2A.706/2005 04.05.2006
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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
2A.706/2005 /svc 
 
Arrêt du 4 mai 2006 
IIe Cour de droit public 
 
Composition 
MM. et Mme les Juges Wurzburger, Juge présidant, Müller et Yersin. 
Greffier: M. Vianin. 
 
Parties 
A.X.________, 
recourant, représenté par Me Yves Grandjean, avocat, 
 
contre 
 
Département de l'économie du canton de Neuchâtel, au Château, 2001 Neuchâtel 1, 
 
Tribunal administratif du canton de Neuchâtel, 
case postale 3174, 2001 Neuchâtel 1. 
 
Objet 
Autorisation de séjour, 
 
recours de droit administratif contre l'arrêt du 
Tribunal administratif du canton de Neuchâtel 
du 2 novembre 2005. 
 
Faits: 
A. 
Ressortissant de Serbie-Monténégro (Albanais du Kosovo) né le 14 juin 1973, A.X.________ est entré en Suisse le 20 octobre 1993 et y a déposé une demande d'asile. Cette demande a été rejetée par l'Office fédéral des réfugiés (devenu entre-temps l'Office fédéral des migrations). Alors qu'un recours contre cette décision était pendant, l'Office fédéral des réfugiés a décidé, le 11 mai 1994, de reconsidérer le renvoi de l'intéressé et de l'admettre provisoirement en Suisse, en se fondant sur l'arrêté du Conseil fédéral du 18 décembre 1991 en vertu duquel tous les ressortissants yougoslaves déserteurs et réfractaires devaient être admis provisoirement. 
Cette mesure d'admission collective provisoire a été levée le 25 février 1998. Le 8 avril 1999, en raison de la guerre, le Conseil fédéral a toutefois décidé l'admission provisoire collective des ressortissants yougoslaves dont le dernier domicile était situé dans la province du Kosovo, mesure dont A.X.________ a également bénéficié. L'admission provisoire a été levée le 11 août 1999, mais entre-temps, le 17 mai 1999, le prénommé s'était marié avec une ressortissante suisse, B.X.________, et avait bénéficié d'une autorisation de séjour à compter de cette date. Cette autorisation a été renouvelée jusqu'au 17 mai 2004, malgré un renseignement de la police cantonale, selon lequel le couple s'était séparé en mai-juin (voire août) 2000. 
Le 28 avril 2004, A.X.________ a averti le Service des étrangers du canton de Neuchâtel (ci-après: le Service des étrangers) qu'il était à nouveau domicilié chez son épouse à Z.________ depuis le 31 mars 2004. Interrogés par la police cantonale à la demande du Service des étrangers, A.X.________ et B.X.________ ont fait des déclarations contradictoires. Celui-ci a prétendu qu'il vivait chez son épouse, alors que celle-ci a affirmé vivre seule. Après vérification, la police cantonale est parvenue à la conclusion que A.X.________ vivait probablement chez son frère. 
Le 17 juin 2004, se fondant sur ce renseignement, le Service des étrangers a informé A.X.________ qu'il envisageait de ne pas prolonger son autorisation de séjour. Celui-ci a contesté l'affirmation selon laquelle il ne vivait plus de manière régulière au domicile conjugal et sollicité l'octroi d'un « permis de séjour (permis C) ». 
B. 
Après avoir procédé à l'audition des époux X.________, le Service des étrangers a, par décision du 24 août 2004, refusé de prolonger l'autorisation de séjour de A.X.________ et lui a imparti un délai de départ au 30 septembre 2004. Il a considéré qu'il était abusif de la part de ce dernier de se prévaloir de son mariage aux fins d'obtenir la prolongation de son autorisation de séjour. 
Saisi d'un recours contre cette décision, le Département de l'économie publique du canton de Neuchâtel (actuellement: Département de l'économie; ci-après: le Département) l'a rejeté le 15 avril 2005. A.X.________ a déféré cette décision au Tribunal administratif du canton de Neuchâtel, qui a rejeté le recours par arrêt du 2 novembre 2005. 
C. 
Agissant par la voie du recours de droit administratif, A.X.________ demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt du 2 novembre 2005 et de renvoyer le dossier à l'autorité inférieure pour qu'elle statue à nouveau dans le sens des considérants. Il conteste l'existence d'un abus de droit, en reprochant à l'autorité intimée d'avoir apprécié arbitrairement les faits de la cause. Il soutient que les autorités précédentes ont violé les art. 12 ss. de la loi fédérale du 26 mars 1931 sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE; RS 142.20) en omettant d'examiner si son renvoi était licite et raisonnablement exigible compte tenu de la situation régnant au Kosovo; elles auraient également commis un déni de justice formel en ne se prononçant pas formellement sur la demande d'octroi d'une autorisation de séjour à caractère humanitaire au sens de l'art. 13 lettre f de l'ordonnance du 6 octobre 1986 limitant le nombre des étrangers (OLE; RS 823.21). 
Le Département, le Tribunal administratif et l'Office fédéral des migrations concluent au rejet du recours. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Selon l'art. 100 al. 1 lettre b ch. 3 OJ, le recours de droit administratif n'est pas recevable en matière de police des étrangers contre l'octroi ou le refus d'autorisations auxquelles le droit fédéral ne confère pas un droit. 
Conformément à l'art. 7 al. 1 LSEE, le conjoint étranger d'un ressortissant suisse a droit à l'octroi et à la prolongation de l'autorisation de séjour. Pour juger de la recevabilité du recours de droit administratif, seule est déterminante la question de savoir si un mariage au sens formel existe (ATF 126 II 265 consid. 1b p. 266). Le recourant est marié à une Suissesse. Son recours est donc recevable sous cet angle. 
2. 
Selon l'art. 7 al. 1 LSEE, le conjoint étranger d'un ressortissant suisse a droit à l'octroi et à la prolongation de l'autorisation de séjour; après un séjour régulier et ininterrompu de cinq ans, il a droit à l'autorisation d'établissement; ce droit s'éteint lorsqu'il existe un motif d'expulsion. Quant à l'art. 7 al. 2 LSEE, il prévoit que le conjoint étranger d'un ressortissant suisse n'a pas droit à l'octroi ou à la prolongation de l'autorisation de séjour, lorsque le mariage a été contracté dans le but d'éluder les dispositions sur le séjour et l'établissement des étrangers et notamment celles sur la limitation du nombre des étrangers. D'après la jurisprudence, le fait d'invoquer l'art. 7 al. 1 LSEE peut être constitutif d'un abus de droit, en l'absence même d'un mariage contracté dans le but d'éluder les dispositions sur le séjour et l'établissement des étrangers au sens de l'art. 7 al. 2 LSEE (ATF 130 II 113 consid. 4.2 p. 117; 127 II 49 consid. 5a p. 56 et la jurisprudence citée). 
ll y a abus de droit notamment lorsqu'une institution juridique est utilisée à l'encontre de son but pour réaliser des intérêts que cette institution juridique ne veut pas protéger. L'existence d'un éventuel abus de droit doit être appréciée dans chaque cas particulier et avec retenue, seul l'abus de droit manifeste pouvant être pris en considération (ATF 121 II 97 consid. 4a p. 103). L'existence d'un abus de droit découlant du fait de se prévaloir de l'art. 7 al. 1 LSEE ne peut en particulier être simplement déduit de ce que les époux ne vivent plus ensemble, puisque le législateur a volontairement renoncé à faire dépendre le droit à une autorisation de séjour de la vie commune (cf. ATF 118 Ib 145 consid. 3 p. 149 ss). Pour admettre l'existence d'un abus de droit, il ne suffit pas non plus qu'une procédure de divorce soit entamée; le droit à l'octroi ou à la prolongation d'une autorisation de séjour subsiste en effet tant que le divorce n'a pas été prononcé, car les droits du conjoint étranger ne doivent pas être compromis dans le cadre d'une telle procédure. Enfin, on ne saurait uniquement reprocher à des époux de vivre séparés et de ne pas envisager le divorce. Toutefois, il y a abus de droit lorsque le conjoint étranger invoque un mariage n'existant plus que formellement dans le seul but d'obtenir une autorisation de séjour, car ce but n'est pas protégé par l'art. 7 al. 1 LSEE. Le mariage n'existe plus que formellement lorsque l'union conjugale est rompue définitivement, c'est-à-dire lorsqu'il n'y a plus d'espoir de réconciliation; les causes et les motifs de la rupture ne jouent pas de rôle (ATF 131 II 265 consid. 4.2 p. 267; 130 II 113 consid. 4.2 p. 117 et les arrêts cités). 
3. 
Selon les constatations de fait de l'autorité intimée - qui lient le Tribunal de céans (art. 105 al. 2 OJ) -, les époux X.________ se sont séparés en mai/juin, au plus tard en août 2000, soit entre une année et une année et demie après leur mariage (17 mai 1999). Le 19 août 2000, ils ont déclaré à la gendarmerie de Y.________ « qu'ils avaient pris la décision d'aller vivre chacun de leur côté » (rapport de la police cantonale du 29 août 2000, p. 2). En 2002, le recourant a déposé ses papiers durant environ un mois (du 12 août au 15 septembre) à Z.________, en indiquant être domicilié chez son épouse. Cette dernière a toutefois déclaré qu'il n'avait pas cohabité avec elle durant cette période (procès-verbal d'audition du 28 juillet 2004). A partir d'avril 2004, le recourant a à nouveau déposé ses papiers à Neuchâtel, en indiquant l'adresse de son épouse. Au plus tard en septembre de la même année, ils étaient de nouveau séparés (cf. recours au Département, p. 2). De plus, durant cette période, il n'y a pas eu reprise de la vie commune, puisque, selon les déclarations non contestées de B.X.________, le recourant « venait un peu chez elle et vivait aussi chez son frère » et qu'ils se voyaient « comme des amis mais pas comme un couple marié » (procès-verbal d'audition du 28 juillet 2004, p. 2). 
Ainsi, lors du prononcé de la décision attaquée, les époux X.________ étaient séparés depuis plus de cinq ans et il faut convenir avec l'autorité intimée que le dossier ne contient aucun élément qui laisserait envisager une reprise de la vie commune avec un minimum de vraisemblance. Il y a lieu au contraire d'admettre que l'union conjugale apparaît vidée de sa substance et qu'elle l'était déjà avant l'écoulement du délai de cinq ans de l'art. 7 al. 1 LSEE. Dès lors, l'autorité intimée n'a pas arbitrairement apprécié les faits de la cause ni autrement violé le droit fédéral en considérant qu'il était abusif de droit de la part du recourant d'invoquer une union n'existant plus que formellement aux fins d'obtenir la prolongation de son autorisation de séjour. Le recours doit donc être rejeté sur ce point. 
4. 
Le recourant reproche également aux autorités cantonales d'avoir omis d'examiner si son renvoi était licite et raisonnablement exigible au sens de l'art. 14a LSEE
La voie du recours de droit administratif n'étant pas ouverte en matière de renvoi (art. 100 al. 1 lettre b ch. 4 OJ), le grief est irrecevable. On peut toutefois relever qu'il appartient aux autorités compétentes pour l'exécution du renvoi de se prononcer sur les questions liées à l'art. 14a LSEE (cf. 2A.214/2002, consid. 3.6). Il en va de même des griefs se rapportant à l'art. 3 CEDH (interdiction de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, auxquels l'intéressé pourrait être exposé dans son pays d'origine): selon une jurisprudence constante, la question du respect de cette disposition ne se pose pas déjà lors de la décision de renvoi du territoire cantonal - laquelle n'indique pas dans quel pays l'intéressé sera renvoyé -; elle doit être examinée seulement dans le cadre de la décision par laquelle l'autorité fédérale étend le renvoi à l'ensemble du territoire suisse (2A.732/2005 consid. 3.1; 2P.171/1994 consid. 2b; 2P.56/1992 consid. 3b) ou lors de l'exécution du renvoi (2P.116/2001 consid. 4c), au vu des circonstances de lieu et de temps en vigueur à ce moment. 
Enfin, le grief selon lequel l'autorité intimée aurait commis un déni de justice formel en ne se prononçant pas sur la demande d'octroi d'une autorisation de séjour à caractère humanitaire au sens de l'art. 13 lettre f OLE est irrecevable: le recourant ne peut déduire aucun droit à une autorisation de séjour en se fondant sur l'art. 13 lettre f OLE (ATF 122 II 186 consid. 1e p. 192), de sorte que la voie du recours de droit administratif n'est pas ouverte à cet égard (art. 100 al. 1 lettre b ch. 3 OJ). 
5. 
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours dans la mesure où il est recevable. 
Succombant, le recourant supporte les frais judiciaires (art. 156 al. 1 OJ) et n'a pas droit à des dépens (art. 159 al. 1 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
2. 
Un émolument judiciaire de 1'500 fr. est mis à la charge du recourant. 
3. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, au Département de l'économie et au Tribunal administratif du canton de Neuchâtel ainsi qu'à l'Office fédéral des migrations. 
Lausanne, le 4 mai 2006 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
Le juge présidant: Le greffier: