8C_689/2023 10.06.2024
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
8C_689/2023  
 
 
Arrêt du 10 juin 2024  
 
IVe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Wirthlin, Président, Viscione et Métral. 
Greffière : Mme Barman Ionta. 
 
Participants à la procédure 
Allianz Suisse Société d'Assurances SA, 
Richtiplatz 1, 8304 Wallisellen, 
représentée par Me Sara Giardina, avocate, 
recourante, 
 
contre  
 
A.________, 
représenté par ASSUAS, Association Suisse des Assurés, 
intimé. 
 
Objet 
Assurance-accidents (rente d'invalidité; révision), 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 25 septembre 2023 (A/49/2023 ATAS/715/2023). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
 
A.a. Le 2 juillet 1996, A.________, né en 1966, a été victime d'un accident de la circulation ayant entraîné une fracture du tibia droit, une plaie ouverte de la rotule ainsi qu'une déchirure du ligament croisé antérieur du genou droit. Elvia Assurances (aujourd'hui: Allianz Suisse Société d'Assurances SA [ci-après: Allianz]), auprès de laquelle il était assuré obligatoirement contre le risque d'accident, a pris en charge le cas.  
L'assurance-invalidité (AI) a accordé à l'assuré un reclassement professionnel d'employé administratif/aide-comptable, du 1 er octobre 2002 au 30 juin 2004. Au terme du stage au sein de l'entreprise B.________ SA, l'assuré a été engagé à plein temps dans cette société.  
 
A.b. Le 23 janvier 2014, A.________ s'est tordu la cheville et le genou droits sur le bord d'un trottoir. Allianz a pris en charge les suites de cet événement, pour lequel aucun arrêt de travail n'a été initialement attesté. Dès le 6 mai 2015, le docteur C.________, spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, a mis l'assuré en arrêt de travail total en raison de douleurs du genou droit et de la cheville droite post-traumatiques. L'assuré a été licencié pour le 31 décembre 2015.  
Allianz a mandaté l'entreprise D.________ SA afin d'effectuer une surveillance de l'assuré, laquelle a eu lieu entre le 28 mars et le 3 avril 2016. Parallèlement, elle a confié un mandat d'expertise au docteur E.________, spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, qui a rendu son rapport le 20 avril 2016. Sur la base de cette expertise, Allianz a, par décision du 27 mai 2017, mis un terme aux prestations d'assurance en retenant que le statu quo sine était atteint pour la cheville droite au 22 juillet 2014, et pour le genou droit au 19 février 2016. Le 8 février 2017, Allianz a écarté l'opposition. 
A.________ a recouru devant la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice de la République et canton de Genève (ci-après: la Chambre des assurances sociales). Celle-ci a ordonné une expertise médicale bidisciplinaire, qu'elle a confiée au professeur F.________, spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, et à la docteure G.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie. Dans son rapport du 21 novembre 2018, le professeur F.________ a constaté pour l'essentiel que l'accident de 1996 avait causé des lésions séquellaires aboutissant à une arthrose tricompartimentale débutante et à une patella baja du genou droit. L'accident de 2014 avait péjoré la situation de ce genou; il avait en outre entraîné un état douloureux du pied et de la cheville droits sur un état antérieur, pour lequel un délai de six mois paraissait justifié quant au retour au statu quo ante. L'assuré présentait, enfin, une tendinopathie fibrillaire du tendon d'Achille droit, probablement en relation avec la boiterie induite par l'arthrose du genou. Selon l'expert, la reprise d'une activité adaptée sur le plan orthopédique et ostéoarticulaire était exigible à 70% dès la date de son examen clinique du 27 juin 2018. Invité par la Chambre des assurances sociales à se prononcer sur la vidéo-surveillance de D.________ SA, le professeur F.________ a répondu qu'elle ne changeait pas ses conclusions quant à la capacité de travail fixée à 70% (complément d'expertise du 29 juillet 2019). Considérant qu'il convenait de suivre les conclusions de l'expertise judiciaire orthopédique, la Chambre des assurances sociales a, par arrêt du 27 janvier 2020, admis partiellement le recours, reconnu le droit de l'assuré à des indemnités journalières pour les affections du genou droit et la tendinopathie fibrillaire du tendon d'Achille jusqu'au 19 février 2016, date de la stabilisation de l'état de santé, et renvoyé la cause à Allianz pour examen du droit de l'assuré à la prise en charge du traitement médical, à une rente d'invalidité et à une indemnité pour atteinte à l'intégrité en tenant compte des conclusions de l'expertise judiciaire orthopédique. En outre, elle a nié tout lien de causalité adéquate entre les troubles psychiques et l'accident de 2014, le lien de causalité naturelle avec l'accident de 1996 étant par ailleurs exclu par l'experte psychiatre. 
 
A.c. Entre-temps, le 9 août 2019, A.________ a subi une fracture de la tête radiale droite et de la base du cinquième métatarsien à droite à la suite d'une chute à trottinette, accident non couvert par Allianz.  
Dans un rapport du 20 novembre 2019 rédigé à la demande de l'Office AI du canton de Genève, le professeur F.________ a mentionné que l'assuré était capable de travailler à plein temps dans une activité adaptée permettant des changements de position, des déplacements limités et l'évitement de ports de charges, à condition que les phénomènes douloureux soient maîtrisés, précisant qu'il fallait prendre en compte les effets de l'accident du 9 août 2019 qui n'étaient pas terminés. L'Office AI a mandaté le Centre d'Expertise Médicale (CEMed) pour une expertise bidisciplinaire. Après avoir examiné l'assuré le 14 mai 2021, le docteur H.________, spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, a conclu que depuis le 9 février 2020, l'assuré était capable de travailler à 100%, sans limitation de temps ni de rendement, dans une activité adaptée aux limitations somatiques (rapport d'expertise du 15 juillet 2021). Le Service médical régional (SMR) de l'AI a cependant proposé de maintenir la capacité de travail au taux de 70% au-delà du 9 février 2020, dès lors que l'appréciation du docteur H.________ apparaissait comme une appréciation différente de celle du professeur F.________ (avis SMR du 19 octobre 2022). 
 
A.d. Allianz a confié une expertise au docteur I.________, spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur. Au terme de son rapport du 2 février 2022, cet expert a conclu à l'absence de diminution permanente de la capacité de travail dans l'activité habituelle, résultant des accidents de 1996 et 2014.  
 
A.e. Par arrêt du 19 avril 2022, admettant un recours pour déni de justice formé par l'assuré, la Chambre des assurances sociales a enjoint Allianz de rendre une décision dans un délai de 30 jours, rappelant avoir jugé qu'il subsistait une atteinte durable causée par l'événement de 2014, laquelle entraînait une incapacité de travail durable de 30%, y compris dans une activité adaptée. L'expertise ordonnée auprès du docteur I.________ portait principalement sur des questions tranchées par l'arrêt du 27 janvier 2020 ayant force de chose jugée depuis plus de deux ans.  
 
A.f. Le 23 mai 2022, Allianz a rendu une nouvelle décision par laquelle elle a mis un terme à la prise en charge du traitement conservateur pour le genou droit et le tendon d'Achille au 8 février 2020, reconnu le droit de l'assuré à une indemnité pour atteinte à l'intégrité fondée sur un taux de 25% et alloué une rente d'invalidité de 30% du 19 février 2016 au 23 mai 2022, soulignant que la rente était supprimée dès lors que l'expertise du CEMed attestait une capacité de travail totale dès le 9 février 2020. Saisie d'une opposition, Allianz l'a partiellement admise par décision du 23 novembre 2022, en ce sens que la rente d'invalidité prenait fin au 1er juin 2022, soit le premier jour du mois suivant la notification de la décision du 23 mai 2022.  
 
B.  
Par arrêt du 25 septembre 2023, la Chambre des assurances sociales a partiellement admis le recours interjeté par l'assuré contre la décision sur opposition du 23 novembre 2022 et a annulé celle-ci dans la mesure où elle supprimait la rente d'invalidité au-delà du 31 mai 2022. 
 
C.  
Allianz interjette un recours en matière de droit public contre cet arrêt, en concluant principalement à sa réforme dans le sens de la confirmation de la décision sur opposition du 23 novembre 2022. Subsidiairement, elle conclut à l'annulation de l'arrêt et au renvoi de la cause à l'instance précédente pour nouvelle décision. 
L'intimé conclut au rejet du recours. La Chambre des assurances sociales et l'Office fédéral de la santé publique ont renoncé à se déterminer. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours est dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière de droit public (art. 82 ss LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d LTF). Il a été déposé dans le délai (art. 100 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi. Il est donc recevable. 
 
2.  
 
2.1. Le recours en matière de droit public peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF) et n'est limité ni par les arguments de la partie recourante, ni par la motivation de l'autorité précédente. Le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués, compte tenu de l'exigence de motivation prévue à l'art. 42 al. 2 LTF, et ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties (art. 107 al. 1 LTF).  
 
2.2. Au vu du contenu et des conclusions du recours, le litige porte sur le droit de l'intimé au maintien de la rente d'invalidité au-delà du 31 mai 2022. Dans la mesure où le Tribunal fédéral est lié par les conclusions du recours (cf. consid. 2.1 supra), il n'y a pas lieu de revenir sur le droit à la rente d'invalidité de 30% pour la période antérieure.  
 
2.3. S'agissant d'une procédure concernant l'octroi de prestations en espèces de l'assurance-accidents, le Tribunal fédéral n'est pas lié par les faits établis par la juridiction précédente (art. 105 al. 3 LTF).  
 
3.  
 
3.1. Aux termes de l'art. 17 al. 1 LPGA - dans sa teneur en vigueur dès le 1er janvier 2022 et donc applicable ratione temporis au cas d'espèce (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 et les arrêt cités) -, lorsque le taux d'invalidité subit une modification d'au moins 5 points de pourcentage (let. a) ou atteint 100% (let. b), la rente d'invalidité est, d'office ou sur demande, révisée pour l'avenir, à savoir augmentée, réduite ou supprimée. Tout changement important des circonstances propre à influencer le degré d'invalidité, et donc le droit à la rente, peut motiver une révision. La rente peut être révisée non seulement en cas de modification sensible de l'état de santé, mais aussi lorsque celui-ci est resté en soi le même, mais que ses conséquences sur la capacité de gain ont subi un changement important (ATF 144 I 103 consid. 2.1; 134 V 131 consid. 3). Tel est le cas lorsque la capacité de travail s'améliore grâce à l'accoutumance ou à une adaptation du handicap. En revanche, une simple appréciation différente d'un état de fait qui, pour l'essentiel est demeuré inchangé n'appelle pas une révision au sens de l'art. 17 al.1 LPGA (ATF 144 I 103 consid. 2.1; 141 V 9 consid. 2.3 et les références). L'art. 17 LPGA est applicable, par analogie, en cas d'octroi, à titre rétroactif, d'une rente échelonnée ou limitée dans le temps (ATF 148 V 321 consid. 7.3.1; 125 V 413 consid. 2d et les références).  
 
3.2. Selon le principe de la libre appréciation des preuves, le juge apprécie les preuves médicales qu'il a recueillies sans être lié par des règles formelles. En ce qui concerne la valeur probante d'un rapport médical, il est déterminant que les points litigieux aient fait l'objet d'une étude circonstanciée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées par la personne examinée, qu'il ait été établi en pleine connaissance de l'anamnèse, que la description du contexte médical et l'appréciation de la situation médicale soient claires et enfin que les conclusions de l'expert soient dûment motivées. Au demeurant, l'élément déterminant pour la valeur probante n'est ni l'origine du moyen de preuve ni sa désignation comme rapport ou comme expertise, mais bel et bien son contenu (ATF 125 V 351 consid. 3a et les références).  
S'agissant d'une expertise mise en oeuvre dans le cadre d'une procédure administrative au sens de l'art. 44 LPGA, la jurisprudence a précisé que le tribunal peut lui accorder une pleine valeur probante aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de son bien-fondé (ATF 135 V 465 consid. 4.4; 125 V 351 consid. 3b/bb). En effet, au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à des nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion distincte de celle exprimée par les experts. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expertise (arrêt 8C_267/2023 du 17 novembre 2023 consid. 3.2 et l'arrêt cité). 
 
4.  
La cour cantonale a considéré, en substance, que la recourante avait alloué ses prestations, dès février 2016, sur la base de l'expertise judiciaire du professeur F.________, conformément aux instructions figurant dans l'arrêt de renvoi du 27 janvier 2020. Par la suite, le professeur F.________ avait indiqué dans son rapport du 20 novembre 2019, et par une phrase exactement identique à celle figurant dans son rapport d'expertise, que l'intimé était apte à travailler à un taux de 100% dans une activité adaptée à la condition que les phénomènes douloureux soient maîtrisés. Or le professeur F.________ n'indiquait pas que tel était le cas au jour de son rapport. Par ailleurs, le SMR avait estimé que la capacité de travail de l'intimé dans son activité habituelle était de 70% également au-delà du 9 février 2020, se distançant des conclusions de l'expertise du CEMed. Selon les premiers juges, la recourante ne pouvait se fonder valablement sur l'expertise du docteur H.________, qui avait lui-même nié une amélioration de l'état de santé en précisant, sur demande du SMR, que son évaluation était une appréciation différente de celle retenue par le professeur F.________. Enfin, dans son rapport d'expertise du 2 février 2022, le docteur I.________ s'adonnait à critiquer l'expertise du professeur F.________ et concluait à un état de santé définitivement atteint au 19 février 2016, sans diminution permanente de la capacité de travail de l'intimé. Aussi, aucun élément médical ne permettait d'établir une amélioration de l'état de santé de l'intimé entre février 2016 (moment de la reconnaissance du droit à la rente) et mai 2022 (moment de la suppression du droit à la rente). 
 
5.  
La recourante se plaint d'un établissement des faits erroné et incomplet, d'une appréciation arbitraire des preuves ainsi que d'une violation de l'art. 17 LPGA. En substance, elle reproche à l'instance précédente d'avoir écarté trois appréciations médicales, dont deux expertises, toutes subséquentes à un nouvel accident survenu le 9 août 2019, et d'avoir considéré que la révision du droit à la rente ne pouvait être effectuée sur cette base au motif qu'il agissait d'appréciations simplement différentes de celle retenue par le professeur F.________ dans son expertise de 2018. Les juges cantonaux avaient résumé de manière incomplète le rapport du professeur F.________ du 20 novembre 2019, le figeant à un état de fait antérieur à l'accident du 9 août 2019. Ils avaient retenu arbitrairement que l'on ne pouvait se fonder sur l'expertise du docteur H.________ pour retenir une amélioration de l'état de santé dès lors que l'Office AI n'avait pas suivi son appréciation. Enfin, ils avaient ignoré les éléments mis en avant par le docteur I.________ qui démontraient que l'intimé ne souffrait plus des affections orthopédiques consécutives aux accidents de 1996 et 2014. 
 
6.  
 
6.1. Il ressort de l'expertise judiciaire du 21 novembre 2018 que l'intimé présentait, comme suites des accidents de 1996 et 2014, une arthrose tricompartimentale débutante et une patella baja du genou droit ainsi qu'une tendinopathie fibrillaire du tendon d'Achille à droite probablement en relation avec la boiterie due aux lésions du genou. Le professeur F.________ avait indiqué que dans une activité permettant des changements de position, des déplacements limités et l'évitement de port de charges, la capacité de travail "pourrait être totale à condition que les phénomènes douloureux soient maîtrisés". Au terme de son rapport, il avait cependant ajouté qu'en présence de douleurs chronicisées, un rendement total paraissait difficilement exigible en l'état, l'estimant à 70%. Dans son complément d'expertise du 29 juillet 2019, il s'était prononcé notamment sur la capacité de travail dans une activité adaptée en tenant compte d'un traitement antidouleur exigible et bien conduit, répondant qu'avec la disparition des phénomènes douloureux, l'intimé pouvait envisager un emploi à 100% et avec un rendement total dans une activité adaptée (bureau, comptabilité, etc.) sans port de charges ni changement de position répétitif.  
L'évaluation de la capacité de travail par le professeur F.________, qui résultait de ses constatations médicales établies ensuite de l'examen clinique du 27 juin 2018, n'avait donc pas une portée définitive. Ce spécialiste était d'avis, en effet, que la maîtrise des phénomènes douloureux était une condition au recouvrement d'une pleine capacité de travail sans diminution de rendement. 
Ultérieurement, la baisse de rendement n'a plus été attestée par le professeur F.________, désormais chirurgien traitant de l'intimé. On notera, à l'instar des premiers juges, que s'agissant du rapport du 20 novembre 2019 à l'attention de l'Office AI, le professeur F.________ a repris à l'identique son évaluation de la capacité de travail totale dans une activité adaptée - précisant au surplus qu'il fallait prendre en compte les effets de l'accident de 2019 qui n'étaient pas terminés -, mais sans faire mention d'un rendement réduit. Dans ces circonstances, on ne peut partir d'emblée du principe que la diminution de rendement retenue en 2018 était toujours pertinente au moment où la recourante a rendu sa décision. 
 
6.2.  
 
6.2.1. On ne saurait ensuite suivre le raisonnement adopté par la cour cantonale pour écarter l'expertise du docteur H.________ (CEMed). Comme le relève la recourante, le fait que le SMR n'a pas suivi les conclusions de ce médecin ne dispensait pas l'instance précédente d'examiner la valeur probante de son expertise. En effet, l'évaluation de l'invalidité par les organes de l'assurance-invalidité n'a pas de force contraignante pour l'assureur-accidents (ATF 131 V 362 consid. 2.3; la réciprocité de cette règle à l'égard de l'assurance-invalidité a également été admise: ATF 133 V 549). On soulignera encore que si, dans sa lettre du 21 décembre 2021, le docteur H.________ a répondu au SMR que son évaluation de la capacité de travail était une appréciation différente de celle retenue par le professeur F.________, il ne s'est pas pour autant exprimé quant à l'évolution de la situation médicale. Singulièrement, il n'a pas exclu une évolution favorable de l'état de santé de l'intimé, ce qu'il convient précisément d'examiner.  
 
6.2.2. Liminairement, il sied de relever que l'expert du CEMed a pris en compte les rapports médicaux antérieurs ainsi que les plaintes de l'intimé, avant de détailler la situation médicale actuelle. Ses conclusions - motivées et convaincantes - concernant la capacité de travail dans une activité adaptée se fondent sur un examen clinique complet et documenté, qui rend compte de manière claire et détaillée des restrictions fonctionnelles et des ressources de l'intimé. Cette expertise devait donc être prise en compte dans le cadre de l'appréciation des preuves (cf. consid. 3.2 supra), le fait que le SMR s'en soit distancé n'en affaiblissant pas sa valeur probante.  
Cela étant, le docteur H.________ a relevé que les différents bilans radiologiques depuis 2015 n'avaient pas montré d'évolution de la gonarthrose droite, laquelle devait être considérée comme très modérée. Si les plaintes au niveau du genou droit n'avaient que peu évoluées avec le temps et étaient toujours présentes, il n'en demeurait pas moins que le traitement antalgique (Dafalgan et Ponstan) était placé en réserve et l'intimé ne se souvenait plus quand avait eu lieu la dernière prise de celui-ci. Selon l'expert, il y avait une divergence importante entre la symptomatologie déclarée, les plaintes exprimées et les signes orthopédiques observés, qu'ils soient cliniques ou constatés à l'imagerie. La capacité de travail de l'intimé était de 100%, sans baisse de rendement, dans une activité adaptée respectant les limitations fonctionnelles suivantes: les activités en terrain accidenté, la montée et la descente régulières d'escaliers, le travail en échafaudage, le port de charges régulier supérieures à 15 kg et le port de charges irrégulier supérieures à 20 kg. Le docteur H.________ a encore précisé que les différents traumatismes avaient justifié des incapacités de travail qui, actuellement, devant l'absence de complications notoires hormis la gonarthrose droite secondaire, n'entraînaient plus aucune incapacité de travail si l'activité professionnelle respectait les limitations fonctionnelles énoncées. Il a en outre constaté que l'état de santé était stabilisé à 6 mois maximum du dernier traumatisme, soit le 9 février 2020. 
 
6.2.3. On peut déduire de ces constatations médicales que la capacité de travail, limitée en 2018 à un taux de 70%, a évolué favorablement. Initialement, les limitations fonctionnelles découlant du tableau établi par le professeur F.________ concernaient le port de charges, les positions et les déplacements. Ces limitations avaient été émises en lien avec les phénomènes douloureux, qui justifiaient en l'état - selon le professeur F.________ - un rendement de 70%, et ne relevaient pas de restrictions définitives à une activité adaptée. En 2021, les limitations fonctionnelles induites par la gonarthrose droite avaient évolué, dès lors qu'elles concernaient désormais plus spécifiquement les activités en terrains accidentés, les escaliers et échafaudages et le port de charges désormais exigible à 15 kg de manière régulière et à 20 kg de manière irrégulière. La baisse de rendement ne se justifiait plus si l'activité professionnelle respectait ces restrictions fonctionnelles. En outre, il apparaissait objectivement une maîtrise des phénomènes douloureux. En novembre 2019, le traitement antalgique prescrit par le professeur F.________ était du Dafalgan et Ponstan selon nécessité et du Flector Tissugel et, en février 2020, "une décharge antalgique" du pied droit. Il n'apparaît pas au dossier que le professeur F.________ ait mis en place un traitement spécifique de la gonarthrose ensuite de l'expertise de 2018. En mai 2021, l'intimé prenait des antalgiques seulement en cas de besoin. En février 2022, il ne suivait aucun traitement contre la douleur du genou droit selon le docteur I.________. Ce médecin a en outre relevé qu'en août 2019, "l'assuré était apte à pratiquer la trottinette. Ce qui, de par les importantes charges mécaniques appliquées à la rotule droite lors de cette pratique, est incompatible avec une affection symptomatique de celle-ci".  
 
6.3. Les considérations qui précèdent sont de nature à établir l'amélioration de la capacité de travail de l'intimé, capacité qui n'était pas définitive lors de la reconnaissance du droit à la rente d'invalidité en février 2016.  
Aussi, contrairement à ce qu'ont retenu les juges cantonaux, les éléments médicaux au dossier, en particulier l'expertise du CEMed sur laquelle la recourante pouvait valablement se fonder, permettent d'attester que l'état de santé de l'intimé s'est amélioré entre le moment de la reconnaissance du droit à la rente en février 2016 et celui de sa suppression en mai 2022. Au plus tard à cette date, l'intimé était à même d'exercer l'activité d'employé administratif/aide-comptable adaptée à ses limitations fonctionnelles, à plein temps et sans baisse de rendement, ce qui justifiait la suppression de sa rente d'invalidité. Le recours se révèle dès lors bien fondé et doit être admis. 
 
7.  
L'intimé, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Bien qu'elle obtienne gain de cause, la recourante n'a pas droit à une indemnité de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est admis. L'arrêt de la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 25 septembre 2023 est annulé et la décision sur opposition de Allianz du 23 novembre 2022 est confirmée. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de l'intimé. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, et à l'Office fédéral de la santé publique. 
 
 
Lucerne, le 10 juin 2024 
 
Au nom de la IVe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Wirthlin 
 
La Greffière : Barman Ionta