2C_244/2023 10.01.2024
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_244/2023  
 
 
Arrêt du 10 janvier 2024  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz et Hänni. 
Greffier : M. Rastorfer. 
 
Participants à la procédure 
1. A.________, B.________ et C.________, 
2. B.________, 
3. C.________, 
4. D.________, 
tous les quatre représentés par Me Gilles Robert-Nicoud, avocat, 
recourants, 
 
contre  
 
Police cantonale du commerce du canton de Vaud, chemin des Boveresses 155, case postale 50, 1066 Epalinges, 
intimée. 
 
Objet 
Police du commerce; demande de reconsidération, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton 
de Vaud, Cour de droit administratif et public, du 15 mars 2023 (GE.2022.0238). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________, B.________ et C.________ (ci-après: la Société) est une société en nom collectif ayant pour but l'exploitation du café-restaurant "A.________" (ci-après: l'établissement). Les associés en sont B.________ et C.________.  
En 2020, D.________ était titulaire de l'autorisation d'exercer pour l'établissement. L'autorisation d'exploiter appartenait à la Société. 
 
A.b. Entre juin et juillet 2020, plusieurs rapports établis par la Police cantonale du commerce vaudoise (ci-après: la Police du commerce) ont fait état de manquements constatés au sein de l'établissement en lien avec les dispositions légales fédérales et cantonales de lutte contre l'épidémie de coronavirus. Il a en substance été observé, le 20 juin 2020, un dépassement de l'heure d'ouverture motivé par les "temps difficiles" en raison de l'épidémie notamment; le 22 juillet 2020, un nouveau dépassement de l'heure d'ouverture motivé par la volonté de "renflouer les caisses" vu la "période compliquée"; et enfin, le 31 juillet 2020, une absence de plan de protection consultable, un traçage incomplet des clients, une surcapacité de la terrasse et une forte suspicion de prêt de licence notamment.  
 
A.c. Le 8 octobre 2020, la Police du commerce a prononcé un avertissement avec menace de fermeture contre la Société pour des faits s'étant déroulés le 3 octobre 2020 au sein de l'établissement où, lors d'un contrôle, il avait été relevé que l'obligation du port du masque par le personnel - dont certains de ses membres avait trinqué à deux reprises avec des clients - n'était pas respectée, que l'obligation du port du masque par les clients dès leur entrée dans l'établissement n'était également pas respectée, et qu'il en avait été de même des obligations de maintenir une distance entre les groupes de clients et de consommer uniquement assis.  
 
A.d. Dans la nuit du 3 au 4 novembre 2020, il a été constaté que des débordements avaient eu lieu dans l'établissement, que des clients se trouvaient debout sans porter le masque et consommaient debout, que de nombreux clients ne respectaient pas les distances sociales et que de nombreux clients dansaient dans l'établissement.  
 
A.e. Par décision du 17 février 2021, sur la base de l'ensemble des faits constatés entre le 20 juin et la nuit du 3 au 4 novembre 2020 précités, la Police du commerce a notamment ordonné le retrait de la licence et la fermeture de l'établissement à compter de la date de ladite décision, le retrait de l'autorisation d'exercer de D.________ pour une durée de 5 ans à compter de la décision, soit jusqu'au 16 février 2026, et refusé toute nouvelle demande d'autorisation en son nom pour cette même période, ainsi que le retrait de l'autorisation d'exploiter de la Société pour une durée de 5 ans à compter de la décision, soit jusqu'au 16 février 2026, et refusé toute nouvelle demande d'autorisation d'exploiter au nom de la Société, ainsi qu'à celui de B.________ et de C.________, ou de toute autre personne morale à laquelle ceux-ci pourraient être associés.  
 
A.f. Le 26 février 2021, B.________, C.________ et D.________ ont requis la reconsidération de la décision précitée. Ils évoquaient en particulier la situation financière de la Société et le fait que le retrait durable de l'autorisation d'exploiter signifiait la fermeture définitive de l'établissement.  
 
A.g. Par décision sur reconsidération du 3 mars 2021, la Police du commerce a notamment ordonné le retrait de la licence et la fermeture de l'établissement pour une durée de 4 mois à compter du 17 février 2021, soit jusqu'au 16 juin 2021, la réouverture étant soumise au dépôt d'une nouvelle demande d'autorisation d'exercer et à l'octroi d'une nouvelle licence d'établissement, le retrait de l'autorisation d'exercer de D.________ pour une durée de 3 ans à compter de la décision, soit jusqu'au 16 février 2024, et refusé toute nouvelle demande d'autorisation en son nom pour cette même période, ainsi que le retrait de l'autorisation d'exploiter de la Société pour une durée de 4 mois à compter de la décision, soit jusqu'au 16 juin 2021, et refusé toute nouvelle demande d'autorisation d'exploiter au nom de la Société, ainsi qu'à celui de B.________ et de C.________, ou de toute autre personne morale à laquelle ceux-ci pourraient être associés.  
Cette décision n'a pas fait l'objet d'un recours et est entrée en force. 
 
A.h. B.________, C.________ et D.________ ont été dénoncés aux autorités pénales en raison des faits reprochés sur le plan administratif.  
Par dispositif du jugement rendu le 11 juin 2021, le Tribunal de police de Lausanne a acquitté les intéressés du chef d'accusation de contravention à l'Ordonnance COVID-19 situation particulière. Les faits objets de la procédure pénale ne ressortent pas du dispositif précité. 
Par ordonnance du 31 mai 2022, le Ministère public lausannois n'est pas entré en matière sur les faits s'étant déroulés les 20 juin et 3 novembre 2020. S'agissant des premiers, l'autorité pénale a retenu leur réalisation mais a toutefois considéré que la mesure administrative de fermeture durant 4 mois de l'établissement et le manque à gagner consécutif étaient plus répressifs qu'une condamnation pénale avec sursis, ce qui rendait inexistant l'intérêt à punir. S'agissant des faits du 3 novembre 2020, le Ministère public retenait que plusieurs clients s'étaient réunis à l'intérieur de l'établissement, sans y respecter les mesures sanitaires en vigueur relatives à la capacité d'accueil, aux distances de sécurité et au port du masque notamment. L'autorité pénale a toutefois retenu, à la suite des auditions des prévenus, que ceux-ci avaient pris le maximum de précautions et appliqué les mesures en vigueur, et que l'établissement n'endossait aucune responsabilité dans le mouvement de foule des clients. Il s'agissait de l'accumulation d'actes individuels engagés à la seule initiative des clients souhaitant profiter d'une dernière soirée avant la fermeture des bars et restaurants. 
 
A.i. Le 3 août 2022, la Société et D.________ ont demandé la reconsidération de la décision sur reconsidération du 3 mars 2021 de la Police du commerce, en se fondant en substance sur les décisions pénales des 11 juin 2021 et 31 mai 2022 précitées.  
 
B.  
Par décision du 26 août 2022, la Police du commerce a déclaré la demande de reconsidération irrecevable. Par acte du 27 septembre 2022, la Société, B.________, C.________ et D.________ ont recouru contre ce prononcé auprès du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal cantonal) qui, par arrêt du 15 mars 2023, a rejeté le recours et a confirmé la décision attaquée. 
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, la Société, B.________, C.________ et D.________ demandent au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, de réformer l'arrêt du Tribunal cantonal du 15 mars 2023 en ce sens que la décision du 26 août 2022 de la Police du commerce est annulée et que l'autorité précitée est invitée à entrer en matière sur la demande de réexamen du 3 août 2022; subsidiairement, d'annuler l'arrêt cantonal attaqué et de renvoyer la cause au Tribunal cantonal pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
Le Tribunal cantonal conclut au rejet du recours en se référant aux considérants de son arrêt. La Police du commerce formule des observations et conclut au rejet du recours. Les recourants n'ont pas déposé d'observations finales. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 147 I 333 consid. 1). 
 
1.1. L'arrêt attaqué est une décision finale (art. 90 LTF), rendue en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF) dans une cause concernant au fond le prononcé de mesures administratives fondées sur la loi vaudoise sur les auberges et les débits de boissons du 26 mars 2002 (LADB/VD; BLV 935.31) et qui relève donc du droit public au sens de l'art. 82 let. a LTF (cf. arrêts 2C_244/2021 du 8 juillet 2021 consid. 1; 2C_220/2017 du 25 août 2017 consid. 1). Il peut donc en principe faire l'objet d'un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral, aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée.  
 
1.2. Conformément à l'art. 89 al. 1 LTF, a la qualité pour recourir en matière de droit public quiconque a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire (let. a); est particulièrement atteint par la décision ou l'acte normatif attaqué (let. b); et a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification (let. c). Selon la jurisprudence, cet intérêt doit être actuel et exister tant au moment du dépôt du recours qu'à celui où l'arrêt est rendu (ATF 142 I 135 consid. 1.3.1 et les arrêts cités).  
En l'occurrence, en tant que la décision sur reconsidération du 3 mars 2021 - dont la demande de reconsidération de celle-ci a été déclarée irrecevable par décision du 26 août 2022 de la Police du commerce, ce prononcé ayant par la suite été confirmé par l'arrêt attaqué - ordonne le retrait de licence et la fermeture de l'établissement, ainsi que le retrait de l'autorisation d'exploiter de la recourante 1, jusqu'au 16 juin 2021, force est de constater que l'intérêt actuel de la recourante 1, des recourants 2 et 3 (en tant qu'associés de la société en nom collectif titulaires des droits et obligations de cette dernière, dont toute décision rendue à son encontre produit ainsi des effets à leur égard, si bien qu'ils ont la qualité de partie sous cet angle; cf. HANS-UELI VOGT, in Basler Kommentar, Obligationenrecht II, 6e éd. 2023, n° 5 ad art. 562 CO; MEINHARDT MARCEL/TRANCHET MARCEL, in Kommentar zum Schweizerischen Obligationenrecht, 4e éd. 2023, n° 4 ad art. 562 CO; KARIN MÜLLER, in Handkommentar zum Schweizer Privatrecht, 3e éd. 2016, n° 3c ad art. 562 CO) et du recourant 4 (en tant que gérant de l'établissement) à obtenir l'annulation de la décision attaquée sur ces points faisait déjà défaut au moment du dépôt du recours devant le Tribunal fédéral. 
En revanche, en tant que ladite décision ordonne également le retrait de l'autorisation d'exercer du recourant 4 jusqu'au 16 février 2024 et le refus de toute nouvelle demande d'autorisation à son nom pour cette même période, il convient d'admettre que ce dernier possède encore à ce jour un intérêt actuel au recours au sens de l'art. 89 al. 1 LTF. Quant aux recourants 1, 2 et 3, la décision du 3 mars 2021 leur refuse également toute nouvelle demande d'autorisation d'exploiter chacun en leur propre nom. La durée de cette mesure n'est toutefois pas précisée si bien qu'il n'est pas clair si celle-ci est d'une durée indéterminée - auquel cas les intéressés disposeraient encore d'un intérêt actuel au recours - ou si elle n'était valable que jusqu'à la fin de la mesure de retrait de l'autorisation d'exploiter de la recourante 1, soit jusqu'au 16 juin 2021 - auquel cas ils ne bénéficieraient plus d'un tel intérêt. Cela étant dit, la question de la qualité pour recourir des recourants 1, 2 et 3 peut rester ouverte en l'espèce, compte tenu de l'issue du recours (cf. infra consid. 4). 
 
1.3. Pour le surplus, déposé en temps utile compte tenu des féries (cf. art. 46 al. 1 let. a et 100 al. 1 LTF) et dans les formes requises (art. 42 LTF), le recours est recevable.  
 
2.  
 
2.1. Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral contrôle librement le respect du droit fédéral, qui comprend les droits de nature constitutionnelle (cf. art. 95 let. a et 106 al. 1 LTF). Sauf dans les cas cités expressément à l'art. 95 LTF, le recours en matière de droit public ne peut toutefois pas être formé pour violation du droit cantonal (ou communal) en tant que tel. En revanche, il est possible de faire valoir que l'application du droit cantonal (ou communal) consacre une violation du droit fédéral, en particulier qu'elle est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. ou contraire à un autre droit fondamental (ATF 145 I 108 consid. 4.4.1). Le Tribunal fédéral n'examine cependant le moyen tiré de la violation de droits fondamentaux que si ce grief a été invoqué et motivé de manière précise par le recourant (art. 106 al. 2 LTF; ATF 146 I 62 consid. 3; 142 III 364 consid. 2.4).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits constatés par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), hormis dans les cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF. Selon l'art. 97 al. 1 LTF, le recours ne peut critiquer les constatations de fait que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire (art. 9 Cst.) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (ATF 145 V 188 consid. 2). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, la partie recourante doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées. Les faits et critiques invoqués de manière appellatoire sont irrecevables (ATF 145 I 26 consid. 1.3).  
En l'espèce, dès lors que les recourants présentent une argumentation partiellement appellatoire, en complétant librement l'état de fait retenu dans l'arrêt attaqué, sans invoquer ni l'arbitraire, ni une constatation manifestement inexacte des faits, le Tribunal fédéral ne peut pas en tenir compte. Il en ira en particulier ainsi de l'allégation selon laquelle, après avoir approché le Chef du Département de l'économie du canton de Vaud "par l'intermédiaire d'une personnalité bien connue", celui-ci leur aurait fait savoir qu'il était disposé à reconsidérer la décision de la Police du commerce du 17 février 2021 à condition qu'ils retirent le recours qu'ils avaient interjeté contre l'avertissement prononcé à leur encontre le 8 octobre 2020, si bien qu'ils auraient été "contraints" de se soumettre à la décision sur reconsidération du 3 mars 2021 "sans possibilité de recours, sous la menace d'un dommage bien plus grave". Le Tribunal fédéral statuera donc exclusivement sur la base des faits tels qu'ils ressortent de l'arrêt attaqué. 
 
3.  
Le litige consiste à vérifier si c'est à juste titre que le Tribunal cantonal a confirmé la décision de la Police du commerce déclarant irrecevable la demande de reconsidération de sa décision du 3 mars 2021, elle-même rendue en reconsidération de sa décision du 17 février 2020 qui prononçait, sur le fond, des mesures administratives à l'encontre des recourants en application de la LADB/VD. 
 
 
4.  
Les recourants dénoncent une application arbitraire du droit cantonal en matière de reconsidération des décisions administratives, ainsi que la violation de l'art. 29 al. 2 Cst. 
 
4.1. Appelé à revoir l'application ou l'interprétation d'une norme sous l'angle de l'arbitraire, le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité cantonale de dernière instance que si celle-ci apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain. En revanche, si l'application de la loi défendue par l'autorité cantonale ne s'avère pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la législation en cause, cette interprétation sera confirmée, même si une autre solution paraît également concevable, voire préférable (cf. ATF 148 II 106 consid. 4.6.1; 145 II 32 consid. 5.1). La décision de l'instance précédente doit être arbitraire non seulement dans sa motivation, mais aussi dans son résultat (cf. ATF 148 II 106 consid. 4.6.1; 146 IV 88 consid. 1.3.1).  
 
4.2. Les autorités administratives sont tenues de réexaminer leurs décisions si une disposition légale expresse ou si une pratique administrative constante les y oblige (arrêt 2C_203/2020 du 8 mai 2020 consid. 4.1). Dans le canton de Vaud, l'art. 64 al. 2 de la loi vaudoise sur la procédure administrative du 28 octobre 2008 (LPA/VD; BLV 173.36) traite des motifs de réexamen des décisions et dispose que l'autorité entre en matière si l'état de fait à la base de la décision s'est modifié dans une mesure notable depuis lors (let. a), si le requérant invoque des faits ou des moyens de preuve importants qu'il ne pouvait pas connaître lors de la première décision ou dont il ne pouvait pas ou n'avait pas de raison de se prévaloir à cette époque (let. b) ou si la première décision a été influencée par un crime ou un délit (let. c). Selon l'art. 65 al. 1 LPA, si le requérant entend invoquer l'un des moyens mentionnés à l'art. 64 let. b et c, il doit déposer sa demande dans les nonante jours dès la découverte dudit moyen.  
Le Tribunal fédéral a en outre déduit des garanties générales de procédure de l'art. 29 al. 1 et 2 Cst. l'obligation pour l'autorité administrative de se saisir d'une demande de réexamen lorsque les circonstances se sont modifiées dans une mesure notable depuis la première décision attaquée ou lorsque le requérant invoque des faits ou des moyens de preuve importants qu'il ne connaissait pas ou qu'il avait été dans l'impossibilité de faire valoir dans la procédure antérieure (cf. ATF 146 I 185 consid. 4.1; 138 I 61 consid. 4.3; 136 II 177 consid. 2.1). Le réexamen de décisions administratives entrées en force ne doit toutefois pas être admis trop facilement. Il ne saurait en particulier servir à remettre sans cesse en cause des décisions exécutoires ou à détourner les délais prévus pour les voies de droit ordinaires (cf. ATF 143 II 1 consid. 5.1; 136 II 177 consid. 2.1; 120 Ib 42 consid. 2b; arrêt 2C_337/2022 du 3 août 2022 consid. 5.2). 
 
4.3. La modification notable des circonstances de fait comme motif de réexamen concerne les vrais nova ("echte Noven"), à savoir des faits survenus après la prise de la décision litigieuse (cf. ATF 144 V 35 consid. 5.2.4; 143 V 19 consid. 1.2; 143 III 42 consid. 4.1; arrêt 2C_337/2017 du 10 juillet 2017 consid. 3.1). Un réexamen pour ce motif n'entre toutefois en ligne de compte que dans la mesure où il s'agit d'adapter un état de fait permanent qui se prolonge dans le temps notamment, mais non pas un état de fait révolu qui n'est plus susceptible d'évoluer (cf. ATF 138 I 61 consid. 4.5; 136 II 177 consid. 2.2.1; 97 I 748 consid. 4b; arrêts 2C_414/2021 du 3 septembre 2021 consid. 2.2.3; 1C_185/2019 du 12 novembre 2019 consid. 4.1; cf. aussi GEROLD STEINMANN/BENJAMIN SCHINDLER/DAMIAN WYSS, in Die Schweizerische Bundesverfassung, St. Galler Kommentar, 4e éd. 2023, n° 54 ad art. 29 Cst.). Selon la doctrine, en procédure administrative, un jugement pénal postérieur à une décision administrative ne constitue pas un fait nouveau justifiant le réexamen de ladite décision, mais une appréciation différente du même état de fait relevant du droit (cf. BENOÎT BOVAY ET AL., in Procédure administrative vaudoise annotée, 2e éd. 2021, n° 4.2.1.1 ad art. 64 LPA/VD et les références citées).  
L'invocation de faits ou moyens de preuve importants que le requérant ne connaissait pas ou était dans l'impossibilité de faire valoir dans la procédure antérieure comme autre motif de réexamen concerne, quant à lui, les pseudo-nova ("unechte Noven"), à savoir des faits antérieurs au jugement ou, plus précisément, ceux qui se sont produits jusqu'au moment où des allégations de faits étaient encore recevables dans la procédure principale (cf. ATF 143 III 272 consid. 2.2; 138 I 61 consid. 4.5). Ce motif de réexamen correspond, par analogie, à celui ouvrant la voie de la révision au sens des art. 66 al. 2 let. a PA et 123 al. 2 let. a LTF (cf. KARIN SCHERRER REBER, in Praxiskommentar Verwaltungsverfahrensgesetz, 3e éd. 2023, n° 16 ad art. 66 PA; MARTINE DANG/MINH SON NGUYEN, in Commentaire romand de la Constitution fédérale, 2021, n° 82 ad art. 29 Cst.; BENOÎT BOVAY ET AL., op.cit., n° 4.3.1 ad art. 64 LPA/VD). Les moyens de preuve visés doivent également avoir déjà existé lorsque le jugement a été rendu ou, plus précisément, jusqu'au dernier moment où ils pouvaient encore être introduits dans la procédure principale (cf. ATF 143 III 272 consid. 2.2). Les faits ou moyens de preuve, qui doivent par ailleurs être importants en ce sens qu'ils sont susceptibles d'influencer le sort de la décision contestée dans un sens favorable au requérant, ne doivent avoir été découverts qu'après coup et ne pas avoir pu être invoqués dans la procédure principale, malgré la diligence du requérant (cf. ATF 144 V 258 consid. 2.1; 143 III 272 consid. 2.2; arrêt 2C_414/2021 précité consid. 2.2.5). On n'admettra qu'avec retenue qu'il était impossible à une partie d'alléguer un fait déterminant ou de produire un moyen de preuve dans la procédure antérieure, car la procédure de réexamen ne doit pas servir à remédier aux omissions de la partie requérante dans la conduite du procès (cf. arrêts 4F_7/2020 du 22 février 2021 consid. 5.5.2, non publié in ATF 147 III 238; 2C_414/2021 précité 2021 consid. 2.2.3), ni servir à éluder les dispositions légales sur les délais de recours (cf. ATF 136 II 177 consid. 2.1; 120 Ib 42 consid. 2b; arrêt 2C_315/2021 du 25 mars 2921 consid. 4) ou l'absence de recours. 
 
4.4. Les recourants, pour autant qu'on les comprenne, soutiennent en substance que l'état de fait à la base de la décision sur reconsidération du 3 mars 2021 s'est notablement modifié au sens de l'art. 64 al. 2 let. a LPA/VD du fait du prononcé des décisions pénales des 11 juin 2021 et 31 mai 2022. Ils affirment ensuite n'avoir jamais eu la possibilité de présenter leur version des faits devant la Police du commerce au vu de la manière "arbitraire" dont elle aurait mené la procédure, en particulier en refusant de suspendre celle-ci jusqu'à droit connu sur la procédure pénale, de sorte qu'il fallait admettre que le motif de réexamen de l'art. 64 al. 2 let. b LPA/VD était également réalisé. Selon les recourants, c'est donc à tort que le Tribunal cantonal a retenu que les conditions de recevabilité de leur demande de réexamen n'étaient pas remplies.  
 
4.5. Dans l'arrêt attaqué, la cour cantonale a tout d'abord retenu que les recourants n'établissaient d'aucune manière en quoi la situation de fait prévalant à la base de la décision de la Police du commerce du 3 mars 2021 s'était modifiée d'une manière notable depuis lors, si bien que le motif de réexamen de l'art. 64 al. 2 let. a LPA/VD ne pouvait pas être retenu. Quant au motif prévu à l'art. 64 al. 2 let. b LPA/VD, la cour cantonale a retenu que les recourants - dont l'argumentation consistait à se plaindre d'une constatation insuffisante des faits par la Police du commerce - perdaient de vue que les faits retenus par la décision pénale du 31 mai 2020 et par la décision sur reconsidération du 3 mars 2021 étaient identiques s'agissant des événements survenus le 20 juin 2020. Quant aux événements du 3 novembre 2021, si les faits retenus par l'autorité pénale et la Police du commerce divergeaient en ce qui concernait les mesures de précaution prises par les recourants, il n'en demeurait pas moins que de tels faits étaient connus de ces derniers si bien qu'ils auraient pu s'en prévaloir dans la procédure administrative. Or, les intéressés ne démontraient pas qu'ils avaient été empêchés de le faire, respectivement qu'ils n'avaient pas saisi l'importance desdits faits. Les conditions de l'art. 64 al. 2 let. b LPA/VD n'étaient ainsi pas réalisées. Enfin, s'agissant de la décision pénale du 11 juin 2021, qui selon les recourants concernait les incidents du 3 octobre 2020, non seulement le fait que l'existence d'une infraction pénale y était niée ne suffisait pas à réaliser les conditions de l'art. 64 al. 2 let. b LPA/VD, mais le délai pour invoquer un tel moyen selon l'art. 65 al. 1 LPA/VD était depuis longtemps dépassé.  
 
4.6. Le raisonnement de l'autorité précédente ne prête pas le flanc à la critique.  
 
4.6.1. S'agissant du motif de réexamen prévu à l'art. 64 al. 2 let. a LPA/VD, à savoir la modification notable des circonstances de fait à la base de la décision litigieuse, les recourants perdent manifestement de vue que les décisions pénales dont ils se prévalent constituent certes de vraies nova, mais que l'état de fait sur lequel celles-ci sont fondées ne concerne nullement des faits survenus après la prise de la décision du 3 mars 2021. En effet, il ressort des constatations cantonales, d'une manière qui lie le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF; cf. supra consid. 2.2), que les décisions pénales en question portent sur les événements qui se sont déroulés les 20 juin, 3 octobre (selon les recourants) et 3 novembre 2020 au sein de l'établissement, et il n'apparaît pas - et les recourants ne prétendent d'ailleurs pas le contraire - que celles-ci auraient établi des faits qui se seraient réalisés après le 3 mars 2021. Au surplus, il est constant que l'état de fait à la base de la décision sur reconsidération du 3 mars 2021 concerne des incidents ponctuels et révolus dans le temps, et non pas un état de fait permanent et ouvert susceptible d'évoluer avec le temps, à l'instar du statut d'une personne sous l'angle du droit des étrangers (cf. ATF 146 I 185 consid. 4.2; 136 II 177 consid. 2.2.1), de sorte que la voie du réexamen pour le motif ici analysé n'entre quoi qu'il en soit pas en ligne de compte.  
 
 
4.6.2. Quant au motif de réexamen prévu à l'art. 64 al. 2 let. b LPA/VD, à savoir la découverte de faits ou de moyens de preuve importants qui n'étaient pas connus lors de la première décision ou dont le requérant ne pouvait pas ou n'avait pas de raison de se prévaloir à cette époque, on relèvera d'emblée que les recourants admettent que la Police du commerce leur a offert la possibilité d'exercer leur droit d'être entendus avant le prononcé de la décision sur reconsidération du 3 mars 2021 (cf. p. 11 du recours). Ils ne soutiennent par ailleurs pas qu'ils auraient été empêchés de présenter une preuve ou que l'autorité précitée leur aurait refusé l'administration d'une preuve offerte. Dans ces conditions, on ne voit manifestement pas en quoi les recourants auraient, comme ils le prétendent, été dans l'impossibilité, malgré toute leur diligence, de faire valoir leurs arguments quant aux événements survenus les 20 juin, 3 octobre et 3 novembre 2020. Le fait, selon eux, que la Police du commerce n'aurait eu "cure [de leurs] explications" et n'aurait "pas cherché à établir les faits", ce qui ressortirait du refus "arbitraire" de cette autorité de donner suite à leur demande de suspension de la procédure administrative jusqu'à droit connu sur l'issue de la procédure pénale, relève de l'appréciation respectivement de l'établissement des faits qui a été effectué dans le cadre de la décision du 3 mars 2021. Un grief y relatif - comme celui, au demeurant, d'un prétendu arbitraire dans le refus de suspension de la procédure administrative - devait donc être soulevé dans un recours à l'encontre de ladite décision auprès du Tribunal cantonal. Or, les intéressés ne l'ont pas attaquée. Il faut rappeler ici que les demandes de nouvel examen ne peuvent servir à éluder les dispositions légales sur les délais de recours ou l'absence de recours par le requérant, ni à remédier aux omissions de ce dernier dans la conduite de la procédure (cf. supra consid. 4.3). Quant à l'argumentation des recourants selon laquelle ils auraient été "factuellement privés de toute voie de droit" à l'encontre de la décision du 3 mars 2021 en raison des pressions qu'ils auraient subi par le Chef du Département de l'économie du canton de Vaud, celle-ci est, comme on l'a vu (cf. supra consid. 2.2), irrecevable.  
Enfin, c'est en vain que les intéressés se prévalent de l'arrêt publié aux ATF 139 II 95 pour reprocher au Tribunal cantonal de les avoir privés de la possibilité de réexaminer la décision litigieuse "à la lumière des faits établis par le juge pénal", et en particulier de l'ordonnance de non-entrée en matière 31 mai 2022 ayant considéré que les recourants avaient, en amont des faits s'étant déroulés le 3 novembre 2020, pris toutes les mesures adéquates du point de vue sanitaire. D'une part, comme déjà mentionné précédemment, non seulement les recourants ne démontrent pas qu'ils n'auraient pas eu la possibilité d'exposer leur version des faits sur ce point devant la Police du commerce, mais ils ne démontrent également pas - et on ne le voit pas non plus - en quoi il serait insoutenable de retenir, comme l'ont fait les juges précédents, que de tels éléments de fait leur étaient déjà connus et accessibles à l'époque du prononcé de la décision du 3 mars 2021. D'autre part, ils perdent de vue que si le Tribunal fédéral a considéré, à l'ATF 139 II 95, que les autorités administratives ne peuvent, en principe, s'écarter des constatations de fait d'un jugement pénal, cela ne concerne que les jugements pénaux entrés en force rendus antérieurement à la décision administrative envisagée (cf. ATF 139 II 95 consid. 3.2). Or, tel n'est pas le cas en l'espèce, dans la mesure où il est constant que les décisions pénales dont se prévalent les recourants ont justement été rendues postérieurement à la décision litigieuse du 3 mars 2021. Ils perdent enfin également de vue que, pour être admissibles en tant que pseudo-nova, les moyens de preuve invoqués doivent avoir avoir déjà existé lors de la première décision (cf. supra consid. 4.3) ce qui, comme on vient de le voir, n'est ici pas le cas. 
 
4.7. Il suit des considérations qui précèdent que le Tribunal cantonal n'a pas procédé à une application arbitraire de l'art. 64 al. 2 let. a et b LPA/VD ni violé les garanties de l'art. 29 Cst. en confirmant que les conditions permettant d'ouvrir un droit au réexamen de la décision du 3 mars 2021 n'étaient en l'espèce pas réunies.  
 
5.  
Pour le surplus, les recourants ne prétendent pas que le Tribunal cantonal aurait appliqué de manière arbitraire l'art. 65 al. 1 LPA/VD relatif au délai pour pouvoir se prévaloir du motif de réexamen prévu par l'art. 64 al. 2 let. b LPA/VD notamment. La question n'a donc pas à être examinée (art. 106 al. 2 LTF). 
 
6.  
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours dans la mesure où il est recevable (cf. consid. 1.2). Succombant, les recourants doivent supporter les frais judiciaires, solidairement entre eux (art. 66 al. 1 et 5 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'500 fr., sont mis à la charge des recourants, solidairement entre eux. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué au mandataire des recourants, à la Police cantonale du commerce du canton de Vaud et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public. 
 
 
Lausanne, le 10 janvier 2024 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
Le Greffier : H. Rastorfer