7B_9/2023 22.11.2023
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
7B_9/2023  
 
 
Arrêt du 22 novembre 2023  
 
IIe Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mme et MM. les Juges fédéraux, Koch, Juge présidant, 
Hurni et Hofmann, 
Greffière : Mme Rubin. 
 
Participants à la procédure 
A.A., B.A. et C.A.________, 
 
recourants, 
 
contre  
 
Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens VD, 
intimé. 
 
Objet 
Ordonnance de classement et de non-entrée en matière, 
 
recours contre l'arrêt de la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 25 octobre 2022 
(n° 802 PE18.013807-ABG). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. En 2018, D.A.________, né en 1997, est décédé à U.________ après s'être jeté du toit d'un bâtiment. Il résidait de manière volontaire, depuis 2016, au foyer V.________ à U.________, qui offre notamment aux jeunes adultes atteints de troubles psychiatriques un lieu de vie temporaire, en milieu ouvert.  
 
A.b. Une procédure pénale a été ouverte par le Ministère public de l'arrondissement de Lausanne (ci-après: le Ministère public) le jour du décès, afin d'en établir les circonstances.  
 
A.c. Les 27 et 30 août 2018, A.A., B.A. et C.A.________, soit respectivement la mère, la soeur et le père de D.A.________, ont déposé plainte pénale contre inconnu, soupçonnant les dirigeants et le personnel du foyer V.________ d'avoir, par omission fautive, provoqué le suicide de celui-ci.  
 
A.d. Le 16 février 2022, A.A., B.A. et C.A.________ ont déposé une nouvelle plainte pénale contre cinq personnes, à savoir la directrice du foyer V.________, l'éducatrice référente de D.A.________, l'assistante sociale en charge du dossier de la famille A.________ auprès de l'Etablissement Vaudois d'Accueil des Migrants (ci-après: l'EVAM), le chef des assistants sociaux de l'EVAM et une employée de l'EVAM. A.A., B.A. et C.A.________ leur ont notamment reproché d'avoir, probablement en vue de s'enrichir, abusé des pouvoirs de leur charge pour contourner les règles applicables à l'admission de D.A.________ au foyer V.________, notamment sur le plan financier, ainsi que de l'avoir contraint à intégrer ladite institution puis à y rester.  
 
A.e. Par ordonnances distinctes du 18 août 2022, le Ministère public a classé la procédure ouverte à la suite du décès de D.A.________ et a refusé d'entrer en matière sur la plainte pénale déposée le 16 février 2022 par A.A., B.A. et C.A.________.  
 
B.  
A.A., B.A. et C.A.________ ont formé le 1 er septembre 2022 un recours contre les ordonnances de classement et de non-entrée en matière précitées auprès de la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: l'autorité précédente ou la cour cantonale). Cette dernière a déclaré le recours irrecevable par arrêt du 25 octobre 2022.  
 
C.  
Par acte du 11 janvier 2023, A.A., B.A. et C.A.________ forment un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt précité. Ils concluent à l'admission de leur recours et à l'annulation de l'arrêt entrepris. De plus, ils concluent à ce que les "demandes pour la suite de l'enquête" énumérées dans leur courrier du 16 février 2022 au Ministère public et dans leur recours auprès de la Cour de céans soient "prises en compte". En outre ils sollicitent à ce que l'un d'entre eux soit auditionné. Ils requièrent par ailleurs l'assistance judiciaire et la désignation d'un avocat en qualité de défenseur d'office. 
Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 146 IV 185 consid. 2). 
 
1.1. Le recours est ici dirigé contre une décision d'irrecevabilité prise en dernière instance cantonale (art. 80 al. 1 LTF) dans le cadre d'une procédure pénale. Le recours en matière pénale, au sens de l'art. 78 al. 1 LTF, est donc ouvert. Le recours a en outre été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF).  
 
1.2. Indépendamment des conditions posées par l'art. 81 al. 1 LTF, la partie recourante est aussi habilitée à se plaindre d'une violation de ses droits de partie équivalant à un déni de justice formel, sans toutefois pouvoir faire valoir par ce biais, même indirectement, des moyens qui ne peuvent être séparés du fond (ATF 146 IV 76 consid. 2; 141 IV 1 consid. 1.1; arrêt 7B_34/2022 du 18 juillet 2023 consid. 2.4). En l'espèce, la cour cantonale a déclaré irrecevable le recours intenté par le recourant contre l'ordonnance de classement et l'ordonnance de non-entrée en matière du Ministère public, pour défaut de motivation, respectivement pour défaut de qualité pour recourir. En tant que les recourants se plaignent d'avoir été privés indûment d'une voie de droit, ce qui équivaut à une violation de leurs droits de partie, ils ont qualité pour former un recours en matière pénale au Tribunal fédéral.  
 
1.3. Cela étant, dès lors que l'autorité précédente a refusé d'entrer en matière sur leur recours, seule la question de la recevabilité de celui-ci peut être portée devant le Tribunal fédéral, qui n'a, à ce stade, pas à examiner le fond de la contestation. Les griefs et conclusions des recourants relatifs aux moyens et réquisitions de preuves auxquels le Ministère public et la cour cantonale n'auraient pas donné suite ainsi qu'à ceux visant l'administration de nouvelles preuves par ces autorités sont donc irrecevables. Il en va de même des pièces produites à l'appui du recours, dont les recourants ne démontrent par ailleurs pas que les conditions de l'art. 99 al. 1 LTF seraient remplies. L'intégralité de ces moyens sont en effet destinés à étayer le bien-fondé des accusations des recourants et ne peuvent être séparés du fond.  
 
1.4. Enfin, les recourants ne prennent pas de conclusions réformatoires. On comprend toutefois des motifs allégués par ces derniers qu'ils entendent obtenir de l'autorité précédente qu'elle se prononce au fond sur leur recours contre les ordonnance de non-entrée en matière et de classement du Ministère public. Les recourants n'étant pas représentés, il convient de ne pas se montrer trop strict et de considérer que cela suffit tout juste pour satisfaire aux exigences de forme déduites de l'art. 42 al. 1 et 2 LTF (cf. ATF 137 II 313 consid. 1.3; 133 II 409 consid. 1.4.1; arrêt 7B_36/2022 du  
13 septembre 2023 consid. 2.3). 
 
1.5. Sous réserve de ce qui précède, il y a partant lieu d'entrer en matière sur le recours.  
 
2.  
Dans une première partie de leur écriture, les recourants présentent leur propre état de fait. Une telle manière de procéder, dans la mesure où les faits exposés s'écartent des constatations de l'instance précédente ou les complètent sans qu'il soit indiqué que ceux-ci seraient manifestement inexacts ou arbitraires, est irrecevable, le Tribunal fédéral n'étant pas une instance d'appel (cf. ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2; 146 IV 88 consid. 1.3.1). 
 
3. La cour cantonale a déclaré l'intégralité du recours irrecevable.  
 
3.1. Selon l'art. 42 al. 1 LTF, les mémoires de recours au Tribunal fédéral doivent indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuves, et être signés. L'art. 42 al. 2 LTF exige par ailleurs que le recourant discute les motifs de la décision entreprise et indique précisément en quoi il estime que l'autorité précédente a méconnu le droit (ATF 142 III 364 consid. 2.4; 140 III 86 consid. 2); en particulier, la motivation doit être topique, c'est-à-dire se rapporter à la question juridique tranchée par l'autorité cantonale (cf. ATF 123 V 335  
consid. 1b; arrêts 6B_1207/2023 du 1 er novembre 2023 consid. 2; 6B_879/2023 du 4 octobre 2023 consid. 5). Ainsi, lorsque la décision attaquée est une décision d'irrecevabilité, les motifs développés dans le mémoire de recours doivent porter sur la question de la recevabilité traitée par l'autorité précédente à l'exclusion du fond du litige (ATF 123 V 335 consid. 1b; cf. arrêts 7B_166/2023 du 29 septembre 2023 consid. 1.1; 7B_253/2023 du 31 août 2023 consid. 3.1).  
Lorsque la décision attaquée comporte plusieurs motivations indépendantes dont chacune suffit à sceller le sort de la cause, il revient à la partie recourante, sous peine d'irrecevabilité, de s'attaquer conformément aux art. 42 al. 2 et 106 al. 2 LTF à chacune d'entre elles et de démontrer qu'elles sont contraires au droit (ATF 142 III 364 consid. 2.4; arrêt 7B_663/2023 du 30 octobre 2023 consid. 1.1). 
Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Cela étant, eu égard à l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, il n'examine en principe que les griefs soulevés; il n'est pas tenu de traiter, à l'instar d'une autorité de première instance, toutes les questions juridiques pouvant se poser, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui (ATF 142 III 364 consid. 2.4; 140 III 86 consid. 2; ATF 137 III 580 consid. 1.3). En outre, le Tribunal fédéral ne connaît de la violation de droits fondamentaux que s'ils sont invoqués et motivés par le recourant (art. 106 al. 2 LTF), soit s'ils ont été expressément soulevés et exposés de manière claire et détaillée. Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2; 146 IV 88 consid. 1.3.1; 145 IV 154 consid. 1.1). 
 
3.2. Tout d'abord, s'agissant de l'ordonnance de classement attaquée, la cour cantonale a considéré que le recours était irrecevable en raison d'un défaut de motivation. Force est de relever que le recours auprès de la Cour de céans est exempt de toute discussion destinée à démontrer en quoi cette appréciation violerait le droit fédéral. Les recourants n'émettent en effet aucune critique contre le refus de la cour cantonale d'entrer en matière sur leur recours contre le classement prononcé par le Ministère public ni ne font valoir un quelconque grief formel à son sujet. L'intégralité de l'argumentation qu'ils consacrent à ladite ordonnance se rapporte à son bien-fondé, en particulier aux éléments qui auraient dû conduire le Ministère public à poursuivre l'instruction (cf. pp. 6-8 du mémoire de recours), alors que l'objet du litige est circonscrit, s'agissant du classement, au prononcé d'irrecevabilité. Partant, le recours est irrecevable sur ce point (art. 42 al. 2 LTF).  
 
3.3.  
 
3.3.1. Ensuite, la cour cantonale a également déclaré irrecevable le recours contre l'ordonnance de non-entrée en matière. La cour cantonale a en effet estimé, se ralliant à l'avis du Ministère public et renvoyant à sa motivation à cet égard, que les recourants n'avaient pas été directement atteints par les faits reprochés, respectivement n'étaient pas lésés, de sorte qu'ils ne disposaient pas de la qualité pour porter plainte (art. 30 al. 1 CP). Par voie de conséquence, ils ne pouvaient en principe se prévaloir d'aucun intérêt juridique protégé à recourir contre l'ordonnance de non-entrée en matière. La cour cantonale a encore relevé qu'en tant qu'ils se prétendaient lésés, les recourants avaient failli à leur devoir de motiver leur qualité pour recourir de manière suffisante, à savoir de manière concluante ou avec une certaine vraisemblance. En particulier, ils n'avaient pas indiqué quelles conclusions civiles ils pourraient prendre contre les agents de l'Etat visés par leur plainte. Par conséquent, le recours dirigé contre l'ordonnance de non-entrée en matière était irrecevable, faute de motivation spécifique sur la qualité pour recourir.  
Puis, à titre subsidiaire, la cour cantonale a en substance retenu que même à admettre la qualité pour recourir des recourants, ces derniers s'étaient contentés dans leur recours d'exposer leur version des faits et n'étaient pas parvenus, par leur argumentation, à remettre en cause l'absence d'infraction pénale, respectivement à démontrer une quelconque responsabilité ou faute pénale des personnes mises en cause dans leurs plaintes. En particulier, les recourants n'exposaient pas en quoi les personnes visées par leur plainte pénale auraient fait preuve d'abus d'autorité ou de contrainte aux fins de faire entrer leur proche au foyer V.________. 
Partant, il sied de constater que la cour cantonale s'est également, de facto, prononcée sur le bien-fondé du recours dirigé contre l'ordonnance de non-entrée en matière, qu'elle a implicitement rejeté, peu importe que le dispositif de sa décision ne fasse état que d'une irrecevabilité. La décision entreprise repose ainsi sur une double motivation, à savoir l'une qui a trait à la recevabilité du recours contre la non-entrée en matière (qualité pour recourir et motivation de cette condition) et l'autre qui porte sur le fond (examen des éléments constitutifs des infractions), dont chaque pan est indépendant et suffit à sceller l'issue de la procédure pénale. Comme déjà évoqué  
(cf. consid. 3.1 supra), dans une telle configuration, il appartient à la partie recourante, sous peine d'irrecevabilité, de démontrer que chacune d'entre elles est contraire au droit.  
Il convient donc de déterminer si tel est le cas en l'espèce. 
 
3.3.2. Face à la motivation de la cour cantonale, les recourants consacrent de longs développements tendant à démontrer le bien-fondé des accusations contenues dans leur plainte pénale à l'égard des cinq personnes du foyer V.________. Ils s'attaquent donc à la motivation subsidiaire de la cour cantonale, soit celle qui concerne le fond. S'agissant toutefois de l'argumentation principale, soit celle liée à leur qualité pour recourir et au défaut de motivation y relatif, les recourants se contentent brièvement de contester l'appréciation de la cour cantonale au sujet de leur qualité pour porter plainte, affirmant sans autre développement avoir été "lésés dans tout ce qui a été commis à l'encontre de [leur] fils et frère" au nom duquel ils "devaient porter plainte" (cf. p. 6 du mémoire de recours). Ces considérations ne permettent pas de mettre en lumière une quelconque appréciation arbitraire par la cour cantonale. Ce procédé, purement appellatoire, est partant irrecevable. Quant au défaut de toute motivation de leur qualité pour recourir devant la cour cantonale, on recherche vainement dans leur mémoire au Tribunal fédéral, une argumentation spécifique sur cette question. Ils ne critiquent ainsi pas le raisonnement de la cour cantonale ni ne tentent de démontrer en quoi celui-ci serait arbitraire, ce qui n'est pas conforme aux exigences de motivation déduites des art. 42 al. 2 LTF et 106 al. 2 LTF.  
Tout au plus, les recourants relèvent, en introduction et probablement dans une perspective de démontrer que les éléments constitutifs des infractions dénoncées sont réalisés, qu'en abusant de leur statut professionnel, les personnes visées auraient "ôté les droits de [leur] fils à l'éducation, au travail et à la liberté de choisir son lieu de vie" 
(cf. p. 1 mémoire de recours). Cela ne ressort toutefois pas de leur recours cantonal ni des faits retenus par l'autorité précédente dans sa décision, contre laquelle les recourants n'élèvent aucun grief qui imposerait au Tribunal fédéral de s'en écarter (art. 42 al. 2 et 106 al. 2 LTF). En outre, les recourants n'exposent pas non plus ce qui justifierait l'allégation de ces faits pour la première fois en procédure fédérale (art. 99 al. 1 LTF). Ils sont partant irrecevables. En tout état, même s'ils devaient être considérés recevables, ces développements ne permettent pas de comprendre en quoi la cour cantonale aurait violé le droit fédéral (art. 42 al. 1 et 2 LTF) et moins encore en quoi des droits fondamentaux des recourants auraient été méconnu 
(art. 106 al. 2 LTF). 
Il s'ensuit que les recourants ne remettent pas en cause le premier volet de la motivation de la décision querellée, par lequel la cour cantonale a jugé que le recours était irrecevable et ne cherchent pas à démontrer en quoi elle aurait fait une application insoutenable ou d'une autre manière contraire au droit de l'art. 382 al. 1 CPP. Ceci suffit à sceller le sort du présent recours (cf. ATF 142 III 364 consid. 2.4 
in fine).  
 
4.  
Sur le vu de ce qui précède, le recours doit être déclaré irrecevable. Comme le recours était dénué de chances de succès, la demande d'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 64 al. 1 LTF). Les recourants, qui succombent, supporteront dès lors les frais de la procédure, solidairement entre eux (art. 65 et 66 al. 1 et 5 LTF). Les frais judiciaires seront fixés en tenant compte de leur situation économique qui n'apparaît pas favorable (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est irrecevable. 
 
2.  
La demande d'assistance judiciaire est rejetée. 
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'200 fr., sont mis à la charge des recourants, solidairement entre eux. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux recourants et à la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 22 novembre 2023 
 
Au nom de la IIe Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Juge présidant : Koch 
 
La Greffière : Rubin