1C_168/2023 30.10.2023
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_168/2023  
 
 
Arrêt du 30 octobre 2023  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Kneubühler, Président, 
Chaix et Haag. 
Greffière : Mme Tornay Schaller. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me François Gillard, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Secrétariat d'Etat aux migrations, Quellenweg 6, 3003 Berne. 
 
Objet 
Annulation de la naturalisation ordinaire, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal administratif fédéral, Cour VI, du 7 mars 2023 (F-1551/2021). 
 
 
Faits :  
 
A.  
A.________, ressortissant du Kosovo, né en 1981, est arrivé dans le canton de Vaud en 1991. Il a déposé une première demande de naturalisation ordinaire en 2006, laquelle a échoué en raison d'un échec à l'examen municipal. Il a déposé une seconde demande de naturalisation ordinaire le 20 octobre 2015. 
Dans le cadre de cette demande, A.________ a pris connaissance, le 3 octobre 2015, de ce que, pour pouvoir être naturalisé, il devait respecter l'ordre juridique suisse et que si cette condition n'était pas remplie au moment de la décision, sa naturalisation pouvait, selon l'art. 41 de l'ancienne loi fédérale sur l'acquisition et la perte de la nationalité suisse du 29 septembre 1952 (aLN; RO 1952 1115), être annulée dans un délai de huit ans, si elle avait été obtenue par des déclarations mensongères ou par la dissimulation de faits essentiels. L'intéressé a en outre solennellement déclaré avoir respecté l'ordre juridique en Suisse et à l'étranger au cours des dix dernières années et, même au-delà de ces dix années, n'avoir pas commis d'infractions pour lesquelles il devait s'attendre à être poursuivi ou condamné, avant de s'engager à informer les autorités compétentes en matière de naturalisation de toute enquête pénale ouverte à son encontre ou de condamnation durant la procédure de naturalisation. 
Le 5 février 2018, l'intéressé a obtenu la bourgeoisie de la commune de Lausanne. Le 31 octobre 2018, il s'est vu octroyer le droit de cité vaudois et a été mis, le 3 avril 2019, au bénéfice de la nationalité suisse, après avoir obtenu l'autorisation fédérale de naturalisation le 17 janvier 2019. 
 
B.  
Par ordonnance pénale du 21 octobre 2019, il a été condamné par le Ministère public de l'arrondissement de Lausanne à une peine pécuniaire de 180 jours-amende avec sursis pendant deux ans et à une amende de 2'160 francs pour avoir employé, en violation de l'art. 117 al. 1 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI; RS 142.20), des travailleurs étrangers sans autorisation du 3 avril 2018 au 12 juillet 2019. Aucune opposition n'a été formée à cette ordonnance pénale. Le Secrétariat d'Etat aux migrations (ci-après: SEM) en a reçu une copie le 5 décembre 2019. 
Par courrier du 9 novembre 2020, le SEM a communiqué à l'intéressé qu'il se voyait contraint d'examiner s'il y avait lieu d'annuler sa naturalisation. A.________ s'est déterminé par courriers des 8 décembre 2020 et 8 janvier 2021: il a notamment relevé que l'absence de communication de l'existence de l'ordonnance pénale précitée aux autorités compétentes était imputable à une négligence de sa part. 
Par décision du 4 mars 2021, le SEM a annulé la naturalisation ordinaire de l'intéressé. 
 
C.  
Par arrêt du 7 mars 2023, le Tribunal administratif fédéral (TAF) a rejeté le recours déposé par A.________ contre la décision du 4 mars 2021. 
 
D.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ demande principalement au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du 7 mars 2023 et la décision du SEM du 4 mars 2021 et de prononcer que sa nationalité suisse est conservée. Il conclut subsidiairement au renvoi de la cause au SEM pour complément d'instruction et pour qu'il soit décidé de classer sans suite l'enquête ouverte à son encontre et tendant à une éventuelle annulation de sa naturalisation. 
Le TAF et le SEM ont conclu au rejet du recours. Le recourant a répliqué, par courrier du 5 juillet 2023. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Dirigé contre la décision du TAF (art. 86 al. 1 let. a LTF) qui confirme l'annulation de la naturalisation ordinaire accordée au recourant, le recours est recevable comme recours en matière de droit public (art. 82 let. a LTF). Le motif d'exclusion de l'art. 83 let. b LTF n'entre pas en ligne de compte, dès lors qu'il s'agit en l'espèce d'annulation de la naturalisation ordinaire (arrêt 1C_324/2020 du 23 septembre 2020 consid. 1 et les références citées). Pour le surplus, le recourant a la qualité pour recourir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF et les conditions formelles de recevabilité sont remplies, de sorte qu'il y a lieu d'entrer en matière. 
 
2.  
L'entrée en vigueur, le 1 er janvier 2018, de la nouvelle loi sur la nationalité suisse du 20 juin 2014 (LN; RS 141.0) a entraîné l'abrogation de la loi fédérale du 29 septembre 1952 sur l'acquisition et la perte de la nationalité suisse (aLN; RO 1952 1115), conformément à l'art. 49 LN (en relation avec le chiffre I de son annexe). En vertu de la réglementation transitoire prévue par l'art. 50 LN, l'acquisition et la perte de la nationalité suisse sont régies par le droit en vigueur au moment où le fait déterminant s'est produit (al. 1). Les demandes déposées avant l'entrée en vigueur de la nouvelle loi sont traitées conformément aux dispositions de l'ancien droit jusqu'à ce qu'une décision soit rendue (al. 2).  
En l'espèce, la décision d'octroi de la naturalisation ordinaire au recourant a été prononcée en avril 2019, soit postérieurement à l'entrée en vigueur du nouveau droit, de sorte que le Tribunal administratif fédéral a appliqué le nouveau droit (cf. arrêt 1C_574/2021 du 27 avril 2022 consid. 2.4). En revanche, afin de déterminer si la décision d'annulation de la naturalisation ordinaire reposait sur l'existence de déclarations mensongères ou de dissimulation de faits essentiels, l'instance précédente s'est référée aux dispositions pertinentes de l'ancienne LN relatives aux conditions matérielles posées à la naturalisation ordinaire, dès lors que l'intéressé a déposé sa demande de naturalisation en octobre 2015, soit avant l'entrée en vigueur du nouveau droit (cf. art. 50 al. 2 LN; cf. arrêt 1C_378/2021 du 8 novembre 2021 consid. 3.2). Ce raisonnement peut être suivi, le recourant ne le contestant par ailleurs pas. 
 
3.  
Le recourant conteste avoir obtenu la naturalisation par la dissimulation consciente de faits essentiels. Il reproche au TAF d'avoir abusé de son pouvoir d'appréciation et d'avoir violé le principe de la proportionnalité en confirmant la décision d'annuler la naturalisation ordinaire. 
 
3.1. A teneur de l'art. 36 al. 1 LN, le SEM peut annuler la naturalisation obtenue par des déclarations mensongères ou par la dissimulation de faits essentiels (cf. également art. 41 al. 1 aLN).  
Selon l'art. 14 aLN, avant l'octroi de l'autorisation, on s'assurera de l'aptitude du requérant à la naturalisation. On examinera notamment si le requérant se conforme à l'ordre juridique suisse (let. c). 
Pour qu'une naturalisation soit annulée, il ne suffit pas qu'elle ait été accordée alors que l'une ou l'autre de ses conditions n'était pas remplie; il faut qu'elle ait été acquise grâce à un comportement déloyal et trompeur. S'il n'est point besoin que ce comportement soit constitutif d'une escroquerie au sens du droit pénal, il est nécessaire que l'intéressé ait donné sciemment de fausses informations à l'autorité ou qu'il l'ait délibérément laissée dans l'erreur sur des faits qu'il savait essentiels (ATF 140 II 65 consid. 2.2). 
La nature potestative de l'art. 36 LN confère une certaine liberté d'appréciation à l'autorité compétente, qui doit toutefois s'abstenir de tout abus dans l'exercice de celle-ci. Commet un abus de son pouvoir d'appréciation l'autorité qui se fonde sur des critères inappropriés, ne tient pas compte de circonstances pertinentes ou rend une décision arbitraire, contraire au but de la loi ou au principe de la proportionnalité (ATF 129 III 400 consid. 3.1). 
 
3.2. En l'occurrence, il n'est pas contesté que par ordonnance pénale du 21 octobre 2019 le recourant a été condamné pour violation de l'art. 117 al. 1 LEI à une peine pécuniaire de 180 jours-amende, assortie d'un sursis de deux ans. Il lui est reproché d'avoir employé, dès avril 2018, un premier ressortissant étranger ne disposant pas de l'autorisation nécessaire pour travailler, puis un deuxième, à compter du 7 février 2019 et un troisième depuis le 10 mai 2019. Le recourant n'a pas fait opposition à cette ordonnance pénale.  
Il s'agit dès lors de déterminer si le recourant a sciemment donné de fausses informations ou délibérément omis d'informer les autorités de naturalisation à ce sujet et si ce comportement justifie l'annulation de sa naturalisation ordinaire. 
 
3.2.1. Le TAF a considéré que vu la déclaration signée par le recourant le 3 octobre 2015, il y avait lieu d'admettre que celui-ci était conscient du fait qu'il devait, d'une part, respecter l'ordre juridique suisse pour pouvoir être naturalisé et, d'autre part, annoncer aux autorités compétentes toutes circonstances ou faits qui s'opposaient potentiellement à sa naturalisation; or, en employant à compter du mois d'avril 2018, un ressortissant étranger ne disposant pas de l'autorisation nécessaire pour travailler et, à partir du 7 février 2019, un deuxième sans autorisation également, l'intéressé avait violé l'ordre juridique suisse. Pour l'instance précédente, ce comportement constitue un obstacle potentiel à la naturalisation et les autorités compétentes en la matière auraient dû en être immédiatement informées; or, ce n'était que postérieurement à la naturalisation du recourant que le SEM en avait pris connaissance, après réception de la copie de l'ordonnance pénale du 21 octobre 2019, que lui avait transmise le Ministère public de l'arrondissement de Lausanne en décembre 2019.  
Le TAF a relevé que, sans pour autant exiger du recourant qu'il s'auto-incrimine (cf. arrêt 1C_247/2010 du 23 juillet 2010 consid. 3.3, aussi cité à l'ATF 140 II 65 consid. 3.4), il y avait néanmoins lieu de souligner que l'intéressé avait, dans les faits, dissimulé aux autorités de naturalisation la circonstance qu'il employait des ressortissants étrangers dépourvus des autorisations nécessaires pour travailler en Suisse. Les juges précédents ont ajouté que l'intéressé avait agi de manière intentionnelle (avec conscience et volonté) ou, pour le moins, par dol éventuel (cf. art. 12 al. 2 CP) : les excuses formulées par le recourant relatives à son prétendu manque d'expérience ou à sa négligence alléguée n'étaient en effet pas convaincantes; on ne saurait ignorer que l'intéressé était, avant sa naturalisation, un ressortissant kosovar, séjournant en Suisse depuis de nombreuses années, et qu'il était, partant, conscient du fait que ses compatriotes devaient disposer d'une autorisation pour pouvoir travailler en Suisse; ainsi, même en admettant que l'intéressé avait omis de procéder aux vérifications nécessaires et s'était reposé sur les renseignements incomplets donnés par ses employés (notamment, adresse de domicile en Suisse, numéro AVS et compte bancaire), il devait, à tout le moins, avoir envisagé le fait qu'il commettait des infractions à la législation sur les étrangers et s'en était accommodé. Le TAF a considéré que ce comportement ne pouvait être qualifié de simple négligence. Il a ajouté que le Ministère public avait retenu le caractère intentionnel des infractions, en se fondant sur l'art. 117 al. 1 LEI. Il en a déduit qu'il y avait ainsi lieu de considérer que le recourant avait consciemment dissimulé aux autorités de naturalisation le fait qu'il employait des ressortissants étrangers au noir (cf. ATF 140 II 65 consid. 3.3.2 et 3.4.2, s'agissant de l'obligation de collaborer; MERZ/VON RÜTTE, in: Uebersax/Rudin/Hugi Yar/Geiser/Vetterli (éd.), Ausländerrecht, 3e éd. 2022, n° 22.110 p. 1273). 
Le TAF a ajouté que cette dissimulation portait de surcroît sur des faits essentiels; l'art. 14 let. c aLN exige en effet du candidat à la naturalisation qu'il se conforme à l'ordre juridique suisse, ce qui signifie qu'il doit avoir une bonne réputation du point de vue du droit pénal et du droit des poursuites (cf. Message du 26 août 1987 relatif à la modification de la loi sur la nationalité, FF 1987 III 285, p. 296; ATF 140 II 65 consid. 3.3; DOW/MAHON, in: Amarelle/Nguyen [éd.], Code annoté de droit des migrations, vol. V: Loi sur la nationalité [LN], 2014, art. 14 n° 28 p. 54 s.). Le TAF a considéré qu'en employant des ressortissants étrangers qui ne disposaient pas des autorisations nécessaires pour travailler en Suisse, le recourant n'avait pas respecté l'ordre juridique suisse: il y avait, partant, lieu d'admettre que le SEM n'aurait pas octroyé l'autorisation fédérale de naturalisation s'il avait eu connaissance des infractions commises par l'intéressé en matière de droit des étrangers. 
 
3.2.2. Face à cette argumentation détaillée, le recourant se contente, de manière appellatoire, de répéter les arguments - qu'il a déjà fait valoir devant l'instance précédente et auxquels celle-ci a répondu. Il reprend parfois mot pour mot l'argumentation formée devant le TAF. Il fait à nouveau valoir qu'il n'a pas fait opposition à l'ordonnance pénale du 21 octobre 2019 "en raison principalement de sa volonté de se dispenser d'une procédure plus longue et coûteuse". Il soutient que le TAF aurait dû prendre en compte, en plus du contenu sommaire de l'ordonnance pénale, "le contexte et les circonstances ayant entouré ces événements-là", à savoir le fait qu'en 2018 il venait de constituer son entreprise, ainsi que son inexpérience à ce moment-là; il se prévaut de sa bonne foi au motif que les personnes engagées présentaient un "statut assez troublant, en ce sens qu'elles avaient toutes un domicile légal, un numéro AVS et un compte en banque", qu'un employé avait été engagé par son frère et qu'un autre aurait montré un document sur lequel il serait inscrit qu'il peut rester en Suisse.  
Il conteste encore le caractère intentionnel de l'infraction à l'art. 117 al. 1 LEI et soutient que l'ordonnance pénale ne lie pas le juge administratif quant à l'appréciation du caractère intentionnel de l'infraction. Il soutient à nouveau ne pas avoir eu conscience de dissimuler une infraction aux autorités de naturalisation. 
Ces éléments, de surcoît appellatoires, ne suffisent pas pour démontrer que le SEM et le TAF auraient abusé de leur pouvoir d'appréciation en annulant la naturalisation ordinaire du recourant en se fondant sur l'art. 36 al. 1 LN. En effet, l'élément pertinent n'est pas la condamnation pénale et son inscription au casier judiciaire de l'intéressé (qui sont intervenues postérieurement à l'octroi de la naturalisation ordinaire). L'élément déterminant est le fait que le recourant a adopté un comportement répréhensible durant la procédure de naturalisation (le fait d'avoir employé des ressortissants étrangers qui ne disposaient pas des autorisations nécessaires pour travailler en Suisse) et a dissimulé aux autorités de naturalisation cette circonstance. 
De plus, comme le recourant a renoncé à s'opposer à l'ordonnance pénale du 21 octobre 2019, alors qu'il aurait eu la possibilité de le faire, c'est à tort qu'il reproche au TAF de s'être référé aux faits tels que retenus dans celle-ci pour déterminer quels étaient ceux qui avaient été dissimulés par le recourant durant la procédure de naturalisation. En effet, l'ordonnance pénale non contestée est assimilée à un jugement pénal entré en force (cf. art. 354 al. 3 CPP). 
Pour le reste, le TAF s'est déterminé sur les arguments du recourant tendant à démontrer que son comportement avait été négligent, considérant que, vu sa nationalité étrangère et la durée de son séjour en Suisse, l'intéressé devait être conscient (ou devait avoir envisagé le fait) qu'il commettait des infractions à la législation sur les étrangers. On ne saurait dès lors reprocher au TAF de ne pas avoir procédé à sa propre appréciation du comportement adopté par le recourant durant le processus de naturalisation et de s'être fié au contenu de l'ordonnance pénale entrée en force. 
S'agissant enfin du grief du recourant selon lequel il lui serait reproché de ne de pas s'être auto-incriminé, il y a lieu de relever que le TAF s'est prononcé sur cette question, précisant que, s'il n'était pas attendu de l'intéressé qu'il s'auto-incriminât, ce dernier aurait pu, ayant été rendu attentif aux conséquences d'une dissimulation de faits essentiels, renoncer à sa requête de naturalisation (cf. ATF 140 II 65 consid. 3.4.1). 
En définitive, le TAF n'a pas violé l'art. 36 al. 1 LN en considérant que la naturalisation ordinaire du recourant avait été obtenue par la dissimulation de faits essentiels. Le grief doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité. 
 
3.3. Le recourant se plaint aussi d'une violation du principe de la proportionnalité dans l'application de l'art. 36 al. 1 LN.  
 
3.3.1. Le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst.) exige qu'une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés (règle de l'aptitude) et que ceux-ci ne puissent être atteints par une mesure moins incisive (règle de la nécessité); en outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et il exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (principe de la proportionnalité au sens étroit, impliquant une pesée des intérêts; ATF 146 I 157 consid. 5.4 et les arrêts cités).  
 
3.3.2. Le TAF a jugé que la décision d'annulation de la naturalisation était conforme au principe de la proportionnalité. Il a relevé l'importance de l'intérêt public à lutter contre le travail au noir (cf., notamment, ATF 141 II 57 consid. 7; arrêt 2C_881/2012 du 16 janvier 2013 consid. 4.3.2). Il s'est référé à cet égard au Message du Conseil fédéral concernant la loi fédérale contre le travail au noir du 16 janvier 2002, selon lequel le travail au noir "ne constitue pas un délit négligeable", dès lors que celui-ci est à l'origine de nombreux problèmes, dont, notamment, des pertes de recettes pour le secteur public, une menace pour la protection des travailleurs, ainsi que des distorsions de la concurrence et de la péréquation financière (FF 2002 3371, p. 3372 et 3375). Le TAF en a déduit que le comportement illégal adopté par le recourant, qui a débuté déjà une année avant sa naturalisation, ne saurait par conséquent être qualifié de bagatelle; le fait que ses employés aient été prétendument affiliés à l'AVS n'était pas décisif dans le cas d'espèce, dès lors qu'ils n'étaient pas autorisés à travailler en Suisse; il importait par ailleurs peu que le statut de ceux-ci ait été régularisé après-coup; en définitive, l'intérêt public à l'annulation de la naturalisation ordinaire de l'intéressé était important.  
Après avoir relevé qu'il pouvait certes, prima facie, paraître dur d'annuler la naturalisation ordinaire de l'intéressé, qui réside en Suisse depuis de très nombreuses années, l'instance précédente a rappelé que l'annulation de la naturalisation litigieuse intervenait dans un contexte de dissimulation trompeuse de faits pénalement répréhensibles par l'intéressé, lequel aurait pu tout aussi bien renoncer à sa requête de naturalisation (cf. ATF 140 II 65 consid. 3.4.1); le recourant avait du reste été expressément rendu attentif au fait que sa naturalisation pouvait être annulée s'il dissimulait des faits essentiels. Le TAF a ajouté que rien n'indiquait au dossier que l'annulation de sa naturalisation suisse l'exposerait à un risque de devenir apatride; de plus, les attaches profondes que le recourant dit entretenir avec la Suisse n'étaient pas mises à mal par la décision d'annulation; celles-ci seront prises en compte par l'autorité cantonale des migrations chargée de statuer sur le maintien du séjour en Suisse de l'intéressé (cf. ATF 140 II 65 consid. 4.2.2).  
 
3.4. Ce raisonnement ne prête pas le flanc à la critique et peut être confirmé. Le recourant ne répond d'ailleurs pas à l'argumentation développée de l'instance précédente et se contente, à nouveau, de faire valoir qu'il n'a jamais eu l'intention de dissimuler les faits pour lesquels il a été condamné pénalement, de sorte que l'annulation de la naturalisation serait disproportionnée. Il rappelle aussi que cela fait plus de 30 ans qu'il vit en Suisse et que son intégration est excellente. Ces éléments, pris en compte par le TAF dans sa pesée des intérêts, sont insuffisants pour démontrer une violation du principe de la proportionnalité dans l'application de l'art. 36 LN.  
Le grief de la violation du principe de la proportionnalité doit être écarté dans la faible mesure de sa recevabilité. 
 
3.5. Le recourant fait enfin valoir une application analogique arbitraire de l'art. 4 al. 2 let. d de l'ordonnance sur la nationalité suisse du 17 juin 2016 (OLN; RS 141.01).  
Ce grief doit être d'emblée rejeté. En effet, le TAF n'a pas appliqué par analogie l'art. 4 al. 2 let. d OLN. Il a examiné le comportement du recourant sous l'angle de l'art. 14 let. c aLN, concluant que l'intéressé n'avait pas respecté l'ordre juridique suisse et que le SEM n'aurait pas octroyé l'autorisation fédérale de naturalisation s'il avait eu connaissance des infractions commises par celui-ci. 
 
4.  
Il s'ensuit que le recours est rejeté dans la mesure de sa recevabilité, aux frais du recourant qui succombe (art. 66 al. 1 LTF); il n'est pas alloué de dépens. 
 
 
 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure de sa recevabilité. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 francs, sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Secrétariat d'Etat aux migrations et au Tribunal administratif fédéral, Cour VI. 
 
 
Lausanne, le 30 octobre 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
La Greffière : Tornay Schaller