autorité d'appel, auprès de laquelle les faits pourraient être rediscutés librement. Il est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'elles n'aient été établies en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, soit pour l'essentiel de façon arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. Une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle apparaît discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable et cela non seulement dans sa motivation mais aussi dans son résultat (ATF 148 IV 409 consid. 2.2; 146 IV 88 consid. 1.3.1; 145 IV 154 consid. 1.1). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables. Le Tribunal fédéral n'entre en matière sur les moyens fondés sur la violation de droits fondamentaux, dont l'interdiction de l'arbitraire, que s'ils ont été invoqués et motivés de manière précise (art. 106 al. 2 LTF; ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 148 IV 409 consid. 2.2; 147 IV 73 consid. 4.1.2).  
La présomption d'innocence, garantie par les art. 10 CPP, 32 al. 1 Cst., 14 par. 2 Pacte ONU II et 6 par. 2 CEDH, ainsi que son corollaire, le principe in dubio pro reo, concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large (ATF 145 IV 154 consid. 1.1; 144 IV 345 consid. 2.2.3.1; 127 I 38 consid. 2a). En tant que règle sur le fardeau de la preuve, elle signifie, au stade du jugement, que ce fardeau incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. Comme règle d'appréciation des preuves (sur la portée et le sens précis de la règle sous cet angle, cf. ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3), la présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective. Lorsque l'appréciation des preuves et la constatation des faits sont critiquées en référence au principe in dubio pro reo, celui-ci n'a pas de portée plus large que l'interdiction de l'arbitraire (ATF 148 IV 409 consid. 2.2; 146 IV 88 consid. 1.3.1; 145 IV 154 consid. 1.1 et les arrêts cités).  
Lorsque l'autorité cantonale a forgé sa conviction quant aux faits sur la base d'un ensemble d'éléments ou d'indices convergents, il ne suffit pas que l'un ou l'autre de ceux-ci ou même chacun d'eux pris isolément soit à lui seul insuffisant. L'appréciation des preuves doit en effet être examinée dans son ensemble. Il n'y a ainsi pas d'arbitraire si l'état de fait retenu pouvait être déduit de manière soutenable du rapprochement de divers éléments ou indices. De même, il n'y a pas d'arbitraire du seul fait qu'un ou plusieurs arguments corroboratifs apparaissent fragiles, si la solution retenue peut être justifiée de façon soutenable par un ou plusieurs arguments de nature à emporter la conviction (arrêts 6B_558/2023 du 11 septembre 2023 consid. 2.1; 6B_1040/2022 du 23 août 2023 consid. 2.1.2; 6B_924/2022 du 13 juillet 2023 consid. 2.1). 
 
1.2. À teneur de l'art. 111 CP, celui qui aura intentionnellement tué une personne sera puni d'une peine privative de liberté de cinq ans au moins, en tant que les conditions prévues aux art. 112 à 117 CP ne sont pas réalisées.  
 
1.2.1. Il y a tentative lorsque l'auteur a réalisé tous les éléments subjectifs de l'infraction et manifesté sa décision de la commettre, alors que les éléments objectifs font, en tout ou en partie, défaut (art. 22 al. 1 CP; ATF 140 IV 150 consid. 3.4; 137 IV 113 consid. 1.4.2; 131 IV 100 consid. 7.2.1). Il y a donc tentative de meurtre, lorsque l'auteur, agissant intentionnellement, commence l'exécution de cette infraction, manifestant ainsi sa décision de la commettre, sans que le résultat ne se produise (cf. ATF 140 IV 150 consid. 3.4; arrêts 6B_1093/2023 du 8 novembre 2023 consid. 2.1.4; 6B_900/2022 du 22 mai 2023 consid. 2.1.4, non publié in ATF 149 IV 266). Selon la jurisprudence, les deux formes de dol (direct et éventuel) s'appliquent également à la tentative (ATF 122 IV 246 consid. 3a; 120 IV 199 consid. 3e; arrêt 6B_1093/2023 précité consid. 2.1.4).  
La nature de la lésion subie par la victime et sa qualification d'un point de vue objectif est sans pertinence pour juger si l'auteur s'est rendu coupable de tentative de meurtre. En effet, celle-ci peut être réalisée alors même que les éléments objectifs de l'infraction font défaut. Il n'est ainsi pas même nécessaire que la victime soit blessée pour qu'une tentative de meurtre soit retenue dans la mesure où la condition subjective de l'infraction est remplie. L'auteur ne peut ainsi valablement contester la réalisation d'une tentative de meurtre au motif que le coup qu'il a donné à la victime n'aurait causé que des lésions corporelles simples et que la vie de celle-ci n'aurait pas été mise en danger (arrêts 6B_1093/2023 précité consid. 2.1.4; 6B_264/2022 du 8 mai 2023 consid. 2.2; 6B_1116/2022 du 21 avril 2023 consid. 1.4). 
 
1.2.2. Selon l'art. 12 al. 2 CP, agit intentionnellement quiconque commet un crime ou un délit avec conscience et volonté. L'auteur agit déjà intentionnellement lorsqu'il tient pour possible la réalisation de l'infraction et l'accepte pour le cas où celle-ci se produirait (dol éventuel). Le dol éventuel suppose que l'auteur tient pour possible la réalisation de l'infraction mais qu'il agit tout de même, parce qu'il accepte ce résultat pour le cas où il se produirait et s'en accommode, même s'il le juge indésirable et ne le souhaite pas (ATF 147 IV 439 consid. 7.3.1; 137 IV 1 consid. 4.2.3).  
En l'absence d'aveux de la part de l'auteur, le juge ne peut, en règle générale, déduire la volonté interne de l'intéressé qu'en se fondant sur des indices extérieurs et des règles d'expérience. Font partie de ces circonstances l'importance, connue de l'auteur, de la réalisation du risque, la gravité de sa violation du devoir de diligence, ses mobiles et sa façon d'agir. Plus la probabilité de la réalisation de l'état de fait est importante et plus la violation du devoir de diligence est grave, plus l'on sera fondé à conclure que l'auteur a accepté l'éventualité de la réalisation du résultat dommageable (ATF 147 IV 439 consid. 7.3.1; 133 IV 222 consid. 5.3; arrêt 6B_900/2022 précité consid. 2.1.2). De la conscience de l'auteur, le juge peut déduire sa volonté, lorsque la probabilité de la survenance du résultat s'imposait tellement à lui que sa disposition à en accepter les conséquences ne peut raisonnablement être interprétée que comme son acceptation (ATF 147 IV 439 consid. 7.3.1; 137 IV 1 consid. 4.2.3; 133 IV 9 consid. 4.1). 
Selon la jurisprudence, personne ne peut ignorer la probabilité d'une issue fatale en cas de coups de couteau portés au torse ou à l'abdomen d'une victime (arrêts 6B_1093/2023 précité consid. 2.1.1; 6B_269/2023 du 30 juin 2023 consid. 1.1.2 en référence à l'ATF 109 IV 5 consid. 2). Dans ce cas de figure, on peut généralement conclure que l'auteur s'est accommodé de la mort de la victime (arrêts 6B_269/2023 précité consid. 1.1.2; 6B_774/2020 du 28 juillet 2021 consid. 2.5 et les nombreux arrêts cités). 
 
1.2.3. Déterminer ce qu'une personne a su, envisagé, voulu ou accepté relève du contenu de la pensée, à savoir de faits internes, qui, en tant que tels, lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'ils aient été retenus de manière arbitraire (ATF 147 IV 439 consid. 7.3.1; 141 IV 369 consid. 6.3). Est en revanche une question de droit celle de savoir si l'autorité cantonale s'est fondée sur une juste conception de la notion d'intention et si elle l'a correctement appliquée sur la base des faits retenus et des éléments à prendre en considération (ATF 137 IV 1 consid. 4.2.3; 135 IV 152 consid. 2.3.2).  
 
1.3. D'après l'arrêt entrepris, il est établi que, dans la nuit du 5 au 6 juillet 2020, l'intimé est intervenu muni d'un couteau de cuisine, au secours de sa mère, contre le recourant qui la violentait, et a été blessé à trois reprises par la lame.  
La cour cantonale a retenu la version des faits livrée par l'intimé, ses déclarations étant détaillées et corroborées par les éléments objectifs du dossier. Le tableau lésionnel et la reconstitution, de même que les empreintes sur le manche du couteau était compatibles avec ses dires. Son discours était resté globalement constant et conforté par les déclarations des voisins. La mère de l'intimé, témoin oculaire, confirmait la version des faits de son fils. Une partie de leur récit était objectivée par l'enregistrement de l'appel à la police (port du couteau par le recourant, terreur manifeste de son épouse, cri de l'intimé " il m'a coupé la tête "). Cette reconstitution en temps réel des faits était incompatible avec la version du recourant, qui contestait en appel avoir saisi le couteau. Ses déclarations ne permettaient pas d'expliquer les lésions de la victime ou la présence de ses empreintes digitales sur le manche, et encore moins la fuite de l'intimé par le balcon. Le recourant n'avait cessé de varier en évoquant les prétendues menaces qu'il subissait de son beau-fils avant l'attaque. Or, aucun élément ne permettait d'établir que le jeune homme fut violent auparavant.  
Sur le plan subjectif, la cour cantonale a rappelé que le recourant avait visé des régions comportant des organes vitaux et vaisseaux sanguins importants (thorax, estomac, arrière du crâne). Pris de boisson, le recourant ne pouvait exclure qu'un mouvement brusque entraînât une issue fatale, d'autant moins que la victime était mobile, contrainte d'esquiver les coups. A cela s'ajoutait que l'attaque avait été longue (plus de 8 minutes selon l'enregistrement), que l'auteur avait utilisé un couteau tranchant, possédant une lame de plus de 20 cm, qu'il éprouvait des sentiments négatifs envers la victime, autant d'éléments montrant sa détermination. Si la vie de la victime n'avait pas été concrètement mise en danger, le recourant ne pouvait qu'avoir envisagé la mort et, ainsi accepté cette issue, cela dès le premier coup de couteau. Le fait que le garçon eut préféré fuir par le balcon, malgré le danger, ne faisait que convaincre de l'intention qui animait le recourant de manière reconnaissable pour la victime. 
La cour cantonale a écarté la légitime défense excessive plaidée par le recourant. Elle a notamment relevé qu'une fois désarmé, l'intimé ne représentait plus une menace, et la suite des événements dépendait exclusivement du recourant, de sorte que l'attaque subséquente n'avait pas été commise en état de légitime défense, ce qui excluait également tout excès. 
 
1.4.  
 
1.4.1. S'agissant du déroulement des faits, le recourant affirme que les lésions subies par l'intimé pouvaient, selon les experts médicaux, résulter de la faible intensité " de [sa propre] réaction de défense ". Or, non seulement la faible intensité évoquée par les experts était rattachée à une attaque, et non à une réaction de défense, mais surtout, cette hypothèse a été écartée par la cour cantonale, qui a retenu expressément celle déduite des mouvements défensifs et d'esquives de l'intimé. Il n'y a pas lieu d'entrer en matière sur le grief du recourant qui sélectionne un extrait des constatations des experts et en modifie le contenu de manière crasse. Son moyen est irrecevable.  
Le recourant oppose sa propre appréciation de la constance de ses déclarations à celle opérée de manière circonstanciée par la cour cantonale. Ce procédé, purement appellatoire, est irrecevable. S'agissant des déclarations de l'intimé, la cour cantonale a tenu compte de la variation portant sur la prise initiale du couteau, mais a considéré que cela ne décrédibilisait aucunement le reste de son récit détaillé et corroboré par les éléments objectifs du dossier. En se contentant de souligner cette variation, et en en déduisant, de façon purement appellatoire, que l'intimé avait " pris l'initiative d'attaquer son beau-père avec le couteau de cuisine ", le recourant s'écarte de manière inadmissible des faits arrêtés par la cour cantonale (cf. art. 105 al. 1 et 106 al. 2 LTF). Il est également irrecevable à interpréter librement l'appréciation cantonale des déclarations de l'intimé et de sa mère, pour en déduire que celles-ci ne portaient que sur le port du couteau.  
Le recourant se méprend en tant qu'il prétend que la constatation de l'attaque au niveau du thorax et de l'estomac ne reposerait que sur une déclaration sujette à caution de la victime, à défaut de tout élément objectif. Il omet que la cour cantonale s'est notamment fondée, outre sur les déclarations des parties, sur le tableau lésionnel de l'intimé, la reconstitution, le témoignage de la mère de l'intimé, l'enregistrement de l'appel à la police et la fuite de l'intimé par le balcon (attestée par des témoins), pour établir le déroulement des événements. Le recourant ne tente pas de démontrer le caractère insoutenable du rapprochement de ces divers éléments. S'agissant de la réaction de l'intimé, il ne développe aucune argumentation recevable propre à remettre en cause les gestes d'esquive et de protection de ce dernier, notamment au niveau de l'abdomen et de la poitrine, ce qui lui a occasionné les plaies à l'avant-bras et à la main (cf. supra consid. 1.3).  
Or, sur cette base, la cour cantonale pouvait, sans arbitraire, retenir que le recourant avait visé l'estomac et le thorax de l'intimé, région dont il n'est pas contesté qu'elle comporte des organes vitaux et des vaisseaux sanguins importants. Le recourant ne remet pas en cause le coup porté à l'arrière du crâne de l'intimé, mais conteste, sans autre développement, que le crâne comporterait un organe vital et des vaisseaux sanguins importants. Son grief, à la limite de la témérité, ne remplit manifestement pas les exigences minimales de motivation au sens de l'art. 106 al. 2 LTF et est dès lors irrecevable. 
En définitive, le recourant échoue à démontrer l'arbitraire dans l'établissement des faits s'agissant des coups portés par le recourant à son beau-fils, au niveau du thorax, de l'abdomen et de l'arrière du crâne, au moyen d'un couteau de cuisine tranchant pourvu d'une lame de 20 cm. 
 
1.4.2. Le recourant conteste avoir envisagé la mort de l'intimé et accepté cette issue.  
Il prétend d'abord que la cour cantonale aurait omis de procéder à une " analyse de la pensée de l'auteur " et aurait " affirmé péremptoirement " que celui qui porte un coup de couteau dans la région des épaules et du buste, doit s'attendre à causer des blessures, voire l'issue fatale. Ce faisant, le recourant interprète librement la majeure présentée par la cour cantonale, illustrée par des exemples tirés de la jurisprudence, et ignore l'appréciation circonstanciée des aspects cognitifs et volitifs concrets animant le recourant au moment des actes reprochés.  
Le recourant estime que, dans la mesure où il n'a pas atteint des organes vitaux, mais occasionné que des lésions superficielles, il ne pouvait être retenu qu'il avait accepté le risque de tuer son beau-fils. Or il est rappelé que la nature des lésions et leur qualification d'un point de vue objectif sont sans pertinence, l'auteur ne pouvant contester la réalisation d'une tentative de meurtre au motif que les coups qu'il a donnés à la victime n'auraient causé que des lésions corporelles simples et que la vie de celle-ci n'aurait pas été mise en danger (cf. supra consid. 1.2.1).  
Pour le surplus, le recourant ne conteste pas avoir frappé, dénigré et critiqué continuellement son beau-fils pendant des années (cf. supra let. B.b). Aussi, il échoue à démontrer l'arbitraire de la constatation cantonale selon laquelle il avait des sentiments négatifs envers la victime.  
Dans les circonstances d'espèce, impliquant un père de famille qui, de nuit, pris de boisson, dirige plusieurs coups de couteau d'une lame de 20 cm, notamment dans les régions du thorax, de l'abdomen et de l'arrière du crâne d'un adolescent en mouvement, la cour cantonale pouvait, sans arbitraire, retenir que le recourant avait envisagé la mort de son beau-fils et avait accepté cette issue. 
C'est donc conformément au droit fédéral que la cour cantonale a retenu l'intention meurtrière du recourant, à tout le moins sous la forme du dol éventuel, et l'a reconnu coupable de tentative de meurtre au sens de l'art. 111 cum 22 CP.  
 
1.5. Sous couvert d'une violation des art. 123 al. 1 et 2 CP en lien avec l'art. 16 al. 1 CP, le recourant plaide la "légitime défense" au motif que son beau-fils aurait provoqué l'attaque.  
Au vu de ce qui précède, l'infraction de lésions corporelles simples ne saurait entrer en ligne de compte s'agissant des faits encore contestés. Quant à la légitime défense (cf. sur ce point notamment arrêts 6B_508/2021 du 14 janvier 2022 consid. 1.4.1; 6B_903/2020 du 10 mars 2021 consid. 4.2), d'une part, la version soutenue par le recourant, selon laquelle il aurait été victime d'une attaque, a été écartée sans arbitraire par la cour cantonale (cf. supra consid. 1.4.1). D'autre part, le recourant ne tente d'aucune manière de démontrer l'arbitraire de la constatation selon laquelle l'intimé ne représentait plus aucune menace une fois désarmé, la suite des événements dépendant uniquement de lui. Son grief doit dès lors être rejeté.  
 
1.6. Le recourant estime que la peine privative de liberté doit être réduite à 3 ans, au motif qu'il devrait être condamné pour lésions corporelles causées en cas d'excès de légitime défense. Faute d'obtenir la qualification juridique à laquelle il prétend, son grief tombe à faux.  
Il en va de même de la conclusion du recourant tendant à ce qu'il ne soit pas expulsé du territoire suisse en vertu de l'art. 66a CP et s'agissant du signalement SIS. 
 
2.  
Le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Comme il était dénué de chances de succès, la demande d'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant, qui succombe, supportera les frais de la procédure, qui seront fixés en tenant compte de sa situation financière (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
La demande d'assistance judiciaire est rejetée. 
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'200 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision. 
 
 
Lausanne, le 29 janvier 2024 
 
Au nom de la Ire Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Juge présidant : Muschietti 
 
La Greffière : Klinke