6B_888/2023 29.11.2023
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_888/2023  
 
 
Arrêt du 29 novembre 2023  
 
Ire Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, 
Muschietti et van de Graaf. 
Greffière : Mme Klinke. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Liza Sant'Ana Lima, avocate, 
recourant, 
 
contre  
 
1. Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens VD, 
2. B.________, 
représentée par Me José Coret, avocat, 
intimés. 
 
Objet 
Séquestration; présomption d'innocence, 
 
recours contre le jugement de la Cour d'appel 
pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud 
du 10 mars 2023 (n° 180 PE20.006705-MNU/AUI). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par jugement du 30 novembre 2022, le Tribunal de police de l'arrondissement de La Côte a libéré A.________ des chefs de voies de fait qualifiées (cas 1 et 3), menaces qualifiées (cas 4) et tentative de contrainte (cas 5) (ch. I du dispositif) et a libéré B.________ des chefs de tentative de lésions corporelles simples qualifiées (cas 3), voies de fait qualifiées (cas 3 et 4), menaces qualifiées (cas 4), tentative de menaces qualifiées (cas 3) et dénonciation calomnieuse (cas 6) (ch. II du dispositif). Le tribunal a reconnu A.________ coupable de séquestration (cas 2) (ch. III du dispositif) et l'a condamné à une peine pécuniaire de 60 jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 50 fr. (ch. IV du dispositif), a suspendu l'exécution de cette peine et fixé un délai d'épreuve de 2 ans (ch. V du dispositif). Il a renoncé à révoquer le sursis accordé le 1er septembre 2016 par le Ministère public de l'arrondissement de La Côte (ch. VI du dispositif), a alloué à B.________ une indemnité de 2'572 fr. 25 et à A.________ une indemnité de 1'750 fr. au sens de l'art. 429 CPP (ch. VII et VIII du dispositif) et a mis les frais de procédure par 856 fr. 25 à la charge de ce dernier, le solde étant laissé à la charge de l'Etat (ch. IX du dispositif). 
 
B.  
Par jugement du 10 mars 2023, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, l'appel formé par A.________ contre le jugement de première instance, jugement qu'elle a confirmé. A.________ a été condamné aux frais de la procédure d'appel, par 990 francs. 
Le jugement cantonal se fonde en substance sur les faits suivants. 
 
B.a. En 2018, A.________ a noué une relation sentimentale avec B.________, avec laquelle il a eu une fille, C.________, née en 2020. Le couple s'est séparé en septembre 2020. B.________ a obtenu la garde de l'enfant.  
 
B.b. En mars 2020, à U.________, au sein du domicile du couple, A.________, qui était rentré alcoolisé, a enfermé B.________ dans une partie de leur appartement et l'y a laissée toute la nuit, alors qu'elle était enceinte et que sa grossesse arrivait à son terme.  
 
B.c. L'extrait du casier judiciaire de A.________ mentionne une condamnation prononcée le 1er septembre 2016 par le Ministère public de l'arrondissement de La Côte à une peine pécuniaire de 70 jours-amende à 40 fr. le jour, avec sursis pendant 3 ans, et à une amende de 720 fr. pour conduite en état d'ébriété qualifiée.  
 
C.  
A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre le jugement cantonal et conclut à sa libération du chef de séquestration, ainsi qu'à l'allocation d'une indemnité de 10'000 fr. au sens de l'art. 429 al. 1 let. a CPP
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir fait preuve d'arbitraire dans l'établissement des faits et d'avoir violé le principe in dubio pro reo dans l'appréciation des preuves.  
 
1.1.  
 
1.1.1. Le Tribunal fédéral n'est pas une autorité d'appel, auprès de laquelle les faits pourraient être rediscutés librement. Il est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'elles n'aient été établies en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, soit pour l'essentiel de façon arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. Une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle apparaît discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable et cela non seulement dans sa motivation mais aussi dans son résultat (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1; 145 IV 154 consid. 1.1; 143 IV 241 consid. 2.3.1). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables. Le Tribunal fédéral n'entre en matière sur les moyens fondés sur la violation de droits fondamentaux, dont l'interdiction de l'arbitraire, que s'ils ont été invoqués et motivés de manière précise (art. 106 al. 2 LTF; ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 148 IV 409 consid. 2.2; 147 IV 73 consid. 4.1.2).  
La présomption d'innocence, garantie par les art. 10 CPP, 32 al. 1 Cst., 14 par. 2 Pacte ONU II et 6 par. 2 CEDH, ainsi que son corollaire, le principe in dubio pro reo, concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large (ATF 145 IV 154 consid. 1.1; 144 IV 345 consid. 2.2.3.1; 127 I 38 consid. 2a). En tant que règle sur le fardeau de la preuve, elle signifie, au stade du jugement, que ce fardeau incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. Comme règle d'appréciation des preuves (sur la portée et le sens précis de la règle sous cet angle, cf. ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3), la présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective. Lorsque l'appréciation des preuves et la constatation des faits sont critiquées en référence au principe in dubio pro reo, celui-ci n'a pas de portée plus large que l'interdiction de l'arbitraire (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1; 145 IV 154 consid. 1.1 et les arrêts cités).  
 
1.1.2. Les déclarations de la victime constituent un élément de preuve. Le juge doit, dans l'évaluation globale de l'ensemble des éléments probatoires rassemblés au dossier, les apprécier librement (arrêts 6B_912/2022 du 7 août 2023 consid. 3.1.2; 6B_174/2022 du 12 janvier 2023 consid. 5.1.3), sous réserve des cas particuliers où une expertise de la crédibilité des déclarations de la victime s'impose (ATF 129 IV 179 consid. 2.4). Les cas de déclarations contre déclarations, dans lesquels les déclarations de la victime en tant que principal élément à charge et les déclarations contradictoires de la personne accusée s'opposent, ne doivent pas nécessairement, sur la base du principe in dubio pro reo, conduire à un acquittement. L'appréciation définitive des déclarations des participants incombe au tribunal du fond (ATF 137 IV 122 consid. 3.3; arrêts 6B_912/2022 précité consid. 3.1.2; 6B_330/2021 du 15 septembre 2021 consid. 2.3).  
 
1.1.3. A teneur de l'art. 183 ch. 1 al. 1 CP, quiconque, sans droit, arrête une personne, la retient prisonnière, ou, de toute autre manière, la prive de sa liberté est puni d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire.  
 
1.2. Se fondant sur l'appréciation faite par le premier juge des déclarations des parties, la cour cantonale a considéré que l'intimée avait livré un récit circonstancié, étant en mesure de donner des détails a priori insignifiants. Elle avait en outre immédiatement confié cet incident à son amie D.________, qui avait confirmé en avoir entendu parler. Toutes deux s'accordaient sur le principe d'un enfermement, cette amie ayant conseillé à l'intimée d'en parler rapidement. Par ailleurs, l'intimée s'était montrée mesurée dans ses accusations et dans le cadre des différentes altercations ayant émaillé la vie du couple, notamment en retirant successivement ses plaintes pénales, en sollicitant la suspension de la procédure au sens de l'art. 55a CP et en renonçant à demander l'expulsion de son compagnon du logement familial, même après l'intervention de la police. Elle n'avait aucunement accablé le recourant, faisant même état de ses doutes s'agissant de son intention délictueuse en raison de la consommation d'alcool de celui-ci. Quant à la datation des faits, l'intimée avait situé l'épisode de la séquestration en mars 2020, ce qui était manifestement suffisant.  
Au vu de ces éléments, la cour cantonale n'a pas suivi la thèse de la vengeance plaidée par le recourant, laquelle n'était fondée sur aucun élément objectif. A cet égard, la teneur des messages de l'intimée, reproduits dans la déclaration d'appel, pouvaient tout aussi bien s'expliquer par la colère légitime de cette dernière. 
 
1.3. Selon le recourant, l'absence d'éléments matériels permettant d'étayer l'une ou l'autre des versions, empêchait le juge de privilégier celle de l'intimée. Ce faisant, il omet que l'établissement des faits peut reposer sur les déclarations de la victime, comme élément principal à charge, en particulier dans des configurations comme celle prévalant en l'espèce, s'agissant de faits qui se sont déroulés à huis clos, au domicile du couple (cf. supra consid. 1.1.2).  
Le recourant reproche à la cour cantonale de s'être fondée sur les déclarations de l'intimée alors qu'elle n'était pas en mesure de préciser le jour des faits incriminés. Or l'intimée a indiqué que l'événement s'était produit en mars 2020 (jugement entrepris consid. 3.2 avec renvoi au jugement de première instance, cf. p. 25 et p. 15, mémoire de recours p. 6), à une date très proche du terme de sa grossesse (jugement de première instance p. 15, mémoire de recours p. 7) leur fille étant née le [...] 2020. Elle a donné d'autres indications temporelles, précisant que les intéressés étaient allés acheter des meubles à "E.________" ce jour-là, et qu'elle pourrait retrouver la date sur la base des rapports de l'hôpital de V.________, où les violences psychologiques avaient été constatées (cf. jugement de première instance p. 15 et 25; cf. renvoi du jugement entrepris consid. 3.2). Compte tenu de ces éléments, le recourant ne saurait reprocher à la cour cantonale d'avoir fait preuve d'arbitraire en considérant que les déclarations de l'intimée au sujet de la datation des faits étaient suffisantes. Le recourant ne se prévaut pas d'une violation du principe d'accusation sur ce point. 
A l'appui de son grief d'arbitraire, le recourant fait valoir que l'intimée se serait contredite sur le lieu où les faits se seraient déroulés (mémoire de recours p. 11). Or, si le premier juge a admis une divergence sur la question du lieu précis de l'enfermement ("dans une pièce de l'appartement" devant le ministère public, respectivement "une partie du logement" devant la police et aux débats), il a relevé que l'intimée avait toujours été constante sur le fait qu'elle avait été empêchée de quitter le logement (jugement de première instance p. 26 s.), ce qui constitue l'élément déterminant. Le recourant ne remet pas en cause cette appréciation et ne formule aucun grief suffisamment motivé sous l'angle de l'art. 106 al. 2 LTF sur ce point. Toujours s'agissant du lieu d'enfermement, le recourant soulève une contradiction entre les déclarations de l'intimée et de son amie, quant à l'accès aux toilettes pendant l'épisode de séquestration en cause. Or, relevant que les déclarations de l'intimée et de son amie concordaient sur le principe de l'enfermement et sur le conseil de cette dernière d'en parler rapidement, les juges cantonaux ont considéré que la contradiction concernant l'accès aux toilettes n'entachait pas la crédibilité de l'enferment dans son ensemble (jugement entrepris consid. 3.2 avec renvoi au jugement de première instance p. 25 s., lequel évoque une possible mémoire imparfaite ou extrapolation des propos rapportés). En se limitant à soulever cette contradiction, dont la cour cantonale a tenu compte, le recourant échoue à démontrer l'arbitraire dans l'appréciation circonstanciée des différentes déclarations. Il ne saurait rien en déduire sous l'angle de la présomption d'innocence. 
Le recourant reproche aux juges précédents d'avoir écarté la thèse selon laquelle l'intimée aurait construit les faits par esprit de vengeance. Il se prévaut de certains extraits de messages échangés entre les parties. Or la cour cantonale a tenu compte de ces messages et a relevé que ceux-ci pouvaient s'expliquer par la colère légitime de l'intimée, au vu notamment des nombreux épisodes de violence ayant émaillé la vie de couple (cf. jugement entrepris consid. 3.2). Il ressort en outre du raisonnement du premier juge, auquel renvoie le jugement entrepris, que l'intimée n'était pas animée par la recherche de vengeance. Cette conclusion reposait notamment sur le fait qu'elle n'avait pas souhaité l'expulsion de son compagnon lors de l'intervention de la police au domicile du couple le 22 mars 2020, qu'elle avait exigé la confidentialité de ses révélations au personnel soignant s'agissant des violences subies, qu'elle avait rapidement retiré ses plaintes pénales et sollicité la suspension de la procédure (art. 55a CP) et qu'elle avait plusieurs fois justifié le délai de dénonciation par sa volonté de préserver l'homme qu'elle aimait et qui se trouvait être le père de sa fille. Aux débats de première instance, l'intimée était apparue sincère et cohérente dans ses propos, n'ayant jamais cherché à invectiver son ex-compagnon ni à l'accabler et était encore très émotive à l'évocation des faits et du litige parental. Elle était même allée jusqu'à douter des réelles intentions du recourant lorsqu'elle s'est retrouvée enfermée. En outre, ce n'était pas systématiquement elle qui avait fait appel aux forces de l'ordre mais également le voisinage et le recourant lui-même (jugement de première instance p. 26). Le recourant ne dit mot sur les nombreux éléments pris en compte par les juges précédents pour écarter la thèse de la vengeance et se contente d'affirmer que les messages échangés seraient des preuves inébranlables du désir de vengeance de l'intimée (cf. mémoire de recours p. 10). Un tel procédé est purement appellatoire, partant irrecevable. 
L'appréciation personnelle livrée par le recourant, selon laquelle il serait tout à fait possible, objectivement parlant, que les faits en question n'aient jamais existé (mémoire de recours p. 12), est irrecevable. 
Contrairement à ce que suggère le recourant, la cour cantonale n'a pas fondé sa condamnation pour séquestration sur la base d'autres actes de violence commis, mais a apprécié les déclarations contradictoires des parties concernant l'infraction en cause, dans leur contexte, conformément aux principes jurisprudentiels en la matière (cf. supra consid. 1.1.1 et 1.1.2).  
En définitive, dans une démarche apparaissant largement appellatoire, le recourant échoue à démontrer l'arbitraire dans l'appréciation des preuves et l'établissement des faits. 
 
2.  
Pour le surplus, le recourant ne forme aucun grief sous l'angle de l'art. 183 ch. 1 CP (s'agissant de cette infraction, cf. notamment ATF 141 IV 10 consid. 4.3 s.) et ne conteste d'aucune manière la peine infligée, de sorte qu'il n'y a pas lieu de s'arrêter sur ces points du jugement entrepris. 
Dans la mesure où le recourant n'obtient pas l'acquittement du chef de séquestration, sa conclusion tendant à l'allocation d'une indemnité au sens de l'art. 429 al. 1 let. a CPP, due en cas d'acquittement, devient sans objet. 
 
3.  
Le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Le recourant, qui succombe, supporte les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 29 novembre 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
La Greffière : Klinke