6B_757/2021 14.07.2022
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_757/2021  
 
 
Arrêt du 14 juillet 2022  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, Denys et Koch. 
Greffière : Mme Paris. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Philippe Maridor, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
1. Ministère public de l'État de Fribourg, 
place Notre-Dame 4, 1700 Fribourg, 
2. B.B.________, 
3. C.B.________, 
intimés. 
 
Objet 
Contrainte sexuelle, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal de l'État 
de Fribourg, Cour d'appel pénal, du 6 mai 2021 
(501 2019 170). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par jugement du 6 novembre 2019, le Tribunal pénal de l'arrondissement de la Sarine a reconnu A.________ coupable de contrainte sexuelle et l'a condamné à une peine privative de liberté de 9 mois, avec sursis pendant 2 ans. Il a partiellement admis les conclusions civiles formulées par les proches de feu D.________ et a condamné A.________ à leur verser la somme de 2'500 fr. au titre de réparation du tort moral subi par cette dernière. Il a acquitté le prénommé des chefs de prévention de lésions corporelles simples, voies de fait et viol et a renoncé à son expulsion. 
 
B.  
Par arrêt du 6 mai 2021, la Cour d'appel pénal du Tribunal cantonal de l'État de Fribourg a rejeté l'appel interjeté par A.________ et confirmé le jugement du 6 novembre 2019. 
Elle s'est fondée en substance sur les faits suivants. 
 
B.a. A.________, réfugié afghan né en 1991, et D.________, née en 1999, se sont rencontrés en 2017, alors qu'ils vivaient dans des foyers situés à proximité l'un de l'autre. Ils entretenaient de bons contacts et se voyaient en moyenne une fois par semaine pour fumer du cannabis ou du shit, jusqu'au 21 août 2017, date à laquelle la jeune fille a été placée dans un autre foyer.  
 
B.b.  
 
B.b.a. Le 12 février 2018, alors que les intéressés ne s'étaient pas revus depuis près de 6 mois, D.________ a contacté A.________ pour aller fumer. Ils se sont alors retrouvés dans la forêt E.________, à U.________. Vers 19h, A.________, appuyé sur un banc à côté de D.________, a posé sa main sur l'épaule de celle-ci et a tenté de l'embrasser. Lorsqu'elle a répondu qu'elle ne voulait pas, le prénommé a répondu qu'ils ne faisaient rien de mal, avant de la tirer contre lui, de sorte qu'ils se sont retrouvés face à face. Il l'a alors enlacée, embrassée et lui a touché les fesses. Nonobstant le refus de la jeune fille, il a baissé son propre pantalon et son slip et a introduit sa main dans le pantalon de D.________ pour lui toucher le sexe par-dessus la culotte.  
 
 
B.b.b. Un peu plus tard le même jour, D.________ et A.________ ont entretenu une relation sexuelle à l'orée de la forêt. Alors que la prénommée s'était rhabillée et que A.________ avait enlevé son préservatif, il lui a dit " fais avec la bouche ". Voyant qu'elle ne s'approchait pas d'elle-même, il l'a tirée vers lui et lui a pris la tête qu'il a maintenue contre son sexe en érection. Il l'a obligée à le lécher pendant une dizaine de secondes.  
 
B.c. Le 17 février 2018, D.________ a raconté les faits à une amie avec laquelle elle a décidé de confronter A.________. Le lendemain, lors de la confrontation, D.________ a appelé la police après un échange de coups et a expliqué avoir été victime d'une agression sexuelle le 12 février 2018. Le 2 mars 2018, D.________ a mis fin à ses jours.  
 
C.  
A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt cantonal. Il conclut, avec suite de frais et dépens, à sa réforme en ce sens qu'il est acquitté de l'infraction de contrainte sexuelle. Il conclut également à ce que les conclusions civiles formulées par les proches de D.________ soient rejetées. Il requiert par ailleurs le bénéfice de l'assistance judiciaire. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Sans remettre en cause les actes d'ordre sexuel retenus, le recourant conteste avoir usé d'un moyen de contrainte au sens de l'art. 189 al. 1 CP. Il soutient en particulier que ses actes n'auraient pas atteint le degré d'intensité requis pour être qualifiés d'actes de contrainte. 
 
1.1. A teneur de l'art. 189 al. 1 CP, se rend coupable de contrainte sexuelle celui qui, notamment en usant de menace ou de violence envers une personne, en exerçant sur elle des pressions d'ordre psychique ou en la mettant hors d'état de résister, l'aura contrainte à subir un acte analogue à l'acte sexuel ou un autre acte d'ordre sexuel.  
L'art. 189 CP tend à protéger la libre détermination en matière sexuelle (ATF 131 IV 167 consid. 3 p. 169; 122 IV 97 consid. 2b p. 100) en réprimant l'usage de la contrainte aux fins d'amener une personne à faire ou à subir, sans son consentement, un acte d'ordre sexuel. Pour qu'il y ait contrainte en matière sexuelle, il faut que la victime ne soit pas consentante, que l'auteur le sache ou accepte cette éventualité et qu'il passe outre en profitant de la situation ou en utilisant un moyen efficace (ATF 122 IV 97 consid. 2b p. 100; arrêts 6B_802/2021 du 10 février 2022 consid. 1.2; 6B_488/2021 du 22 décembre 2021 consid. 5.4.1; 6B_367/2021 du 14 décembre 2021 consid. 2.2.1; 6B_579/2021 du 29 novembre 2021 consid. 3.1). L'art. 189 CP ne protège des atteintes à la libre détermination en matière sexuelle que pour autant que l'auteur surmonte ou déjoue la résistance que l'on pouvait raisonnablement attendre de la victime (ATF 133 IV 49 consid. 4 et l'arrêt cité; arrêts 6B_802/2021 précité consid. 1.2; 6B_488/2021 précité consid. 5.4.1; 6B_367/2021 précité consid. 2.2.1). 
La contrainte sexuelle suppose l'emploi d'un moyen de contrainte. Il s'agit notamment de l'usage de la violence. La violence désigne l'emploi volontaire de la force physique sur la personne de la victime dans le but de la faire céder (ATF 122 IV 97 consid. 2b p. 100; arrêts 6B_367/2021 précité consid. 2.2.1; 6B_995/2020 du 5 mai 2021 consid. 2.1). Il n'est pas nécessaire que la victime soit mise hors d'état de résister ou que l'auteur la maltraite physiquement. Une certaine intensité est néanmoins requise. La violence suppose non pas n'importe quel emploi de la force physique, mais une application de cette force plus intense que ne l'exige l'accomplissement de l'acte dans les circonstances ordinaires de la vie. Selon le degré de résistance de la victime ou encore en raison de la surprise ou de l'effroi qu'elle ressent, un effort simplement inhabituel de l'auteur peut la contraindre à se soumettre contre son gré (ATF 87 IV 66 consid. 1 p. 68; arrêts 6B_367/2021 précité consid. 2.2.1; 6B_995/2020 précité consid. 2.1). Selon les circonstances, un déploiement de force relativement faible peut suffire. Ainsi, peut déjà suffire le fait de maintenir la victime avec la force de son corps, de la renverser à terre, de lui arracher ses habits ou de lui tordre un bras derrière le dos (arrêts 6B_367/2021 précité consid. 2.2.1; 6B_1444/2020 du 10 mars 2021 consid. 2.3.2; 6B_326/2019 du 14 mai 2019 consid. 3.2.1). 
Sur le plan subjectif, la contrainte sexuelle est une infraction intentionnelle, étant précisé que le dol éventuel suffit. Agit intentionnellement celui qui sait ou accepte l'éventualité que la victime ne soit pas consentante, qu'il exerce ou emploie un moyen de contrainte sur elle et qu'elle se soumette à l'acte sexuel, respectivement à l'acte d'ordre sexuel, sous l'effet de cette contrainte (arrêts 6B_159/2020 du 20 avril 2020 consid. 2.4.3; 6B_95/2015 du 25 janvier 2016 consid. 5.1; cf. ATF 87 IV 66 consid. 3 p. 70 s.). 
 
1.2. La cour cantonale a retenu que même si le recourant ne s'était pas montré particulièrement violent, il avait néanmoins fait usage de sa force physique pour immobiliser la jeune fille et lui imposer des actes d'ordre sexuel, alors qu'il savait qu'elle n'y consentait pas. Il avait, d'une part, tiré D.________ et l'avait maintenue contre lui pour lui imposer des baisers et des caresses sexuelles aussi bien sur les fesses que sur le sexe par-dessus la culotte. Il avait, d'autre part, tenu la tête de D.________ après l'avoir tirée contre lui pour que celle-ci lèche son sexe, comme il le lui avait demandé. Bien qu'il n'avait pas fait preuve de violence caractérisée, raison pour laquelle la victime avait eu de la peine à désigner les actes dénoncés d'agression sexuelle, il n'en demeurait pas moins que l'emploi de la force était suffisant pour qualifier le comportement du recourant de contrainte sexuelle, d'autant que la victime avait été prise par surprise. Quant à l'aspect subjectif, la cour cantonale a retenu que même si la victime n'avait pas crié ni ne s'était débattue, le recourant savait qu'elle ne souhaitait pas de baisers et de caresses car elle le lui avait signifié à plusieurs reprises, notamment en lui disant " non ", que " ce n'était pas possible " et en ne répondant pas à ses avances. Par ailleurs, le fait qu'une relation sexuelle était intervenue entre les intéressés ne changeait rien au fait que le recourant était en mesure de comprendre que D.________ ne souhaitait pas lui prodiguer une fellation. Le recourant avait en effet dû tirer la jeune femme qui ne s'approchait pas et lui saisir la tête en voyant qu'elle ne s'exécutait pas. Compte tenu de ces éléments, la cour cantonale a retenu que les conditions de l'art. 189 al. 1 CP étaient réalisées.  
 
1.3. En l'espèce, s'agissant du premier complexe de faits (cf. let. B.b.a supra), il est constant que le recourant a commencé par mettre sa main sur l'épaule de D.________ et a tenté de l'embrasser. Il est également établi et incontesté que celle-ci a opposé une résistance aux avances du recourant en lui indiquant clairement " qu'elle ne voulait pas ". Le recourant a alors brisé la résistance de la jeune fille, passant outre son refus manifeste, en lui répondant " qu'ils ne faisaient rien de mal " et en la tirant vers lui. Il l'a manifestement tirée avec une certaine intensité puisque celle-ci, qui se trouvait à ses côtés, s'est retrouvée face à lui. Il a ensuite usé d'une force physique suffisante pour la prendre et la maintenir contre lui, dans le but de la faire céder. Quand bien même celle-ci ne cédait pas et continuait d'exprimer son refus (cf. procès-verbal d'audition devant la police du 18 février 2018 l. 33-34 p.3), le recourant l'a embrassée et enlacée puis lui a caressé les fesses et lui a touché le sexe par-dessus la culotte, contre son gré. Dans ces circonstances, la cour cantonale pouvait considérer que les gestes du recourant réalisaient l'intensité suffisante de l'emploi de la violence comme moyen de contrainte. En tant que le recourant tire ses propres déductions du degré de résistance qu'aurait pu lui opposer D.________ en relation avec la confrontation organisée par celle-ci quelques jours après l'événement en cause, son argumentation est purement appellatoire, partant irrecevable. Au demeurant, dans la mesure où l'usage de la force physique sur la victime doit être admis, le moyen par lequel le recourant conteste avoir pris celle-ci par surprise n'est pas déterminant, pour autant qu'il soit suffisamment motivé (art. 106 al. 2 LTF).  
S'agissant du deuxième complexe de faits (cf. let. B.b.b supra), il est constant que le recourant a demandé une fellation à la victime. Voyant qu'elle ne s'approchait pas, il l'a tirée vers lui. Puis, comme elle ne s'exécutait pas, il lui a saisi la tête et l'a maintenue contre son sexe en érection. Or ces gestes requièrent indubitablement l'application d'une force plus intense que ne l'exige l'accomplissement de l'acte dans les circonstances ordinaires de la vie, sans qu'il fût nécessaire que la jeune femme décrive avec précision l'intensité de la force utilisée par le recourant, contrairement à ce que soutient celui-ci. Pour le surplus, l'acte ayant duré une dizaine de secondes, l'argument du recourant selon lequel la victime aurait eu la possibilité de s'échapper est dénué de toute pertinence. Le comportement qu'il aurait adopté durant la relation sexuelle consentie préalable, qu'il décrit comme exempt de violence, n'est pas davantage déterminant puisqu'il se rapporte à un autre complexe de faits. 
Compte tenu de ce qui précède, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral en jugeant que l'élément de contrainte sous la forme de l'usage de la force était réalisé. Le recourant ne conteste pas, à juste titre, les autres éléments constitutifs de l'infraction, en particulier l'élément subjectif. Il s'ensuit que la condamnation pour contrainte sexuelle doit être confirmée. 
 
2.  
Le recourant ne discute pas la quotité de la peine qui lui a été infligée, de sorte qu'il n'y a pas lieu de l'examiner plus avant. 
 
3.  
En tant que le recourant conclut au rejet des conclusions civiles des proches de D.________ en se prévalant de son acquittement de l'infraction retenue au préjudice de celle-ci, sa conclusion est sans objet. 
 
4.  
Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Comme il était dénué de chance de succès, la demande d'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant, qui succombe, supporte les frais judiciaires dont le montant sera fixé en tenant compte de sa situation financière, laquelle n'apparaît pas favorable (art. 65 al. 2 et 66 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
La demande d'assistance judiciaire est rejetée. 
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'200 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal de l'État de Fribourg, Cour d'appel pénal. 
 
 
Lausanne, le 14 juillet 2022 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
La Greffière : Paris