5A_165/2023 04.04.2024
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
5A_165/2023  
 
 
Arrêt du 4 avril 2024  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Herrmann, Président, 
von Werdt et Bovey. 
Greffière : Mme Mairot. 
 
Participants à la procédure 
A.A.________, 
représenté par Me G.________, avocate, 
recourant, 
 
contre  
 
B.A.________, 
représentée par Me Sonia Ryser, avocate, 
intimée. 
 
Objet 
mesures protectrices de l'union conjugale, contribution d'entretien, 
 
recours contre l'arrêt de la Chambre civile de la 
Cour de justice du canton de Genève du 24 janvier 2023 (C/7971/2021, ACJC/88/2023). 
 
 
Faits :  
 
A.  
A.A.________, né en 1964, et B.A.________, née en 1968, tous deux de nationalité française et suisse, se sont mariés en 1994 à Paris (France), sous le régime de la séparation de biens. Quatre enfants sont issus de cette union: C.________, né en 1995, D.________, né en 1997, E.________, né en 2000, et F.________, née en 2005. 
Le 29 avril 2021, l'épouse a requis des mesures protectrices de l'union conjugale, procédure dans laquelle des mesures superprovisionnelles et provisionnelles ont été rendues. 
Les conjoints vivent séparés depuis le 6 mai 2021. 
 
B.  
Par jugement de mesures protectrices de l'union conjugale du 27 juin 2022, le Tribunal de première instance du canton de Genève a, entre autres points, attribué à la mère l'autorité parentale exclusive et la garde de l'enfant F.________, réservé au père un droit de visite à exercer d'entente avec la mineure et accordé à l'épouse la jouissance exclusive du domicile conjugal, jardin et garage compris, du mobilier le garnissant ainsi que du véhicule familial. Le mari a été condamné à verser, pour l'entretien de sa fille, allocations familiales ou d'études en sus, la somme totale de 3'210 fr. pour la période allant du 1er mai 2021 au 31 mai 2022, puis 2'645 fr. par mois dès le 1er juin 2022, ainsi qu'une contribution d'entretien pour l'épouse d'un montant total de 17'860 fr. pour la période allant du 1er mai 2021 au 31 mai 2022 et de 8'190 fr. par mois dès le 1er juin 2022. 
Par arrêt du 24 janvier 2023, communiqué le lendemain, la Cour de justice du canton de Genève, statuant sur l'appel du mari, a confirmé le jugement entrepris et débouté les parties de toutes autres conclusions. 
 
C.  
Par acte expédié le 27 février 2023, le mari exerce un recours en matière civile contre cet arrêt, assorti d'une requête d'effet suspensif. Il conclut principalement à ce qu'il soit dit que l'intimée n'a droit à aucune contribution d'entretien, subsidiairement, à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
Des observations sur le fond n'ont pas été requises. 
 
D.  
Par ordonnance du 28 mars 2023, le Président de la Cour de céans a rejeté la requête d'effet suspensif. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans la forme légale (art. 42 al. 1 LTF), par une personne qui a qualité pour recourir (art. 76 al. 1 let. a et b LTF), le recours est dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF; ATF 133 III 393 consid. 4) rendue en matière civile (art. 72 al. 1 LTF; ATF 133 III 393 consid. 2) par une autorité cantonale supérieure statuant en dernière instance et sur recours (art. 75 al. 1 et 2 LTF), dans une affaire de nature pécuniaire dont la valeur litigieuse requise est atteinte (art. 51 al. 1 let. a, 51 al. 4 et 74 al. 1 let. b LTF). Le recours est donc recevable au regard de ces dispositions. 
 
2.  
 
2.1. La décision attaquée porte sur des mesures provisionnelles au sens de l'art. 98 LTF (ATF 149 III 81 consid. 1.3; 133 III 393 consid. 5), en sorte que le recourant ne peut dénoncer que la violation de droits constitutionnels. Le Tribunal fédéral n'examine de tels griefs que s'ils ont été invoqués et motivés ("principe d'allégation"; art. 106 al. 2 LTF), c'est-à-dire expressément soulevés et exposés de manière claire et détaillée (ATF 146 IV 114 consid. 2.1; 144 II 313 consid. 5.1). Le recourant ne peut se borner à critiquer la décision attaquée comme il le ferait en procédure d'appel, où l'autorité de recours jouit d'une libre cognition. En particulier, il ne peut se contenter d'opposer sa thèse à celle de l'autorité précédente, mais doit au contraire démontrer, par une argumentation précise et détaillée, que cette décision se fonde sur une interprétation ou une application de la loi manifestement insoutenable. Le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur les critiques de nature appellatoire (ATF 142 III 364 consid. 2.4).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Dans l'hypothèse d'un recours soumis à l'art. 98 LTF, le recourant qui entend invoquer que les faits ont été établis de manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 148 IV 39 consid. 2.3.5; 147 I 73 consid. 2.2; 144 III 93 consid. 5.2.2), doit, sous peine d'irrecevabilité, satisfaire au principe d'allégation susmentionné (art. 106 al. 2 LTF; cf. supra consid. 2.1), étant rappelé qu'en matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (ATF 147 V 35 consid. 4.2; 143 IV 500 consid. 1.1; 140 III 264 consid. 2.3).  
 
3.  
Le recourant reproche à la Cour de justice d'avoir arbitrairement établi les faits et apprécié les preuves en retenant que les revenus retirés par l'intimée de sa société, en sus de son salaire mensuel net de 1'810 fr., étaient de 1'080 fr. au lieu de 3'945 fr. net par mois. Il prétend en outre qu'il était insoutenable de refuser d'imputer à l'épouse un revenu hypothétique mensuel net d'au moins 10'530 fr. 
 
3.1.  
 
3.1.1. Le revenu d'un indépendant est constitué par son bénéfice net, à savoir la différence entre les produits et les charges. En cas de revenus fluctuants, pour obtenir un résultat fiable, il convient de tenir compte, en général, du bénéfice net moyen réalisé durant plusieurs années (dans la règle, les trois dernières). Plus les fluctuations de revenus sont importantes et les données fournies par l'intéressé incertaines, plus la période de comparaison doit être longue. Dans certaines circonstances, il peut être fait abstraction des bilans présentant des situations comptables exceptionnelles, à savoir des bilans attestant de résultats particulièrement bons ou spécialement mauvais. Par ailleurs, lorsque les revenus diminuent ou augmentent de manière constante, le gain de l'année précédente est considéré comme le revenu décisif, qu'il convient de corriger en prenant en considération les amortissements extraordinaires, les réserves injustifiées et les achats privés (ATF 143 III 617 consid. 5.1; arrêts 5A_49/2023 du 21 novembre 2023 consid. 4.2.1.1; 5A_565/2022 du 27 avril 2023 consid. 3.1.1.1; 1048/2021 du 11 octobre 2022 consid. 4.2 et les références).  
 
3.1.2. Pour fixer la contribution d'entretien, le juge doit en principe tenir compte du revenu effectif des parties, tant le débiteur que le créancier pouvant néanmoins se voir imputer un revenu hypothétique supérieur. Il s'agit ainsi d'inciter la personne à réaliser le revenu qu'elle est en mesure de se procurer et qu'on peut raisonnablement exiger d'elle, la première de ces conditions relevant du fait et la seconde du droit (ATF 147 III 308 consid. 4; 143 III 233 consid. 3.2; arrêts 5A_338/2023 du 29 février 2024 consid. 3.3.2; 5A_22/2023 du 6 février 2024 consid. 4.1 et les références).  
 
3.2. En l'espèce, l'autorité cantonale a considéré que le premier juge avait à juste titre constaté que les résultats de l'entreprise de l'épouse variaient de façon significative depuis sa création. Or le mari n'exposait pas pourquoi la moyenne effectuée sur les trois dernières années (soit de 2018 à 2020), conformément à la jurisprudence, ne serait pas fondée. Il se bornait à prétendre que ladite société était florissante, comme en attestait son résultat de 2020, et que son bénéfice augmenterait encore en 2022, sans toutefois se référer à aucune pièce s'agissant de cette prétendue nouvelle augmentation. Au demeurant, même si cette allégation était établie, cela ne signifierait pas encore que les résultats de la société seraient en constante augmentation, à telle enseigne qu'il conviendrait de se fonder sur la seule année 2020, comme le soutenait le débirentier. Celui-ci prétendait en outre que l'épouse pourrait travailler à 100% dès que le second fils des parties serait placé en institution et qu'au vu de son expérience, elle pourrait réaliser, selon le calculateur suisse de salaire, un revenu mensuel de 10'530 fr. net dans son domaine. Le futur placement de l'enfant n'était toutefois plus d'actualité et le mari ne critiquait pas les autres motifs retenus par le premier juge en lien avec l'imputation d'un revenu hypothétique à l'épouse. Son argumentation n'était dès lors pas convaincante.  
 
3.3. Le recourant ne motive pas ses critiques de manière conforme aux exigences déduites de l'art. 106 al. 2 LTF. En tant qu'il conteste le revenu que l'intimée retire effectivement de sa société, il se contente de prétendre, en reprenant par moment mot pour mot les termes de son recours cantonal, qu'il était arbitraire de retenir que cette société n'était pas florissante. Il reproche à la cour cantonale d'être arrivée à ce constat en incluant l'année 2018, qui était déficitaire, dans le calcul d'un revenu moyen, alors qu'en 2019 et 2020, la société avait généré des bénéfices, ce qui serait le "signe d'une constante augmentation". Il ajoute que la Cour de justice a elle-même souligné que "la diminution alléguée du résultat 2021 et du chiffre d'affaires entre décembre 2021 et février 2022 n'était pas documentée", ce qui corroborerait l'évolution positive de la société, comme le confirmerait également le fait qu'elle emploie désormais deux employées. Il aurait ainsi démontré, du moins sous l'angle de la vraisemblance, que les revenus de l'intimée provenant de sa société sont plus élevés que ceux qui ont été retenus, puisqu'ils seraient de 3'945 fr. 40 par mois. Ce faisant, le recourant se borne toutefois à faire valoir sa propre opinion, sans tenter d'établir en quoi l'appréciation des preuves à laquelle s'est livrée la cour cantonale serait insoutenable. Le moyen ne répond donc pas non plus aux exigences de motivation accrues déduites de l'art. 106 al. 2 LTF.  
Il en va de même s'agissant du revenu hypothétique que le recourant voudrait voir imputer à l'intimée. Selon lui, l'autorité précédente aurait arbitrairement refusé de tenir compte d'un tel revenu, au motif que "l'expérience professionnelle de l'intimée durant les vingt dernières années était limitée au travail qu'elle avait fourni pour sa propre entreprise qui n'était pas florissante" et que, "âgée de 54 ans bientôt, ses chances de pouvoir augmenter ses revenus à court terme apparaissait ainsi ténues, d'autant plus qu'elle devait s'occuper de [son second fils] à son retour des EPI [soit: Établissements publics pour l'intégration] l'après-midi". Ce raisonnement ferait totalement fi de la formation avancée en marketing de l'épouse, ainsi que du fait que son entreprise dispose de deux employées à mi-temps et d'un site internet permettant la vente en ligne, ce qui lui permet d'être ouverte et "active" même lorsque l'intimée se trouve avec son fils, ce qu'il avait pourtant étayé. Il prétend aussi avoir démontré, en se basant notamment sur le calculateur suisse de salaire, que l'intéressée serait en mesure de réaliser, en travaillant à 100% dans sa branche, un revenu mensuel net de 10'530 fr. En réalité, le passage de l'arrêt attaqué reproduit par le recourant consiste toutefois en un résumé des motifs du premier juge, dont l'autorité cantonale a constaté, sans être contredite, qu'ils n'avaient pas été critiqués devant elle, sauf s'agissant de la question de la prise en charge de l'enfant. L'argumentation du recourant, au demeurant de nature appellatoire et quasi textuellement reprise de son mémoire d'appel (art. 106 al. 2 LTF), se heurte ainsi aussi au principe de l'épuisement des griefs (art. 75 al. 1 LTF; ATF 146 III 203 consid. 3.3.4; 145 III 42 consid. 2.2.2; 143 III 290 consid. 1.1 et les références). 
Le moyen est dès lors entièrement irrecevable. 
 
4.  
Toujours sous l'angle de l'arbitraire dans l'établissement des faits et l'appréciation des preuves, le recourant conteste aussi l'évaluation de ses propres ressources. Il reproche à l'autorité cantonale de lui avoir imputé un revenu locatif hypothétique de 4'083 fr. par mois en lien avec ses biens immobiliers sis à Paris et d'avoir constaté qu'il n'avait pas rendu vraisemblable le montant des travaux nécessaires à l'accueil de nouveaux locataires dans la maison copropriété des époux. L'arrêt attaqué devait en outre être corrigé s'agissant du montant de sa fortune. 
 
4.1. En ce qui concerne le revenu hypothétique imputé au mari pour la location de ses immeubles à Paris, comprenant un local commercial et deux places de parc, l'autorité cantonale a constaté que le premier juge s'était fondé sur la facture 2007 d'un montant de 14'043 euros par trimestre, charges comprises, dont 516 euros pour les deux parkings. Selon ce magistrat, dès lors que le débirentier louait actuellement une seule place de parc pour 480 euros par trimestre, il pouvait louer le local et l'autre place de parc pour 14'043 euros par trimestre. Par conséquent, un revenu mensuel de 4'841 euros pouvait être retenu à ce titre ([14'043 + 480] / 3), dont à déduire les charges de copropriété et la taxe foncière, de 922 euros par mois (soit un revenu mensuel net de 3'919 euros ou 4'083 fr.).  
Selon l'autorité précédente, le mari prétendait que les perspectives de location étaient aléatoires, au vu de spécificités négatives du bien. Il reprochait en outre au premier juge de n'avoir pas tenu compte de l'imposition en France à hauteur de 30%. Pour la cour cantonale, ces griefs étaient infondés. Considérant qu'à teneur des pièces produites par le mari, le local commercial n'aurait pas trouvé preneur en juillet 2022 au loyer mensuel de 5'783 euros, soit 17'349 euros par trimestre, charges comprises, elle a estimé que l'intéressé devrait toutefois pouvoir rapidement le louer, si tel n'était pas déjà le cas, à un loyer inférieur, tout en restant dans le cadre du revenu hypothétique de 14'043 euros par trimestre retenu par le premier juge pour ce local et une place de parc. Le débirentier ne se référait par ailleurs à aucune pièce du dossier attestant d'un impôt payé à ce titre en France par le passé, lorsque le bien était loué. Quoi qu'il en soit, le premier juge avait procédé, sous l'angle de la vraisemblance, à une estimation dont le résultat, qui n'était pas critiquable, se situait bien en dessous du loyer réclamé par l'intéressé. 
Le recourant se borne à affirmer qu'aucun motif objectif ne permettait de lui imputer un revenu locatif hypothétique de 4'083 fr. par mois. Reprenant son argumentation soulevée en appel, il soutient avoir rapporté la preuve qu'il ne pouvait pas percevoir de revenus du bien concerné, le montant retenu à ce titre étant de surcroît illusoire vu le taux d'imposition élevé en France, de l'ordre de 30%, ce que les juges précédents n'auraient pas pris en considération. De nature purement appellatoire, ces allégations sont irrecevables, la cour cantonale ayant au demeurant constaté que le débirentier ne s'était référé à aucune pièce attestant du paiement d'un impôt en France lorsque le bien était loué, ce qui n'est pas critiqué dans le présent recours. 
 
4.2. Il n'y a pas non plus lieu d'entrer en matière sur le grief relatif aux travaux prétendument nécessaires à la location de la maison dont les époux sont copropriétaires. L'autorité précédente a en effet considéré que le débirentier, qui avait uniquement produit des devis d'entreprises, n'avait pas rendu ces travaux vraisemblables; au demeurant, il ne tirait aucune conclusion de ce fait nouveau s'agissant de ses revenus découlant dudit immeuble et semblait de plus en retirer, depuis juillet 2022, une somme mensuelle de 1'500 fr. plus élevée que celle retenue par le premier juge. En se limitant à affirmer qu'" on ne voit pas quelle autre preuve il aurait pu apporter ", le recourant ne critique pas valablement cette motivation. Le grief est par conséquent également irrecevable (art. 106 al. 2 LTF).  
 
4.3. Le recourant soutient encore qu'un autre point important de l'arrêt attaqué devrait être corrigé, au motif que l'autorité précédente serait tombée dans l'arbitraire en omettant de prendre en considération qu'au moment du dépôt de l'appel, le solde de son compte bancaire s'était déjà beaucoup amoindri, et ce malgré la pièce n° 169 le démontrant. Sa seule fortune immédiatement réalisable serait ainsi de 151'839 fr. 55.  
A cet égard, la cour cantonale a considéré qu'il ressortait du train de vie du mari et des charges dont il décidait librement de s'acquitter, selon ses propres allégués, qu'il disposait largement des moyens financiers nécessaires pour subvenir à l'entretien convenable de son épouse et de sa fille, à tout le moins durant la période limitée des mesures protectrices de l'union conjugale. Depuis la séparation des conjoints, en mai 2021, il avait décidé de loger dans un hôtel qui lui coûtait 3'900 fr. par mois, sans produire de preuve de recherches d'un appartement. A bien plaire, il entretenait son fils majeur à hauteur de 3'751 fr. par mois, lui avait versé en sus 10'000 fr. en juillet 2022 et s'était en outre récemment engagé auprès de lui à lui payer une formation complémentaire. Il ne produisait du reste aucune pièce susceptible de démontrer valablement le solde que présenterait son compte bancaire, en particulier qu'il aurait baissé à 151'926 fr. Par ailleurs, il paraissait retirer actuellement de la location du bien immobilier copropriété des époux 1'500 fr. par mois de plus que ce qui avait été retenu par le premier juge. Il était en outre propriétaire de plusieurs voitures de collection et d'une Porsche 911, lesquelles augmentaient d'autant la fortune aisément réalisable dont il disposait. Enfin, il était dans l'expectative d'un héritage qu'il évaluait lui-même à trois millions de francs. 
Le recourant se contente de dire, sans autre précision, que la pièce n° 169 susvisée démontrerait que le solde de son compte bancaire s'élevait à 151'839 fr. 55 au 5 juillet 2022 et à affirmer qu'il s'agit là de sa seule fortune immédiatement réalisable. Il ne conteste cependant pas les autres éléments sur lesquels la cour cantonale s'est fondée pour retenir que ses moyens financiers lui permettaient de subvenir à l'entretien convenable de sa femme et de sa fille, à tout le moins durant la procédure de mesures protectrices de l'union conjugale. Autant qu'il est suffisamment motivé (art. 106 al. 2 LTF), le moyen est par conséquent infondé, le solde de son compte bancaire, quand bien même serait-il établi, n'étant pas déterminant à lui seul. 
 
5.  
Dans un dernier grief, le recourant se plaint de la violation arbitraire des art. 163 et 176 CC. Il fait valoir en substance que la perspective d'une reprise de la vie commune par les époux est nulle, de sorte que l'autorité cantonale aurait dû prendre en considération les critères applicables à l'entretien après le divorce pour statuer sur la contribution d'entretien, ce qu'elle n'aurait pas fait. 
 
5.1. Le principe et le montant de la contribution d'entretien due selon l'art. 176 al. 1 ch. 1 CC se déterminent en fonction des facultés économiques et des besoins respectifs des époux. Le juge doit partir de la convention, expresse ou tacite, que les conjoints ont conclue au sujet de la répartition des tâches et des ressources entre eux, l'art. 163 CC demeurant la cause de leur obligation d'entretien réciproque (ATF 140 III 337 consid. 4.2.1; 138 III 97 consid. 2.2). Il doit ensuite prendre en considération qu'en cas de suspension de la vie commune, le but de l'art. 163 al. 1 CC impose à chacun des époux le devoir de participer, selon ses facultés, aux frais supplémentaires qu'engendre la vie séparée. Si leur situation financière le permet encore, le standard de vie antérieur choisi d'un commun accord - qui constitue la limite supérieure du droit à l'entretien afin de ne pas anticiper sur la répartition de la fortune - doit être maintenu pour les deux parties. Quand il n'est pas possible de conserver ce standard, les conjoints ont droit à un train de vie semblable. Il se peut donc qu'à la suite de cet examen, le juge doive modifier la convention conclue pour la vie commune afin de l'adapter à ces faits nouveaux, la reprise de la vie commune n'étant ni recherchée, ni vraisemblable. C'est dans ce sens qu'il y a lieu de comprendre la jurisprudence selon laquelle, lorsque la séparation est irrémédiable, le juge doit prendre en considération, dans le cadre de l'art. 163 CC, les critères applicables à l'entretien après le divorce pour statuer sur la contribution d'entretien et, en particulier, sur la question de la (re) prise ou de l'augmentation de l'activité lucrative d'un époux (ATF 137 III 385 consid. 3.1, précisant l'arrêt paru aux ATF 128 III 65; arrêts 5A_884/2022 du 14 septembre 2023 consid. 6.2.1; 5A_564/2022 du 27 avril 2023 consid. 3.1.1.1).  
 
5.2. Le recourant soutient qu'il est injuste et contraire au principe de l'égalité de traitement des époux d'exiger de lui qu'il entame sa fortune sans imposer à l'intimée d'en faire autant. Sur ce point, l'autorité cantonale a cependant considéré, une fois de plus, que le mari ne se référait à aucune pièce concernant la fortune dont disposerait la société de l'épouse, ajoutant qu'il ne lui incombait pas de compulser le dossier relativement volumineux de première instance pour éventuel-lement trouver une pièce susceptible de fonder les allégations de l'intéressé. En tous les cas, la fortune de celui-ci ne pouvait être mise sur le même pied que celle dont bénéficierait la société de l'épouse, même si celle-ci en était l'unique associée. Le capital et la trésorerie d'une société ne pouvaient être utilisés librement par ses associés, car ils étaient soumis à des contraintes de fonctionnement de la société, dont l'autorité précédente a estimé qu'elle n'avait pas à les analyser, rappelant au surplus que les revenus imputés à l'épouse dans sa décision dépendaient de la viabilité de sa société. Le recourant ne s'en prend pas du tout à cette motivation, de sorte que sa critique fondée sur le principe de l'égalité entre les époux est irrecevable (art. 106 al. 2 LTF).  
Le recourant prétend en outre que les conditions permettant d'imputer un revenu hypothétique à l'intimée seraient réalisées, alors que tel ne serait pas le cas pour lui. Selon la jurisprudence à laquelle il se réfère, lorsque la séparation est irrémédiable, chacun des époux doit s'effor-cer d'assurer l'entretien convenable par la prise, la reprise ou encore l'augmentation d'une activité rémunérée, pour autant qu'il en ait la pos-sibilité effective (principe de l'autonomie financière; ATF 148 III 358 consid. 5; 147 III 301 consid. 6.2; 138 III 97 consid. 2.2; 137 III 385 consid. 3.1; 130 III 537 consid. 3.2; 128 III 65 consid. 1 et 4). Cette dernière condition n'étant en l'occurrence pas réalisée s'agissant de l'épouse (cf. supra consid. 3), le refus de lui imputer un revenu hypothétique n'apparaît donc pas arbitraire. En ce qui le concerne, le recourant expose que les conditions de la prise en compte d'un revenu hypothétique résultant de la location de ses biens situés à Paris ne seraient pas réunies, dès lors "qu'elles se basent sur des faits établis de manière arbitraire". Ce grief a cependant été examiné plus haut et rejeté (cf. supra consid. 4.1), si bien qu'il n'y a pas lieu d'y revenir. Par ailleurs, le recourant n'avance aucun argument visant à démontrer qu'un tel revenu ne saurait être raisonnablement exigé de lui. 
 
6.  
Vu ce qui précède, le recours se révèle mal fondé et ne peut dès lors qu'être rejeté, dans la faible mesure de sa recevabilité. Le recourant, qui succombe, supportera par conséquent les frais judiciaires (art. 66 al 1 LTF) et versera en outre des dépens à l'intimée pour ses observations sur l'effet suspensif (art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Une indemnité de 500 fr., à verser à l'intimée à titre de dépens, est mise à la charge du recourant. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 4 avril 2024 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Herrmann 
 
La Greffière : Mairot