6P.228/2006 22.05.2007
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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
6P.228/2006 
6S.523/2006 /rod 
 
Arrêt du 22 mai 2007 
Cour de cassation pénale 
 
Composition 
MM. les Juges Schneider, Président, 
Ferrari, Favre, Zünd et Mathys. 
Greffier: M. Oulevey. 
 
Parties 
Y.________, 
recourant, représenté par Me Riccardo Rondi, avocat, 
 
contre 
 
A.________, représentée par Me Jacques Barillon, avocat, 
B.________, représenté par Me Yannis Sakkas, avocat, 
Ministère public de la Confédération, 
Taubenstrasse 16, 3003 Berne, 
intimés, 
Cour des affaires pénales du Tribunal pénal fédéral, case postale 2720, 6501 Bellinzone. 
 
Objet 
6P.228/2006 
Art. 29 al. 2 Cst. (procédure pénale; arbitraire) 
 
6S.523/2006 
Lésions corporelles par négligence, 
 
recours de droit public (6P.228/2006) et pourvoi en nullité (6S.523/2006) contre l'arrêt de la Cour des affaires pénales du Tribunal pénal fédéral du 12 octobre 2006. 
 
Faits : 
 
A. 
Par arrêt rendu en français le 12 octobre 2006, la Cour des affaires pénales du Tribunal pénal fédéral, à Bellinzone, composée d'un juge unique, a reconnu les accusés X.________ et Y.________ coupables de lésions corporelles graves par négligence, renoncé à leur infliger une peine, constaté qu'ils étaient obligés de réparer tout ou partie du dommage subi par les parties civiles B.________ et A.________, renvoyé celles-ci à agir pour le surplus devant le juge civil et condamné les accusés aux frais et dépens. 
 
Cet arrêt est fondé, en résumé, sur les constatations de fait suivantes: 
A.a Par contrat du 31 mars 1999, la société D.________ Sàrl propriétaire d'un hélicoptère monomoteur McDonnel Douglas MD 500N, a confié l'exploitation de cet appareil à E.________, entreprise dirigée par Y.________. E.________ a elle-même confié la maintenance de l'aéronef à une société allemande titulaire d'une licence reconnue en Suisse, F.________ dont le directeur est X.________. 
A.b Le 27 octobre 1999, B.________, associé de D.________ Sàrl et titulaire d'une licence d'élève pilote, a décidé d'effectuer sur l'appareil susmentionné un vol d'instruction de La Chaux-de-Fonds à Sion, et retour, sous la surveillance de Y.________, lui-même titulaire d'une licence d'instructeur de vol. B.________ a emmené sa fille, A.________, et un ami, C.________, comme simples passagers. 
 
À l'aller, alors que l'appareil s'apprêtait à survoler le col du Sanetsch, le voyant lumineux "engine chip light", qui a pour fonction de signaler la présence de limaille sur l'un ou l'autre des détecteurs installés à cet effet, s'est allumé. Sur recommandation de Y.________, B.________ a poursuivi son vol en direction de l'aéroport de Sion, où il s'est posé sans difficulté. 
 
À Sion, tandis que B.________ et ses passagers vaquaient à leurs propres occupations, Y.________ a démonté les deux bouchons magnétiques de la turbine. Il a constaté la présence de résidus métalliques sur un détecteur. Ne sachant quelle conduite adopter, il a téléphoné à X.________, qui se trouvait en rendez-vous professionnel en dehors des locaux de son entreprise et ne pouvait dès lors pas consulter immédiatement le manuel d'entretien. Après s'être fait rapporter les constatations de Y.________, X.________ a déclaré à celui-ci qu'à sa place, il poursuivrait son vol après avoir enlevé les résidus métalliques détectés. Se fondant sur ce conseil, Y.________ a nettoyé la limaille et remis les bouchons en place. Sans autre vérification, il a décidé que le vol de retour pouvait être effectué, en suivant, pour des raisons de sécurité, la route de la vallée du Rhône. 
 
L'élève pilote, l'instructeur de vol et les passagers ont ensuite repris leur place à bord. B.________ a décollé. Une fois l'hélicoptère à 60 ou 70 mètres du sol, deux détonations se sont fait entendre et la turbine a cessé de fonctionner. S'emparant aussitôt des commandes, Y.________ a réussi à poser l'appareil dans un verger voisin. 
 
Lors de cet atterrissage d'urgence, A.________ a été grièvement blessée. Victime d'un éclatement de vertèbre, elle a subi plusieurs interventions chirurgicales et de nombreuses hospitalisations. Elle est toujours en traitement et n'a pas pu reprendre d'activité professionnelle à ce jour. Son intégrité physique est définitivement atteinte. B.________ a subi, quant à lui, une fracture-tassement de la colonne vertébrale et une plaie à la jambe droite. C.________ a subi, lui aussi, une fracture-tassement de la colonne vertébrale. Il a dû porter un corset pendant trois mois, mais ne souffre actuellement d'aucune séquelle. Enfin, Y.________ a été légèrement blessé. 
A.c Au moment des faits, l'instructeur et l'élève pilote disposaient du manuel de vol, établi par le constructeur à l'intention du pilote. Ce document rappelait que la présence de limaille indiquée par le voyant "engine chips light" était le signe d'une possible détérioration du moteur. Pour le cas où ce voyant s'allumait, il prescrivait au pilote d'atterrir le plus vite possible et d'inspecter les détecteurs avant le prochain vol. Il renvoyait, pour le surplus, aux indications données dans le manuel d'entretien. 
 
Également établi par le constructeur, le manuel d'entretien s'adressait au responsable de la maintenance, soit en l'espèce à X.________. Il rappelait que le témoin "engine chip light" signalait la présence de conditions pouvant entraîner une panne du moteur. Si ce voyant s'allumait, il prescrivait notamment de nettoyer le détecteur concerné et de faire tourner le rotor au sol durant trente minutes. Si cet essai au sol se déroulait normalement et si le voyant ne se rallumait pas une fois le détecteur réinstallé, le moteur pouvait alors être remis en service et le prochain vol être entrepris. 
A.d A.________, B.________ et C.________ ont porté plainte auprès du Procureur général du Valais central, qui a requis et obtenu l'ouverture d'une information judiciaire. Le juge en charge du dossier a sursis à tout acte d'instruction, dans l'attente du résultat de l'enquête administrative diligentée par le Bureau d'enquête sur les accidents d'aviation. À réception du rapport de cette autorité, daté du 12 juillet 2004, le juge a interpellé le Ministère public de la Confédération, qui s'est déclaré compétent pour continuer les poursuites, qu'il a exercées d'abord contre Y.________, puis qu'il a étendues à X.________. 
 
A.________ et B.________ se sont constitués parties civiles dans la procédure fédérale. 
 
B. 
Par acte unique rédigé en italien et déposé en deux exemplaires, Y.________ déclare interjeter simultanément contre cet arrêt un recours de droit public, pour constatation arbitraire des faits (art. 9 Cst.) et violation du droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.), et un pourvoi en nullité, pour violation de l'art. 125 CP
 
Il assortit chacun de ses recours d'une requête d'effet suspensif. 
 
Le Ministère public fédéral et A.________ concluent au rejet des deux recours. B.________ s'en remet à justice. 
 
Le recourant a déposé des observations sur les déterminations des intimés. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
 
1. 
1.1 En vertu de son art. 132 al. 1, 1ère phrase, la loi fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF; RS 173.110) ne s'applique qu'aux procédures introduites devant le Tribunal fédéral après son entrée en vigueur. Interjetés avant le 1er janvier 2007, les présents recours restent dès lors soumis aux art. 84 ss de la loi fédérale d'organisation judiciaire du 16 décembre 1943 (ci-après OJ) et 268 ss de la loi fédérale du 15 juin 1934 sur la procédure pénale (ci-après: PPF; RS 312.0) dans leur teneur au 31 décembre 2006. 
 
1.2 L'art. 37 al. 3 OJ prescrivait au Tribunal fédéral de rendre son arrêt dans la langue de la décision attaquée. Il ne l'autorisait à déroger à cette règle que si les parties parlaient une autre langue officielle. Dans le cas présent, comme il n'est pas établi que les intimés comprennent bien l'italien, l'arrêt doit être rendu en français. 
 
1.3 Conformément à l'art. 275 al. 5 PPF, lorsque la décision attaquée faisait à la fois l'objet d'un recours de droit public et d'un pourvoi en nullité, il y avait lieu, en principe, d'examiner d'abord le recours de droit public. Rien ne justifie d'inverser cet ordre de priorité en l'espèce. 
 
I. Recours de droit public 
 
2. 
Le recours de droit public n'était ouvert que contre des décisions ou arrêtés cantonaux (art. 84 OJ). Exercé contre un jugement rendu par une autorité fédérale, le présent recours doit dès lors être déclaré irrecevable, aux frais de son auteur. Les moyens soulevés à l'appui du recours de droit public devant quand même être examinés dans le cadre du pourvoi (cf. infra, consid. 3.2), il sied de fixer l'émolument judiciaire à 2'000 fr. (art. 156 al. 1 OJ). 
 
La partie civile qui a pris des conclusions obtient gain de cause et a dès lors droit à des dépens (art. 159 al. 1 OJ), qu'il convient de fixer à 500 fr. pour toutes choses. Il n'y a en revanche pas lieu d'allouer des dépens aux autres parties. 
 
La cause étant ainsi jugée, la requête d'effet suspensif jointe au recours de droit public n'a plus d'objet. 
 
II. Pourvoi en nullité 
 
3. 
3.1 Avant l'entrée en vigueur de la LTF, les jugements rendus par la Cour des affaires pénales du Tribunal pénal fédéral, à Bellinzone, pouvaient faire l'objet d'un pourvoi en nullité au Tribunal fédéral. Conformément à l'art. 33 al. 3 let. b de la loi fédérale du 4 octobre 2002 sur le Tribunal pénal fédéral (ci-après LTPF; RS 173.71), la procédure était réglée par les art. 268 ss PPF, en principe applicables aux pourvois dirigés contre les jugements pénaux de dernière instance cantonale. Exercé par le dépôt, dans les trente jours dès la notification de l'expédition intégrale de l'arrêt entrepris, d'un mémoire rédigé dans une langue nationale et dûment motivé, le présent pourvoi est dès lors recevable (art. 30 al. 1 OJ, 270 let. a, 272 al. 1 et 273 PPF). 
 
3.2 Il résulte de l'art. 33 al. 3 let. b LTPF que l'art. 269 al. 2 PPF, qui réservait le recours de droit public, n'était pas applicable aux pourvois dirigés contre les arrêts du Tribunal pénal fédéral, de sorte que le recourant pouvait notamment faire valoir une violation de ses droits constitutionnels. En l'espèce, les moyens d'ordre constitutionnel que le recourant a développés sous la rubrique "recours de droit public" de son mémoire unique peuvent dès lors être examinés dans le cadre du pourvoi. 
 
4. 
Le recourant se plaint notamment d'arbitraire dans la constatation des faits. Il soutient que le premier juge aurait confondu deux documents techniques différents lorsqu'il a constaté que le manuel de vol (Pilot's Flight Manual) renvoyait, en cas d'allumage du témoin "engine chip light", au manuel d'entretien Rolls Royce. 
 
4.1 Selon la jurisprudence, l'arbitraire, prohibé par l'art. 9 Cst., ne résulte pas du seul fait qu'une autre solution pourrait entrer en considération ou même qu'elle serait préférable; le Tribunal fédéral n'annulera la décision attaquée que lorsque celle-ci est manifestement insoutenable, qu'elle se trouve en contradiction claire avec la situation de fait, qu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique indiscuté, ou encore lorsqu'elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité; pour qu'une décision soit annulée pour cause d'arbitraire, il ne suffit pas que la motivation formulée soit insoutenable, il faut encore que la décision apparaisse arbitraire dans son résultat. 
 
Lorsque la partie recourante - comme c'est le cas en l'espèce - s'en prend à l'appréciation des preuves et à l'établissement des faits, la décision n'est arbitraire que si le juge n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, s'il a omis, sans raison sérieuse, de tenir compte d'un moyen important propre à modifier la décision attaquée ou encore si, sur la base des éléments recueillis, il a fait des déductions insoutenables (ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9 et les références). 
 
4.2 En cas d'allumage du témoin lumineux "engine chip light", le manuel de vol (dossier du Tribunal pénal fédéral, act. 10.00.0503 ss) prescrit au pilote d'atterrir le plus vite possible, d'inspecter le détecteur avant le prochain vol et de se référer au "HMI" (cf. ibid., 10.00.0587). Par "HMI", le manuel de vol entend le manuel d'entretien de base, intitulé en anglais "Basic Handbook of Maintenance Instruction" (cf. ibid., 10 00 0531), lequel renvoie au manuel d'utilisation et d'entretien spécifique du moteur ("Allison Engine Operation and Maintenance Manual") pour les cas où le détecteur de limaille s'est allumé (cf. ibid., 19 02 0569). D'après le rapport d'enquête rendu le 12 juillet 2004 par le Bureau d'enquête sur les accidents d'aviation (ibid., 10 00 0006 ss), le manuel d'entretien spécifique du moteur n'est autre que celui intitulé "Operation and Maintenance Manual of Rolls-Royce Allison 250 C20R Series" (cf. ibid., 10 00 0014). Le premier juge ne s'est dès lors pas manifestement trompé de document en se référant au manuel Rolls-Royce (ibid., 10 00 0019-0020) pour déterminer ce que prescrivait le constructeur. Par ailleurs, contrairement à ce que soutient le recourant, les prescriptions topiques étaient déjà en vigueur au moment des faits, puisqu'elles ont été introduites dans le manuel le 1er juillet 1995 (cf. ibid., 10 00 0018-0020, en particulier la mention "Jul 1/95" en bas des deux dernières pages citées). Aussi le moyen est-il mal fondé. 
 
5. 
Le recourant conteste avoir commis la moindre négligence et, si tant est qu'il en ait commis une, qu'elle se trouve en lien de causalité naturelle et adéquate avec les lésions corporelles graves subies par les occupants de l'hélicoptère. 
 
5.1 L'art. 18 al. 3 CP définit la négligence comme l'imprévoyance coupable dont fait preuve celui qui, ne se rendant pas compte des conséquences de son acte, agit sans user des précautions commandées par les circonstances et sa situation personnelle. 
5.1.1 Pour qu'il y ait négligence, il faut donc, en premier lieu, que l'auteur ait violé les règles de prudence que les circonstances lui imposaient pour ne pas excéder les limites du risque admissible et que, d'autre part, il n'ait pas prêté l'attention ou fait les efforts que l'on pouvait attendre de lui pour se conformer à son devoir (ATF 122 IV 17 consid. 2b p. 19 s.). Pour déterminer plus précisément les devoirs imposés par la prudence, on peut se référer aux normes édictées par l'ordre juridique pour assurer la sécurité et éviter des accidents. À défaut de dispositions légales ou réglementaires, on peut recourir à des règles analogues qui émanent d'associations privées ou semi-publiques lorsqu'elles sont généralement reconnues. La violation des devoirs de la prudence peut aussi être déduite de principes généraux, si aucune règle spéciale de sécurité n'a été violée (ATF 122 IV 17 consid. 2b/aa p. 20). 
 
Un comportement viole le devoir de prudence lorsque l'auteur, au moment des faits, aurait pu, compte tenu de ses connaissances et de ses capacités, se rendre compte de la mise en danger d'autrui. Il faut donc se demander si l'auteur pouvait prévoir, dans les grandes lignes, le déroulement concret des événements. Cette question s'examine en suivant le concept de la causalité adéquate (ATF 127 IV 34 consid. 2a p. 39.; 126 IV 13 consid. 7a/bb p. 17). L'étendue du devoir de diligence doit s'apprécier en fonction de la situation personnelle de l'auteur, c'est-à-dire de ses connaissances et de ses capacités (ATF 122 IV 145 consid. 3b/aa p. 147). 
 
En matière aérienne, diverses dispositions légales ou réglementaires tendent à assurer la sécurité du trafic. En particulier, l'art. 24 al. 1 let. c de l'ordonnance du 18 septembre 1995 sur la navigabilité des aéronefs (ONAE; RS 748.215.1), mentionné dans l'acte d'accusation (cf. dossier du Tribunal pénal fédéral, act. 8 100 007), prescrit qu'un aéronef ne peut être remis en circulation à la suite de défaillances techniques, de défauts ou de sollicitations anormales ayant mis en question sa navigabilité que si un examen a été effectué par une personne habilitée et a révélé que la navigabilité de l'aéronef n'était pas compromise. Cette disposition s'adresse à l'exploitant (cf. art. 23 al. 1 ONAE). On peut évidemment attendre d'un dirigeant d'une société qui exploite un aéronef - qui plus est instructeur de vol - qu'il connaisse cette prescription. Elle constitue dès lors pour lui un devoir de prudence. 
 
Dans le cas présent, le recourant ne s'est pas opposé à ce que les passagers et l'élève pilote reprennent place à bord et il a lui-même pris place à côté de l'élève pilote pour remplir sa fonction d'instructeur. Ce faisant, il a autorisé par actes concluants les passagers à remonter à bord et l'élève pilote à décoller, sans qu'un contrôle de la navigabilité ait été effectué par une personne habilitée. Le recourant a donc violé ses devoirs de prudence. 
5.1.2 En second lieu, pour qu'il y ait négligence au sens de l'art. 18 al. 3 CP, il faut que celui qui a violé un devoir de prudence puisse se voir imputer cette violation à faute, c'est-à-dire qu'il puisse se voir reprocher, compte tenu de ses circonstances personnelles, un manque d'effort blâmable (ATF 122 IV 145 consid. 2b/aa p. 148). 
 
Dans le cas présent, rien n'empêchait le recourant de différer le vol de retour jusqu'à ce qu'un examen de la navigabilité ait été effectué par une personne habilitée, quitte à prier les autres occupants de l'appareils de rentrer chez eux en taxi ou en train. Eût-il craint de perdre la clientèle de l'élève pilote en prenant cette option que cela n'aurait pas justifié de mettre en danger l'intégrité corporelle, voire la vie, de son élève et des passagers. Quoi qu'il en dise, le recourant s'est donc bien rendu coupable de négligence. 
 
5.2 La négligence commise par le recourant consiste en une action (autoriser l'élève pilote à décoller de Sion), et non en une omission. En effet, le recourant n'a pas eu un comportement passif, mais il a au contraire, en prenant place lui-même dans l'appareil en qualité d'instructeur pour le vol de retour, autorisé par actes concluants l'élève pilote à décoller, sans qu'un contrôle de la navigabilité ait été effectué par une personne habilitée. 
5.2.1 Une action est l'une des causes naturelles d'un résultat dommageable si, dans l'enchaînement des événements tels qu'ils se sont produits, cette action a été, au regard de règles d'expériences ou de lois scientifiques, une condition sine qua non de la survenance de ce résultat - soit si, en la retranchant intellectuellement des événements qui se sont produits en réalité, et sans rien ajouter à ceux-ci, on arrive à la conclusion, sur la base des règles d'expérience et des lois scientifiques reconnues, que le résultat dommageable ne se serait très vraisemblablement pas produit (cf. ATF 115 IV 199 consid. 5b p. 206 et les références). La série des événements à prendre en considération pour cette opération intellectuelle commence par l'action reprochée à l'auteur, finit par le dommage et ne comprend rien d'autre que les événements réels qui ont relié ces deux extrémités de la chaîne d'après les règles d'expérience et les lois scientifiques. La causalité naturelle ne cesse dès lors pas lorsque le dommage résulte effectivement de l'action reprochée à l'auteur, mais serait survenu quand même sans cette cause, à raison d'autres événements qui l'auraient entraîné si l'auteur ne l'avait pas lui-même causé (cf., en responsabilité civile, les exemples donnés par Henri Deschenaux/Pierre Tercier, La responsabilité civile, 2ème éd., Berne 1982, § 4 n. 23 ss p. 56-57). 
 
Pour que le délit de négligence soit réalisé, c'est en tant que violation d'un devoir de prudence, et non en tant que comportement global de l'auteur, que l'action doit être en rapport de causalité avec le résultat dommageable. Il ne suffit dès lors pas que l'action commise par l'auteur se trouve en tant que telle en rapport de causalité naturelle avec le dommage. Il faut en principe qu'il soit encore établi avec une haute vraisemblance que si l'auteur avait agi d'une manière conforme à son devoir de prudence, toutes choses égales par ailleurs, le résultat ne se serait pas produit (cf. ATF 130 IV 7 consid. 3.2 in fine p. 10/11), et cela non pas pour des raisons fortuites, mais pour des raisons en rapport avec le but protecteur de la règle de prudence violée (cf. Hans Walder, Die Kausalität im Strafrecht, RPS 1977 p. 113 ss, spéc. p. 114 et 152). L'hypothèse à poser à ce stade du raisonnement doit servir à juger du caractère causal de l'acte illicite commis par l'auteur; il est dès lors sans pertinence que, si l'auteur n'avait pas lui-même commis l'acte illicite qui lui est imputé, un tiers l'eût peut-être commis à sa place (cf., en droit allemand, Claus Roxin, Strafrecht, Allgemeiner Teil, 4ème éd., Munich 2006, § 11 n. 59 p. 379 i.f.). 
 
Par ailleurs, une action est la cause adéquate du résultat dommageable si le comportement était propre, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience générale de la vie, à entraîner un résultat du genre de celui qui s'est produit; il s'agit là d'une question de droit que la cour de céans revoit librement (ATF 122 IV 17 consid. 2c/bb p. 23, 121 IV 207 consid. 2a p. 212 s.). La causalité adéquate peut être exclue, l'enchaînement des faits perdant sa portée juridique, si une autre cause concomitante - par exemple une force naturelle, le comportement de la victime ou d'un tiers - constitue une circonstance tout à fait exceptionnelle ou apparaît si extraordinaire, que l'on ne pouvait pas s'y attendre. L'imprévisibilité d'un acte concurrent ne suffit pas en soi à interrompre le rapport de causalité adéquate. Il faut encore que cet acte ait une importance telle qu'il s'impose comme la cause la plus probable et la plus immédiate de l'événement considéré, reléguant à l'arrière-plan tous les autres facteurs qui ont contribué à l'amener et notamment le comportement de l'auteur (ATF 131 IV 145 consid. 5.2 p. 148 et les arrêts cités). 
5.2.2 Dans le cas présent, le recourant a autorisé l'élève pilote à décoller, sans qu'un contrôle de la navigabilité ait été effectué par une personne habilitée. Sur la base de cette autorisation, l'élève pilote a décollé et l'accident s'est produit. Si le recourant avait demandé, comme l'y obligeait l'art. 24 al. 1 let. c ONAE, à une personne habilitée de procéder à un examen de navigabilité, le test prescrit par le constructeur aurait alors été effectué. Soit ce test aurait permis de détecter l'origine de la panne, de réparer la pièce défectueuse et de faire le vol de retour sans dommage; soit il aurait laissé inexpliquée l'origine de la limaille détectée dans le moteur lors du vol aller. Or, dans cette dernière hypothèse, il est très vraisemblable, si ce n'est certain, que la personne habilitée consultée par le recourant aurait émis des doutes sur la navigabilité de l'appareil et que le recourant n'aurait, par conséquent, pas autorisé l'élève pilote à repartir. En tout état de cause, le test aurait indiqué la conduite à adopter, propre à éviter très vraisemblablement l'accident. Par ailleurs, lorsqu'un instructeur de vol autorise son élève à décoller sans que toutes les mesures de sécurité prescrites par la réglementation aient été prises, il est dans l'ordre des choses qu'un accident se produise. La négligence commise par le recourant se trouve donc en lien de causalité naturelle et adéquate avec les lésions subies par les autres occupants de l'appareil. 
 
Le moyen par lequel le recourant conteste avoir commis une négligence en lien de causalité naturelle et adéquate avec les lésions corporelles subies par les autres occupants de l'hélicoptère se révèle ainsi mal fondé. 
 
6. 
L'action commise par le recourant (autoriser l'élève pilote alors qu'une personne habilitée aurait dû préalablement examiner la navigabilité de l'appareil) et ses conséquences (le décollage, la chute et les lésions corporelles graves) avaient toutes été alléguées dans l'acte d'accusation. La cour de céans peut dès lors constater sans autre mesure que le premier juge n'a pas violé le droit fédéral en considérant que le recourant s'est rendu coupable de lésions corporelles graves par négligence, au sens des art. 122 et 125 CP. Peu importe que, pour arriver à cette déclaration de culpabilité, le premier juge ait lui-même suivi un autre raisonnement que la cour de céans et qu'il se soit, pour cela, fondé sur un fait qui n'était pas mentionné dans l'acte d'accusation. Même s'il apparaissait qu'en retenant le fait en question, le premier juge a, comme le soutient le recourant, violé le principe d'immutabilité (art. 169 et 170 PPF; cf., sur ce principe en général, Gérard Piquerez, Traité de procédure pénale suisse, 2ème éd., Zurich 2006, n. 324 p. 208 s.), il n'y aurait de toute façon pas lieu d'annuler l'arrêt attaqué. Le moyen peut ainsi être rejeté sans qu'il soit nécessaire de dire si le principe d'immutabilité a effectivement été violé. 
 
Partant, le pourvoi, mal fondé, doit être rejeté. 
 
7. 
Le recourant, qui succombe, doit supporter les frais de justice, arrêtés à 2'000 fr. (art. 153a OJ, 245 et 278 al. 1 PPF). 
 
Obtenant gain de cause, celle des parties civiles qui a conclu au rejet du pourvoi a droit à une indemnité (art. 278 al. 3 1ère phrase PPF), qu'il paraît équitable de fixer à 500 fr. Le recourant versera une compensation à la Caisse du Tribunal fédéral (art. 278 al. 3 3ème phrase PPF). 
 
Il n'y a pas lieu d'allouer d'indemnité aux autres parties. 
 
8. 
La cause étant ainsi jugée, la requête d'effet suspensif jointe au pourvoi en nullité n'a plus d'objet. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours de droit public est irrecevable. 
 
2. 
Le pourvoi en nullité est rejeté. 
 
3. 
Les requêtes d'effet suspensif n'ont plus d'objet. 
 
4. 
Un émolument judiciaire global de 4'000 fr. est mis à la charge du recourant. 
 
5. 
Le recourant paiera une indemnité de 500 fr. à A.________ à titre de dépens pour sa réponse sur le recours de droit public. 
 
6. 
La Caisse du Tribunal fédéral versera une indemnité de 500 fr. à A.________ pour sa réponse sur le pourvoi en nullité. 
 
7. 
Il n'est pas alloué d'indemnité aux autres parties. 
 
8. 
Le recourant est condamné à verser 500 fr. à la Caisse du Tribunal fédéral en compensation de l'indemnité versée à A.________ pour sa réponse sur le pourvoi en nullité. 
 
9. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties, au Ministère public de la Confédération et à la Cour des affaires pénales du Tribunal pénal fédéral. 
Lausanne, le 22 mai 2007 
Au nom de la Cour de cassation pénale 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: Le greffier: