6B_658/2022 24.05.2023
Wichtiger Hinweis:
Diese Website wird in älteren Versionen von Netscape ohne graphische Elemente dargestellt. Die Funktionalität der Website ist aber trotzdem gewährleistet. Wenn Sie diese Website regelmässig benutzen, empfehlen wir Ihnen, auf Ihrem Computer einen aktuellen Browser zu installieren.
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_658/2022  
 
 
Arrêt du 24 mai 2023  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mme et MM. les Juges fédéraux 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, 
Denys et Hurni. 
Greffière : Mme Rettby. 
 
Participants à la procédure 
Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens VD, 
recourant, 
 
contre  
 
1. A.________, 
représenté par Me François Roux, avocat, 
2. B.B.________, 
représentée par Me Imed Abdelli, avocat, 
 
intimés. 
 
Objet 
Homicide par négligence; appréciation des preuves, 
 
recours contre le jugement de la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 24 février 2022 (n° 74 PE17.013046-SOO/AWL). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par jugement du 8 octobre 2021, le Tribunal de police de l'arrondissement de l'Est vaudois a déclaré A.________ coupable d'homicide par négligence, l'a condamné à une peine pécuniaire de 90 jours-amende à 100 fr. le jour, assortie du sursis et d'un délai d'épreuve de deux ans, ainsi qu'à une amende de 1'500 fr., peine privative de liberté de substitution de 15 jours, l'a condamné à verser un montant de 10'000 fr. (valeur échue) à B.B.________ au titre de réparation du tort moral et dit qu'il n'y avait pas lieu au versement d'une indemnité en faveur de A.________. Il a statué sur le sort des objets séquestrés et mis une partie des frais à la charge de A.________, le solde étant laissé à la charge de l'État. 
 
B.  
Statuant le 24 février 2022, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois a admis l'appel formé par A.________ contre ce jugement et a rejeté l'appel joint de B.B.________. Elle a acquitté A.________ d'homicide par négligence et a renvoyé B.B.________ à agir par la voie civile. 
En substance, la décision cantonale repose sur les faits suivants. 
Le 9 juillet 2017 vers 19h50 à U.________, sur la route V.________, dans le sens de la descente en direction de W.________, C.B.________ cheminait le long du muret bordant la chaussée à droite, accompagné de son épouse B.B.________ qui marchait devant lui. Au même instant, au guidon de son cycle D.________, A.________ descendait ce tronçon à une vitesse oscillant entre 49 et 50 km/h. Peu avant un premier virage à droite, A.________ a resserré sa trajectoire pour se rapprocher du bord droit de la chaussée. Au sortir de la courbe, il a soudain aperçu C.B.________ à une vingtaine de mètres devant lui alors que celui-ci était en train de traverser la route de la droite vers la gauche. A.________ a crié pour attirer l'attention du piéton, a freiné légèrement jusqu'à atteindre une vitesse d'environ 46 km/h, et a choisi de conserver sa trajectoire à droite afin de passer entre le piéton et le muret, plutôt que de contourner l'obstacle par la gauche. Cependant, concurremment, C.B.________ s'est retourné pour regarder la chaussée et, lorsqu'il a aperçu le cycliste, a décidé de rebrousser chemin pour regagner le bord droit de la chaussée d'où il venait. C'est alors qu'une collision s'est produite entre l'avant du cycle piloté par A.________ et le flanc droit du piéton C.B.________. Les deux hommes ont chuté lourdement sur la chaussée. Consécutivement à l'accident, A.________ et C.B.________ ont été acheminés au CHUV, où C.B.________ est décédé le même jour à 23h50 en raison de lésions traumatiques cranio-cérébrales et thoraco-abdominales situées principalement du côté droit. A.________ a présenté une contusion sur le côté gauche, une foulure du pouce et des fractures au niveau de deux côtes et du bassin, nécessitant deux opérations, une hospitalisation et une période d'arrêt de travail. B.B.________ a déposé plainte et s'est constituée partie civile, sans chiffrer ses conclusions, le 31 juillet 2017. 
 
C.  
Le Ministère public vaudois forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre le jugement du 24 février 2022. Il conclut, principalement à la réforme du jugement attaqué en ce sens que l'appel de A.________ est rejeté, que le jugement rendu le 8 octobre 2021 par le tribunal de police est confirmé et que les frais d'appel et de la procédure devant le Tribunal fédéral sont intégralement mis à la charge de celui-ci. Subsidiairement, il conclut à l'annulation du jugement entrepris et au renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
 
D.  
Invités à se déterminer, A.________ a conclu principalement à l'irrecevabilité du recours du ministère public, subsidiairement au rejet de celui-ci, tandis que la cour cantonale a renoncé à se déterminer et s'est référée aux considérants de sa décision. B.B.________ a conclu, avec suite de frais et dépens, principalement à l'annulation du jugement entrepris et, partant, à la confirmation du jugement du 8 octobre 2021, subsidiairement au renvoi de la cause à la cour cantonale pour une nouvelle décision au sens des considérants. Par ailleurs, elle requiert l'octroi de l'assistance judiciaire, l'exonération de l'avance de frais et la désignation de Me Imed Abdelli en tant qu'avocat ainsi que la production de l'intégralité de la procédure cantonale en mains du Tribunal fédéral. Il ressort de ses motifs que B.B.________ "appuie les explications et conclusions" prises par le ministère public dans son recours. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
En application de l'art. 81 al. 1 let. b ch. 3 LTF, l'accusateur public a qualité pour former un recours en matière pénale. Savoir quelle autorité au sein d'un canton constitue l'accusateur public est une question qui doit se résoudre à l'aune de la LTF. Lorsqu'il existe un ministère public compétent pour la poursuite de toutes les infractions sur l'ensemble du territoire, seule cette autorité aura la qualité pour recourir au Tribunal fédéral. En revanche, savoir qui, au sein de ce ministère public, a la compétence de le représenter est une question d'organisation judiciaire, soit une question qui relève du droit cantonal (ATF 142 IV 196 consid. 1.5.2 p. 200; arrêt 6B_52/2022 du 16 mars 2023 consid. 3). Dans le canton de Vaud, l'art. 27 al. 2 de la loi du 19 mai 2009 sur le Ministère public (LMPu/VD; RS/VD 173.21) dispose que le procureur général ou ses adjoints sont seuls compétents pour saisir le Tribunal fédéral. 
Le recours en matière pénale est une voie de réforme (art. 107 al. 2 LTF). Le recourant ne peut se borner à demander l'annulation de la décision et le renvoi de la cause à l'autorité cantonale, mais doit également, sous peine d'irrecevabilité, prendre des conclusions sur le fond du litige. Il n'est fait exception à ce principe que lorsque le Tribunal fédéral, s'il admettait le recours, ne serait pas en mesure de statuer lui-même sur le fond et ne pourrait que renvoyer la cause à l'autorité cantonale (ATF 137 II 313 consid. 1.3 p. 317; 134 III 379 consid. 1.3 p. 383; 133 III 489 consid. 3.1 p. 489 s.; ar rêt 6B_660/2022 du 7 mars 2023 consid. 1). 
En l'espèce, le mémoire de recours est signé par le Procureur général du canton du Vaud. Le recourant conclut à la réforme du jugement cantonal en ce sens que l'appel de l'intimé 1 est rejeté et que le jugement de première instance est confirmé. On parvient à comprendre, sur le vu également des motifs du recours, qu'il entend obtenir la réforme du jugement attaqué, dans le sens d'une condamnation de l'intimé 1 pour homicide par négligence. Cela suffit pour satisfaire aux exigences de forme déduites de l'art. 42 al. 1 et 2 LTF. Le grief d'irrecevabilité que formule l'intimé 1 est partant rejeté et le recours est recevable. 
 
2.  
Le recourant conteste l'acquittement de l'intimé 1 du chef d'homicide par négligence. 
 
2.1. Aux termes de l'art. 117 CP, celui qui, par négligence, aura causé la mort d'une personne sera puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire. Selon l'art. 12 al. 3 CP, agit par négligence quiconque, par une imprévoyance coupable, commet un crime ou un délit sans se rendre compte des conséquences de son acte ou sans en tenir compte. L'imprévoyance est coupable quand l'auteur n'a pas usé des précautions commandées par les circonstances et par sa situation personnelle.  
Une condamnation pour homicide par négligence implique la réalisation de trois éléments constitutifs, à savoir le décès d'une personne, une négligence, ainsi qu'un rapport de causalité naturelle et adéquate entre les deux premiers éléments (ATF 122 IV 145 consid. 3 p. 147; arrêts 6B_1295/2021 du 16 juin 2022 consid. 2.1; 6B_388/2020 du 30 septembre 2021 consid. 4.1). 
Pour qu'il y ait négligence, il faut tout d'abord que l'auteur ait, d'une part, violé les règles de prudence que les circonstances lui imposaient pour ne pas excéder les limites du risque admissible et que, d'autre part, il n'ait pas déployé l'attention et les efforts que l'on pouvait attendre de lui pour se conformer à son devoir (ATF 143 IV 138 consid. 2.1 p. 140; 135 IV 56 consid. 2.1 p. 64 et les références citées). Un comportement viole le devoir de prudence lorsque l'auteur, au moment des faits, aurait pu, compte tenu de ses connaissances et de ses capacités, se rendre compte de la mise en danger d'autrui et qu'il a simultanément dépassé le risque admissible (ATF 143 IV 138 consid. 2.1 p. 140; 135 IV 56 consid. 2.1 p. 64 et les références citées). S'il y a eu violation des règles de la prudence, encore faut-il que celle-ci puisse être imputée à faute, c'est-à-dire que l'on puisse reprocher à l'auteur, compte tenu de ses circonstances personnelles, d'avoir fait preuve d'un manque d'effort blâmable (ATF 145 IV 154 consid. 2.1 p. 158; 135 IV 56 consid. 2.1 p. 64). Lorsqu'il existe des normes de sécurité spécifiques qui imposent un comportement déterminé pour prévenir les accidents, le devoir de prudence se définit en premier lieu à l'aune de ces normes (ATF 143 IV 138 consid. 2.1 p. 140; 135 IV 56 consid. 2.1 p. 64). Dans le domaine du trafic routier, on se référera donc aux règles de la circulation (ATF 126 IV 91 consid. 4a/aa p. 92; arrêt 6B_1280/2019 du 5 février 2020 consid. 4.1). 
Il faut en outre qu'il existe un rapport de causalité entre la violation fautive du devoir de prudence et le décès de la victime. Il y a rupture du lien de causalité adéquate, l'enchaînement des faits perdant sa portée juridique, si une autre cause concomitante - par exemple une force naturelle, le comportement de la victime ou celui d'un tiers - propre au cas d'espèce constitue une circonstance tout à fait exceptionnelle ou apparaît si extraordinaire que l'on ne pouvait pas s'y attendre. Cependant, cette imprévisibilité de l'acte concurrent ne suffit pas en soi à interrompre le lien de causalité adéquate. Il faut encore que cet acte ait une importance telle qu'il s'impose comme la cause la plus probable et la plus immédiate de l'événement considéré, reléguant à l'arrière-plan tous les autres facteurs qui ont contribué à amener celui-ci, notamment le comportement de l'auteur (ATF 134 IV 255 consid. 4.4.2 p. 265 s.; 133 IV 158 consid. 6.1 p. 168; cf. aussi ATF 143 III 242 consid. 3.7 p. 250). 
En matière de circulation routière, le Tribunal fédéral a jugé que la présence inattendue d'un piéton traversant une autoroute n'était pas plus imprévisible que celle d'animaux errants ou blessés, de victimes d'accidents, d'objets tombés sur la chaussée ou de véhicules immobilisés, de tels obstacles n'étant pas considérés si rares qu'on puisse en faire abstraction sur une autoroute (ATF 100 IV 279 consid. 3d p. 284). Dans un arrêt concernant un piéton cheminant sur une route cantonale vers 22h30, ce comportement n'a pas été considéré comme étant exceptionnel au point d'interrompre le lien de causalité entre le comportement fautif du conducteur automobile et le décès de la victime (arrêt 6B_1023/2010 du 3 mars 2011 consid. 3.2). Dans un arrêt concernant un piéton qui s'était engagé sur la chaussée, avait laissé tomber un sac de pommes de terres et s'était accroupi pour les recueillir, il fallait retenir l'existence du lien de causalité adéquate; même si l'attitude de la victime était étrange, elle n'était pas entièrement imprévisible (ATF 106 IV 391 consid. 2b) p. 395). 
 
2.2.  
 
2.2.1. Conformément à l'art. 1 al. 2 de la Loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR; RS 741.01), les cyclistes sont soumis aux règles de la circulation (art. 26 à 57a) sur toutes les routes servant à la circulation publique; les autres usagers de la route ne sont soumis à ces règles que sur les routes ouvertes entièrement ou partiellement aux véhicules automobiles ou aux cycles.  
S'agissant des véhicules et leurs conducteurs, la LCR distingue, dans son titre 2, les véhicules automobiles et leurs conducteurs (art. 7 ss), des véhicules sans moteurs et leurs conducteurs (art. 18 ss). L'art. 32 LCR concerne la circulation des véhicules. D'autres règles s'appliquent aux autres usagers de la route, soit les piétons, les cavaliers et les animaux (art. 49 ss LCR; cf. aussi art. 50 s. de l'Ordonnance du 13 novembre 1962 sur les règles de la circulation routière [OCR; RS 741.11]). La règle de l'art. 32 al. 1 LCR s'applique à tous les conducteurs de véhicules, c'est-à-dire aux conducteurs de véhicules à moteur et aux cyclistes, contrairement aux limitations de vitesse prévues à l'art. 32 al. 2 LCR (cf. art. 1 al. 2 1 ère phrase LCR; HANS GIGER, SVG Kommentar, Strassenverkehrsgesetz mit weiteren Erlassen, 9 e éd. 2022, n. 8 ad art. 19 LCR et n. 14 ad art. 32 LCR; cf. BUSSY/RUSCONI/JEANNERET ET AL., Code suisse de la circulation routière, 4ème éd., 2015, n. 1.3.2 ad art. 1 LCR; NIGGLI/PROBST/WALDMANN, Basler Kommentar Strassenverkehrsgesetz, 2014, n. 24 ad art. 1 LCR). Par ailleurs, les cyclistes doivent accorder la priorité aux piétons sur les passages pour piétons et adapter leur vitesse en conséquence (art. 6 al. 1 OCR; HANS GIGER, op. cit., n. 8 ad art 19 LCR),  
 
2.2.2. D'après l'art. 31 al. 1 LCR, le conducteur devra rester constamment maître de son véhicule de façon à pouvoir se conformer aux devoirs de la prudence. L'art. 32 al. 1 LCR dispose que la vitesse doit toujours être adaptée aux circonstances, notamment aux particularités du véhicule et du chargement, ainsi qu'aux conditions de la route, de la circulation et de la visibilité. Aux endroits où son véhicule pourrait gêner la circulation, le conducteur est tenu de circuler lentement et, s'il le faut, de s'arrêter, notamment aux endroits où la visibilité n'est pas bonne, aux intersections qu'il ne peut embrasser du regard, ainsi qu'aux passages à niveau. L'art. 4 al. 1 OCR précise que le conducteur ne doit pas circuler à une vitesse qui l'empêcherait de s'arrêter sur la distance à laquelle porte sa visibilité; lorsque le croisement est malaisé, il doit pouvoir s'arrêter sur la moitié de cette distance.  
L'observation de la règle de l'adaptation de la vitesse aux "circonstances" est la première condition de la maîtrise du véhicule. S'il veut pouvoir se conformer aux devoirs de la prudence comme le prescrit l'art. 31 al. 1 LCR, le conducteur devra, avant tout, adapter sa vitesse, pour qu'elle ne constitue ni une cause d'accident ni une gêne excessive pour la circulation (BUSSY/RUSCONI/JEANNERET ET AL., op. cit., n. 1.1 et 1.2 ad art. 32 LCR). Il n'existe pas de vitesse adaptée en soi, ni de vitesse excessive en soi. C'est la prudence commandée par les circonstances qui constitue le cadre de l'adaptation de la vitesse. Il s'agit d'une notion concrète. Il faut tenir compte de l'ensemble des circonstances (idem). 
La règle de l'art. 32 al. 1 LCR implique notamment qu'on ne peut circuler à la vitesse maximale autorisée que si les conditions de la route, du trafic et de visibilité le permettent (ATF 121 IV 286 consid. 4b p. 291; arrêt 6B_1280/2019 du 5 février 2019 consid. 4.4). Il faut notamment réduire sa vitesse dans un virage à visibilité réduite (BUSSY/RUSCONI/JEANNERET ET AL., op. cit., no 1.6 ad art. 32 LCR). 
La règle de la possibilité d'arrêt sur la distance de visibilité, et en fonction des risques prévisibles, est la règle fondamentale de l'adaptation de la vitesse (BUSSY/RUSCONI/JEANNERET ET AL., op. cit., n. 1.16 ad art. 32 LCR). La règle de l'art. 4 al. 1 OCR est valable quel que soit le lieu où circule le véhicule, notamment dans une courbe ou un virage masqué (ATF 93 IV 59 consid. 2 p. 61; BUSSY/RUSCONI/JEANNERET ET AL., op. cit., n. 1.17 s. ad art. 32 LCR). Un conducteur qui s'engage dans un tournant à visibilité retreinte, même sur une route de grand transit, doit compter avec la présence d'un obstacle sur la zone de la route qu'il n'aperçoit pas encore, par exemple un véhicule très lent, une voiture automobile arrêtée par une panne ou un accident et non signalée d'une manière conforme aux art. 4 al. 1 LCR et 23 al. 1 OCR (ATF 89 IV 23 consid. 2 p. 25; arrêt 6S.457/2004 du 21 mars 2005 consid. 2.4; HANS GIGER, op. cit., n. 22 ad art 32 LCR; BUSSY/RUSCONI/JEANNERET ET AL., op. cit., n. 1.18 et 1.26 ad art. 32 LCR).  
 
2.2.3. Le juge apprécie librement une expertise et n'est, dans la règle, pas lié par les conclusions de l'expert. Toutefois, il ne peut s'en écarter que lorsque des circonstances ou des indices importants et bien établis en ébranlent sérieusement la crédibilité; il est alors tenu de motiver sa décision de ne pas suivre le rapport d'expertise (ATF 142 IV 49 consid. 2.1.3 p. 53). Inversement, si les conclusions d'une expertise judiciaire apparaissent douteuses sur des points essentiels, le juge doit recueillir des preuves complémentaires pour tenter de dissiper ses doutes. A défaut, en se fondant sur une expertise non concluante, il pourrait commettre une appréciation arbitraire des preuves et violer l'art. 9 Cst. (ATF 144 III 264 consid. 6.2.3 p. 273).  
 
2.3. Se référant notamment à l'expertise technique du 24 août 2020, la cour cantonale a considéré qu'il ne faisait aucun doute que la victime était en train de traverser la route lorsqu'il avait été heurté, que son attention avait été attirée par le cri du cycliste et qu'il était soudainement revenu sur ses pas avant d'être heurté. Elle a ensuite déterminé si l'intimé 1 circulait à une vitesse inadaptée aux circonstances. En l'occurrence, la route était sèche. Il faisait encore jour et le tronçon était limité à 80 km/h. Le vélo n'était pas muni de compteur de vitesse. Selon l'expertise, l'intimé 1 n'aurait pas pu s'arrêter avant le piéton. Cela étant, un cycliste avait d'autres choix que l'arrêt pour éviter un obstacle, son véhicule n'occupant pas tout l'espace de la voie droite de la chaussée. Un piéton cheminant sur le côté droit pouvait être dépassé sans difficulté; un piéton immobilisé pouvait être contourné. S'il se trouvait plus proche du centre de la chaussée, il était visible plus tôt, comme ce serait le cas d'un véhicule à moteur occupant toute la voie de droite. L'intimé 1, qui était un cycliste expérimenté, n'avait que très peu de raisons de s'attendre à la présence de piétons à cet endroit de la chaussée, à savoir cheminant dans le sens de la descente, le long d'un muret se situant du côté droit de la route, sans aucune mise à l'abri possible, sauf à se coller au mur, alors qu'ils auraient dû, en toute logique et conformément à la règle, se tenir sur le bord gauche de la chaussée (cf. art. 49 al. 1 LCR). Il était encore plus invraisemblable qu'un piéton ait choisi de traverser la route à cet endroit-là, à savoir dans une courbe, où la visibilité était réduite. Pour la cour cantonale, dans le cas présent, l'intimé 1 avait vu le piéton, l'avait averti de sa présence, avait freiné légèrement et, constatant que celui-ci était en train de traverser, avait décidé de passer par la droite. Il avait choisi d'éviter la victime en effectuant une manoeuvre de contournement, raison pour laquelle il n'avait pas freiné de manière importante. Or, en l'espèce, même si le cycliste avait effectué un freinage beaucoup plus prononcé - sans nécessairement vouloir s'arrêter avant la position du piéton comme s'il y avait une ligne sur la chaussée - on ne pouvait affirmer avec certitude que la collision n'aurait pas pu être évitée. L'expertise technique ne permettait pas de trancher ce point. Selon la cour cantonale, l'accident était dû au fait malheureux que les protagonistes avaient effectué au même instant le même choix de trajectoire. Celui du piéton résultait d'un changement d'avis de dernière minute, après que le cycliste avait évalué la situation, signalé sa présence et choisi l'option du contournement. Si le cycliste devait s'attendre à des obstacles imprévus, il ne devait pas nécessairement s'attendre à ce que ces obstacles bougent dans des directions inattendues et illogiques compte tenu de la configuration des lieux, la vision et le vécu d'un cycliste n'étant de plus pas comparables à ceux d'un conducteur de voiture. Enfin, il y avait lieu de souligner que l'intimé 1 était un cycliste expérimenté; du fait de ses nombreuses heures de pratique, il avait déjà été confronté à des situations de danger qu'il avait su appréhender par le passé. Il avait été en mesure d'estimer la situation et d'identifier le piéton comme étant un adulte, et non un enfant, de sorte qu'il avait autant moins de raison de s'attendre à un revirement de trajectoire. Il s'ensuivait qu'on ne pouvait pas affirmer que la vitesse de l'intimé 1 était inadaptée aux circonstances, compte tenu des particularités de ce type de véhicule, de sorte qu'aucune faute de circulation ne pouvait lui être reprochée. La cour cantonale a conclu que les conditions de l'art. 117 CP n'étaient pas réalisées.  
 
2.4. Une expertise a été ordonnée et l'expert, F.________, a rendu son rapport d'expertise technique le 24 août 2020 (cf. pièces 76 et 77 du dossier cantonal), ainsi qu'un rapport complémentaire le 18 février 2021 (cf. pièces 92 et 93 du dossier cantonal).  
La cour cantonale n'a pas résumé les conclusions du rapport d'expertise technique et du rapport complémentaire. Il en ressort notamment que la collision a eu lieu dans le 2ème segment d'une grande courbe à droite; la chaussée était bordée à droite par un mur de pierre et à gauche par une barrière (cf. rapport du 24 août 2020, p. 5 et annexe au rapport du 24 août 2020, p. A-3). La position de collision par rapport à la chaussée ne pouvait pas être déterminée précisément. Le choc s'était produit environ à la hauteur d'une petite rampe d'accès aux vignes située sur la droite dans la courbe. La largeur de la chaussée était d'environ 5.2 m (cf. rapport du 24 août 2020, p. 7, 18). Le cycliste circulait à une vitesse de 49 à 50 km/h dans les secondes précédant l'accident. La vitesse de collision se situait aux environs de 46-47 km/h (cf. rapport du 24 août 2020, p. 2, 10, 20, 23). Si la diminution de vitesse était bien due à un freinage et non au choc, on ne pouvait pas qualifier ce freinage - décélération de 1.1 m/s2 - de freinage d'urgence (ibidem, p. 23). Il existait deux types d'évitement, soit l'évitement spatial, qui impliquait que le cycliste aurait pu s'arrêter avant l'endroit où le choc s'était produit, et l'évitement temporel, lors duquel un laps de temps supplémentaire dû à une diminution de la vitesse du cycliste et/ou un mouvement plus rapide du piéton permettrait à celui-ci de ne plus se trouver sur la trajectoire du cycliste à la hauteur de la zone de choc (ibidem, p. 21). A la vitesse à laquelle circulait le cycliste peu avant le choc (49 à 50 km/h), il lui serait resté 17 m au maximum pour effectuer une manoeuvre d'évitement, en l'espèce soit un freinage soit une tentative d'évitement du piéton en modifiant sa trajectoire (ibidem, p. 20 s.). En cas de freinage, à la vitesse de 49 km/h, il aurait fallu 40 m au cycliste pour pouvoir s'immobiliser, le freinage (pleine efficacité) débutant après 19.5 m parcourus. Ainsi, bien qu'un freinage ait été possible, il aurait été impossible de s'arrêter avant la zone de choc (le piéton ayant pu être aperçu au maximum à 31 m, soit dans le cas le plus favorable où celui-ci se trouvait à 2 m du bord droit de la chaussée). La vitesse de collision aurait encore été de 29 km/h malgré un freinage (ibidem, p. 3, 18, 21). Quant à l'évitement temporel, à la vitesse de 49-50 km/h, en effectuant un freinage, cela n'aurait laissé qu'environ 0.25 s de plus au piéton pour se déplacer, soit environ 22 cm, ce qui aurait probablement été insuffisant pour qu'il s'éloigne suffisamment de la zone de choc; il ne pouvait être exclu que le choc aurait été moins direct dans ces conditions (ibidem, p. 2). La vitesse maximale qui aurait permis au cycliste de s'immobiliser avant la zone de choc, dans les conditions les plus favorables (distance de visibilité de 31 m), aurait été de 41.6 km/h (ibidem, p. 21, 24). Mais comme la décélération lors du freinage aurait sans doute été moindre en cas de réaction au danger que lors des essais, on devait plutôt admettre une vitesse maximale de 37.5 km/h environ (ibidem, p. 3, 24). En circulant à la vitesse constante de 41.6 km/h, le cycliste mettrait 4.13 s pour arriver à la hauteur du point de choc; le piéton aurait ainsi eu 1.5 s supplémentaires pour s'éloigner de la zone de choc, respectivement ne plus se trouver sur la trajectoire du cycliste (ibidem, p. 21). On pouvait conclure qu'au vu de la vitesse à laquelle circulait le cycliste, il lui aurait été impossible de s'arrêter avant la zone de choc. La réduction de vitesse aurait été au maximum 19 km/h environ, pour une vitesse de collision minimale d'environ 30 km/h (ibidem, p. 3). Ainsi, le choix d'effectuer une manoeuvre d'évitement au lieu d'un freinage était compréhensible (ibidem, p. 3). Aux questions complémentaires de savoir si le cycliste aurait pu sans trop de peine ajuster sa trajectoire pour être en mesure d'éviter le piéton, si celui-ci était resté statique, l'expert a répondu qu'il ne voyait aucune raison vraisemblable qui aurait pu empêcher le cycliste de modifier quelque peu sa trajectoire si la situation l'avait exigé, vers la gauche ou vers la droite (cf. rapport complémentaire du 18 février 2021, p. 11). En l'absence totale de réaction de la part du cycliste (soit en effectuant aucun freinage) et sans immobilisation du piéton, il n'était pas certain que le choc aurait pu être évité (ibidem, p. 12). Les conclusions du rapport technique du 24 août 2020 demeuraient valables à l'aune du complément d'expertise (idem). 
 
2.5. A titre liminaire, il y a lieu de traiter le point soulevé par l'intimé 1 dans ses déterminations, soit de savoir si les art. 32 LCR et 4 OCR visent aussi le comport ement des cyclistes et peuvent "réellement s'appliquer de facto" à ceux-ci. A ce titre, il fait valoir que les particularités du cycle devraient être prises en compte. Un cycliste freinant de manière appuyée risquerait d'être projeté par-dessus son cycle, contrairement à un automobiliste. Un cycliste circulant à vitesse très réduite ne risquerait pas de diminuer la fluidité du trafic au sens de l'art. 4 al. 5 OCR.  
Les cyclistes font partie intégrante de la circulation routière. A ce titre, ils doivent respecter les règles de la circulation (cf. art. 1 al. 2 1 ère phrase LCR). Tout comme les conducteurs des véhicules à moteur, il appartient donc aux cyclistes de respecter le principe de l'adaptation de leur vitesse aux circonstances, prévu à l'art. 32 al. 1 LCR, soit notamment aux particularités de leurs véhicules. L'art. 4 OCR, qui précise l'art. 32 al. 1 LCR, leur est par conséquent également applicable. L'application des dispositions précitées aux cyclistes ressort également de la systématique de l'OCR, qui prévoit, dans sa partie 1, des règles de circulation (des règles générales [art. 2 ss, dont l'art. 4 OCR], des règles applicables à certaines routes [art. 35 ss] ou à des catégories spéciales de véhicules [dont les cycles, art. 42 ss], etc.) et, dans sa partie 2, des règles applicables aux autres usagers de la route, soit les piétons, les engins assimilés à des véhicules (dont les cycles ne font pas partie, cf. RO 2002 1931, p. 1931), les cavaliers et animaux (art. 46 ss OCR). Au demeurant, il n'est ni nécessaire ni pertinent en l'espèce de déterminer si un cycliste circulant à vitesse réduite ne risque pas de diminuer la fluidité du trafic au sens de l'art. 4 al. 5 OCR, de sorte que cette question peut rester ouverte. Les autres critiques formulées par l'intimé 1 à cet égard seront examinées ci-après en tant que de besoin.  
 
2.6. Le raisonnement de la cour cantonale, qu'il n'est pas aisé de suivre dans la mesure où il mélange les questions liées à l'analyse d'un éventuel comportement fautivement négligent de la part de l'intimé 1 et celles du rapport de causalité (et son éventuelle interruption) entre la violation fautive du devoir de prudence et le décès de la victime, ne saurait être suivi.  
La cour cantonale a retenu que, même si le cycliste avait effectué un freinage "beaucoup plus prononcé", sans nécessairement vouloir s'arrêter, on ne pouvait affirmer avec certitude que la collision n'aurait pas pu être évitée, l'expertise ne permettant pas, selon elle, de trancher ce point. Il ressort pourtant clairement de l'expertise qu'à la vite sse à laquelle circulait l'intimé 1, le choc était inévitable même si celui-ci avait freiné efficacement, ou avait tenté de contourner le piéton, sauf s'il était resté immobile, ce qui n'avait pas été le cas. Autrement dit, à teneur de l'expertise, un freinage efficace n'aurait pas permis d'éviter en soi le choc, aspect dont la cour cantonale ne pouvait s'écarter sans arbitraire. S'agissant de l'évitement temporel, l'expertise conclut qu'en effectuant un freinage efficace, cela n'aurait laissé qu'environ 0.25 s de plus au piéton pour se déplacer, soit environ 22 cm, ce qui aurait été "probablement insuffisant" pour qu'il s'éloigne suffisamment de la zone de choc. L'expertise tranche donc également ce point, contrairement à ce qu'a retenu la cour cantonale. Cependant, il est vrai qu'à cet égard on ne peut affirmer avec certitude que la collision n'aurait pas pu être évitée, puisque l'expertise conclut seulement que le freinage aurait été "probablement insuffisant" pour que le piéton s'éloigne suffisamment. Peu importe, toutefois, puisqu'il demeure qu'en l'occurrence l'intimé 1 n'a pas freiné efficacement. 
Il ressort de l'expertise que le choc a eu lieu au sortir du 2ème segment d'une grande courbe à droite. Selon les considérations de l'expert, le choc était inévitable à la vitesse à laquelle circulait le cycliste et la vitesse de l'intimé 1 était inadaptée aux circonstances concrètes de l'espèce. Sur la base des éléments mis en avant dans l'expertise, il convient de retenir que l'intimé 1 a violé son devoir de prudence découlant des règles de la circulation routière en n'adoptant pas une vitesse adéquate aux circonstances et à la visibilité dont il disposait, compte tenu de la courbe sur laquelle il circulait. Il devait en effet compter avec la possibilité de se trouver face à un danger au sortir de la courbe, laquelle restreignait sa visibilité et donc aussi l'anticipation possible. Or, so n allure ne lui permettait pas de s'arrêter sur la distance visible. L'intimé 1 connaissait la route pour y être déjà passé. Il ne pouvait dès lors ignorer que sa visibilité était limitée en raison de la courbe. La prudence commandée par les circonstances aurait dû l'amener à ralentir et adapter sa vitesse à la visibilité dont il disposait. 
L'intimé 1 a agi fautivement car rien ne l'aurait empêché de se conformer à ses devoirs, à plus forte raison qu'il s'agit, selon l'état de fait cantonal, d'un cycliste expérimenté bénéficiant de nombreuses heures de pratique. 
L'intimé 1 souligne que l'expert aurait admis que le choix d'effectuer une manoeuvre d'évitement était compréhensible. Si l'expert admet en effet que ce choix était compréhensible, c'est toutefois au regard de la vitesse à laquelle circulait le cycliste, en vertu de laquelle il lui aurait été impossible de s'arrêter avant la zone de choc. Par sa vitesse inadaptée, l'intimé 1 s'est mis lui-même dans une situation dangereuse. Il ne saurait ainsi être suivi lorsqu'il soutient qu'on ne pourrait pas lui reprocher d'avoir pris la décision de contourner le piéton par la droite. L'intimé 1 affirme que s'il avait effectué un freinage beaucoup plus prononcé, il aurait pu être projeté sur le piéton ou son vélo atterrir sur le piéton. Ce faisant, il s'écarte de l'état de fait retenu par la cour cantonale, lequel lie le Tribunal fédéral. En tout état, il ressort de l'expertise qu'un freinage était en soi possible. A cet égard, la vitesse maximale qui aurait permis au cycliste de s'immobiliser avant la zone de choc était de 41.6 km/h (conditions les plus favorables), alors que l'intimé 1 circulait à 49 km/h. L'intimé 1 ne peut ainsi rien déduire de l'arrêt du Tribunal fédéral qu'il invoque, dans lequel rien ne permettait de considérer qu'un automobiliste aurait roulé à une vitesse excessive et où il n'apparaissait pas que celui-ci aurait violé fautivement les règles de prudence que les circonstances lui imposaient et qui découlaient en particulier des art. 26 et 31 LCR (arrêt 6B_770/2017 du 11 janvier 2018 conisd. 3.2). 
L'intimé 1 fait valoir qu'un cycliste a d'autres choix que l'arrêt pour éviter un obstacle puisqu'il n'utilise pas la totalité de la voie (ce qui lui permettrait de doubler ou croiser des cycles ou des piétons cheminant le long d'une route). A teneur de l'art. 32 al. 1 LCR, le conducteur doit adapter sa vitesse aux particularités de son véhicule, parmi d'autres circonstances. Or la vitesse de l'intimé 1 était inadaptée aux circonstances concrètes de l'espèce, pour les motifs évoqués précédemment. Par ailleurs, les particularités du cycle mis en cause ont bien été prises en compte par l'expert aux fins de l'établissement de son rapport, notamment la largeur de celui-ci (cf. rapport du 24 août 2020, p. 4). Pour le reste, les manoeuvres de dépassement ou de contournement ne sont pas en soi l'apanage des seuls cyclistes (cf. art. 35 al. 2 LCR). 
 
2.7. Il n'y a pas de rupture du lien de causalité adéquate entre la violation fautive du devoir de prudence et le décès de la victime. La présence d'un piéton traversant une route touristique du Lavaux un dimanche soir d'été vers 19h50 ne constitue pas un fait extraordinaire ou imprévisible qui relègue à l'arrière-plan le rôle causal joué par la faute de l'intimé 1. I l est vrai qu'il ressort de l'état de fait cantonal que la victime, qui longeait la chaussée du côté droit, a entrepris de traverser la route au sortir d'une courbe, avant de revenir en arrière après avoir aperçu le cycliste. Toutefois, ce comportement n'était pas imprévisible au point qu'il pouvait interrompre le lien de causalité entre le comportement fautif de l'intimé 1 et l'accident. Les piétons sont susceptibles de présenter diverses réactions face à un danger soudain (courir, s'immobiliser, rebrousser chemin, etc.), ce qui n'a rien d'inhabituel. En revenant sur ses pas après avoir aperçu le cycliste, qui avait crié pour attirer son attention, la victime a simplement cherché à se mettre à l'abri, qui plus est en empruntant le chemin le plus court. Si l'intimé 1 avait roulé plus lentement, comme l'exigeait le manque de visibilité, il aurait pu s'arrêter en temps utile et éviter le choc. Ainsi, le comportement du piéton n'était pas de nature à reléguer à l'arrière-plan les propres agissements de l'intimé 1 et ne saurait être considéré comme la cause la plus probable et la plus immédiate de l'accident.  
En affirmant que des bancs étaient disposés sur le côté gauche de la route où la victime aurait pu facilement se mettre à l'abri, l'intimé 1 s'écarte de l'état de fait de la cour cantonale par lequel le Tribunal fédéral est lié (art. 105 al. 1 LTF). 
La présente affaire se distingue de celles dont se prévaut l'intimé 1, dans lesquelles une rupture du lien de causalité a été retenue au motif que la victime s'était soudainement élancée sur la chaussée devant le véhicule au moment où il survenait (arrêt 6S.287/2004 du 24 septembre 2004 consid. 2.5), ou au motif que l'attitude de la victime, qui après avoir traversé la chaussée n'avait pas seulement fait un pas en arrière ni trébuché, mais avait couru sur plusieurs mètres afin de se placer sur la voie de gauche devant le véhicule (arrêt 6B_770/2017 du 11 janvier 2018 consid. 3.2). Aussi, l'intimé 1 ne saurait rien en déduire en sa faveur. 
Au vu de ce qui précède, la cour cantonale a violé le droit fédéral en acquittant l'intimé 1 d'homicide par négligence. 
 
2.8. Le bien-fondé du grief conduit à l'admission du recours. Le ju gement attaqué doit être annulé en tant qu'il porte sur l'acquittement de l'intimé 1 du chef d'homicide par négligence. La cause est renvoyée à la cour cantonale pour qu'elle rende une nouvelle décision dans le sens des considérants.  
 
3.  
Il n'y a pas lieu d'allouer une indemnité au ministère public qui agit dans l'exercice de ses attributions officielles (art. 68 al. 1 et al. 3 LTF). Pour ce même motif, il n'y a pas lieu de mettre des frais judiciaires à la charge de la cour cantonale (art. 66 al. 4 LTF). L'intimé 1, qui a conclu au rejet du recours et qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). L'intimée 2, qui obtient gain de cause, peut prétendre au versement d'une indemnité de dépens, à la charge, pour moitié chacun, du canton de Vaud et de l'intimé 1. Sa demande d'assistance judiciaire devient dès lors sans objet. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est admis, le jugement attaqué est annulé et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour nouvelle décision. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'500 fr., sont mis à la charge de A.________. 
 
3.  
Le canton de Vaud et A.________ verseront chacun à l'avocat de B.B.________ une indemnité de 1'000 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 24 mai 2023 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
La Greffière : Rettby