1F_5/2023 08.03.2024
Avis important:
Les versions anciennes du navigateur Netscape affichent cette page sans éléments graphiques. La page conserve cependant sa fonctionnalité. Si vous utilisez fréquemment cette page, nous vous recommandons l'installation d'un navigateur plus récent.
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1F_5/2023  
 
 
Arrêt du 8 mars 2024  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Kneubühler, Président, 
Chaix et Müller. 
Greffier : M. Kurz. 
 
Participants à la procédure 
A.________, représenté par Me Alexandre Kirschmann, avocat, 
requérant, 
 
contre  
 
B.________ SA, représentée par Me Luc Pittet, avocat, intimée, 
 
Municipalité de Pully, avenue du Prieuré 2, case postale 63, 1009 Pully, représentée par 
Me Jacques Haldy, avocat, 
Direction générale des immeubles et du patrimoine du canton de Vaud, place de la Riponne 10, 1014 Lausanne, 
Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, 
avenue Eugène-Rambert 15, 1014 Lausanne. 
 
Objet 
Demande de révision (art. 123 al. 2 let. a LTF), 
 
demande de révision de l'arrêt du Tribunal fédéral 
suisse du 13 septembre 2022 (1C_390/2021 [Arrêt AC.2020.0246]). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par décision du 3 juillet 2020, la Municipalité de Pully a accordé à B.________ SA (ci-après: B.________ ou la constructrice), un permis de construire un immeuble de 8 logements avec parking souterrain sur la parcelle n° 3026. Le projet implique la démolition de la villa existante (n° ECA 1965), occupée par A.________. 
Par arrêt du 21 mai 2021, la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal vaudois a rejeté le recours formé par A.________ dans la mesure où il était recevable. Le recourant prétendait être au bénéfice d'un contrat de bail tacite avec l'ancienne propriétaire; il payait les charges, mais aucun loyer. Toutefois, B.________, actuelle propriétaire, avait produit un jugement relatif à une procédure d'expulsion dont il ressortait qu'aucun contrat de bail tacite n'avait été conclu. Il était dès lors douteux que l'occupant sans droit de la villa ait qualité pour recourir. Sur le fond, les modifications apportées au projet initial n'étaient pas soumises à l'obligation d'une enquête complémentaire. L'accès à la parcelle était suffisamment sûr et les nuisances admissibles. La villa existante ne présentait pas d'intérêt historique ou architectural imposant qu'elle fût conservée. 
 
B.  
Par arrêt du 13 septembre 2022 (1C_390/2021), la Ire Cour de droit public du Tribunal fédéral a déclaré irrecevable le recours en matière de droit public formé par A.________. Celui-ci prétendait être au bénéfice d'un bail tacite, mais B.________ avait produit un jugement civil du 10 février 2021 dont il ressortait qu'il n'existait aucun bail. Devant le Tribunal fédéral, le recourant ne contestait pas qu'il ne disposait d'aucun titre juridique pour occuper la villa. Des procédures d'expulsion étaient en cours devant les juridictions vaudoises, de sorte que le recourant ne pouvait retirer un avantage pratique de l'annulation ou de la réforme de l'arrêt cantonal. 
 
C.  
Par acte du 1 er mars 2023, A.________ forme une demande de révision de l'arrêt du 13 septembre 2022. Il demande l'annulation de cet arrêt et l'admission des conclusions présentées dans la cause 1C_390/2021.  
La Municipalité de Pully et B.________ concluent au rejet de la demande de révision. Le requérant et les intimées ont ensuite persisté dans leurs conclusions. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
En vertu de l'art. 123 al. 2 let. a LTF, la révision d'un arrêt du Tribunal fédéral peut être demandée dans les affaires civiles et les affaires de droit public, si le requérant découvre après coup des faits pertinents ou des moyens de preuve concluants qu'il n'avait pas pu invoquer dans la procédure précédente, à l'exclusion des faits ou moyens de preuve postérieurs à l'arrêt. 
 
2.  
Selon la jurisprudence, ne peuvent justifier une révision que les faits qui se sont produits jusqu'au moment où, dans la procédure principale, des allégations de faits étaient encore recevables, mais qui n'étaient pas connus du requérant malgré toute sa diligence; en outre, ces faits doivent être pertinents, c'est-à-dire qu'ils doivent être de nature à modifier l'état de fait qui est à la base de l'arrêt entrepris et à conduire à un jugement différent en fonction d'une appréciation juridique correcte (ATF 134 III 669 consid. 2.2 et les références). Les preuves, quant à elles, doivent servir à prouver soit les faits nouveaux importants qui motivent la révision, soit des faits qui étaient certes connus lors de la procédure précédente, mais qui n'avaient pas pu être prouvés, au détriment du requérant. Si les nouveaux moyens sont destinés à prouver des faits allégués antérieurement, le requérant doit aussi démontrer qu'il ne pouvait pas les invoquer dans la précédente procédure. Par faits pertinents, il faut entendre les faits de nature à modifier l'état de fait qui est à la base du jugement et à conduire à un jugement différent en fonction d'une appréciation juridique correcte (ATF 147 III 238 consid. 4.1). Par preuves concluantes, il faut entendre des preuves propres à entraîner une modification du jugement dans un sens favorable à la partie requérante (ATF 147 III 238 consid. 4.2). 
 
2.1. Dans son arrêt du 13 septembre 2022, la cour de céans a retenu que le requérant ne disposait d'aucun titre juridique pour demeurer dans la villa; il n'était pas lié par un contrat de bail et payait simplement les charges; une procédure d'expulsion était en cours, sur l'issue de laquelle l'annulation du permis de démolir et de construire n'aurait aucun effet.  
A l'appui de sa demande de révision, le requérant se prévaut du procès-verbal d'une audience de conciliation tenue le 18 novembre 2022 devant le Tribunal des baux à Vevey. Il en résulte que la résiliation du bail notifiée à A.________ est valable et qu'une prolon-gation lui est accordée jusqu'au 30 septembre 2024 au plus tard, date à laquelle il s'engage à quitter les locaux. Dès le 1er décembre 2022, le requérant s'engage en outre à payer un loyer mensuel de 1'400 fr. Le requérant en déduit qu'il existait bien un contrat de bail au moment où l'arrêt du Tribunal fédéral a été rendu. Il estime avoir fait preuve de diligence car ce n'est qu'à la date du procès-verbal qu'il aurait été à même de prouver l'existence d'un bail tacite avec la constructrice. 
 
2.2. Le procès-verbal du 18 novembre 2022 devant le Tribunal des baux fait était d'une conciliation ayant abouti. Il est constaté que la résiliation de bail notifiée le 4 mai 2020 pour le 1er octobre 2020 est valable.  
Dans son arrêt, la CDAP relevait déjà que le recourant n'avait pas établi qu'il était le locataire de la villa, de sorte que son recours paraissait irrecevable. On peut dès lors se demander pour quelle raison le requérant n'a pas évoqué devant le Tribunal fédéral l'existence d'une procédure pendante devant le Tribunal des baux, dès lors que celle-ci portait sur la résiliation d'un prétendu bail à loyer. On peut également se demander si la pièce produite constitue un faux ou un vrai novum, dès lors qu'elle est postérieure à l'arrêt dont la révision est demandée. Se pose encore la question de savoir si le procès-verbal de conciliation vient réellement, comme le soutient le requérant, prouver l'existence d'un bail à loyer entre les parties; celles-ci se sont accordées sur la validité d'une résiliation, mais cela ne démontre pas que, si le tribunal des baux avait dû examiner la question, il aurait nécessairement conclu à l'existence d'un bail. Cela est d'ailleurs douteux au vu de l'arrêt du 10 février 2021 de la Chambre des recours civile du Tribunal cantonal vaudois, qui constate formellement que le requérant ne démontrait pas être au bénéfice d'un contrat de bail tacite. 
 
2.3. Ces questions peuvent toutefois demeurer indécises. En effet, à teneur du procès-verbal précité, le requérant s'engage irrévocablement à quitter la villa au 30 septembre 2024; la transaction est susceptible d'exécution directe et la constructrice est autorisée à en obtenir l'exécution forcée. Dans la mesure où une prolongation est accordée, la constructrice s'engage pour sa part à ne pas commencer les travaux de démolition et de construction contre lesquels le requérant avait recouru. Dès lors, si le Tribunal fédéral avait été nanti de cette pièce au moment de statuer, il aurait également considéré que le recourant n'avait pas d'intérêt à recourir puisque l'admission de son recours n'aurait rien changé à son obligation de quitter les lieux et que la constructrice ne pouvait rien entreprendre avant la date fixée.  
Le requérant affirme qu'il pourrait, en cas d'admission de son recours, obtenir une nouvelle prolongation de son bail. Il méconnaît ainsi que la transaction du 18 novembre 2022 est assimilée à un jugement entré en force et exécutoire. Il soutient encore qu'au cas où il devrait quitter la villa qu'il occupe, il ne serait pas exclu qu'il s'installe dans le voisinage. Une telle hypothèse (qui est d'ailleurs sans rapport avec la pièce fondant la demande de révision) ne suffirait toutefois pas à fonder sa qualité pour recourir, laquelle doit reposer sur des indices à tout le moins concrets. 
 
3.  
Il s'ensuit que les conditions d'une révision au sens de l'art. 123 al. 2 let. a LTF ne sont pas réunies. La demande doit être rejetée dans la mesure où elle est recevable. Conformément à l'art. 66 al. 1 LTF, les frais judiciaires sont mis à la charge du requérant. Une indemnité de dépens, également à la charge du requérant, est allouée à l'intimée B.________, qui obtient gain de cause avec l'assistance d'un avocat (art. 68 al. 2 LTF). Il n'est pas alloué d'autres dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
La demande de révision est rejetée dans la mesure où elle est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du requérant. 
 
3.  
Une indemnité de dépens de 2'000 fr. est allouée à l'intimée B.________ SA, à la charge du requérant. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et de la Municipalité de Pully, à la Direction générale des immeubles et du patrimoine du canton de Vaud et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public. 
 
 
Lausanne, le 8 mars 2024 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
Le Greffier : Kurz