7B_937/2023 27.12.2023
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
7B_937/2023  
 
 
Arrêt du 27 décembre 2023  
 
IIe Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Abrecht, Président, 
Kölz et Hofmann. 
Greffier: M. Magnin. 
 
Participants à la procédure 
A.A.________, 
représentée par Me Robert Assaël, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
E.________, 
intimée, 
 
F.________. 
 
Objet 
Récusation, 
 
recours contre l'arrêt rendu le 25 octobre 2023 par la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève (ACPR/831/2023 - PS/105/2023). 
 
 
Faits:  
 
A.  
 
A.a. Des membres de la famille A.________, composée de B.A.________ (père), A.A.________ (mère), C.A.________ (fils) et D.A.________ (épouse de ce dernier), sont prévenus dans une procédure pénale ouverte par le Ministère public de la République et canton de Genève (ci-après: le Ministère public) pour, notamment, traite d'être humains par métier (art. 182 al. 2 CP), usure par métier (art. 157 ch. 1 et 2 CP) et infractions à la loi fédérale du 16 décembre 2005 sur les étrangers et l'intégration (LEI; RS 142.20). Il leur est en substance reproché d'avoir exploité leur personnel de maison.  
 
A.b. Par acte d'accusation du 14 février 2023, complété et corrigé le 15 août 2023, le Ministère public a renvoyé les prévenus devant le Tribunal correctionnel de la République et canton de Genève (ci-après: le Tribunal correctionnel). Les débats devant ce tribunal, composé notamment de la juge E.________, ont dans un premier temps été fixés du 2 au 6 octobre 2023.  
 
A.c. Durant l'instruction préliminaire, B.A.________ a changé d'avocat. Le 20 septembre 2023, l'avocat G.________ a annoncé au Tribunal correctionnel qu'il succédait au précédent défenseur de l'intéressé.  
 
A.d. Le 22 septembre 2023, la juge E.________ a observé que l'avocat G.________ était, conjointement avec des tiers, le bailleur de son appartement. Elle a ajouté que des travaux de surélévation de l'immeuble étaient en cours et qu'un litige pourrait survenir à ce sujet. Elle a soulevé, auprès de la direction de la procédure, à savoir la juge F.________, la question de savoir si cet élément devait être porté à la connaissance des parties, ainsi que la question de l'éventuelle interdiction de postuler de l'avocat précité (cf. art. 105 al. 2 LTF).  
 
A.e. La direction de la procédure a fixé un délai aux parties pour se déterminer sur ses échanges avec la juge E.________. Dans ce cadre, par courrier du 25 septembre 2023, l'avocat G.________ a indiqué que ses relations avec la juge précitée avaient toujours été très cordiales et sans la moindre inimitié.  
 
B.  
 
B.a. Par lettre du 25 septembre 2023, A.A.________ a demandé la récusation de la juge E.________. Elle a indiqué que celle-ci avait évoqué la possibilité d'interdire à Me G.________ de postuler, que cela pourrait laisser entendre qu'elle-même pourrait se trouver dans une situation dans laquelle son objectivité serait compromise et qu'il y aurait donc déjà une apparence de partialité.  
 
B.b. Par ordonnance du 25 septembre 2023, la Direction de la procédure du Tribunal correctionnel a interdit à l'avocat G.________ de postuler dans la présente cause. B.A.________ et l'avocat G.________ ont recouru contre cette ordonnance. Dans leur recours, ils ont notamment fait valoir qu'ils ne voyaient pas qui aurait pu tirer un avantage de la récusation de la juge en question, à l'exception du prévenu susmentionné, et que celui-ci ne l'avait pas réclamée. L'avocat précité a par ailleurs précisé qu'il était copropriétaire avec deux autres personnes de l'immeuble dans lequel logeait la magistrate et que la gestion de cet immeuble avait été confiée à une gérance immobilière.  
 
B.c. Par arrêt du 25 octobre 2023, la Chambre pénale de recours de la République et canton de Genève (ci-après: la Chambre pénale de recours) a rejeté la demande de récusation et a mis les frais de la procédure, arrêtés à 1'000 fr., à la charge de la requérante.  
 
C.  
Par acte du 27 novembre 2023, A.A.________ (ci-après: la recourante) forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre cet arrêt, en concluant à sa réforme en ce sens que la récusation de la juge E.________ soit ordonnée. Elle a en outre requis des mesures provisionnelles en ce sens qu'il soit fait interdiction au Tribunal correctionnel de tenir les débats fixés du 15 au 19, 25 et 26 janvier 2024, "avant droit connu par le Tribunal fédéral". Son avocat n'a pas produit de procuration à l'appui de son recours. 
Par ordonnance du 30 novembre 2023, adressée sous pli recommandé, le Président de la II e Cour de droit pénal du Tribunal fédéral a imparti à Me Robert Assaël un délai au 12 décembre 2023 pour remédier au défaut de procuration, en précisant qu'à défaut, son mémoire ne serait pas pris en considération. Le pli contenant cette ordonnance a été distribué à son destinataire le 1 er décembre 2023. L'avocat précité n'a pas produit la procuration sollicitée dans le délai imparti.  
Le 4 décembre 2023, la Chambre pénale de recours a indiqué qu'elle s'opposait à la requête de mesures provisionnelles et a renoncé à présenter des observations. 
Par courrier du 5 décembre 2023, la juge E.________ a déposé des déterminations et s'en est remise à justice. 
Le 7 décembre 2023, la Direction de la procédure du Tribunal correctionnel a déposé ses observations et a conclu au rejet du recours, ainsi que de la requête de mesures provisionnelles. 
Le 22 décembre 2023, la recourante a déposé des déterminations et a confirmé les conclusions prises dans son recours. 
 
 
Considérant en droit:  
 
1.  
 
1.1. Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 146 IV 185 consid. 2).  
Une décision - rendue par une autorité cantonale statuant en tant qu'instance unique (art. 80 al. 2 in fine LTF) - relative à la récusation de magistrats pénaux peut faire immédiatement l'objet d'un recours en matière pénale, malgré son caractère incident (cf. art. 78 et 92 al. 1 LTF). La recourante, prévenue, dont la demande de récusation a été rejetée, a qualité pour recourir en vertu de l'art. 81 al. 1 LTF.  
 
1.2. L'avocat Robert Assaël n'a pas produit la procuration de sa cliente avant l'échéance du délai qui lui a été imparti, malgré l'ordonnance du 30 novembre 2023 l'invitant à remédier à ce défaut et l'informant que, dans le cas contraire, son mémoire de recours ne serait pas pris en considération. Le recours doit dès lors être déclaré irrecevable au sens de l'art. 42 al. 5 LTF. Cela étant, le recours aurait de toute manière dû être rejeté sur le fond pour les motifs qui seront exposés ci-après (cf. consid. 2 et 3 infra).  
 
2.  
 
2.1. La recourante, qui invoque en particulier l'arbitraire, reproche à la cour cantonale de ne pas avoir tenu compte du fait que, le 25 octobre 2023, elle avait également rendu un autre arrêt, qui annulait l'ordonnance du 25 septembre 2023 interdisant à l'avocat G.________ de postuler. Elle fait valoir que l'autorité cantonale aurait dû se pencher et statuer sur la question, qu'il estime pertinente, de la récusation de la juge intimée en tenant compte du fait que le prénommé avait finalement été admis à postuler. Elle considère que ce fait serait déterminant et susceptible d'amener à un autre résultat concernant la question de la récusation de la magistrate intimée. La recourante invoque également une violation de son droit d'être entendue et un déni de justice sur ce point.  
 
2.2.  
 
2.2.1. Le Tribunal fédéral est lié par les constatations de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), sous les réserves découlant des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, soit pour l'essentiel l'arbitraire dans la constatation des faits (sur cette notion, v. ATF 145 IV 154 consid. 1.1). Le Tribunal fédéral n'examine de tels griefs ainsi que, de manière plus générale, tous ceux qui relèvent de la violation de droits fondamentaux, que s'ils sont invoqués et motivés par le recourant (art. 106 al. 2 LTF), soit s'ils ont été expressément soulevés et exposés de manière claire et détaillée. Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 145 IV 154 consid. 1.1; arrêt 6B_1148/2021 du 23 juin 2023 consid. 2.3).  
 
2.2.2. Le droit d'être entendu, garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., implique pour l'autorité l'obligation de motiver sa décision, afin que le destinataire puisse la comprendre, l'attaquer utilement s'il y a lieu et afin que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle. Le juge doit ainsi mentionner, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision (ATF 146 II 335 consid 5.1; 143 III 65 consid. 5.2; 139 IV 179 consid. 2.2), de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 143 IV 40 consid. 3.4.3; 141 IV 249 consid. 1.3.1; 139 IV 179 consid. 2.2). Il n'a toutefois pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut se limiter à l'examen des questions décisives pour l'issue du litige (ATF 147 IV 249 consid. 2.4; 142 II 154 consid. 4.2; 139 IV 179 consid. 2.2). La motivation peut d'ailleurs être implicite et résulter des différents considérants de la décision (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1; arrêt 6B_1246/2022 du 11 octobre 2023 consid. 3.1 et les arrêts cités). L'autorité qui ne traite pas un grief relevant de sa compétence, motivé de façon suffisante et pertinent pour l'issue du litige, commet un déni de justice formel proscrit par l'art. 29 al. 1 Cst. (ATF 142 II 154 consid. 4.2; arrêt 6B_1446/2021 du 9 décembre 2022 consid. 3.1.2 et l'arrêt cité).  
 
2.3. En l'espèce, comme on le verra ci-dessous (cf. consid. 3.4 infra), et contrairement aux affirmations de la recourante, la question de l'interdiction de postuler de l'avocat n'est pas déterminante dans le cadre de l'examen de sa demande de récusation. La recourante tente en effet de lier la question de la récusation de la magistrate intimée avec celle de la capacité de postuler de l'avocat en question. Pour ce faire, elle se fonde en particulier sur l'ordonnance d'interdiction de postuler du 25 septembre 2023, dans laquelle la direction de la procédure aurait indiqué que la situation constituait "assurément une cause de récusation de la magistrate". Or, quoi qu'en dise la recourante, et comme l'a relevé à juste titre l'autorité cantonale, il n'appartenait pas à la direction de la procédure de statuer sur la demande de récusation, mais à l'autorité de recours (cf. art. 59 al. 1 let. b CPP). Par ailleurs, la Chambre pénale de recours pouvait tout à fait avoir une appréciation différente de celle de la direction de la procédure et se fonder sur d'autres motifs pour rendre sa décision. Dans ces conditions, la recourante ne saurait valablement considérer que ce qu'a retenu cette dernière serait pertinent et nécessaire pour l'examen de la requête de récusation. En réalité, elle ne fait que plaider sa cause, dans une version qui l'arrange, en procédant à une démarche appellatoire. Dans la présente occurrence, la seule question qu'il convient d'examiner est celle de savoir si le fait que la magistrate intimée soit la locataire de l'avocat d'une partie à la procédure constitue, dans le cas particulier, un motif de récusation. On rappelle pour le surplus que la cour cantonale n'avait pas l'obligation de discuter tous les faits, moyens de preuve ou griefs et qu'elle pouvait, comme elle l'a en l'occurrence fait (cf. consid. 3.4 infra), se limiter aux questions décisives pour l'issue du litige. Ainsi, l'autorité cantonale n'a ni versé dans l'arbitraire, ni violé le droit d'être entendu de la recourante en ne mentionnant pas l'arrêt rendu le 23 octobre 2023 concernant l'interdiction de postuler de l'avocat concerné (ACPR/834/2023) dans le cadre de l'arrêt querellé.  
 
3.  
 
3.1. La recourante invoque une violation de l'art. 56 let. f CPP. Elle reproche à la cour cantonale d'avoir considéré que la juge intimée n'avait fait que formuler une hypothèse selon laquelle ce ne serait pas à elle de se déporter si la constitution de l'avocat en question faisait naître une cause de récusation. La recourante rappelle qu'il ne s'agirait, selon elle, pas d'une hypothèse, mais d'un fait avéré, et déduit du fait que la direction de la procédure a indiqué, dans sa décision d'interdiction de postuler, qu'il existait "assurément" une cause de récusation pour la magistrate intimée que cette dernière aurait en l'espèce également considéré que la récusation s'imposait. Elle relève en outre qu'un juge qui pose la question de sa récusation et de l'interdiction de postuler de l'avocat à la direction de la procédure manifesterait à tout le moins une apparence de parti pris et un malaise à juger. Enfin, elle critique de manière succincte les motifs pour lesquels l'autorité cantonale a retenu que le "risque qu'un jugement défavorable puisse venir affecter l'impartialité de la juge" n'était pas concret.  
 
3.2. Selon l'art. 56 let. f CPP, toute personne exerçant une fonction au sein d'une autorité pénale est tenue de se récuser lorsque d'autres motifs, notamment un rapport d'amitié étroit ou d'inimitié avec une partie ou son conseil juridique, sont de nature à la rendre suspecte de prévention.  
Cette disposition légale a la portée d'une clause générale recouvrant tous les motifs de récusation non expressément prévus à l'art. 56 let. a à e CPP. Elle correspond à la garantie d'un tribunal indépendant et impartial instituée par les art. 30 Cst. et 6 CEDH (ATF 148 IV 137 consid. 2.2; 143 IV 69 consid. 3.2). Elle concrétise également les droits déduits de l'art. 29 al. 1 Cst. garantissant l'équité du procès et assure au justiciable cette protection lorsque d'autres autorités ou organes que des tribunaux sont concernés (ATF 141 IV 178 consid. 3.2.2). Elle n'impose pas la récusation seulement lorsqu'une prévention effective du magistrat est établie, car une disposition interne de sa part ne peut guère être prouvée. Il suffit que les circonstances donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une activité partiale du magistrat. Seules les circonstances constatées objectivement doivent être prises en considération. Les impressions purement individuelles d'une des parties au procès ne sont pas décisives (ATF 148 IV 137 consid. 2.2; 143 IV 69 consid. 3.2). L'impartialité subjective d'un magistrat se présume jusqu'à preuve du contraire (ATF 136 III 605 consid. 3.2.1; arrêt 7B_189/2023 du 16 octobre 2023 consid. 2.2 et les arrêts cités). 
De jurisprudence constante, des liens d'amitié ou une inimitié peuvent créer une apparence objective de partialité à condition qu'ils soient d'une certaine intensité. En revanche, des rapports de voisinage, des études ou des obligations militaires communes ou des contacts réguliers dans un cadre professionnel ne suffisent en principe pas. Plus généralement, pour être à même de trancher un différend avec impartialité, un juge ne doit pas se trouver dans la sphère d'influence des parties (ATF 144 I 159 consid. 4.3; arrêt 1B_436/2021 du 6 janvier 2022 consid. 4.2). Un rapport d'obligation, notamment de subordination ou de dépendance, voire des liens particuliers entre le juge et une personne intéressée à l'issue de la procédure, telle qu'une partie ou son mandataire, peuvent, selon leur nature et leur intensité, fonder un soupçon de partialité (arrêt 1B_436/2021 du 6 janvier 2022 consid. 4.2 et les arrêts cités). Dans le monde judiciaire restreint des cantons, il est inévitable que juges et avocats se connaissent et se fréquentent; les exigences en matière d'apparence objective d'impartialité entre juges et mandataires des parties ne sauraient être poussées à un point tel que le fonctionnement normal de la justice en soit entravé (arrêt 1B_436/2021 du 6 janvier 2022 consid. 4.2 et les arrêts cités). 
 
3.3. La cour cantonale a considéré que la recourante n'avait pas démontré que la situation exposée par la juge intimée montrait, chez cette dernière, un risque de manquer à l'impartialité ou à d'autres devoirs d'un magistrat. Elle a relevé que la juge concernée n'avait formulé qu'une hypothèse, "à savoir que, si la constitution de l'avocat précité faisait naître une cause de récusation en raison d'un conflit latent en droit du bail, ce ne serait pas à elle de se déporter". L'autorité cantonale a ajouté que le CPP ne laissait pas à la discrétion de la juge concernée le soin de décider si la magistrate devait être récusée pour un motif d'inimitié au sens de l'art. 56 let. f CPP, ni à la direction de la procédure du tribunal de première instance, mais que c'était l'autorité de recours qui était compétente pour statuer sur ce point. L'autorité cantonale a ensuite relevé que l'avocat concerné n'était pas celui de la recourante, que celle-ci n'était pas la bailleresse de la juge intimée et qu'aucun procès n'était pendant entre cette dernière et l'avocat. Elle a en outre indiqué que le prévenu défendu par l'avocat en question n'avait pas demandé de récusation, que ce prévenu s'était même demandé qui y aurait eu un avantage, à part lui, et que, dans la prise de position du 25 septembre 2023, son avocat avait mis en évidence les relations très cordiales, dénuées d'inimitié, avec la magistrate mise en cause. La cour cantonale a dès lors conclu qu'en l'état, les travaux de surélévation de l'immeuble dans lequel logeait cette dernière n'avaient pas atteint le stade de simples tensions personnelles avec l'avocat concerné et que les relations avec les locataires avaient été déléguées de façon usuelle à une gérance immobilière. Elle a enfin ajouté qu'aucun procès ayant cet objet n'était pendant devant le tribunal compétent, de sorte que le risque qu'un jugement défavorable à la juge concernée puisse venir affecter l'impartialité attendue n'était pas concret.  
 
3.4. Cette argumentation ne prête pas le flanc à la critique et doit être confirmée.  
Tout d'abord, on ne saurait admettre, comme le prétend la recourante, que la juge intimée aurait admis l'existence d'un motif de récusation, uniquement parce que la direction de la procédure aurait considéré que la situation constituait "assurément" une cause de récusation. Il est également erroné d'affirmer que, dans la mesure où elle a posé la question de sa récusation à la direction de la procédure, la magistrate intimée aurait manifesté un parti pris, à tout le moins en apparence, ou un malaise à juger. Par ces affirmations, la recourante se contente de livrer sa propre interprétation subjective des faits de la cause. 
En réalité, la juge intimée a, dans son courriel du 22 septembre 2023, simplement informé la direction de la procédure qu'elle était la locataire de l'avocat d'une partie à la procédure, en indiquant qu'elle lui laissait le soin d'examiner si cet élément devait être porté à la connaissance des parties. Elle a précisé que les débats devaient avoir lieu dans une semaine et qu'elle avait une connaissance complète du dossier, de sorte qu'elle a évoqué la possibilité de l'interdiction de postuler de l'avocat, parce que celui-ci était intervenu après elle dans le cadre de la procédure. Cette attitude ne dénote aucun parti pris, même en apparence, mais traduit au contraire la transparence et la bonne foi de la magistrate, comme cela ressort par ailleurs de ses déterminations du 5 décembre 2023. Le courriel du 22 septembre 2023 n'avait en effet qu'un but d'information. La juge intimée n'y a en outre pris aucune position et a uniquement, comme l'a relevé la cour cantonale, formulé des hypothèses - dont l'éventuelle interdiction de postuler de l'avocat au lieu de sa propre éventuelle récusation - sur lesquelles elle a laissé le soin à la direction de la procédure de statuer. On ne saurait dès lors lui reprocher d'avoir, par l'envoi de ce simple courriel, adopté un comportement pouvant laisser entendre qu'elle pourrait se trouver dans une situation dans laquelle son objectivité pourrait être compromise. 
Pour le surplus, avec l'autorité cantonale, il y a lieu de considérer qu'il n'existe dans le cas d'espèce, et au regard de la situation telle qu'elle est décrite par les parties, pas de motif de récusation au sens de l'art. 56 let. f CPP. La magistrate intimée est en effet une des locataires d'un immeuble dont l'avocat concerné est copropriétaire. Il existe dès lors certes un rapport d'obligation entre cette dernière et le mandataire d'une des parties au procès. Cependant, en l'espèce, l'intensité du lien entre ces deux personnes n'est pas suffisante pour fonder un soupçon de partialité de la part de la juge en question. Dans leurs écritures, tous deux ont en effet relevé qu'ils n'avaient aucune inimitié l'un envers l'autre, mais au contraire qu'ils avaient en substance toujours entretenu des relations cordiales. La gestion de l'immeuble a en outre été confiée à une gérance immobilière et aucun litige en lien avec le contrat de bail qui lie les intéressés n'est en l'état pendant devant les autorités. Au demeurant, ce n'est pas parce que des travaux sont en cours dans un immeuble qu'ils impliquent nécessairement un litige, qui plus est devant les tribunaux. Quoi qu'il en soit, dans sa lettre du 25 septembre 2023, l'avocat en question a indiqué qu'il avait déjà été amené à plaider devant la magistrate en cause, qu'il ne s'occupait pas de la gestion de l'immeuble et que l'éventuel litige pouvant survenir en lien avec cet immeuble, dont il avait appris l'existence par la présente procédure, n'y changeait rien. Dans ces conditions, on ne saurait retenir qu'il existerait, à ce stade, des indices allant dans le sens que la juge intimée pourrait se trouver dans la sphère d'influence d'une partie au procès ou qu'il existerait un fort lien d'amitié ou d'inimitié entre les protagonistes en cause. En définitive, force est de constater que la recourante ne fonde sa demande de récusation sur aucune circonstance objective et qu'elle ne fait part que de ses impressions purement individuelles, qui ne sont en l'occurrence pas décisives. 
 
3.5. Il résulte de ce qui précède que l'autorité cantonale n'a pas violé le droit fédéral en rejetant la requête de récusation de la recourante, de sorte que le recours, s'il avait été recevable (cf. consid. 1.2 supra), n'aurait pu qu'être rejeté.  
 
4.  
La recourante, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
La cause étant jugée, la requête de mesures provisionnelles devient sans objet. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:  
 
1.  
Le recours est irrecevable. 
 
2.  
La requête de mesures provisionnelles est sans objet. 
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à F.________ et à la Chambre pénale de recours de la Cour de justice de la République et canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 27 décembre 2023 
 
Au nom de la IIe Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président: Abrecht 
 
Le Greffier: Magnin