4A_574/2022 23.05.2023
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
4A_574/2022  
 
 
Arrêt du 23 mai 2023  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Jametti, Présidente, Hohl et Rüedi. 
Greffier : M. Botteron. 
 
Participants à la procédure 
A.________ AG, 
 
recourante, 
 
contre  
 
B.________ SA, 
 
représentée par Me Michael Lavergnat, avocat, 
intimée. 
 
Objet 
expulsion de locataires pour cause de non-paiement du loyer (art. 257d CO) selon la procédure de protection dans les cas clairs (art. 257 CPC), 
 
recours contre l'arrêt rendu le 14 novembre 2022 par la Chambre des baux et loyers de la Cour de justice du canton de Genève (C/8864/2022, ACJC/1471/2022). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Le 15 octobre 2020, A.________ AG (ci-après: la bailleresse, la recourante) et B.________ SA (ci-après: la locataire, l'intimée) ont conclu un contrat de bail à loyer portant sur la location d'une arcade n° xxx au rez-de-chaussée et de locaux au sous-sol de l'immeuble sis rue de [...] à Genève. Le montant du loyer mensuel a été fixé à 6'000 fr. pour 2020, à 12'000 fr. pour 2021 puis à 17'000 fr. et 1'200 fr. de charges. 
Par avis comminatoire du 15 mars 2021, la bailleresse a mis la locataire en demeure de lui régler dans les 30 jours le montant de 106'270 fr. à titre de loyers et de charges pour la période du 1er janvier 2021 au 31 mars 2021 et des frais de rappel à hauteur de 70 fr. ainsi que de 75'000 fr. correspondant à cinq acomptes dus pour résorber les loyers d'un précédent contrat pour la période du 30 octobre 2020 au 28 février 2021, sous déduction d'un acompte de 8'400 fr. Elle a informé la locataire de son intention de résilier le bail conformément à l'art. 257d CO faute de paiement des sommes en souffrance dans le délai imparti. 
Ces montants n'ayant pas été intégralement réglés dans le délai imparti, la bailleresse a résilié le bail par avis officiel du 22 avril 2021, pour le 31 mai 2021. La locataire a contesté ce congé devant le Tribunal. 
 
B.  
Le 9 mai 2022, la bailleresse a introduit une requête en cas clair devant le Tribunal des baux et loyers du canton de Genève, sollicitant l'évacuation de la locataire avec exécution directe. 
Par jugement du 4 juillet 2022, le Tribunal des baux et loyers du canton de Genève a condamné la locataire a évacuer immédiatement l'arcade n° xxx au rez-de-chaussée et les locaux au sous-sol de l'immeuble et autorisé la bailleresse à requérir l'évacuation par la force publique de la locataire dès l'entrée en force du jugement. 
La Chambre des baux et loyers de la Cour de justice du canton de Genève a admis l'appel et déclaré la requête en cas clair irrecevable, par arrêt du 14 novembre 2022. Elle a considéré que la condition de la situation juridique claire faisait défaut au vu des fermetures d'établissements publics entraînées par la pandémie de Covid-19 et des incertitudes qu'elles faisaient peser sur les droits et obligations des parties au contrat de bail. 
 
C.  
Contre cet arrêt qui lui a été notifié le 16 novembre 2022, la bailleresse a interjeté un recours en matière civile au Tribunal fédéral le 16 décembre 2022. Elle conclut principalement à son annulation et à ce que sa requête de cas clair soit déclarée recevable, et que la locataire soit condamnée à évacuer immédiatement de sa personne, de tous ses biens et de tous tiers, l'arcade et les locaux loués ainsi que ses dépendances, ainsi qu'à ce qu'elle soit autorisée à faire exécuter sans délai le jugement par la force publique. Subsidiairement, elle conclut au renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision au sens des considérants. 
La locataire a conclu au rejet du recours. 
La cour cantonale s'est référée aux considérants de son arrêt. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Interjeté en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) par la bailleresse, qui a succombé dans ses conclusions en expulsion de la locataire (art. 76 al. 1 LTF), et dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) rendue sur appel par le Tribunal supérieur du canton de Genève (art. 75 LTF) dans une affaire de droit du bail (art. 72 al. 1 LTF), dont la valeur litigieuse dépasse 15'000 fr. (art. 74 al. 1 let. a LTF; cf. ATF 144 III 346 consid. 1.2.1 et 1.2.2.3), le recours en matière civile est en principe recevable. 
 
2.  
 
2.1. Saisi d'un recours en matière civile contre une décision rendue en procédure de protection dans les cas clairs, le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il revoit ainsi librement l'application de l'art. 257 CPC (art. 95 let. a LTF; ATF 138 III 728 consid. 3.2, 620 consid. 5), pour autant que le recours soit motivé conformément aux exigences de l'art. 42 al. 2 LTF (ATF 140 III 115 consid. 2). Toutefois, le Tribunal fédéral n'est lié ni par les motifs invoqués par les parties, ni par l'argumentation juridique retenue par l'autorité cantonale; il peut donc admettre le recours pour d'autres motifs que ceux invoqués par le recourant, comme il peut le rejeter en opérant une substitution de motifs (ATF 135 III 397 consid. 1.4; 134 III 102 consid. 1.1; 133 III 545 consid. 2.2).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Relèvent de ces faits tant les constatations relatives aux circonstances touchant l'objet du litige que celles concernant le déroulement de la procédure conduite devant l'instance précédente et en première instance, c'est-à-dire les constatations ayant trait aux faits procéduraux (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 et les références citées). Le Tribunal fédéral ne peut rectifier ou compléter les constatations de l'autorité précédente que si elles sont manifestement inexactes, c'est-à-dire arbitraires (ATF 140 III 115 consid. 2; 135 III 397 consid. 1.5) ou ont été établies en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). Encore faut-il que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF).  
La critique de l'état de fait retenu est soumise au principe strict de l'allégation énoncé par l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 140 III 264 consid. 2.3 et les références). La partie qui entend attaquer les faits constatés par l'autorité précédente doit expliquer clairement et de manière circonstanciée en quoi les conditions précitées seraient réalisées (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 et les références). Les critiques de nature appellatoire, tendant simplement à une nouvelle appréciation des preuves, sont irrecevables (ATF 133 II 249 consid. 1.4.3). Si elle souhaite obtenir un complètement de l'état de fait, la partie doit aussi démontrer, par des renvois précis aux pièces du dossier, qu'elle a présenté aux autorités précédentes en conformité avec les règles de procédure les faits juridiquement pertinents à cet égard et les moyens de preuve adéquats (ATF 140 III 86 consid. 2). Si la critique ne satisfait pas à ces exigences, les allégations relatives à un état de fait qui s'écarterait de celui de la décision attaquée ne pourront pas être prises en considération (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1). Aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF). 
 
3.  
Lorsque le bailleur introduit une requête d'expulsion du locataire dont il a résilié le bail pour cause de retard dans le paiement du loyer ou de frais accessoires échus au sens de l'art. 257d CO, selon la procédure de protection dans les cas clairs de l'art. 257 CPC, la cause est soumise tant aux conditions de droit matériel de l'art. 257d CO qu'aux règles de procédure de l'art. 257 CPC
 
3.1. La réglementation de droit matériel mise en place par le législateur à l'art. 257d CO signifie que le locataire mis en demeure doit évacuer l'objet loué dans les plus brefs délais s'il ne paie pas le loyer en retard. Une prolongation du bail est exclue de par la loi (art. 272a al. 1 let. a CO). Selon la jurisprudence, la contre-créance invoquée en compensation par le locataire doit donc pouvoir être prouvée sans délai, sous peine de contrecarrer la volonté du législateur de permettre au bailleur de mettre fin au bail et d'obtenir l'évacuation du locataire dans les plus brefs délais (arrêt 4A_140/2014 du 6 août 2014 consid. 5.2). Cette exigence se justifie d'autant plus que le locataire qui prétend avoir une créance en réduction de loyer ou en dommages-intérêts pour cause de défauts de l'objet loué n'a ni le droit de retenir tout ou partie du loyer échu, ni la possibilité de consigner le loyer (arrêt précité, loc. cit.). Cette jurisprudence s'applique également dans le cadre de la procédure de protection dans les cas clairs de l'art. 257 CPC (cf. arrêt 4A_452/2021 du 4 janvier 2022 consid. 2.2 et 3.4; 4A_422/2020 du 2 novembre 2020 consid. 4).  
 
3.2. La procédure de protection dans les cas clairs de l'art. 257 CPC permet d'obtenir rapidement une décision ayant l'autorité de la chose jugée et la force exécutoire lorsque la situation de fait et de droit n'est pas équivoque (ATF 138 III 620 consid. 5.1.1, avec référence au Message du 28 juin 2006 relatif au CPC, FF 2006 6959 ad art. 253; arrêt 4A_282/2015 du 27 juillet 2015 consid. 2.1).  
 
3.2.1. Aux termes de l'art. 257 al. 1 CPC, le tribunal admet l'application de la procédure sommaire de protection dans les cas clairs lorsque les conditions suivantes sont remplies: (a) l'état de fait n'est pas litigieux ou est susceptible d'être immédiatement prouvé et (b) la situation juridique est claire. En revanche, si ces conditions ne sont pas remplies, le tribunal n'entre pas en matière sur la requête (art. 257 al. 3 CPC). Le juge ne peut que prononcer son irrecevabilité; il est en effet exclu que la procédure puisse aboutir au rejet de la prétention du demandeur avec autorité de la chose jugée (ATF 144 III 462 consid. 3.1; 140 III 315 consid. 5).  
La procédure à suivre est la procédure sommaire des art. 248 ss CPC (art. 248 let. b CPC). Elle est régie par la maxime des débats (art. 55 al. 1 CPC), sauf dans les deux cas particuliers prévus par l'art. 255 CPC (lequel est réservé par l'art. 55 al. 2 CPC). Toutefois, dans l'application de cette maxime, il y a lieu de tenir compte des spécificités de la procédure de protection dans les cas clairs (ATF 144 III 462 consid. 3.2; arrêt 4A_218/2017 du 14 juillet 2017 consid. 3.1). 
 
3.2.2. La recevabilité de la procédure de protection dans les cas clairs est donc soumise à deux conditions cumulatives.  
 
3.2.2.1. Premièrement, l'état de fait n'est pas litigieux lorsqu'il n'est pas contesté par le défendeur; il est susceptible d'être immédiatement prouvé lorsque les faits peuvent être établis sans retard et sans trop de frais. En règle générale, la preuve est rapportée par la production de titres, conformément à l'art. 254 al. 1 CPC. La preuve n'est pas facilitée: le demandeur doit ainsi apporter la preuve certaine (voller Beweis) des faits justifiant sa prétention; la simple vraisemblance (Glaubhaftmachen) ne suffit pas. Si le défendeur fait valoir des objections et exceptions motivées et concluantes (substanziiert und schlüssig), qui ne peuvent être écartées immédiatement et qui sont de nature à ébranler la conviction du juge, la procédure du cas clair est irrecevable (ATF 144 III 462 consid. 3.1; 141 III 23 consid. 3.2; 138 III 620 consid. 5.1.1 et les arrêts cités).  
 
3.2.2.2. Secondement, la situation juridique est claire lorsque l'application de la norme au cas concret s'impose de façon évidente au regard du texte légal ou sur la base d'une doctrine et d'une jurisprudence éprouvées (ATF 144 III 462 consid. 3.1; 138 III 123 consid. 2.1.2, 620 consid. 5.1.1, 728 consid. 3.3). En règle générale (cf. toutefois l'arrêt 4A_185/2017 du 15 juin 2017 consid. 5.4 et les références citées), la situation juridique n'est pas claire si l'application d'une norme nécessite l'exercice d'un certain pouvoir d'appréciation de la part du juge ou que celui-ci doit rendre une décision en équité, en tenant compte des circonstances concrètes de l'espèce (ATF 144 III 462 consid. 3.1; 141 III 23 consid. 3.2; 138 III 123 consid. 2.1.2; arrêt 4A_273/2012 du 30 octobre 2012 consid. 5.1.2, non publié in ATF 138 III 620).  
 
3.3. Il appartient au bailleur d'alléguer et de prouver les conditions de l'art. 257d CO (faits générateurs de droit; rechtsbegründende Tatsachen), conformément aux exigences de l'art. 257 CPC. En effet, si le locataire conteste la résiliation du bail (art. 150 al. 1 in fine et 55 al. 1 CPC), le tribunal devra examiner la question de la validité de celle-ci à titre préjudiciel, autrement dit vérifier si les conditions matérielles de l'art. 257d al. 1 et 2 CO sont remplies. Les conditions de l'art. 257 CPC s'appliquent également à cette question préjudicielle (ATF 144 III 462 consid. 3.3.1; 142 III 515 consid. 2.2.4 in fine; 141 III 262 consid. 3.2 in fine; sur la notification de l'avis comminatoire et de la résiliation, cf. arrêt 4A_234/2022 du 21 novembre 2022 consid. 4.1).  
 
3.4. De son côté, le locataire qui oppose la compensation doit prouver celle-ci sans délai (faits destructeurs; rechtsvernichtende Tatsachen).  
Le locataire doit alléguer et prouver que, sommé de payer son loyer sous menace de résiliation, il a fait la déclaration de compensation avant l'échéance du délai de grâce de l'art. 257d al. 1 CO (ATF 119 II 241 consid.6b/bb et cc; arrêts 4A_157/2021 du 15 juin 2021 consid. 7.2; 4A_422/2020 précité consid. 4.2 et les arrêts cités). Il doit également alléguer sa contre-créance et être en mesure de la prouver sans délai. Pour que soit respectée la volonté du législateur lors de l'adoption de l'art. 257d CO, le juge doit en effet pouvoir se prononcer sur l'existence et le montant de la contre-créance rapidement (arrêts 4A_140/2014 précité consid. 5.2). Il doit en aller de même lorsque le locataire prétend seulement à une réduction de son loyer. 
 
4.  
 
4.1. La recourante reproche à la cour cantonale d'avoir violé l'art. 257d CO ainsi que l'art. 257 CPC en considérant que l'éventuel droit de la locataire à une baisse de loyer durant la période des fermetures d'établissements publics en raison de la pandémie de Covid-19 n'était pas clair.  
La recourante invoque que la cour cantonale n'a de toute façon pas examiné si la locataire avait valablement invoqué la compensation de son éventuelle créance en baisse ou suppression du loyer durant le délai comminatoire, avant même d'envisager si celle-ci pouvait ou non y prétendre. La recourante démontre avoir pourtant, après avoir obtenu gain de cause en première instance, invoqué ce grief dans sa réponse à l'appel. 
 
4.2. La possibilité d'opposer en compensation une contre-créance contestée existe pour le locataire mis en demeure de payer un arriéré de loyer (art. 257d CO). Comme on vient de le voir, la déclaration de compensation doit toutefois intervenir avant l'échéance du délai de grâce.  
 
4.3. En l'espèce, c'est en violation de l'art. 257d CO que la cour cantonale n'a pas examiné si la locataire avait fait, dans le délai de grâce de 30 jours fixé dans l'avis comminatoire, la déclaration de compensation avec sa prétendue contre-créance en réduction ou suppression de loyers et d'acomptes de frais accessoires en raison des fermetures administratives d'établissements ordonnées durant la pandémie de Covid-19.  
La Cour de céans est en mesure de statuer sur ce point. En effet, lors de l'audience en première instance, la bailleresse a invoqué que, lors de la conclusion du bail en octobre 2020, à une époque où la problématique de la pandémie de Covid-19 était connue, la locataire, qui avait négocié son loyer à la baisse et obtenu une renonciation partielle à l'arriéré et deux mois de loyer gratuits, n'avait invoqué aucune compensation pendant le délai comminatoire. 
Alors que le tribunal des baux avait ordonné l'expulsion de la locataire, qui a formé un appel, la bailleresse a, dans sa réponse à l'appel, invoqué l'absence d'invocation d'une quelconque compensation dans le délai comminatoire. 
La cour cantonale ayant déclaré irrecevable la requête d'expulsion de la bailleresse, celle-ci a invoqué à nouveau dans son recours en matière civile que la locataire n'avait opposé aucune créance en compensation pendant le délai comminatoire. Dans sa réponse au présent recours, la locataire intimée, qui a bien compris le grief soulevé par la partie adverse, se limite à soutenir que la question du paiement des loyers pendant la pandémie devrait faire l'objet d'une analyse approfondie. Ce faisant, elle ne conteste pas son absence d'invocation de la compensation dans le délai comminatoire. 
Il s'ensuit que, sur ce point, les faits ne sont pas litigieux et la situation juridique est claire. La locataire n'a pas invoqué la compensation dans le délai de grâce. 
 
5.  
La Cour de céans peut se dispenser de renvoyer la cause à la cour cantonale pour décision sur les autres conditions de l'art. 257d CO. En effet, le Tribunal des baux avait considéré que l'avis comminatoire en ce qui concerne les montants à payer était clair et que la locataire ne les avait pas intégralement payés, de sorte que les conditions de l'art. 257 CPC étaient réalisées. Comme la locataire n'a pas remis ces points en cause en appel, ils ont force de chose jugée. 
 
6.  
En ce qui concerne le second grief dont était saisie la cour cantonale, à savoir l'absence de justification de ses pouvoirs de représentation du représentant de la recourante, la cour cantonale l'a écarté et la locataire n'y revient pas, de sorte que cette question n'est plus litigieuse devant la Cour de céans. La bailleresse ayant procédé par l'intermédiaire de sa régie, il n'y a pas lieu de lui allouer des dépens (art. 68 al. 1 LTF; arrêt 4C.269/2002 du 17 décembre 2002, consid. 6). 
 
7.  
Au vu de ce qui précède, le recours doit être admis, l'arrêt attaqué annulé et réformé en ce sens que la requête de la bailleresse en expulsion de la locataire doit être admise. L'intimée prendra à sa charge les frais de la procédure (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est admis, l'arrêt attaqué est annulé et réformé comme suit: 
(1.) B.________ SA est condamnée à évacuer immédiatement de sa personne, de tout tiers dont elle est responsable et de ses biens l'arcade n° xxx au rez-de-chaussée et les locaux au sous-sol de l'immeuble sis rue [...] à Genève. 
(2.) A.________ AG est autorisée à requérir l'évacuation par la force publique de B.________ SA dès ouverture du présent arrêt. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 8'500 fr., sont mis à la charge de l'intimée. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Chambre des baux et loyers de la Cour de justice du canton de Genève. 
 
 
Lausanne, le 23 mai 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jametti 
 
Le Greffier : Botteron