6B_1321/2021 14.02.2023
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_1321/2021  
 
 
Arrêt du 14 février 2023  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Denys, Juge présidant, van de Graaf et Koch. 
Greffière: Mme Musy. 
 
Participants à la procédure 
1. A.________, 
2. B.________ SA, 
représentée par A.________, 
recourants, 
 
contre  
 
Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens VD, 
intimé. 
 
Objet 
Ordonnance de non-entrée en matière 
(faux dans les titres, contrainte, etc.), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal 
du canton de Vaud, Chambre des recours pénale, 
du 14 septembre 2021 (n° 856 PE21.000034-ARS). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. B.________ SA, sise à U.________, exploite une agence de voyages; son administrateur unique, avec signature individuelle, est A.________.  
 
A.b. Par acte du 15 décembre 2020, complété le 6 janvier 2021, A.________, agissant tant en son propre compte que pour le compte de B.________ SA, a déposé plainte contre E.________ pour "faux dans les titres, tentative d'escroquerie, abus de confiance, respectivement toute autre disposition pénale applicable", ainsi que contre la société C.________ SA et ses dirigeants pour "faux dans les titres, tentative d'escroquerie, contrainte, respectivement toute autre disposition applicable".  
A l'appui de leur plainte, A.________ et B.________ SA exposaient ce qui suit. 
Par convention du 12 décembre 2018, A.________ avait vendu les actions de B.________ SA et d'une société tierce à D.________ Sàrl. Cette dernière société était contrôlée par E.________. Le prix de vente stipulé s'élevait à 550'000 fr., à verser par acomptes de montants variables entre le 12 décembre 2018 et le 31 mai 2019. Faute de paiement de la totalité du prix des actions et sous réserve d'un accord contraire entre parties, la vente serait caduque, A.________ devant alors rembourser à D.________ Sàrl l'ensemble des acomptes perçus dans l'intervalle. Par la suite, malgré les garanties du "fiduciaire" de E.________ sur la solvabilité de ce dernier, D.________ Sàrl ne s'était acquittée que des deux premiers acomptes convenus, pour un montant total de 80'000 fr., de sorte que la vente n'était pas venue à chef. 
Selon un deuxième complexe de faits, dans le courant des années 2018 et 2019, une autre société administrée par E.________, savoir F.________ SA, devenue G.________ SA, anciennement active dans la gestion d'une équipe de football, avait failli à s'acquitter d'une partie de la facturation de B.________ SA en lien avec le transport de joueurs sur les lieux de plusieurs rencontres, contraignant finalement la plaignante à engager des poursuites. Le 2 septembre 2019, pour toute réponse à ses relances, B.________ SA s'était elle-même vue adresser un rappel portant sur un montant de 70'000 fr. ayant notamment trait à des prestations de "sponsoring" relatives aux saisons 2018 et 2019, émanant de la société tierce C.________ SA active dans les domaines de la pratique du football et de l'exploitation d'un club de football, créée peu après que E.________ s'était vu déchoir de la présidence de l'équipe de football qui y était liée. Faute de n'avoir jamais conclu de contrat de "sponsoring" avec C.________ SA, B.________ SA s'est refusée à payer. C.________ SA a engagé des poursuites à son encontre. Selon les plaignantes, E.________ avait, conjointement avec les dirigeants de C.________ SA, participé à l'élaboration d'un faux contrat de "sponsoring" à l'appui du rappel litigieux. 
Enfin, selon un troisième complexe de faits, les 21 janvier 2019 et 30 novembre 2020, A.________ avait personnellement octroyé à E.________ deux prêts de 20'000 fr. et de 7'000 francs. Comme B.________ SA était elle-même débitrice d'une société tierce acquise par E.________ dans l'intervalle, A.________ avait fait part à ce dernier de son souhait de compenser sa créance avec la dette de sa société. Lors même qu'il avait initialement donné son accord avec cette manière de faire, E.________ avait toutefois fait encaisser les montants dus par B.________ SA, tout en conservant la contrevaleur des prêts par devers lui. 
 
A.c. Par ordonnance du 24 juin 2021, le Ministère public central, Division criminalité économique, du canton de Vaud a refusé d'entrer en matière sur les plaintes déposées les 15 décembre 2020 et 6 janvier 2021 par A.________ et B.________ SA.  
 
B.  
Par arrêt du 14 septembre 2021, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté le recours formé par A.________ et B.________ SA à l'encontre de l'ordonnance précitée. 
 
C.  
A.________ et B.________ SA forment un recours en matière pénale au Tribunal fédéral. Ils concluent, avec suite de frais et dépens, à l'annulation de l'arrêt rendu par la Chambre des recours pénale le 14 septembre 2021 et au renvoi de la cause aux autorités inférieures afin que celles-ci instruisent la plainte pénale déposée par eux, tout en donnant suite aux réquisitions qu'ils avaient formées. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Aux termes de l'art. 81 al. 1 let. a et b ch. 5 LTF, la partie plaignante qui a participé à la procédure de dernière instance cantonale est habilitée à recourir au Tribunal fédéral, si la décision attaquée peut avoir des effets sur le jugement de ses prétentions civiles. Constituent de telles prétentions celles qui sont fondées sur le droit civil et doivent en conséquence être déduites ordinairement devant les tribunaux civils. Il s'agit principalement des prétentions en réparation du dommage et du tort moral au sens des art. 41 ss CO
Selon l'art. 42 al. 1 LTF, il incombe au recourant d'alléguer les faits qu'il considère comme propres à fonder sa qualité pour recourir. Lorsque le recours est dirigé contre une décision de non-entrée en matière ou de classement de l'action pénale, la partie plaignante n'a pas nécessairement déjà pris des conclusions civiles. Quand bien même la partie plaignante aurait déjà déclaré des conclusions civiles (cf. art. 119 al. 2 let. b CPP), il n'en reste pas moins que le procureur qui refuse d'entrer en matière ou prononce un classement n'a pas à statuer sur l'aspect civil (cf. art. 320 al. 3 CPP). Dans tous les cas, il incombe par conséquent à la partie plaignante d'expliquer dans son mémoire au Tribunal fédéral quelles prétentions civiles elle entend faire valoir contre l'intimé. Comme il n'appartient pas à la partie plaignante de se substituer au ministère public ou d'assouvir une soif de vengeance, la jurisprudence entend se montrer restrictive et stricte, de sorte que le Tribunal fédéral n'entre en matière que s'il ressort de façon suffisamment précise de la motivation du recours que les conditions précitées sont réalisées, à moins que l'on puisse le déduire directement et sans ambiguïté compte tenu notamment de la nature de l'infraction alléguée (ATF 141 IV 1 consid. 1.1 p. 4 s.). 
 
1.1. En ce qui concerne leur qualité pour recourir, les recourants se bornent à indiquer que l'annulation de la décision attaquée aura inexorablement des effets sur leurs prétentions civiles. Dans leur écriture, ils évoquent exclusivement les infractions de faux dans les titres (art. 251 CP) et de contrainte (art. 181 CP), lesquelles concernent uniquement le deuxième complexe de faits présenté dans leur plainte. Rien n'indique qu'ils contesteraient le refus d'entrer en matière sur les autres infractions classées (abus de confiance et escroquerie) et ils n'indiquent, quoi qu'il en soit, pas quelles prétentions civiles ils pourraient, le cas échéant, en déduire. En relation avec les infractions que les recourants discutent, on recherche en vain toute explication sur d'éventuelles conclusions civiles, qu'ils ne chiffrent pas et dont ils n'expliquent pas en quoi elles pourraient consister.  
 
1.2. En tant que de besoin, on peut encore relever que l'on ne perçoit pas concrètement en quoi les infractions dénoncées ont engendré un préjudice pour la recourante 2 - encore moins pour le recourant 1 qui ne serait, en qualité d'ayant droit économique de la recourante 2, que touché indirectement par une atteinte aux intérêts pécuniaires de celle-ci (cf. ATF 141 IV 380 consid. 2.3.3 p. 386; 140 IV 155 consid. 3.3.1 p. 158). En effet, selon les explications des recourants ressortant de leur écriture de recours, "les deux stipulants au faux contrat de sponsoring ont eu très clairement l'intention délibérée de porter atteinte aux intérêts pécuniaires de B.________ SA, l'un - E.________ - en mettant en péril les intérêts financiers de B.________ SA sachant en particulier que la convention avortée du mois de décembre 2018 interdisait au soussigné d'engager des dépenses - l'autre - le C.________ SA - sachant l'absence de tout pouvoir de E.________ au sein de B.________ SA et se réjouissant d'avance de porter dans des comptes une créance de CHF 70'000.- issue de nulle part, mais dont ce même C.________ SA savait qu'elle était susceptible d'avoir une portée juridique certaine ne serait-ce qu'en prolongement d'une procédure judiciaire à la faveur de laquelle les stipulants au faux contrat de sponsoring se feront un malin plaisir à confirmer le bien-fondé dudit contrat et de son exécution" (recours, § 69). A bien comprendre les explications qui précèdent, la recourante 2 n'a, à ce jour, pas subi d'atteinte concrète à ses intérêts pécuniaires découlant directement des infractions en cause. En particulier, elle ne prétend pas s'être acquittée du montant pour lequel C.________ SA avait initié une poursuite, ni même que les mis en cause auraient introduit une action judiciaire en se fondant sur le faux contrat de sponsoring afin d'obtenir le paiement de la prétention déduite en poursuite. Or, la seule notification de commandements de payer ne suffit pas à établir l'existence d'un dommage direct résultant d'agissements prétendument constitutifs de (tentative de) contrainte (cf. arrêt 6B_294/2017 du 16 janvier 2018 consid. 3.1.2).  
Pour le reste, les recourants exposent que la notification d'une poursuite injustifiée est nuisible pour l'image et les relations commerciales d'une société, notamment dans le contexte d'une demande d'aide pour cas de rigueur résultant de la pandémie de Covid-19; ces déclarations d'ordre général ne permettent pas de rendre vraisemblable l'existence d'un quelconque dommage découlant directement des infractions dénoncées, la recourante 2 n'alléguant pas, en particulier, qu'une demande d'aide lui aurait été refusée en raison de l'inscription au registre de la poursuite en cause. 
 
1.3. Sur le vu de ce qui précède, les recourants ne disposent pas de la qualité pour recourir sur le fond.  
 
2.  
Indépendamment des conditions posées par l'art. 81 al. 1 LTF, la partie recourante est aussi habilitée à se plaindre d'une violation de ses droits de partie équivalant à un déni de justice formel, sans toutefois pouvoir faire valoir par ce biais, même indirectement, des moyens qui ne peuvent être séparés du fond (ATF 141 IV 1 consid. 1.1 et les références citées). 
 
2.1. Les recourants invoquent la violation de diverses dispositions (art. 192, 193, 241, 244, 245 et 246) du Code pénal (comme on le comprend: du Code de procédure pénale) et reprochent à la direction de la procédure de ne pas avoir mis en oeuvre une perquisition dans les locaux de C.________ SA ou dans ceux de son conseil et, plus généralement, de pas avoir entrepris tout ce qui était nécessaire pour mettre la main sur le faux contrat de sponsoring ou tout autre document de nature à établir l'existence de ce faux. Leurs développements ne visent toutefois qu'à démontrer en quoi ces mesures seraient nécessaires afin d'établir leurs accusations. Ils ne font ainsi valoir aucun moyen qui peut être séparé du fond et leurs griefs ne sauraient fonder leur qualité pour recourir.  
 
2.2. Enfin, se prévalant de l'art. 29 al. 2 Cst., les recourants se plaignent d'un défaut de motivation de la décision entreprise. Il est toutefois déduit des développements des recourants que, sous couvert de ce grief tiré d'une violation de garanties de procédure, les recourants reprochent en définitive uniquement à la cour cantonale de ne pas avoir fait droit à leur argumentation sur la réalisation des infractions dénoncées.  
Ici également, ils ne font pas valoir de grief indépendant du fond, de sorte que le recours n'est pas non plus recevable sous cet angle. 
 
3.  
L'hypothèse visée à l'art. 81 al. 1 let. b ch. 6 LTF n'entre pas en considération, les recourants ne soulevant aucun grief quant à leur droit de porter plainte. 
 
4.  
Sur le vu de ce qui précède, le recours doit être déclaré irrecevable. Les recourants, qui succombent, supporteront les frais judiciaires, solidairement entre eux (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est irrecevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge des recourants solidairement entre eux. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale. 
 
 
Lausanne, le 14 février 2023 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Juge présidant : Denys 
 
La Greffière : Musy