2C_161/2023 17.05.2023
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_161/2023  
 
 
Arrêt du 17 mai 2023  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mme et MM. les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz et Hartmann. 
Greffier : M. de Chambrier. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
recourante, 
 
contre  
 
Service de la population et des migrants du canton de Fribourg, 
Les Portes-de-Fribourg, route d'Englisberg 11, 1763 Granges-Paccot, 
intimé. 
 
Objet 
Autorisation de séjour, 
 
recours contre la décision du Tribunal cantonal 
de l'Etat de Fribourg, Ie Cour administrative, du 6 février 2023 (601 2023 2). 
 
 
Considérant en fait et en droit :  
 
1.  
Par écrit posté le 9 janvier 2023, B.________, juriste auprès de C.________ à U.________, a recouru auprès de la I e Cour administrative du Tribunal cantonal du canton de Fribourg (ci-après: le Tribunal cantonal) au nom de A.________, ressortissante du Kosovo née en 1976, contre la décision de refus d'autorisation de séjour au titre du regroupement familial inversé et de renvoi de Suisse, prononcée à l'endroit de celle-ci par le Service de la population et des migrants du canton de Fribourg (ci-après: le Service cantonal), le 22 novembre 2022.  
Le 11 janvier 2023, le Tribunal cantonal a informé le représentant précité que seules les personnes autorisées à exercer la profession d'avocat pouvaient agir comme mandataires dans les affaires portées devant lui, en se basant sur l'art. 14 al. 1 du code fribourgeois du 23 mai 1991 de procédure et de juridiction administrative (CPJA; RS/FR 150.1). Un délai au 20 janvier 2023 lui a été imparti pour régulariser le recours en justifiant de ses pouvoirs de représentation (inscription au barreau) ou en transmettant au Tribunal cantonal le mémoire dûment signé par l'intéressée. A cette occasion, le représentant a été expressément avisé du fait qu'à défaut de régularisation dans le délai fixé, le recours serait déclaré irrecevable. 
Le mémoire signé par l'intéressée a été posté à l'adresse du Tribunal cantonal le 25 janvier 2023. 
Par arrêt du 6 février 2023, le Tribunal cantonal a déclaré le recours irrecevable, car le délai imparti pour présenter une écriture conforme aux exigences procédurales n'avait pas été respecté. 
 
2.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public et, subsidiairement, par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, A.________ demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, à titre principal, l'annulation de l'arrêt susmentionné et, subsidiairement, le renvoi de la cause à l'autorité intimée, afin qu'elle statue sur la demande d'autorisation de séjour en sa faveur. La recourante sollicite en outre l'octroi de l'effet suspensif à son recours. 
 
Par ordonnance du 13 mars 2023, la Présidente de la IIe Cour de droit public du Tribunal fédéral a admis la requête d'effet suspensif. 
Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures. 
 
3.  
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (art. 29 al. 1 LTF; cf. ATF 147 I 89 consid. 1). 
 
3.1. Contre un arrêt d'irrecevabilité, le recours en matière de droit public n'est ouvert que si l'arrêt au fond aurait pu être déféré au Tribunal fédéral par cette voie (ATF 135 II 145 c. 3.2). D'après l'art. 83 let. c ch. 2 LTF, le recours en matière de droit public est irrecevable contre les décisions relatives à une autorisation de droit des étrangers à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit. A cet égard, il suffit que le recourant démontre de manière soutenable l'existence d'un droit potentiel à une autorisation de séjour pour que son recours soit recevable; le point de savoir si toutes les conditions sont effectivement réunies dans un cas particulier relève de l'examen au fond (cf. ATF 139 I 330 consid. 1.1).  
En l'occurrence, la recourante, qui invoque l'art. 8 CEDH, se prévaut de manière soutenable de son droit à entretenir une relation avec sa fille mineure de nationalité suisse. Son recours échappe par conséquent au motif d'irrecevabilité de l'art. 83 let. c ch. 2 LTF (cf. arrêt 2C_591/2020 du 4 janvier 2021 consid. 1.1 et les arrêts cités). 
 
3.2. La conclusion principale du recours, qui est purement cassatoire, est recevable, en dépit du pouvoir de réforme dont dispose le Tribunal fédéral (art. 107 al. 2 LTF). En effet, en cas d'admission du recours, le Tribunal fédéral ne serait pas en mesure de statuer lui-même sur le fond (cf. ATF 138 III 46 consid. 1.2; FLORENCE AUBRY GIRARDIN, Commentaire de la LTF, 3e éd. 2022, n° 23 ad art. 42 LTF).  
 
3.3. Les autres conditions de recevabilité étant au surplus réunies (cf. art. 42, 82 let. a, 86 al. 1 let. d et al. 2, 89 al. 1, 90 et 100 al. 1 LTF), il convient d'entrer en matière, sous réserve de ce qui suit.  
 
3.4. Selon la jurisprudence, l'objet de la contestation portée devant le Tribunal fédéral est déterminé par l'arrêt attaqué. L'objet du litige, délimité par les conclusions des parties (art. 107 al. 1 LTF), ne saurait s'étendre au-delà de l'objet de la contestation. Par conséquent, devant le Tribunal fédéral, le litige peut être réduit, mais ne saurait être ni élargi, ni transformé par rapport à ce qu'il était devant l'autorité précédente, qui l'a fixé dans le dispositif de l'arrêt entrepris et qui est devenu l'objet de la contestation devant le Tribunal fédéral (ATF 142 I 155 consid. 4.4.2). La partie recourante ne peut par conséquent pas prendre des conclusions ni formuler de griefs allant au-delà de l'objet du litige.  
En l'espèce, l'arrêt attaqué ne porte que sur l'irrecevabilité du recours déposé devant le Tribunal cantonal pour non respect du délai visant à corriger l'absence de représentation et/ou de signature valable. Il s'ensuit que toutes les conclusions et tous les griefs formulés dans le recours qui ne concernent pas l'irrecevabilité prononcée dépassent l'objet de la contestation et ne sont pas admissibles. Il en va ainsi notamment des griefs de constatation inexacte des faits, de violation de l'art. 8 CEDH et d'arbitraire, ce dernier grief, dans la mesure où ils concernent le fond du litige. 
 
4.  
Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral contrôle librement le respect du droit fédéral, qui comprend les droits de nature constitutionnelle (art. 95 let. a), ainsi que des droits constitutionnels cantonaux (art. 95 let. c; art. 106 al. 1 LTF). Sauf dans les cas cités expressément à l'art. 95 LTF, un tel recours ne peut toutefois pas être formé pour violation du droit cantonal en tant que tel. Il est néanmoins possible de faire valoir que l'application du droit cantonal consacre une violation du droit fédéral, en particulier qu'elle est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. ou contraire à un autre droit constitutionnel (ATF 145 I 108 consid. 4.4.1 et les arrêts cités). Le Tribunal fédéral n'examine toutefois le moyen tiré de la violation de droits fondamentaux, ainsi que celle de dispositions de droit cantonal notamment, que si ce grief a été invoqué et motivé de manière précise par la partie recourante (art. 106 al. 2 LTF; cf. ATF 142 V 577 consid. 3.2). 
 
5.  
La recourante reproche à l'autorité précédente d'avoir violé l'interdiction du déni de justice (29 al. 1 Cst.) en refusant d'examiner au fond son recours. 
 
5.1. Il y a formalisme excessif prohibé par l'art. 29 al. 1 Cst. lorsque des règles de procédure sont appliquées avec une rigueur que ne justifie aucun intérêt digne de protection, au point que la procédure devient une fin en soi et empêche ou complique de manière insoutenable l'application du droit (cf. ATF 145 I 201 consid. 4.2.1; 142 I 10 consid. 2.4.2). De manière générale, la seule application stricte des règles de forme n'est pas constitutive de formalisme excessif (ATF 142 IV 299 consid. 1.3.3; arrêts 2C_713/2022 du 13 février 2023 consid. 7; 8C_145/2019 du 3 juin 2020 consid. 6.3.3). Il n'est pas contraire à la Constitution que le tribunal cantonal insiste, lors de l'introduction d'un recours, sur la signature du recourant ou de son représentant. En revanche, en l'absence de signature valable, il doit fixer un délai raisonnable pour remédier au défaut (cf. ATF 142 V 152 consid. 4.3 s.; 142 I 10 consid. 2.4.6; 120 V 413 consid. 6a). Un délai supplémentaire fixé d'office avec une menace correspondante crée la condition d'une non-entrée en matière, pour autant que le délai fixé ne soit pas respecté (ATF 142 V 152 consid. 4.4).  
 
5.2. En l'occurrence, le Tribunal cantonal n'est pas entré en matière sur le recours de l'intéressée, au motif qu'il n'avait pas été donné suite en temps utile à l'écrit du 11 janvier 2023, impartissant un délai au 20 janvier 2023 pour régulariser l'acte de recours, soit en y apposant la signature de la recourante, soit en justifiant des pouvoirs de représentation de son représentant, et avertissant que faute de correction dans le délai, le recours serait déclaré irrecevable.  
Au regard de la jurisprudence précédemment rappelée (supra consid. 5.1), on ne peut que constater que le Tribunal cantonal n'a pas violé le droit fédéral en déclarant irrecevable le recours porté devant lui. 
 
6.  
Invoquant l'interdiction de l'arbitraire, la recourante reproche également au Tribunal cantonal d'avoir continué à tran smettre des écrits à son représentant, alors que celui-ci, faute d'être avocat, n'était pas en mesure de la représenter et, en particulier, de ne pas lui avoir directement signifié l'obligation de signer et de transmettre le recours dans le délai imparti. 
 
6.1. La notification irrégulière d'une décision ne doit entraîner aucun préjudice pour les parties (ATF 145 IV 259 consid. 1.4.4).  
 
6.2. En l'occurrence, on ne peut pas reprocher à l'autorité précédente d'avoir adressé au représentant de la recourante le courrier du 11 janvier 2023, l'informant des lacunes constatées et des manières d'y remédier, dans la mesure où cet écrit lui indiquait également qu'il avait la possibilité de justifier de ses éventuels pouvoirs de représentation (inscription au barreau). On pouvait attendre du représentant qui ne remplirait pas les conditions de représentation prévue par le droit cantonal qu'il veille à ce qu'un exemplaire du mémoire de recours valablement signé parvienne dans les temps au Tribunal cantonal, voire qu'il requiert de celui-ci un délai supplémentaire pour ce faire.  
Par ailleurs, le contenu du courrier du 11 janvier 2023 a été communiqué à la recourante, puisque celle-ci s'est acquittée de l'avance de frais (dans le délai fixé dans ce même courrier) (art. 105 al. 2 LTF) et qu'elle a signé un exemplaire du recours. La recourante ne prétend pas qu'un éventuel vice dans la notification de l'écrit du 11 janvier 2023 aurait été à l'origine du non-respect du délai fixé pour corriger l'écrit en cause. 
La recourante ne se plaint enfin pas d'une application arbitraire du droit cantonal. 
Dans les présentes circonstances, le Tribunal cantonal n'a pas versé dans l'arbitraire en déclarant le recours irrecevable. 
 
7.  
Mal fondé, le recours doit être rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, en application de la procédure de l'art. 109 al. 2 let. a et al. 3 LTF. Les frais de justice seront à la charge de la recourante, qui succombe (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais de justice, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué à la recourante, au Service de la population et des migrants du canton de Fribourg, au Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg, Ie Cour administrative, et au Secrétariat d'Etat aux migrations. 
 
 
Lausanne, le 17 mai 2023 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
Le Greffier : A. de Chambrier