1C_473/2022 14.06.2023
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_473/2022  
 
 
Arrêt du 14 juin 2023  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux 
Kneubühler, Président, Chaix et Merz. 
Greffier : M. Alvarez. 
 
Participants à la procédure 
A.A.________, 
B.A.________, 
C.________, 
tous les trois représentés par Me Sébastien Dorthe, avocat, 
recourants, 
 
contre  
 
Commune de Romont, 
rue du Château 93, 1680 Romont FR, 
Direction du développement territorial, des infrastructures, de la mobilité et de l'environnement de l'Etat de Fribourg (DIME), 
rue des Chanoines 17, 1700 Fribourg. 
 
Objet 
Aménagement du territoire; projet d'élargissement d'une route communale, 
 
recours contre l'arrêt de la IIe Cour administrative du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg du 27 juin 2022 (602 2021 129). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Une demande préalable portant notamment sur l'élargissement de la route de la Comba, à Romont, a été déposée fin 2017. Par publication dans la Feuille officielle du canton de Fribourg (FO) du 27 avril 2018, la Commune de Romont a mis à l'enquête ce projet prévoyant l'aménagement d'un trottoir, avec élargissement de la route, éclairage public et mise en séparatif des parcelles n os 863, 864, 1014 et 1015 du Registre foncier communal. Cette procédure s'inscrivait dans le contexte de la démarche entamée par D.________ SA, qui avait requis l'autorisation de construire deux immeubles sur la parcelle n o 865, sise à la fin de la route de la Comba, mais également accessible depuis la route du Glaney.  
Le 1 er juillet 2019, après une séance de conciliation qui n'a pas abouti, la Commune de Romont a rejeté les oppositions déposées notamment par des riverains de la route de la Comba et adopté le plan du projet. La commune a décidé de faire passer le trafic exclusivement sur la route de la Comba, le projet assurant ainsi une répartition équitable du trafic entre les deux routes concernées; le développement du quartier nécessitait notamment l'élargissement du gabarit de la route à 4,10 m; le trafic serait en outre limité à 30 km/h. Le dossier a été soumis pour approbation à la Direction cantonale de l'aménagement, de l'environnement et des constructions (DAEC; désormais Direction cantonale du développement territorial, des infrastructures, de la mobilité et de l'environnement [ci-après: DIME]).  
Les opposants ont recouru contre cette décision. Le 5 juillet 2021, la DIME a rejeté les recours. Dans ce cadre, la direction cantonale a notamment estimé que l'arbre situé le long de l'élargissement routier, sur le fond no 864, était suffisamment protégé par les conditions posées par le Service cantonal compétent (actuellement, Service cantonal des forêts et de la nature [ci-après: SFN]) dans son préavis du 1er février 2018. 
Le 9 septembre 2021, A.A.________ et B.A.________, ainsi que C.________, notamment, ont recouru contre cette décision à la IIe Cour administrative du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg. Par arrêt du 27 juin 2022, la cour cantonale a rejeté le recours. Elle a en substance considéré - s'agissant des questions encore en litige - que l'arbre situé le long de la route était suffisamment protégé par les conditions définies par le SFN dans son préavis et les précisions apportées en cours d'instance. 
 
B.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.A.________ et B.A.________, ainsi que C.________ demandent principalement au Tribunal fédéral de rejeter le projet. Subsidiairement, ils concluent au renvoi de la cause à l'instance précédente pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Ils requièrent également l'octroi de l'effet suspensif, accordé par ordonnance du 30 septembre 2022. 
Le Tribunal cantonal renvoie aux considérants de l'arrêt attaqué et conclut au rejet du recours. Il en est de même de la DIME. La Ville de Romont demande aussi le rejet du recours. Egalement invité à se déterminer, l'Office fédéral de l'environnement (ci-après: OFEV) relève que le recours n'indique pas concrètement quelle disposition du droit fédéral de l'environnement serait violée et renonce, pour ce motif, à se prononcer. Aux termes d'un échange ultérieur d'écritures, les recourants et la ville persistent dans leurs conclusions respectives. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) prise en dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d LTF) dans le domaine du droit public de l'aménagement du territoire et des constructions (art. 82 let. a LTF), le recours est en principe recevable comme recours en matière de droit public selon les art. 82 ss LTF, aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. Les recourants ont pris part à la procédure de recours devant le Tribunal cantonal. En tant que riverains de la route de la Comba, ils sont particulièrement touchés par l'arrêt attaqué, qui confirme le projet d'élargissement, et peuvent se prévaloir d'un intérêt digne de protection à son annulation. Ils bénéficient ainsi de la qualité pour recourir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF. Les autres conditions de recevabilité sont au surplus réunies, si bien qu'il y a lieu d'entrer en matière. 
 
2.  
Aux termes de l'art. 99 al. 1 LTF, aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente. Le Tribunal fédéral statue ainsi en principe sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF. Selon l'art. 97 al. 1 LTF, la partie recourante ne peut critiquer la constatation de faits que si ceux-ci ont été établis en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte - en particulier en violation de l'interdiction constitutionnelle de l'arbitraire - et pour autant que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause. Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, la partie recourante doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées. A défaut, il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait divergent de celui contenu dans l'acte attaqué. En particulier, le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur des critiques de type appellatoire (ATF 145 I 26 consid. 1.3; 142 III 364 consid. 2.4; 139 II 404 consid. 10.1). 
 
2.1. A l'appui de leur mémoire, les recourants produisent une série de photographies prises au mois d'août 2022. Il s'agit de pièces nouvelles postérieures à l'arrêt attaqué; elles sont irrecevables (art. 99 al. 1 LTF).  
 
2.2. En début de mémoire, les recourants présentent leur propre version des faits. Une telle argumentation, dans la mesure où elle s'écarte des faits établis par l'instance précédente ou les complète, sans qu'il soit indiqué que ceux-ci seraient manifestement inexacts ou arbitraires, est irrecevable (cf. ATF 136 II 101 consid. 3; 135 II 313 consid. 5.2.2).  
 
2.3. Il ressort de son arrêt que la cour cantonale a fait siennes les constatations de la DIME, qui a établi que l'arbre litigieux se trouvait à une distance de 4 m de la limite de propriété et d'environ 5-6 m de la construction de la route prévue (cf. DIME/DAEC observations du 24 décembre 2021). Les recourants se prévalent à cet égard expressément d'un établissement inexact des faits.  
 
2.3.1. Ils contestent que l'arbre protégé se trouve à une distance suffisante de la route; la distance requise par l'annexe 4 du règlement communal d'urbanisme de janvier 2021 (ci-après: RCU) ne serait pas respectée, si bien que l'octroi d'une dérogation aurait été nécessaire. Une telle critique est non seulement appellatoire, mais encore mélange des problématiques de fait et de droit; elle ne démontre en tout état pas l'arbitraire - que les recourants ne mentionnent au demeurant pas - dans les constatations cantonales.  
 
2.3.2. Quant à la prétendue distance insuffisante entre les canalisations, la rampe d'accès pour le garage souterrain des immeubles projetés sur la parcelle no 865 et l'arbre protégé, elle ne relève à première vue pas du projet en cause et prétendre appellatoirement que les canalisations auraient "un lien direct" puisqu'elles chemineraient sous la route est insuffisant; à la lumière du grief, tel que formulé, cet aspect paraît ainsi excéder l'objet du litige et son influence sur le sort de celui-ci n'est quoi qu'il en soit pas démontrée.  
 
2.3.3. Les recourants avancent encore qu'une vision locale aurait permis de constater ces dépassements. Ils ne se prévalent à cet égard cependant pas d'une violation de leur droit d'être entendus (art. 29 al. 2 Cst.), grief constitutionnel que le Tribunal fédéral n'examine pas d'office (art. 106 al. 2 LTF).  
 
2.3.4. Relève enfin également du droit la question de savoir si la commune a effectué valablement la pesée des intérêts entre la réalisation du projet litigieux et la protection de l'arbre, que suppose l'octroi d'une dérogation aux distances, respectivement si celle-là était nécessaire.  
 
2.3.5. Aussi, cette première série de critiques, en lien avec la question des distances, doit-elle être déclarée irrecevable.  
 
2.4. Toujours sous couvert d'une constatation manifestement inexacte des faits, les recourants affirment que la parcelle no 865 serait équipée. Celle-ci disposerait déjà d'un accès par la route du Glaney. Cette critique n'a cependant aucune portée, un accès par la route du Glaney ayant explicitement été établi par la cour cantonale. Quant à la question de savoir si cet accès répond aux exigences en matière d'équipement, au sens de l'art. 19 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT; RS 700), et si une répartition du trafic sur la route de la Comba se justifie malgré ce premier accès, elle relève non du fait, mais du droit. Les recourants ne reviennent au demeurant plus sur cet aspect dans leur grief de fond, si bien que l'on n'en perçoit pas la pertinence.  
 
2.5. En définitive, les griefs en matière d'établissement des faits doivent être écartés.  
 
3.  
Sur le fond, les recourants se prévalent d'arbitraire. Ils invoquent en particulier l'art. 22 de la loi cantonale du 12 septembre 2012 sur la protection de la nature et du paysage (LPNat; RS/FR 721.0.1) ainsi que l'art. 17 let. b RCU. 
 
3.1. L'art. 22 LPNat prévoit que les boisements hors-forêt, tels haies, bosquets, cordons boisés, alignements d'arbres et grands arbres isolés, ne peuvent pas être supprimés lorsqu'ils sont situés hors zone à bâtir, qu'ils sont adaptés aux conditions locales et qu'ils revêtent un intérêt écologique ou paysager. Cette interdiction ne concerne pas les boisements hors-forêt situés en zone alpestre (al. 1). Les autres mesures de protection des boisements hors-forêt incombent aux communes; leur entretien périodique reste cependant de la responsabilité des propriétaires des fonds concernés (al. 2). Les dérogations à la protection découlant de l'alinéa 1 ou aux mesures prises en application de l'alinéa 2 sont octroyées conformément à l'article 20; les décisions y relatives sont toutefois délivrées par la commune (al. 3). L'art. 20 LPNat dispose que, lorsque, tous les intérêts pris en compte, il est impossible d'éviter des atteintes d'ordre technique aux biotopes dignes de protection, des dérogations aux mesures de protection peuvent être accordées (al. 1). L'octroi des dérogations est subordonné à l'adoption de mesures particulières permettant d'assurer la meilleure protection possible, la reconstitution ou, à défaut, le remplacement du biotope concerné; si, exceptionnellement, la reconstitution et le remplacement se révèlent impossibles, ils sont remplacés par le versement d'une somme d'argent d'un montant correspondant à leur coût présumable (al. 2).  
Le RCU est en cours d'approbation auprès du service compétent de l'Etat; celui-ci a néanmoins été considéré par le Tribunal cantonal et son applicabilité n'est pas discutée. Aux termes de l'art. 17 let. b RCU, la distance minimale d'une construction ou d'une installation par rapport à un boisement hors forêt se calcule sur la base du schéma en annexe 4. En zone à bâtir, l'annexe 4 exige une distance entre la route et un arbre protégé correspondant au rayon de sa couronne, plus 2 m (cf. annexe 4, p. 93). 
 
3.2. Appelé à revoir l'application ou l'interprétation d'une norme sous l'angle de l'arbitraire, le Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité cantonale de dernière instance que si celle-ci apparaît insoutenable, en contradiction manifeste avec la situation effective, adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain. En revanche, si l'application de la loi défendue par l'autorité cantonale ne s'avère pas déraisonnable ou manifestement contraire au sens et au but de la disposition ou de la législation en cause, cette interprétation sera confirmée, même si une autre solution éventuellement plus judicieuse paraît possible (ATF 144 III 368 consid. 3.1 et les arrêts cités). Dans ce contexte, la partie recourante est soumise aux exigences de motivation accrues de l'art. 106 al. 2 LTF.  
 
3.3. La cour cantonale a constaté que l'arbre sur la parcelle no 864 était protégé par le biais du plan d'affectation communal et par le RCU. Le 1er février 2018, le SFN avait conditionné son préavis favorable au projet au maintien du bon état de cet arbre. Dans ses observations au recours du 16 novembre 2021, ledit service n'était en tant que tel pas revenu sur ce premier préavis. L'arbre se trouvait à distance suffisante de la route, de sorte qu'une dérogation n'était pas nécessaire. L'aménagement du trottoir était enfin compatible avec la préservation de l'arbre.  
Les recourants reprochent à l'instance précédente d'avoir rejeté, sans autre justification, hormis la référence aux préavis des services spécialisés, leur grief de la distance à l'arbre. La cour cantonale a toutefois expliqué que les avis des services spécialisés constituent des rapports officiels au sens de l'art. 46 al. 1 let. b du code cantonal de procédure et de juridiction administrative du 23 mai 1991 (CPJA; RS/FR 150.1). Or, les recourants ne contestent ni cette qualification ni la valeur probante qui y est rattachée, encore moins ne pointent-ils d'indice concret et sérieux commandant en l'occurrence de s'en écarter (cf. ATF 139 II 185 consid. 9.3; arrêts 1C_72/2017 du 14 septembre 2017 consid. 3.2; 1C_405/2011 du 24 avril 2012 consid. 2.6). Il est vrai toutefois que le SFN a indiqué, dans ses observations du 16 novembre 2021 au recours cantonal, qu'une dérogation eût été nécessaire (cf. art. 22 al. 3 LPNat). Les recourants ne discutent cependant pas qu'au surplus, comme l'a retenu l'instance précédente, le service n'est en tant que tel pas revenu sur son premier préavis favorable sous condition. Dans sa réponse du 24 décembre 2021 au recours cantonal - à l'appui de laquelle étaient produites lesdites observations du SFN - la DIME a néanmoins constaté que l'arbre se trouvait à une distance de 5-6 m de la construction de la route, constatation sur laquelle il n'y a pas lieu de revenir (cf. consid. 2.3 ci-dessus). Et rien ne laisse supposer que cette distance ne respecterait en l'occurrence pas les exigences de l'art. 17 let. b RCU; les recourants ne le discutent d'ailleurs pas, évoquant de façon générale et laconique une distance prétendument insuffisante. Dans ces conditions, on ne voit pas qu'il serait arbitraire d'avoir jugé qu'une dérogation - et la pesée des intérêts qu'elle suppose (cf. art. 20 LPNat) - n'était en l'espèce pas nécessaire. Il n'est au surplus pas non plus discuté que, dès lors qu'il n'implique pas de creuser à plus de 50 cm de profondeur, l'aménagement du trottoir est compatible avec les exigences de préservation de l'arbre, appréciation partagée par la DIME, sur laquelle il n'y a pas de motif de revenir. 
Il s'ensuit que, dans la faible mesure de sa recevabilité, le grief doit être rejeté. 
 
4.  
Dans un ultime grief, les recourants tentent de porter le litige sur le terrain du droit fédéral en invoquant une violation de l'art. 78 Cst., en relation avec la loi fédérale sur la protection de la nature et du paysage du 1er juillet 1966 (LPN; RS 451). Avec l'OFEV, force est de constater que les recourants se limitent à des considérations d'ordre général sans exposer en quoi la LPN - et plus généralement le droit fédéral de l'environnement - aurait été violée. Mentionner que l'arbre est recensé dans le plan d'affectation des zones et figurerait "à l'inventaire préalable des biotopes qui présente[sic] un intérêt paysager élevé et un intérêt écologique" est à cet égard insuffisant (cf. art. 42 al. 2 LTF); ce d'autant que cet inventaire paraît ressortir au droit cantonal (cf. art. 9 LPNat) - que le Tribunal fédéral n'examine pas d'office (art. 106 al. 2 LTF) - et exclut les biotopes d'importance nationale au sens de la LPN (cf. art. 9 al. 1 LPNat). 
Le grief est irrecevable. 
 
5.  
Les considérants qui précèdent conduisent au rejet du recours, dans la mesure où il est recevable, aux frais des recourants qui succombent (art. 66 al. 1 et 5 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais de justice, arrêtés à 4'000 fr., sont mis à la charge solidaire des recourants. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué au mandataire des recourants, à la Commune de Romont, à la Direction du développement territorial, des infrastructures, de la mobilité et de l'environnement de l'Etat de Fribourg (DIME), à la IIe Cour administrative du Tribunal cantonal de l'Etat de Fribourg ainsi qu'à l'Office fédéral de l'environnement. 
 
 
Lausanne, le 14 juin 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
Le Greffier : Alvarez