2C_223/2024 05.06.2024
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_223/2024  
 
 
Arrêt du 5 juin 2024  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux, 
Aubry Girardin, Présidente, 
Ryter et Kradolfer, 
Greffier : M. Rastorfer. 
 
Participants à la procédure 
A.B.________, 
représenté par Me Ismael Fetahi, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Service de la population du canton de Vaud, avenue de Beaulieu 19, 1014 Lausanne, 
intimé. 
 
Objet 
Révocation de l'autorisation de séjour et renvoi de Suisse, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, 
du 21 mars 2024 
(PE.2023.0141). 
 
 
Considérant en fait et en droit :  
 
1.  
A.B.________, ressortissant équatorien né en 1986, a séjourné à plusieurs reprises en Suisse entre 1999 et 2007, avant d'être expulsé du pays à la suite de sa condamnation pénale à 6 mois d'emprisonnement pour des actes d'ordre sexuel avec des enfants notamment. En 2016, il a épousé en Équateur C.B.________, ressortissante italienne et équatorienne titulaire d'une autorisation de séjour UE/AELE en Suisse. En janvier 2019, il est entré en Suisse, afin de rejoindre son épouse, et a été mis au bénéfice d'une autorisation de séjour au titre du regroupement familial. En octobre 2019, l'épouse de l'intéressé est partie en Équateur et n'est revenue en Suisse qu'en avril 2021. Les époux n'ont jamais repris la vie commune depuis lors. Aucun enfant n'est né de cette union. En revanche, A.B.________ est père de deux enfants, nés en Équateur de deux mères différentes en 2016 respectivement en 2017, et qui sont domiciliés dans ce pays. 
Au 21 juin 2022, le casier judiciaire de A.B.________ faisait état de deux condamnations pénales pour vol d'importance mineure et infractions à la législation sur les étrangers notamment. 
 
2.  
Par décision du 14 juillet 2023, le Service de la population du canton de Vaud (ci-après: le Service cantonal), après avoir entendu A.B.________, a révoqué l'autorisation de séjour du précité et a prononcé son renvoi de Suisse. Par décision sur opposition du 18 août 2023, le Service cantonal a confirmé sa décision du 14 juillet 2023. A.B.________ a interjeté un recours contre cette décision auprès du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal cantonal). Par déterminations du 14 décembre 2023, il a indiqué que son fils né en 2014 - sans préciser s'il s'agissait d'un troisième enfant ou s'il s'était trompé dans les dates de naissances qu'il avait déclarées - se trouvait en Suisse "depuis plusieurs semaines" et vivait avec lui. Par arrêt du 21 mars 2024, le Tribunal cantonal a rejeté le recours. 
 
3.  
Contre l'arrêt du Tribunal cantonal du 21 mars 2024, A.B.________ forme un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral. Il conclut, sous suite de frais et de dépens, outre à l'octroi de l'effet suspensif, à la réforme de l'arrêt attaqué en ce sens que son autorisation de séjour est maintenue. Subsidiairement, il demande l'annulation dudit arrêt et le renvoi de la cause au Tribunal cantonal pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Il requiert enfin le bénéfice de l'assistance judiciaire. 
Par ordonnance du 3 mai 2024, la Présidente de la II e Cour de droit public du Tribunal fédéral a admis la demande d'effet suspensif. 
Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures. 
 
4.  
Le recourant, qui est séparé d'une ressortissante de l'Union européenne, se prévaut d'un droit au maintien respectivement à la prolongation de son autorisation de séjour fondé sur l'art. 50 LEI (RS 142.20) selon lequel, après dissolution de la famille, le droit du conjoint à l'octroi d'une autorisation de séjour et à la prolongation de sa durée de validité subsiste dans certains cas. Cette disposition concerne les étrangers qui sont séparés de ressortissants suisses ou d'étrangers au bénéfice d'une autorisation d'établissement. Elle peut toutefois aussi être invoquée par le conjoint séparé d'un ressortissant de l'Union européenne titulaire d'une autorisation de séjour UE/AELE, pour autant que celui-ci puisse encore se prévaloir d'un droit de séjour en Suisse (ATF 144 II 1 consid. 4.7; arrêt 2C_96/2022 du 16 août 2022 consid. 1.1). Dès lors que rien n'indique, dans l'arrêt attaqué, que l'épouse du recourant qui séjourne à nouveau en Suisse depuis avril 2021 ne disposerait plus dans ce pays d'un droit de séjour fondé sur l'ALCP, on peut admettre que cette condition est réalisée en l'espèce et que, partant, le recourant peut se prévaloir de l'art. 50 LEI. Il s'ensuit que le recours échappe à la clause d'irrecevabilité de l'art. 83 let. c ch. 3 LTF, le point de savoir si les conditions à la poursuite du séjour en Suisse sur la base de cette disposition sont réunies relevant de l'examen au fond (cf. ATF 139 I 330 consid. 1.1). La voie du recours en matière de droit public est donc en principe ouverte. 
Les autres conditions de recevabilité étant au surplus réunies (cf. art. 42, 46 al. 1 let. a, 82 let. a, 86 al. 1 let. d et al. 2, 89 al. 1, 90 et 100 al. 1 LTF), il convient d'entrer en matière. 
 
5.  
Le recourant se plaint d'un établissement incomplet des faits. 
 
5.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF. La partie recourante ne peut critiquer les constatations de fait ressortant de la décision attaquée que si celles-ci ont été effectuées en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 145 V 188 consid. 2). La partie recourante doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées (art. 106 al. 2 LTF). Les faits et les critiques invoqués de façon appellatoire sont irrecevables (ATF 145 I 26 consid. 1.3). Aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut en principe être présenté devant le Tribunal fédéral (art. 99 al. 1 LTF).  
S'agissant de l'appréciation des preuves et des constatations de fait, il y a arbitraire lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1). 
 
5.2. En l'occurrence, le recourant reproche aux juges cantonaux d'avoir procédé à un établissement manifestement incomplet des faits en ne faisant pas mention du fait qu'il était indépendant financièrement, qu'il était employé par une société de pose de parquets depuis le 22 mars 2023, qu'il n'avait pas fait l'objet de poursuites et que sa compagne, son frère et sa cousine vivaient en Suisse, et ses parents en Italie. Or, ces éléments seraient, selon lui, déterminants pour l'issue du litige, car de nature à établir son intégration en Suisse.  
 
5.3. On relèvera d'emblée que l'arrêt attaqué retient que l'intéressé est socialement et professionnellement intégré en Suisse et qu'il réalise un salaire suffisant à couvrir ses besoins. On peut aisément déduire de ces éléments que le recourant a un emploi et qu'il est financièrement indépendant, sans que l'on voie en quoi il aurait en plus été nécessaire de préciser qui est son employeur et la date, au demeurant récente, de son engagement. Quant à l'absence de poursuites de l'intéressé, celle-ci ressort implicitement du silence de la cour précédente à cet égard. Enfin, en ce qui concerne la présence de la compagne, du frère et de la cousine du recourant en Suisse, on notera que ces relations ne relèvent pas de la famille dite nucléaire et ne sont pas, sauf cas exceptionnels dont le recourant ne se prévaut pas, propres à justifier le maintien du séjour d'un étranger sous l'angle de l'art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEI (cf. arrêts 2C_721/2020 du 12 janvier 2021 consid. 7.5; 2C_779/2016 du 13 septembre 2016 consid. 4.2). Quoi qu'il en soit, en tant que le recourant affirme que les éléments dont il se prévaut sont déterminants pour démontrer son intégration en Suisse sous l'angle de l'art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEI, il perd manifestement de vue que les raisons personnelles majeures visées par cette disposition ont trait au critère de l'intégration fortement compromise dans le pays d'origine et ne dépendent donc pas du degré d'intégration en Suisse de la personne concernée (cf. arrêts 2C_777/2015 du 26 mai 2016 consid. 5.1, non publié in ATF 142 I 152; 2C_103/2024 du 3 avril 2024 consid. 7.1; 2C_145/2019 du 24 juin 2019 consid. 3.7; 2C_831/2018 du 27 mai 2019 consid. 4.4). Autrement dit, la prise en compte des faits allégués par le recourant n'aurait eu aucune influence sur le sort du litige.  
 
5.4. Le grief d'établissement arbitraire des faits doit partant être écarté.  
 
5.5. Pour le surplus, les pièces postérieures à l'arrêt attaqué que le recourant a joint à son recours sont nouvelles au sens de l'art. 99 LTF. Elles sont par conséquent, de même que les faits qui en découlent, irrecevables (cf. supra consid. 5.1).  
 
6.  
Le recourant invoque une violation de l'art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEI
 
6.1. En premier lieu, il convient de mentionner que c'est à juste titre que le recourant n'invoque pas l'art. 7 let. d ALCP (RS 0.142.112.681) en relation avec l'art. 3 par. 1 et 2 annexe I ALCP pour prétendre au maintien de son autorisation de séjour en Suisse, dès lors que les époux ne vivent plus ensemble et que l'union conjugale est vidée de toute substance (cf. ATF 144 II 1 consid. 3.1). C'est également à juste titre qu'il ne se prévaut pas d'une violation de l'art. 50 al. 1 let. a LEI, puisque l'union conjugale, au sens de la jurisprudence, n'a pas duré trois ans (ATF 140 II 345 consid. 4).  
 
6.2. Le Tribunal cantonal a correctement rappelé les bases légales applicables et la jurisprudence relative au droit à la prolongation de l'autorisation de séjour après la dissolution de l'union conjugale dans le cas visé par l'art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEI, notamment en lien avec la notion de réintégration sociale fortement compromise dans le pays d'origine (ATF 139 II 393 consid. 6; 138 II 229 consid. 3.1). Il peut donc être renvoyé à l'arrêt attaqué sur ce point (art. 109 al. 3 LTF).  
 
6.3. Le Tribunal cantonal a en outre procédé à une analyse détaillée et convaincante de la situation du cas d'espèce.  
En particulier, sous l'angle des raisons personnelles majeures au sens de l'art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEI, les juges précédents ont retenu que, si le recourant avait un emploi et était financièrement indépendant en Suisse, pays dans lequel il avait séjourné à plusieurs reprises entre 1997 et 2007 et où il résidait depuis 2019, ils ont aussi relevé qu'une telle intégration - qui était du reste entachée par des condamnations pénales - n'était toutefois pas exceptionnelle au point qu'un retour en Équateur apparaîtrait disproportionné. Ce raisonnement ne prête pas le flanc à la critique. Selon la jurisprudence, le fait d'avoir une place de travail et de ne pas dépendre de l'aide sociale notamment ne suffit en effet pas pour retenir des raisons personnelles majeures visées à l'art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEI (cf. arrêts 2C_103/2024 précité consid. 7.2; 2C_869/2022 du 23 décembre 2022 consid. 6.2; 2C_616/2019 du 19 août 2019 consid. 7.4). Quant à l'arrivée d'un des enfants du recourant en Suisse, les juges précédents ont considéré que le recourant ne pouvait pas en déduire un lien particulier avec ce pays, ce qui n'est pas non plus critiquable, dès lors qu'il ressort du dossier que cet enfant est entré en Suisse sur la base d'un visa de touriste valable durant 90 jours, afin de rendre visite à son père, et ne dispose dès lors pas d'un droit de résider durablement dans ce pays. Enfin, le Tribunal cantonal a à juste titre noté que le recourant avait vécu 12 ans en Équateur, pays dans lequel il avait conservé des attaches puisqu'au moins un de ses enfants y vivait toujours, et où il pouvait disposer de la maison de ses parents pour y vivre, ce qui était susceptible de faciliter son retour. 
Pour le reste, s'agissant du point de savoir si la réintégration du recourant dans son pays d'origine serait ou non fortement compromise, les juges cantonaux ont relevé que le recourant n'avait pas démontré en quoi les éléments qu'il avait soulevés - soit en particulier l'évasion d'une figure du crime organisé ou encore les hausses de la violence en Équateur - le mettraient personnellement et directement en danger en cas de retour dans ce pays. Le recourant, sous cet angle, se limite à opposer sa propre appréciation à celle des juges précédents, sans nullement démontrer en quoi celle-ci serait arbitraire. On ne peut quoi qu'il en soit que souscrire au raisonnement du Tribunal cantonal, ce d'autant plus que les allégations de l'intéressé ne reposent que sur des conseils aux voyageurs fournis par le Département fédéral des affaires étrangères notamment. Or, selon la jurisprudence, il ne s'agit là que de mises en garde abstraites sur les risques encourus dans le pays ou la région concernés et qui ne permettent pas à elles seules de démontrer le danger réel et concret que l'étranger encourrait personnellement en cas de retour dans son pays d'origine (cf. arrêts 2C_677/2018 du 4 décembre 2018 consid. 5.2; 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.2; 2C_956/2013 du 11 avril 2014 consid. 3.3). 
 
6.4. Compte tenu de ce qui précède, c'est à bon droit que le Tribunal cantonal a retenu que l'intéressé ne pouvait pas invoquer des raisons personnelles majeures pour en déduire un droit au maintien de son autorisation de séjour en Suisse. Le grief de violation de l'art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEI est donc rejeté.  
 
7.  
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours en application de la procédure simplifiée de l'art. 109 LTF
Succombant, le recourant doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Service de la population et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour de droit administratif et public, ainsi qu'au Secrétariat d'État aux migrations. 
 
 
Lausanne, le 5 juin 2024 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
Le Greffier : H. Rastorfer