6B_720/2022 09.03.2023
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_720/2022  
 
 
Arrêt du 9 mars 2023  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, Koch et Hurni. 
Greffier : M. Fragnière. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Arnaud Moutinot, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
1. Ministère public de la République et canton de Genève, 
route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, 
2. B.________, 
intimés. 
 
Objet 
Contraintes sexuelles, viol; droit d'être entendu, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice 
de la République et canton de Genève, 
Chambre pénale d'appel et de révision, 
du 12 avril 2022 (AARP/101/2022 P/3243/2017). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par jugement du 16 mars 2021, le Tribunal correctionnel de la République et canton de Genève a condamné A.________ pour contraintes sexuelles (art. 189 al. 1 CP) et pour viol (art. 190 al. 1 CP) à une peine privative de liberté de 4 ans. Il a en outre ordonné son expulsion et l'a astreint à verser, à titre d'indemnité pour tort moral, un montant de 15'000 fr. à B.________. 
 
B.  
Statuant par arrêt du 12 avril 2022, la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice genevoise a partiellement admis l'appel formé par A.________ contre le jugement du 16 mars 2021, qu'elle a réformé en ce sens que la mesure d'expulsion était annulée. Elle a par ailleurs rejeté l'appel joint formé par le ministère public contre ce jugement, qu'elle a confirmé pour le surplus. 
En substance, la cour cantonale a retenu les faits suivants. 
 
B.a.  
 
B.a.a. Ressortissant français né en 1957, A.________ a été employé depuis 2003 par la Mission permanente de C.________ à Genève (ci-après: la Mission permanente), en qualité de chauffeur jusqu'en 2014, puis de concierge. Depuis 2013, il habitait un appartement au rez-de-chaussée de la résidence U.________, à Genève, dont il assumait la conciergerie.  
 
B.a.b. B.________, née en 1983 en Tunisie, vivait à Genève depuis 2004 ou 2005. Analphabète ayant quitté l'école à l'âge de 6 ans, elle souffrait de surdité et présentait des troubles du langage, un fonctionnement adaptatif et une efficience intellectuelle limitée (son quotient intellectuel se situant entre 71 et 84). Ainsi, la communication avec des tiers était difficile et nécessitait du temps afin de trouver un mode de dialogue adéquat mêlant paroles et gestes.  
Domestique privée au sein de la Mission permanente depuis 2014, B.________ habitait dans un appartement au sixième étage de la résidence U.________, lequel avait été préalablement occupé par A.________. Elle a dû quitter son emploi et son logement le 30 mai 2016, à la suite de l'arrivée d'un nouvel ambassadeur auprès de la Mission permanente. 
 
B.b. En mars ou en avril 2016, dans l'appartement de B.________, A.________ a imposé à cette dernière un rapport sexuel complet, ainsi que deux autres rapports lors desquels il a pénétré son vagin avec ses doigts. Pour ce faire, A.________ a utilisé sa force physique pour déshabiller B.________, avant de la pousser sur le canapé et de s'allonger sur elle pour la pénétrer de son sexe ou de ses doigts, passant outre son refus et l'exhortant à se taire.  
 
B.c. Réalisant en septembre 2016 qu'elle était enceinte, B.________ s'est rendue chez A.________ pour lui demander de reconnaître l'enfant, ce qu'il a refusé.  
En janvier 2017, elle a donné naissance à un garçon, D.________, dont le père biologique était A.________. 
 
C.  
A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 12 avril 2022. Il conclut, avec suite de frais et dépens, principalement à son acquittement et à l'allocation d'une indemnité de 40'665 fr. 55 pour les dépens cantonaux, ainsi que d'une indemnité de 5'000 fr. à titre de tort moral. Subsidiairement, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recourant conteste sa condamnation pour viol et pour contraintes sexuelles. Il se plaint en substance d'une constatation arbitraire des faits et d'une violation du principe in dubio pro reo, ainsi que d'une violation de son droit d'être entendu.  
 
1.1. Le Tribunal fédéral n'est pas une autorité d'appel, auprès de laquelle les faits pourraient être rediscutés librement. Il est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'elles n'aient été établies en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, à savoir, pour l'essentiel, de façon arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. Une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle apparaît discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable et cela non seulement dans sa motivation, mais aussi dans son résultat (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1; 145 IV 154 consid. 1.1). Le Tribunal fédéral n'entre en matière sur les moyens fondés sur la violation de droits fondamentaux, dont l'interdiction de l'arbitraire, que s'ils ont été invoqués et motivés de manière précise (art. 106 al. 2 LTF; ATF 143 IV 500 consid. 1.1). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1; 145 IV 154 consid. 1.1).  
Lorsque l'autorité cantonale a forgé sa conviction quant aux faits sur la base d'un ensemble d'éléments ou d'indices convergents, il ne suffit pas que l'un ou l'autre de ceux-ci ou même chacun d'eux pris isolément soit à lui seul insuffisant. L'appréciation des preuves doit en effet être examinée dans son ensemble. Il n'y a ainsi pas d'arbitraire si l'état de fait retenu pouvait être déduit de manière soutenable du rapprochement de divers éléments ou indices. De même, il n'y a pas d'arbitraire du seul fait qu'un ou plusieurs arguments corroboratifs apparaissent fragiles, si la solution retenue peut être justifiée de façon soutenable par un ou plusieurs arguments de nature à emporter la conviction (arrêt 6B_1498/2020 du 29 novembre 2021 consid. 3.1 non publié aux ATF 147 IV 505; arrêts 6B_642/2022 du 9 janvier 2023 consid. 1.1.1; 6B_1233/2021 du 19 octobre 2022 consid. 1.1). 
Les déclarations de la victime constituent un élément de preuve. Le juge doit, dans l'évaluation globale de l'ensemble des éléments probatoires rassemblés au dossier, les apprécier librement (arrêts 6B_172/2022 du 31 octobre 2022 consid. 4.1; 6B_66/2022 du 19 avril 2022 consid. 3.3; 6B_408/2021 du 11 avril 2022 consid. 2.1), sous réserve des cas particuliers où une expertise de la crédibilité des déclarations de la victime s'impose (ATF 129 IV 179 consid. 2.4). Les cas de déclarations contre déclarations, dans lesquels les déclarations de la victime en tant que principal élément à charge et les déclarations contradictoires de la personne accusée s'opposent, ne doivent pas nécessairement, sur la base du principe in dubio pro reo, conduire à un acquittement. L'appréciation définitive des déclarations des participants incombe au tribunal du fond (ATF 137 IV 122 consid. 3.3; arrêts 6B_164/2022 du 5 décembre 2022 consid. 1.2; 6B_979/2021 du 11 avril 2022 consid. 4.3).  
 
1.2.  
 
1.2.1. Le droit d'être entendu, garanti à l'art. 29 al. 2 Cst., comprend notamment celui de produire ou de faire administrer des preuves, à condition qu'elles soient pertinentes et de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1; 143 V 71 consid. 4.1; 142 II 218 consid. 2.3; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les réf. citées). Le droit d'être entendu n'empêche pas le juge de mettre un terme à l'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de se forger une conviction et que, procédant de manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, il a la certitude qu'elles ne pourraient pas l'amener à modifier son opinion. Le refus d'instruire ne viole ainsi le droit d'être entendu des parties que si l'appréciation anticipée de la pertinence du moyen de preuve offert, à laquelle le juge a procédé, est entachée d'arbitraire (ATF 144 II 427 consid. 3.1.3; 141 I 60 consid. 3.3; 136 I 229 consid. 5.3).  
Selon l'art. 389 al. 1 CPP, la procédure de recours se fonde sur les preuves administrées pendant la procédure préliminaire et la procédure de première instance. L'art. 389 al. 3 CPP règle les preuves complémentaires. Ainsi, la juridiction de recours administre, d'office ou à la demande d'une partie, les preuves complémentaires nécessaires au traitement du recours. Le droit d'être entendu, consacré par l'art. 107 CPP, garantit aux parties le droit de déposer des propositions relatives aux moyens de preuves (al. 1 let. e). Conformément à l'art. 139 al. 2 CPP, il n'y a pas lieu d'administrer des preuves sur des faits non pertinents, notoires, connus de l'autorité ou déjà suffisamment prouvés. Cette disposition codifie, pour la procédure pénale, la règle jurisprudentielle déduite de l'art. 29 al. 2 Cst. en matière d'appréciation anticipée des preuves (arrêts 6B_182/2022 du 25 janvier 2023 consid. 1.2; 6B_1403/2021 du 9 juin 2022 consid. 1.2; 6B_979/2021 précité consid. 3.1). 
 
1.2.2. D'après l'art. 6 par. 3 let. d CEDH, tout accusé a le droit d'interroger ou de faire interroger les témoins à charge et d'obtenir la convocation et l'interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge. Cette disposition exclut qu'un jugement pénal soit fondé sur les déclarations de témoins sans qu'une occasion appropriée et suffisante soit au moins une fois offerte au prévenu de mettre ces témoignages en doute et d'interroger les témoins, à quelque stade de la procédure que ce soit (ATF 140 IV 172 consid. 1.3; 133 I 33 consid. 3.1; 131 I 476 consid. 2.2; arrêt 6B_1403/2021 précité consid. 2.1 et les arrêts cités). Il s'agit de l'un des aspects du droit à un procès équitable institué à l'art. 6 par. 1 CEDH. En tant qu'elle concrétise le droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.), cette exigence est également garantie par l'art. 32 al. 2 Cst. (ATF 144 II 427 consid. 3.1.2; 131 I 476 consid. 2.2).  
 
1.2.3. Conformément à l'art. 189 CP, se rend coupable de contrainte sexuelle celui qui, notamment en usant de menace ou de violence envers une personne, en exerçant sur elle des pressions d'ordre psychique ou en la mettant hors d'état de résister, l'aura contrainte à subir un acte analogue à l'acte sexuel ou un autre acte d'ordre sexuel. Celui qui, dans les mêmes circonstances, contraint une personne de sexe féminin à subir l'acte sexuel se rend coupable de viol au sens de l'art. 190 CP.  
L'art. 189 CP, de même que l'art. 190 CP, tendent à protéger la libre détermination en matière sexuelle (ATF 131 IV 167 consid. 3; 122 IV 97 consid. 2b), en réprimant l'usage de la contrainte aux fins d'amener une personne à faire ou à subir, sans son consentement, un acte d'ordre sexuel (art. 189 CP) ou une personne de sexe féminin à subir l'acte sexuel (art. 190 CP). Pour qu'il y ait contrainte en matière sexuelle, il faut que la victime ne soit pas consentante, que l'auteur le sache ou accepte cette éventualité et qu'il passe outre en profitant de la situation ou en utilisant un moyen efficace (ATF 148 IV 234 consid. 3.3; 122 IV 97 consid. 2b). L'art. 189 CP ne protège des atteintes à la libre détermination en matière sexuelle que pour autant que l'auteur surmonte ou déjoue la résistance que l'on pouvait raisonnablement attendre de la victime (ATF 148 IV 234 consid. 3.3; 133 IV 49 consid. 4 et l'arrêt cité). 
 
1.3. En l'espèce, à la suite de l'autorité de première instance, la cour cantonale a tenu pour établi qu'en mars ou en avril 2016, le recourant avait forcé l'intimée, malgré le refus exprimé, à entretenir avec lui un rapport sexuel complet, ainsi que deux autres rapports lors desquels il avait pénétré son vagin avec ses doigts (cf. let. B.b supra).  
 
1.4. Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir versé dans l'arbitraire et d'avoir violé le principe in dubio pro reo en retenant la version présentée par l'intimée, au-delà de tout doute raisonnable.  
Son argumentation consiste toutefois essentiellement à remettre en cause la crédibilité de l'intimée, sans revenir sur le contexte des faits et sans discuter plus avant les variations ou autres incohérences entachant ses propres déclarations. Ne démontrant à cet égard pas l'arbitraire de l'appréciation cantonale dans son résultat, sa démarche, appellatoire, est irrecevable dans le recours en matière pénale. 
 
1.5. On relève pour le surplus qu'au moment d'examiner la crédibilité des parties, la cour cantonale a analysé leurs déclarations de manière précise et approfondie, en s'attachant au contexte des faits, soit notamment aux spécificités liées à la personne de l'intimée.  
 
1.5.1. La cour cantonale n'était ainsi pas empêchée de considérer que le recourant avait tenu des propos pauvres en détails, peu réalistes et fluctuants, qui ne s'avéraient pas crédibles, en particulier s'agissant de ses explications quant à la nature des rapports avec l'intimée.  
A ce sujet, le recourant avait soutenu que l'intimée et lui avaient entretenu une relation cachée de quelques mois, ayant débuté spontanément et sans lendemain, à l'instar de ce qui pouvait survenir entre n'importe quels collègues se découvrant une attirance sur le lieu de travail. C'était l'intimée qui lui avait manifesté son envie en l'embrassant et en lui touchant le cou. Ils se seraient ensuite limités à des frottements "sexe contre sexe", en principe avec un préservatif, le recourant ne parvenant pas à avoir d'érection. 
Cela étant, la version du recourant apparaissait peu convaincante. 
Outre le caractère peu compatible de tels rapports avec la grossesse de l'intimée, une relation de cette nature était difficilement concevable, compte tenu non seulement de l'écart d'âge de 27 ans entre les parties, mais surtout de l'inexpérience sexuelle et du handicap de l'intimée. D'une part, cette dernière aurait forcément eu besoin de plus de temps et d'accompagnement pour entamer des rapports intimes dont elle n'aurait manifestement pas pris l'initiative. Il n'existait, d'autre part, au dossier aucun élément (tels que des messages, des cadeaux échangés ou des rencontres allant au-delà d'un verre ou d'un "kebab" partagé au restaurant voisin) accréditant l'existence d'une relation sincère aussi peu soutenue fût-elle. 
D'âge mûr, sexuellement expérimenté et ne souffrant d'aucun handicap ou déficit intellectuel, le recourant avait pour le reste fait des déclarations variables. Il avait fluctué dans ses propos en lien avec le début de sa prétendue relation avec l'intimée (variant du courant de l'année 2015 au début 2016) et s'était montré particulièrement confus s'agissant des lieux et des circonstances de leurs ébats, respectivement de leur premier rapport sexuel. Affirmant pourtant avoir été amoureux de l'intimée, il s'était désintéressé d'elle dès la fin du mois de mai 2016, soit après qu'elle était partie de l'immeuble où ils logeaient tous les deux. Malgré les sentiments allégués, le recourant n'avait jamais pris de ses nouvelles ou cherché à l'aider et lui avait bassement manqué d'égard lorsqu'il avait appris sa grossesse (cf. arrêt attaqué, consid. 4.3 et 4.6 p. 23 et 27 s.). 
 
 
1.5.2. Dans ces circonstances, il n'était pas critiquable pour l'autorité précédente de constater que les déclarations de l'intimée étaient, pour leur part, globalement plus crédibles que celles du recourant, d'autant qu'elles étaient suffisamment détaillées, cohérentes dans leur ensemble et susceptibles d'être rattachées à des éléments du dossier.  
La cour cantonale pouvait en effet apprécier librement les accusations de la victime (cf. consid. 1.1.1 supra) et forger sa conviction en les mettant en perspective avec l'ensemble des éléments au dossier, y compris avec les déclarations peu convaincantes du recourant.  
Aussi, son appréciation globale ne prête pas le flanc à la critique. 
 
1.5.3. La cour cantonale pouvait en particulier, sans arbitraire, écarter la thèse du recourant selon laquelle l'intimée avait menti en affirmant avoir été violée pour dissimuler une relation "adultère" qui n'aurait jamais pu être acceptée par sa famille.  
Au vu de la réaction de ses parents, l'intimée avait en effet vainement cherché à obtenir le mariage avec le recourant, voire la reconnaissance de l'enfant par celui-ci. Face au refus du recourant, elle s'était trouvée seule, enceinte, auprès de sa tante et devait trouver un nouveau logement, étant rejetée par sa famille. Cette situation l'avait alors amenée à rompre ses liens avec ses parents et à intégrer, en janvier 2017, le Foyer E.________ où elle avait été suivie par une socio-éducatrice notamment. 
Dans ce contexte, il pouvait être constaté que l'intimée n'avait plus d'intérêt à mentir lors de sa première audition par la police le 9 février 2017, étant encore observé que l'initiative de déposer plainte pénale n'était pas venue d'elle (cf. arrêt attaqué, ad "En fait" let. B.c, B.e et B.n p. 4 s. et 12, ainsi que le consid. 4.5.1 p. 25 s.). 
 
1.5.4. Au demeurant, la thèse du mensonge pouvait être rejetée en procédant à l'appréciation des déclarations de l'intimée en lien avec les spécificités liées à sa personne.  
D'intelligence limitée, sexuellement inexpérimentée et sans connaissance particulière à ce sujet - ce que le recourant ne conteste pas -, l'intimée s'était efforcée de livrer au mieux sa version des faits, nonobstant son handicap, et avait manifesté à chacune de ses auditions de la tristesse ou de la colère. Son récit comportait des détails non seulement sur les circonstances des rapports sexuels en cause (lieu, habits portés par les parties, irruption du recourant dans sa chambre), mais également sur les gestes précis du recourant, son attitude, ses paroles, ainsi que son ressenti à elle (soit sa peur, ses douleurs, sa faiblesse physique, les odeurs d'alcool, la durée de l'acte et sa perception des écoulements post-coïtaux). 
Le récit des faits par l'intimée reflétait ainsi ce qu'elle avait vécu, sans confusion ou déformation possibles, conscientes ou inconscientes (cf. arrêt attaqué, consid. 4.3 et 4.4.1 p. 23 s.). 
 
1.5.5. Compte tenu du contexte des faits, soit en particulier de l'état de vulnérabilité de la victime qui, handicapée et souffrant de divers troubles, était isolée socialement, il pouvait être considéré que les variations et autres incohérences dans le récit de l'intimée n'affectaient pas la crédibilité de ses accusations.  
Dans cette configuration, les variations ou imprécisions dans les propos de l'intimée pouvaient s'expliquer par le temps écoulé depuis les faits et par l'aspect émotionnel important de l'affaire. Surtout, elles pouvaient avoir été non seulement la conséquence de sa déficience intellectuelle, compliquant la structure de sa pensée et la cohérence de ses déclarations, mais aussi le résultat de ses difficultés d'expression couplées à celles de l'interprète chargé de correctement appréhender ses propos. 
Ces éléments expliquaient pourquoi les déclarations de l'intimée, telles que protocolées dans les différents procès-verbaux, pouvaient paraître manquer de consistance ou de réalisme sur certains points. Il en allait ainsi des variations ou imprécisions concernant le nombre d'agressions subies (trois ou quatre fois), leurs lieux (dans la chambre ou dans le garage pour l'une d'elles), le moment de la journée où ces dernières s'étaient produites (le matin ou le soir) et les habits qu'elle portait lors de la première fois (linge de bain ou pyjama), voire lorsqu'elle avait déclaré s'être rendue à l'hôpital après les faits alors qu'il n'existait pas de trace d'une quelconque consultation à ce moment (cf. arrêt attaqué, consid. 4.3 et 4.4.2 p. 23 ss). 
Contrairement à ce que soutient le recourant, une telle appréciation, fondée sur le contexte particulier des faits, n'est pas arbitraire. 
 
1.5.6. Selon cette même approche, la cour cantonale n'était au reste pas empêchée de considérer que le désaveu de l'assistante de l'ambassadeur, F.________ - qui, appelée à témoigner en appel, avait nié avoir entendu l'intimée se plaindre du comportement du recourant -, n'induisait pas que l'intimée avait sciemment menti sur le fait d'avoir informé son employeur ou son assistante du comportement du recourant et que, partant, sa crédibilité serait sujette à caution.  
L'intimée se trouvait au moment des faits incapable d'appréhender ce qu'elle avait vécu, ignorant même qu'un homme pût pénétrer une femme avec son sexe. Elle n'avait jamais utilisé les termes de viol ou d'agression avant son audition par la police. Le dévoilement n'avait effectivement pu se produire qu'ultérieurement, soit au plus tard le 9 février 2017, durant un entretien avec une collaboratrice du Service de protection des mineurs. Alertée par les termes "je ne voulais pas" utilisés en lien avec les circonstances entourant la naissance de l'enfant, cette dernière avait invité l'intimée à préciser ce qu'elle entendait par là. C'était alors que l'intimée avait réussi à exprimer que "c'était la première fois" et que le père de l'enfant l'avait forcée. 
Autrement dit, l'intimée n'était pas en mesure, peu après les faits, de mettre des mots sur ce qu'elle avait subi, à savoir le fait qu'elle avait eu plusieurs rapports sexuels avec le recourant, dont un rapport complet à tout le moins, et qu'elle avait été violée dès lors que ces actes lui avaient été imposés par la force. Par conséquent, il était impossible de déterminer en quels termes l'intimée aurait abordé le sujet avec son employeur ou son assistante, voire avec tout autre membre de la Mission permanente. Il était fort probable que son interlocuteur ne l'eût pas comprise et qu'il eût depuis lors oublié un tel échange, d'autant plus que la communication avec l'intimée était difficile en raison de son handicap et de ses troubles (cf. arrêt attaqué, ad "En fait" let. B.e B.l.a p. 4 et 11, ainsi que le consid. 4.5.2 p. 26 s.). 
 
1.5.7. Au regard de ce qui précède, la cour cantonale pouvait considérer qu'aucun autre élément n'était propre à conférer une quelconque crédibilité aux dénégations du recourant.  
Contrairement à ce dont il se prévaut, on ne discerne pas en quoi l'absence de mesures prises par l'intimée pour empêcher toute récidive du recourant, voire la prétendue abstinence de ce dernier à l'alcool, démontreraient ipso facto qu'elle a menti.  
En outre, la cour cantonale n'était pas tenue d'établir comment le recourant s'était introduit dans la chambre de l'intimée dès lors que cet élément n'était pas pertinent. Vu sa fonction de concierge ou le fait qu'il avait lui-même occupé ce logement, le recourant avait au demeurant pu utiliser une clé en sa possession ou amener la victime, vulnérable et isolée, à lui ouvrir la porte. 
Enfin, si le dossier contient deux documents des 1er septembre 2016 et 30 janvier 2017 mentionnant que des hommes auraient profité de la naïveté sexuelle de l'intimée, ceux-ci n'ont pas été établis par la victime elle-même, mais par des tiers, dont un collaborateur de Caritas à Genève, G.________. Entendu en qualité de témoin, ce dernier a par ailleurs indiqué ne plus se rappeler si on lui avait parlé d'une ou de plusieurs personnes ayant abusé de la naïveté de la victime. Cela étant, toujours est-il que la cour cantonale pouvait, à tout le moins implicitement, écarter ces éléments qui n'étaient pas inconciliables avec la version de l'intimée, vu les troubles de communication constatés. 
 
1.6. Dans ses développements sous l'angle du droit d'être entendu, le recourant soutient encore que l'audition des parents de l'intimée était nécessaire eu égard aux pressions qu'ils avaient pu lui faire subir en raison de sa grossesse extraconjugale, lesquelles démontreraient qu'elle avait finalement décidé de dénoncer des relations sexuelles non consenties. L'audition de la tante de l'intimée s'imposait, pour sa part, au motif que cette dernière connaissait bien les parties, que l'intimée logeait chez elle durant sa grossesse et qu'elle avait déclaré comprendre ce que sa nièce vivait. Enfin, l'audition de l'ambassadeur et de son épouse se justifiait, dès lors que l'intimée avait dit s'être tournée vers eux pour se plaindre du comportement du recourant.  
 
1.6.1. Ce faisant, le recourant se limite pour l'essentiel à proposer sa propre appréciation anticipée des preuves requises, sans démontrer en quoi celle de la cour cantonale serait entachée d'arbitraire. Dans cette mesure, sa démarche est appellatoire et partant irrecevable dans le recours en matière pénale.  
 
1.6.2. Au reste, la cour cantonale a tenu compte des réquisitions présentées par le recourant et n'a rejeté celles-ci qu'au terme d'une appréciation anticipée des preuves, exempte d'arbitraire.  
Premièrement, les circonstances entourant la relation de l'intimée avec ses parents ont été prises en considération, de sorte que leur audition n'apparaissait pas nécessaire, d'autant que l'initiative de porter plainte ne venait pas d'elle (cf. consid. 1.6.3 supra).  
 
Si, deuxièmement, la tante pouvait certes avoir été témoin des faits de manière indirecte, cet élément demeurait toutefois neutre à la lecture des considérants cantonaux. La cour cantonale, qui n'en a tiré aucune conséquence, pouvait rejeter l'audition de la tante sans verser dans l'arbitraire, étant relevé que le recourant n'indique pas en quoi ce moyen de preuve pourrait lui être favorable. 
Il n'était dernièrement pas critiquable pour la cour cantonale de refuser d'auditionner l'ancien ambassadeur et son épouse. Rien n'indiquait en effet que l'intimée eût opéré une distinction entre son employeur (soit l'ambassadeur et son épouse) et l'assistante de ce dernier, F.________ (cf. arrêt attaqué, consid. 4.4.2 p. 24). En tout état, à supposer que l'ambassadeur et son épouse démentent avoir été personnellement informés par l'intimée des agissements du recourant, cela n'apparaît pas susceptible d'ébranler la conviction des juges cantonaux qui, en dépit du désaveu de l'assistante de l'ambassadeur - ayant exclu avoir été la confidente du moindre problème entre les parties -, ont estimé que la crédibilité de l'intimée n'était pas sujette à caution (cf. consid. 1.6.6 supra).  
 
1.7. En définitive, il n'apparaît pas, au regard de ce qui précède, que l'appréciation des preuves opérée par la cour cantonale soit empreinte d'arbitraire. Celle-ci pouvait accorder une crédibilité accrue aux déclarations de l'intimée, par rapport à celles du recourant, en s'attachant au contexte particulier des faits. Sans violer la présomption d'innocence, elle pouvait ainsi retenir qu'en mars ou en avril 2016, le recourant avait utilisé sa force physique pour contraindre l'intimée, malgré le refus exprimé par cette dernière, à entretenir avec lui un rapport sexuel complet, ainsi que deux autres rapports lors desquels il avait pénétré son vagin avec ses doigts.  
Infondés, les griefs du recourant doivent être rejetés dans la mesure de leur recevabilité. 
 
1.8. Pour le surplus, le recourant ne conteste pas la qualification juridique des actes commis. Les éléments constitutifs tant objectifs que subjectifs étant remplis (cf. art. 189 al. 1 et 190 al. 1 CP), sa condamnation pour contraintes sexuelles et pour viol n'est pas contraire au droit fédéral. Elle doit dès lors être confirmée.  
 
2.  
Le recourant ne consacre enfin aucune critique quant à la peine qui lui a été infligée. 
 
3.  
Les conclusions du recourant tendant à l'octroi d'indemnités pour les dépens cantonaux et à titre de tort moral sont sans objet en tant qu'elles supposent l'acquittement des infractions reprochées, qu'il n'obtient pas. 
 
4.  
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Le recourant, qui succombe, supporte les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision. 
 
 
Lausanne, le 9 mars 2023 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
Le Greffier : Fragnière