2C_490/2022 07.03.2023
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
2C_490/2022  
 
 
Arrêt du 7 mars 2023  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mme et MM les Juges fédéraux 
Aubry Girardin, Présidente, Donzallaz et Hartmann. 
Greffier : M. Wiedler. 
 
Participants à la procédure 
A.________ SA, 
représentée par Me Gilles Robert-Nicoud, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Département de l'économie et de l'emploi de la République et canton de Genève, place de la Taconnerie 7, 1204 Genève, 
représenté par Me David Hofmann, avocat. 
 
Objet 
Allocation d'aide extraordinaire destinée aux 
entreprises touchées par les mesures contre 
l'épidémie du Covid-19, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de 
la République et canton de Genève, Chambre administrative, 2ème section, du 11 mai 2022 (ATA/501/2022). 
 
 
Faits :  
 
A.  
La société A.________ SA est inscrite au registre du commerce de la République et canton de Genève depuis le 13 septembre 2002. Elle a pour but l'exploitation de centres de loisirs, de restauration et toutes activités s'y rapportant. Son siège est à U.________. 
En 2021, elle exploitait trois établissements: le "B.________" à V.________, le "C.________" à W.________ et "D.________" à X.________. 
 
B.  
Le 3 mars 2021, la société A.________ SA a formé auprès du Département du développement économique, devenu depuis lors le Département de l'économie et de l'emploi de la République et canton de Genève (ci-après: le Département cantonal), une demande d'aide financière pour cas de rigueur, en raison des pertes engendrées par l'épidémie de Covid-19. 
Le 18 mars 2021, le Département cantonal a alloué à ladite société une aide financière d'un montant de 750'000 francs. 
Le 16 juillet 2021, la société A.________ SA a formé auprès du Département cantonal une nouvelle demande en vue d'obtenir une aide complémentaire pour cas de rigueur. 
Le 6 septembre 2021, le Département cantonal a alloué à la société A.________ SA une aide financière extraordinaire complémentaire d'un montant de 279'150 francs, alors que 628'324 francs étaient réclamés par la société. 
Par décision du 2 décembre 2021, le Département cantonal a rejeté la réclamation formée par la société précitée contre sa décision du 6 septembre 2021. 
Par arrêt du 11 mai 2022, la Cour de justice de la République et canton de Genève (ci-après: la Cour de justice) a rejeté le recours interjeté par la société A.________ SA à l'encontre de la décision sur réclamation du 2 décembre 2021 du Département cantonal. 
 
 
C.  
La société A.________ SA dépose un recours en matière de droit public devant le Tribunal fédéral. Elle conclut à la réforme de l'arrêt du 11 mai 2022 de la Cour de justice en ce sens que les charges fixes de l'hôtel "D.________" à X.________ doivent être couvertes par les mesures destinées au cas de rigueur dans la mesure de l'insuffisance du chiffre d'affaires conformément à l'ordonnance Covid-19 cas de rigueur et au renvoi de la cause aux autorités précédentes pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Subsidiairement, elle requiert l'annulation de l'arrêt attaqué et le renvoi de la cause aux autorités précédentes pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
La Cour de justice s'en rapporte à justice quant à la recevabilité du recours et persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt. Le Département cantonal et le Département fédéral de l'économie, de la formation et de la recherche se déterminent et concluent au rejet du recours. La recourante dépose des observations et persiste dans ses conclusions. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 147 IV 453 consid. 1). Toutefois, conformément à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, lorsque les conditions de recevabilité ne ressortent pas à l'évidence de l'arrêt attaqué ou du dossier de la cause, la partie recourante doit exposer en quoi celles-ci sont réunies, en particulier en quoi l'arrêt attaqué est une décision pouvant faire l'objet d'un recours en matière de droit public, sous peine d'irrecevabilité (ATF 133 II 353 consid. 1 et les références citées). 
 
1.1. L'arrêt attaqué est une décision finale (art. 90 LTF) rendue en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF). Portant sur l'octroi d'aides financières de l'Etat en lien avec l'épidémie de Covid-19, il s'agit d'une cause de droit public (art. 82 let. a LTF). Le recours en matière de droit public est donc en principe ouvert. Toutefois, un tel recours n'est pas recevable contre les décisions concernant des subventions auxquelles la législation ne donne pas droit (art. 83 let. k LTF).  
 
 
1.2. La République et canton de Genève a mis en place différentes aides financières en faveur des entreprises en lien avec l'épidémie de Covid-19: certaines reprennent les conditions de l'ordonnance fédérale du 25 novembre 2020 concernant les mesures pour les cas de rigueur destinées aux entreprises en lien avec l'épidémie de Covid-19 (Ordonnance Covid-19 cas de rigueur 2020, OMCR 20; RS 951.262) et pour lesquelles le canton bénéfice d'une participation financière de la Confédération au sens de cette ordonnance; d'autres, purement cantonales, ne bénéficient pas du soutien financier de la Confédération, faute pour les entreprises concernées de remplir les critères de l'OMCR 20.  
Le Tribunal fédéral a déjà jugé que ces aides financières, fondées sur la loi genevoise 12'938 du 30 avril 2021 relative aux aides financières extraordinaires de l'Etat destinées aux entreprises particulièrement touchées par la crise économique ou directement par les mesures de lutte contre l'épidémie de coronavirus pour l'année 2021 (LAFE/GE-2021), comme cela est le cas en l'espèce, étaient des subventions au sens de l'art. 83 let. k LTF. Il a également retenu que les aides financières cantonales reposant sur les art. 9 et 10 LAFE/GE-2021 étaient des subventions auxquelles la législation ne donnait aucun droit (cf. arrêt 2C_711/2022 du 9 décembre 2022 consid. 1.2 ss). 
 
1.3. Par ailleurs, le Tribunal fédéral a jugé que ni l'art. 12 de la loi fédérale du 25 septembre 2020 sur les bases légales des ordonnances du Conseil fédéral visant à surmonter l'épidémie de Covid-19 (Loi Covid-19; RS 818.102), qui fixe les principes régissant les aides financières pour cas de rigueur versées par la Confédération, ni l'OMCR 20, qui met en oeuvre ces principes, n'ouvraient un droit à l'octroi des aides financières concernées, ces textes ne faisant que fixer les conditions minimales pour que la Confédération participe financièrement aux programmes de soutien aux entreprises mis en place par les cantons (cf. arrêt 2C_8/2022 du 28 septembre 2022 consid. 1.3.4).  
 
1.4. En l'espèce, le point de savoir si la législation concernant les aides complémentaires donne droit aux subventions en cause n'est pas évident. Aucun élément ressortant de l'arrêt attaqué, des écritures de la recourante ou des déterminations des autorités déposées devant la Cour de céans ne permettent de trancher cette question qui nécessite une analyse détaillée des dispositions cantonales applicables, dispositions que le Tribunal fédéral n'examine pas librement (cf. art. 95 LTF). Il incombait donc à la recourante d'exposer en quoi le motif d'exclusion de l'art. 83 let. k LTF n'entrait pas en considération en l'espèce (art. 42 al. 2 LTF; arrêt 2C_631/2022 du 8 novembre 2022 consid. 1.3), ce qu'elle ne fait pas. Celle-ci se contente d'alléguer succinctement et en vain (cf. consid. 1.2) que l'aide financière litigieuse n'est pas une subvention, sans apporter d'éléments concrets qui permettraient de retenir qu'il existe en l'espèce un droit à cette aide, la seule allégation que l'octroi des aides financières n'a pas un caractère discrétionnaire, sans autre précision, n'étant pas une motivation suffisante.  
 
1.5. Partant, le Tribunal fédéral n'étant pas en mesure d'examiner si le recours échappe à la clause d'irrecevabilité de l'art. 83 let. k LTF, faute de motivation suffisante, la voie du recours en matière de droit public est exclue.  
 
2.  
Il convient dès lors d'examiner si le recours déposé devant le Tribunal fédéral remplit les conditions de recevabilité du recours constitutionnel subsidiaire, quand bien même la recourante n'a formé qu'un recours en matière de droit public. En effet, l'intitulé erroné de l'écriture ne nuit pas à son auteur, pour autant que les conditions de recevabilité du recours qui aurait dû être interjeté soient réunies (ATF 133 II 396 consid. 3.1). 
 
2.1. Selon l'art. 115 LTF, a qualité pour former un recours constitutionnel subsidiaire quiconque a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire (let. a) et a un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée (let. b). L'intérêt juridiquement protégé requis par l'art. 115 let. b LTF peut être fondé sur le droit cantonal ou fédéral ou directement sur un droit fondamental particulier (cf. ATF 140 I 285 consid. 1.2; 135 I 265 consid. 1.3; arrêts 2C_401/2022 du 2 novembre 2022 consid. 2.1; 2C_200/2017 du 14 juillet 2017 consid. 1.2.3).  
 
2.2. En l'espèce, comme on vient de le voir, la recourante ne démontre pas disposer d'un droit à l'octroi de la subvention litigieuse (cf. supra consid. 1.4), alors qu'il lui incombait d'alléguer les éléments propres à fonder sa qualité pour recourir (cf. art. 42 al. 1 et 2 LTF; ATF 141 IV 1 consid. 1.1). On ne peut donc admettre que la recourante possède un intérêt juridique suffisant au sens de l'art. 115 al. 1 let. b LTF pour se plaindre de manière indépendante de l'arbitraire dans l'application du droit, d'un abus du pouvoir d'appréciation ou du principe de l'égalité de traitement, qui à eux seuls ne fondent aucune position juridique protégée invocable dans le cadre d'un recours constitutionnel subsidiaire (ATF 147 I 189 consid. 1.2.1; 133 I 185 consid. 6). Les griefs concernant ces aspects sont donc irrecevables.  
 
2.3. Partant, la voie du recours constitutionnel subsidiaire est également exclue, la recourante n'invoquant au demeurant pas de griefs de nature formelle qu'elle pourrait faire valoir indépendamment du fond (" Star-Praxis "; cf. ATF 141 IV 1 consid. 1.1; 137 II 305 consid. 2; arrêt 2D_32/2022 du 25 novembre 2022 consid. 2.2).  
 
3.  
Sur le vu de ce qui précède, le recours est irrecevable. 
Les frais judiciaires, réduits, sont mis à la charge de la recourante qui succombe (cf. art. 66 al. 1 et al. 5 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est irrecevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 5'000 francs, sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué au mandataire de la recourante, au mandataire du Département de l'économie et de l'emploi de la République et canton de Genève, à la Cour de justice de la République et canton de Genève, ainsi qu'au Département fédéral de l'économie, de la formation et de la recherche. 
 
 
Lausanne, le 7 mars 2023 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : F. Aubry Girardin 
 
Le Greffier : A. Wiedler