1C_178/2024 08.05.2024
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_178/2024  
 
 
Arrêt du 8 mai 2024  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Kneubühler, Président, 
Müller et Merz, 
Greffier : M. Parmelin. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
recourant, 
 
contre  
 
Conseil communal d'Estavayer, 
Case postale 623, 
1470 Estavayer-le-Lac, 
intimé, 
 
Préfecture du district de la Broye, 
Le Château, case postale 821, 
1470 Estavayer-le-Lac. 
 
Objet 
Remise en état; tardiveté du recours, 
 
recours contre la décision du Président de la IIe Cour administrative du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg du 12 février 2024 (602 2024 20). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par décision du 8 février 2023, le Conseil communal d'Estavayer a imparti à A.________ un délai échéant au 31 mars 2023 pour procéder à la remise en état des parcelles n os 774, 782 et 786 en enlevant la bordure en béton installée sans autorisation le long de la route communale et en rétablissant le terrain dans son état avant les travaux exécutés, sous la menace d'une exécution par substitution.  
Statuant sur recours le 22 décembre 2023, le Lieutenant de Préfet de la Broye a confirmé cette décision et fixé à A.________ un délai au 29 février 2024 pour rétablir le terrain tel qu'il se trouvait avant les travaux, soit pour retirer la bordure haute en béton et aplanir le remblai de terre. 
Par décision du 12 février 2024, le Président de la IIe Cour administrative du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg a déclaré irrecevable le recours formé par A.________ contre la décision préfectorale au motif qu'il avait été déposé tardivement. 
 
B.  
Par acte du 20 mars 2024, A.________ forme auprès du Tribunal fédéral un recours constitutionnel pour arbitraire contre cette décision en concluant à son annulation et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision. 
Le Président de la IIe Cour administrative conclut au rejet du recours. Le Lieutenant de Préfet de la Broye et le Conseil communal d'Estavayer n'ont pas déposé d'observations. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
La cause au fond relève du droit public des constructions et de l'aménagement du territoire. La voie du recours en matière de droit public au sens de l'art. 82 let. a LTF est dès lors ouverte contre le prononcé d'irrecevabilité rendu dans ladite cause par le Président de la IIe Cour administrative. Le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable (cf. art. 113 LTF) et doit être traité comme tel. Le recourant est particulièrement touché par la décision attaquée en tant qu'elle l'empêche, pour un motif formel, de faire revoir le bien-fondé de l'ordre de remise en état qui lui a été signifié. Le recours a été déposé dans le délai de trente jours fixé à l'art. 100 al. 1 LTF. La conclusion du recourant tendant à l'annulation de la décision d'irrecevabilité et au renvoi de la cause à l'autorité pour qu'elle entre en matière sur le recours cantonal et statue sur le fond est recevable (cf. ATF 143 I 344 consid. 4). 
 
2.  
Le Président de la IIe Cour administrative a rappelé que, pour être recevable, le recours devait avoir été interjeté dans un délai de trente jours selon l'art. 79 al. 1 du Code fribourgeois de procédure et de juridiction administrative (CPJA; RSF 150.1). Il a relevé que, lorsque le destinataire d'un envoi recommandé ne pouvait pas être atteint et qu'un avis de retrait avait été déposé dans sa boîte aux lettres, l'envoi était réputé avoir été communiqué le dernier jour du délai de garde de sept jours s'il n'avait pas été retiré dans ce délai (ATF 130 III 396 consid. 1.2.3), soulignant que des accords particuliers avec La Poste ne permettaient pas de repousser l'échéance de la notification réputée intervenue à l'échéance du délai de sept jours (ATF 141 II 429 consid. 3.1). Il a considéré qu'un ordre de deuxième présentation déclenché par le destinataire constituait un tel accord et ne prolongeait pas l'échéance de la notification si cette deuxième présentation intervenait après l'échéance du délai de garde de sept jours. En l'occurrence, selon le suivi de l'envoi de la décision attaquée, le pli avait été avisé pour retrait le 29 décembre 2023; il pouvait être recherché dès le lendemain à l'office de retrait et le délai de garde de sept jours arrivait à échéance le 5 janvier 2024. Le recourant avait déclenché un ordre de deuxième présentation en date du 4 janvier 2024 conduisant à une distribution effective du pli après l'expiration du délai de garde de sept jours, de sorte que la décision attaquée était réputée avoir été notifiée le 5 janvier 2024. Le délai de recours était par conséquent arrivé à échéance le 5 février 2024. Déposé dans une boîte aux lettres le 7 février 2024, le recours était ainsi tardif et devait être déclaré irrecevable. 
Le recourant ne saurait être suivi lorsqu'il soutient qu'il n'aurait pas demandé une prolongation du délai de garde et que la jurisprudence rendue dans ce cas de figure ne lui serait pas applicable. Le Tribunal fédéral a en effet déjà relevé que le destinataire d'un acte judiciaire ou d'un envoi recommandé ne pouvait contourner l'effet d'une notification fictive de l'échéance du délai de garde de sept jours, respectivement prolonger ce délai, en demandant une deuxième distribution de l'acte judiciaire ou de l'envoi recommandé (cf. arrêt 6B_923/2018 du 19 novembre 2018 consid. 4). Ainsi, quel que soit l'accord intervenu, une notification fictive s'accomplit le septième jour suivant la première tentative infructueuse de remise de l'envoi et déclenche l'écoulement du délai de recours (arrêt 4A_2/2024 du 17 janvier 2024 consid. 3.1). Les impératifs liés à la sécurité du droit, à l'égalité de traitement et à l'interdiction de l'abus de droit commandent que les règles sur la communication des décisions soient d'une application claire et uniforme, ce qui exclut que le moment où naissent les conséquences procédurales de la notification soit déterminé par les instructions particulières données par un administré à La Poste (ATF 141 II 329 consid. 3.3.2; arrêt 5F_8/2024 du 14 mars 2024 consid. 5). Le fait que La Poste ait procédé, pour des raisons non imputables au recourant, à la deuxième distribution de l'envoi recommandé contenant la décision préfectorale litigieuse non pas le vendredi 5 janvier 2024, qui correspondait au dernier jour du délai de garde, mais le lundi suivant, n'avait pas pour effet de faire partir le délai de recours de la date effective de la remise. En prenant comme point de départ du délai de recours le jour suivant l'échéance du délai de garde de sept jours, le Président de la IIe Cour administrative s'en est ainsi tenu à la jurisprudence et la décision d'irrecevabilité qu'il a prise est conforme au droit et non arbitraire. Le recourant a au surplus disposé d'un laps de temps de vingt-sept jours suffisamment long pour rédiger son recours et n'a ainsi pas subi de préjudice du fait qu'il a effectivement pris connaissance du contenu de la décision préfectorale trois jours après l'échéance du délai de garde. 
 
3.  
Le recours constitutionnel pour arbitraire, traité comme un recours en matière droit public, doit par conséquent être rejeté, ce qui rend sans objet la demande d'effet suspensif dont il était assorti. Le recourant, qui succombe, prendra en charge les frais judiciaires (art. 65 et 66 al. 1 LTF). 
Le délai de remise en état étant aujourd'hui échu, il convient de le reporter au 31 juillet 2024. A défaut d'exécution ou en cas d'exécution non conforme dans le délai, la Commune d'Estavayer est en droit de procéder, sans nouvel avis comminatoire, à la remise en état par substitution aux frais du recourant. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable. 
 
2.  
Le recours en matière de droit public est rejeté. 
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Préfecture du district de la Broye et à la IIe Cour administrative du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg. 
 
 
Lausanne, le 8 mai 2024 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
Le Greffier : Parmelin