6B_1089/2022 16.08.2023
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_1089/2022  
 
 
Arrêt du 16 août 2023  
 
Ire Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux 
Denys, Juge présidant, Muschietti et van de Graaf. 
Greffière : Mme Livet. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Me Jean-Marie Faivre, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
Ministère public de la République et canton de Genève, 
route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, 
intimé. 
 
Objet 
Obtention frauduleuse de prestations sociales (LPC); obtention illicite de prestations d'une assurance sociale; fixation de la peine; expulsion; arbitraire, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice 
de la République et canton de Genève, 
Chambre pénale d'appel et de révision, 
du 30 juin 2022 (P/18868/2019 AARP/204/2022). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par jugement du 11 novembre 2021, le Tribunal de police de la République et canton de Genève a acquitté A.________ du chef d'accusation d'obtention frauduleuse de prestations sociales pour la période du 1 er août au 31 décembre 2012, a classé la procédure de ce même chef d'accusation pour la période du 1 er janvier 2013 au 10 novembre 2014, l'a condamnée pour obtention frauduleuse de prestations sociales pour la période du 11 novembre 2014 au 30 septembre 2016 et obtention illicite de prestations d'une assurance sociale pour la période du 1 er octobre 2016 au 31 juillet 2019, à une peine privative de liberté de 7 mois et à une peine pécuniaire de 150 jours-amende à 30 fr. l'unité, toutes deux avec sursis et délai d'épreuve de 3 ans et a prononcé son expulsion de Suisse pour une durée de 5 ans, renonçant à ordonner le signalement de l'expulsion dans le Système d'information Schengen (SIS). Elle a par ailleurs mis les frais de procédure à la charge de A.________ et renvoyé le Service de prestations complémentaires genevois (ci-après: SPC) à agir par la voie civile.  
 
B.  
Par arrêt du 30 juin 2022, la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice genevoise a très partiellement admis l'appel interjeté par A.________, en ce sens qu'elle l'a acquittée du chef d'accusation d'obtention frauduleuse de prestations sociales également pour la période du 11 novembre au 31 décembre 2014, confirmant sa condamnation pour le surplus. 
En bref, il en ressort les éléments suivants. 
A.________ a déposé, avec son époux, une demande de prestations complémentaires le 13 novembre 1995 et tous deux ont bénéficié de prestations d'assistance dès le 1 er mars 1996 puis de prestations complémentaires à partir du 1 er décembre 2004. A la suite de son divorce, prononcé en Bosnie-Herzégovine le 6 juillet 2011, A.________ a fait une nouvelle demande de prestations complémentaires le 5 octobre 2011. Les formulaires de demande contenaient l'engagement d'informer l'office sans retard de tout changement de la situation personnelle, des revenus, du patrimoine et des dépenses. Par ailleurs, A.________ a reçu, chaque année, une "communication importante" invitant le bénéficiaire à informer, sans délai, le SPC de tout changement dans sa situation financière et/ou personnelle dont il n'aurait pas été tenu compte dans les précédentes décisions d'octroi de prestations. A.________ a également reçu un courrier d'information du 7 octobre 2016 du Conseil d'État relatif à l'entrée en vigueur de l'art. 148a CP et des sanctions y relatives.  
Entre 2015 et 2019, A.________ a régulièrement séjourné plus de trois mois à l'étranger, plus particulièrement dans son pays d'origine, la Bosnie-Herzégovine, ou en Serbie, en laissant croire au SPC qu'elle vivait à U.________, en omettant de l'informer et en dissimulant ses séjours. Elle a ainsi induit en erreur ce service afin de toucher des prestations sociales indues pour plus de 112'000 francs. Elle a séjourné à l'étranger (étant précisé que les jours d'entrée et de sortie ne sont pas comptés dans le total des jours) : 
 
- du 1 er janvier (séjour débuté le 22 novembre 2014) au 28 février, du 15 avril au 2 juin, du 22 juin au 4 octobre et du 5 au 31 décembre 2015 (séjour achevé le 8 mars 2016), soit durant un total de 240 jours (dont une période de 105 jours);  
- du 1 er janvier (séjour débuté le 5 décembre 2015) au 8 mars, du 9 juin au 30 août, du 17 septembre au 3 novembre et du 6 au 31 décembre 2016 (séjour achevé le 19 janvier 2017) soit durant un total de 225 jours;  
- du 1 er janvier (séjour débuté le 6 décembre 2016) au 19 janvier, du 16 février au 19 mars, du 10 avril au 25 mai, du 17 juin au 7 septembre, du 23 septembre au 5 novembre et du 13 au 31 décembre 2017 (séjour achevé le 4 janvier 2018), soit durant un total de 243 jours;  
- du 1 er janvier (séjour débuté le 13 décembre 2017) au 4 janvier, du 23 avril au 17 juin, du 7 juillet au 27 septembre, du 18 au 31 décembre 2018 (séjour achevé le 5 février 2019), soit durant un total de 157 jours;  
- du 1 er janvier (séjour débuté le 18 décembre 2018) au 5 février, du 26 mars au 7 mai et du 29 juin au 6 août 2019, soit durant un total de 116 jours.  
 
C.  
A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 30 juin 2022. Elle conclut, avec suite de frais et dépens, à son acquittement des chefs d'obtention frauduleuse de prestations sociales pour la période du 1 er janvier 2015 au 30 septembre 2016 et d'obtention illicite de prestations d'une assurance sociale pour la période du 1 er octobre 2016 au 31 juillet 2019 et au renvoi de la cause à "l'Autorité inférieure pour qu'elle statue à nouveau dans le sens des considérants du présent mémoire". Elle requiert, par ailleurs, l'octroi de l'assistance judiciaire.  
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Invoquant l'interdiction de l'arbitraire et le principe in dubio pro reo, la recourante conteste l'établissement des faits. 
 
1.1. Le Tribunal fédéral n'est pas une autorité d'appel, auprès de laquelle les faits pourraient être rediscutés librement. Il est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'elles n'aient été établies en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, à savoir, pour l'essentiel, de façon arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. Une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle apparaît discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable et cela non seulement dans sa motivation mais aussi dans son résultat (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1; 145 IV 154 consid. 1.1; 143 IV 241 consid. 2.3.1). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2; 146 IV 88 consid. 1.3.1; 143 IV 500 consid. 1.1). Le Tribunal fédéral n'entre en matière sur les moyens fondés sur la violation de droits fondamentaux, dont l'interdiction de l'arbitraire, que s'ils ont été invoqués et motivés de manière précise (art. 106 al. 2 LTF; ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2; 143 IV 500 consid. 1.1). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2; 145 IV 154 consid. 1.1).  
 
1.2. La présomption d'innocence, garantie par les art. 10 CPP, 32 al. 1 Cst., 14 par. 2 Pacte ONU II et 6 par. 2 CEDH, ainsi que son corollaire, le principe in dubio pro reo, concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large (ATF 145 IV 154 consid. 1.1; 144 IV 345 consid. 2.2.3.1; 127 I 38 consid. 2a). En tant que règle sur le fardeau de la preuve, elle signifie, au stade du jugement, que ce fardeau incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. Comme règle d'appréciation des preuves (sur la portée et le sens précis de la règle sous cet angle, cf. ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3), la présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective. Lorsque l'appréciation des preuves et la constatation des faits sont critiquées en référence au principe in dubio pro reo, celui-ci n'a pas de portée plus large que l'interdiction de l'arbitraire (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1; 145 IV 154 consid. 1.1 et les arrêts cités).  
 
1.3. Dans un premier temps, la cour cantonale a exposé, sous forme de tableau qu'elle a repris du jugement de première instance, les différents moyens de preuve sur lesquels elle se fondait, soit les relevés bancaires, les prestations médicales dispensées, les tampons contenus dans le passeport bosniaque de la recourante, les données de voyage Easyjet et les relevés de consommation électrique relatif à l'appartement occupé par la recourante et son ex-mari, chez qui elle était encore domiciliée (cf. arrêt attaqué B./d.). Elle a ensuite procédé à une appréciation détaillée de ces différents moyens de preuve (cf. arrêt attaqué consid. 2.3.1) pour en déduire les dates de séjour à l'étranger de la recourante (cf. supra consid. B).  
 
1.4. La recourante débute son écriture par une partie "en fait" dans le cadre de laquelle elle annonce "rectifier" certains faits retenus par la cour cantonale. De la sorte, elle ne cherche pas à démontrer que les faits auraient été établis arbitrairement et ne formule ainsi aucun grief recevable au regard de l'art. 106 al. 2 LTF.  
Puis, sous l'intitulé "En droit et discussion", la recourante conteste l'établissement des faits. Toutefois, son argumentation s'épuise en une longue rediscussion des faits et de l'appréciation des preuves à laquelle a procédé la cour cantonale. Il apparaît d'emblée que la motivation du grief ne satisfait pas aux exigences de motivation rappelées ci-dessus (cf. supra consid. 1.1). Dans ce qui s'apparente à une plaidoirie appellatoire, la recourante se borne à opposer sa propre version des faits à celle de l'autorité cantonale, sans démonstration à l'appui. Par ailleurs, on cherche en vain dans son recours une démonstration, conforme aux exigences de l'art. 106 al. 2 LTF, d'une appréciation absolument inadmissible des preuves par les juges cantonaux. La recourante perd manifestement de vue la notion d'arbitraire, telle que définie par la jurisprudence depuis plusieurs décennies, confondant ce qu'elle estime critiquable avec ce qui est intolérable. Elle perd de vue que le Tribunal fédéral n'est pas une juridiction d'appel et que l'arbitraire prétendu d'une décision doit être démontré de manière substantielle, à peine d'irrecevabilité. La simple rediscussion de l'appréciation des preuves à laquelle elle se livre ne suffit pas à faire admettre l'arbitraire qu'elle allègue. Le grief est par conséquent irrecevable. 
Pour le surplus, la recourante ne saurait renvoyer le Tribunal fédéral à son mémoire d'appel cantonal, dès lors que le recours en matière pénale doit être complet (cf. art. 42 al. 1 et 2 LTF; ATF 140 III 115 consid. 2; 138 IV 47 consid. 2.8.1; 133 II 396 consid. 3.1; arrêt 6B_777/2022 du 16 mars 2023 consid. 2.4.2). 
 
2.  
La recourante conteste sa condamnation pour obtention frauduleuse de prestations sociales (art. 31 al. 1 let. d de la loi du 6 octobre 2006 sur les prestations complémentaires; LPC, RS 831.30) et obtention illicite de prestations d'une assurance sociale (art. 148a ch. 1 CP). Toutefois, son argumentation se fonde uniquement sur les faits qu'elle invoque librement et non sur ceux retenus par la cour cantonale, dont la recourante n'a pas démontré l'arbitraire (cf. supra consid. 1.4). Ce faisant, elle n'articule aucun grief recevable tiré de l'application erronée du droit matériel. Cette manière de procéder est irrecevable. 
Pour le surplus, la recourante, qui admet que son séjour à l'étranger aurait très légèrement dépassé les trois mois en 2018, soutient qu'elle devrait être mise au bénéfice de la circonstance atténuante du mobile honorable puisque son séjour aurait été motivé par la maladie grave de sa mère. Là encore, la recourante s'écarte des faits constatés dans l'arrêt cantonal, si bien que son grief est irrecevable. Elle ne conteste, par ailleurs, pas la fixation de la peine autrement qu'en requérant son acquittement, qu'elle n'obtient pas. Il n'y a donc pas lieu d'examiner ce point plus avant (cf. art. 42 al. 2 LTF). 
 
3.  
Invoquant les art. 8 et 13 CEDH, la recourante conteste le prononcé de l'expulsion. 
 
3.1. Aux termes de l'art. 66a al. 1 let. e CP, le juge expulse de Suisse l'étranger qui est condamné notamment pour obtention illicite de prestations d'une assurance sociale ou de l'aide sociale (art. 148a al. 1 CP), quelle que soit la quotité de la peine prononcée à son encontre, pour une durée de cinq à quinze ans.  
 
3.1.1. L'art. 66a al. 2 CP prévoit que le juge peut exceptionnellement renoncer à une expulsion lorsque celle-ci mettrait l'étranger dans une situation personnelle grave (première condition) et que les intérêts publics à l'expulsion ne l'emportent pas sur l'intérêt privé de l'étranger à demeurer en Suisse (deuxième condition). À cet égard, il tiendra compte de la situation particulière de l'étranger qui est né ou qui a grandi en Suisse. Les conditions posées par cette disposition sont cumulatives (arrêt 6B_627/2022 du 6 mars 2023 consid. 2.1 destiné à la publication; ATF 144 IV 332 consid. 3.3).  
 
3.1.2. La clause de rigueur décrite à l'art. 66a al. 2 CP permet de garantir le principe de la proportionnalité (cf. art. 5 al. 2 Cst.; arrêt 6B_627/2022 précité consid. 2.1.1 destiné à la publication; ATF 146 IV 105 consid. 3.4.2; 144 IV 332 consid. 3.3.1). Elle doit être appliquée de manière restrictive (arrêt 6B_627/2022 précité consid. 2.1.1 destiné à la publication; ATF 146 IV 105 consid. 3.4.2; 144 IV 332 consid. 3.3.1). Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral (arrêt 6B_627/2022 précité consid. 2.1.1 destiné à la publication; ATF 146 IV 105 consid. 3.4.2; 144 IV 332 consid. 3.3.2), il convient de s'inspirer des critères énoncés à l'art. 31 de l'ordonnance du 24 octobre 2007 relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative (OASA; RS 142.201) et de la jurisprudence y relative, dans le cadre de l'application de l'art. 66a al. 2 CP. L'art. 31 al. 1 OASA prévoit qu'une autorisation de séjour peut être octroyée dans les cas individuels d'extrême gravité. L'autorité doit tenir compte notamment de l'intégration du requérant selon les critères définis à l'art. 58a al. 1 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration (LEI; RS 142.20), de la situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants, de la situation financière, de la durée de la présence en Suisse, de l'état de santé ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance. Comme la liste de l'art. 31 al. 1 OASA n'est pas exhaustive et que l'expulsion relève du droit pénal, le juge devra également, dans l'examen du cas de rigueur, tenir compte des perspectives de réinsertion sociale du condamné (arrêt 6B_627/2022 précité consid. 2.1.1 destiné à la publication; ATF 147 IV 453 consid. 1.4.5; 144 IV 332 consid. 3.3.2). En règle générale, il convient d'admettre l'existence d'un cas de rigueur au sens de l'art. 66a al. 2 CP lorsque l'expulsion constituerait, pour l'intéressé, une ingérence d'une certaine importance dans son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par la Constitution fédérale (art. 13 Cst.) et par le droit international, en particulier l'art. 8 CEDH (arrêt 6B_627/2022 précité consid. 2.1.1 destiné à la publication; ATF 147 IV 453 consid. 1.4.5).  
 
3.1.3. L'art. 8 par. 1 CEDH dispose que toute personne a en particulier droit au respect de sa vie privée et familiale. Une ingérence dans l'exercice de ce droit est possible, selon l'art. 8 par. 2 CEDH, pour autant qu'elle soit prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui.  
Selon la jurisprudence, pour se prévaloir du droit au respect de sa vie privée au sens de l'art. 8 par. 1 CEDH, l'étranger doit établir l'existence de liens sociaux et professionnels spécialement intenses avec la Suisse, notablement supérieurs à ceux qui résultent d'une intégration ordinaire. Le Tribunal fédéral n'adopte pas une approche schématique qui consisterait à présumer, à partir d'une certaine durée de séjour en Suisse, que l'étranger y est enraciné et dispose de ce fait d'un droit de présence dans notre pays. Il procède bien plutôt à une pesée des intérêts en présence, en considérant la durée du séjour en Suisse comme un élément parmi d'autres et en n'accordant qu'un faible poids aux années passées en Suisse dans l'illégalité, en prison ou au bénéfice d'une simple tolérance (cf. ATF 134 II 10 consid. 4.3; arrêts 6B_348/2023 du 28 avril 2023 consid. 2.4; 6B_1116/2022 du 21 avril 2023 consid. 3.1.2). Un séjour légal de dix années suppose en principe une bonne intégration de l'étranger (ATF 144 I 266 consid. 3.9). 
Par ailleurs, un étranger peut se prévaloir de l'art. 8 par. 1 CEDH (et de l'art. 13 Cst.), qui garantit notamment le droit au respect de la vie familiale, pour s'opposer à l'éventuelle séparation de sa famille, pour autant qu'il entretienne une relation étroite et effective avec une personne de sa famille ayant le droit de résider durablement en Suisse (ATF 144 II 1 consid. 6.1; 139 I 330 consid. 2.1 et les références citées). Les relations familiales visées par l'art. 8 par. 1 CEDH sont avant tout celles qui concernent la famille dite nucléaire, soit celles qui existent entre époux ainsi qu'entre parents et enfants mineurs vivant en ménage commun (cf. ATF 144 II 1 consid. 6.1; 135 I 143 consid. 1.3.2; arrêt 6B_122/2023 du 27 avril 2023 consid. 1.1.3). Les relations entre enfants adultes et leurs parents ne bénéficient en revanche pas de la protection de l'art. 8 CEDH, sauf s'il existe entre eux une relation de dépendance qui va au-delà de liens affectifs normaux, par exemple en raison d'une maladie ou d'un handicap (ATF 137 I 154 consid. 3.4.2; arrêt 6B_1116/2022 du 21 avril 2023 consid. 3.1.2). 
 
3.2. En substance, la cour cantonale a exposé que les infractions d'obtention illicite de prestations d'une assurance sociale, commises depuis le 1 er octobre 2016 et jusqu'en 2019, entraînaient l'expulsion obligatoire. Examinant les conditions de l'art. 66a al. 2 CP permettant de renoncer exceptionnellement à l'expulsion, elle a retenu que la durée de vie de la recourante en Suisse n'était pas négligeable, celle-ci y étant arrivée en 1983, soit près de 40 ans auparavant. Ses deux enfants avaient vu le jour sur le territoire suisse où ils avaient construit leur vie. Néanmoins, la recourante avait vécu 24 ans en Bosnie-Herzégovine, où elle avait constitué sa résidence habituelle, à tout le moins du 1 er janvier 2015 au 31 juillet 2019, dans la mesure où elle s'y était rendue plus de 90 jours par année durant cette période, notamment pour rendre visite à sa mère et à son frère qui y résidaient encore. Rien ne s'opposait à son expulsion, qui ne la placerait pas dans une situation personnelle particulièrement grave. Si son expulsion était certes de nature à compliquer les contacts avec ses enfants désormais adultes et petits-enfants, une telle séparation ne serait toutefois pas insurmontable. En effet, à l'époque actuelle et compte tenu des moyens de communication modernes, l'exercice de relations personnelles pourrait se poursuivre. En tout état de cause, elle avait été condamnée à une peine privative de liberté de sept mois pour obtention illicite de prestations d'assurance sociale et à une peine pécuniaire de 150 jours-amende pour obtention frauduleuse de prestations sociales, pour un montant de plus de 100'000 fr., de sorte que son intérêt à rester en Suisse ne primait pas l'intérêt public à l'expulser. Enfin, la mesure d'expulsion n'était prononcée que pour cinq ans, soit le minimum légal.  
 
3.3. La recourante rediscute la motivation cantonale en se fondant essentiellement sur une présentation personnelle de sa situation et sur sa propre appréciation de celle-ci. Son argumentation est irrecevable, dans la mesure où elle s'écarte de l'état de fait retenu par la cour cantonale, par lequel le Tribunal fédéral est lié (cf. art. 105 al. 1 LTF), sans démontrer en quoi celui-ci serait entaché d'arbitraire. Il en va en particulier ainsi lorsqu'elle évoque la parfaite intégration de ses enfants, ses "belles amitiés" en Suisse, le fait qu'elle ne se sentirait plus chez elle en Bosnie-Herzégovine où elle ne se rendrait que par piété filiale, sa santé mentale dégradée, le fait qu'elle passerait plusieurs heures par semaine avec ses petits-enfants ou encore qu'elle ne recevrait "probablement pas les soins adaptés" dans son pays d'origine.  
Pour le surplus, la cour cantonale a estimé que l'expulsion de la recourante ne la placerait pas dans une situation personnelle grave (première condition de l'art. 66a al. 2 CP). A cet égard, hormis le long séjour de la recourante en Suisse, celle-ci ne fait valoir aucun élément tendant à démontrer qu'elle aurait développé en Suisse des liens sociaux et professionnels supérieurs à ceux qui résulteraient d'une intégration ordinaire. A cet égard, il ressort de l'arrêt attaqué que la recourante est divorcée - le divorce ayant été prononcé en Bosnie-Herzégovine - et qu'elle ne travaille plus depuis à tout le moins 1996, date depuis laquelle elle touche des prestations d'assistance. La seule personne, en dehors de ses enfants majeurs, avec laquelle il est établi qu'elle entretient des liens est sa voisine et amie, B.________, compatriote avec laquelle elle faisait d'ailleurs parfois le trajet jusqu'en Bosnie-Herzégovine. En outre, il ressort des faits que la recourante a établi sa résidence habituelle dans son pays d'origine, à tout le moins entre 2015 et 2019, où elle a passé de très nombreux mois (soit près des deux-tiers de l'année en 2015, 2016 et 2017, la moitié en 2018 et la moitié de la période concernée en 2019). Elle a ainsi gardé des liens étroits avec son pays d'origine dans lequel elle a encore de la famille (sa mère et son frère), dont elle parle la langue et dont elle connaît le fonctionnement au vu de la durée de ses séjours. 
En outre, en l'absence d'une relation de dépendance qui va au-delà de liens affectifs normaux, la seule présence en Suisse des enfants majeurs et petits-enfants de la recourante ne permet pas de considérer qu'il existe une atteinte à la vie familiale au sens de l'art. 8 par. 1 CEDH et, par conséquent, que son expulsion l'expose à une situation personnelle grave (cf. supra consid. 3.1.3 in fine). Par ailleurs, la recourante, qui invoque son âge (64 ans) et celui de ses petits-enfants (1 et 6 ans), prétend qu'il lui sera impossible d'interagir avec ceux-ci par le moyen des technologies modernes. Toutefois, il ressort de la jurisprudence (cf. ATF 144 I 91 consid. 5.1; arrêt 6B_849/2022 du 21 juin 2023 consid. 5.3.3) que ces moyens, qui peuvent être combinés avec de brefs séjours dans le pays où se trouve le parent, sont suffisants pour garantir les relations entre un parent et un enfant mineur au regard de l'art. 8 par. 1 CEDH, si bien qu'ils le sont d'autant plus pour un grand-parent et ses petits-enfants - étant rappelé que les grands-parents ne disposent, sauf circonstances extraordinaires, pas d'un droit de visite sur leurs petits-enfants (cf. arrêt 5A_550/2022 du 23 janvier 2023 consid. 3.3.4). Par ailleurs, la recourante ne prétend pas que ses enfants et petits-enfants ne pourraient pas venir la trouver dans son pays d'origine, pas plus qu'elle n'expose en quoi les moyens modernes de communication ne lui seraient pas accessibles. 
Partant, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral en considérant que le prononcé d'expulsion ne placerait pas la recourante dans une situation personnelle grave. 
 
3.4. Au demeurant, sous l'angle de la pesée des intérêts (seconde condition de l'art. 66a al. 2 CP), le raisonnement de la cour cantonale n'est pas non plus critiquable.  
S'il est certes exact que la recourante n'a porté atteinte qu'à des intérêts pécuniaires, il n'en demeure pas moins que l'intérêt public à son expulsion est important. Comme l'a souligné la cour cantonale, il ne faut pas sous-estimer le préjudice pour la collectivité de ce type d'infractions, y compris sur le plan matériel, puisque cela mobilise constamment les nombreux acteurs appelés à effectuer des contrôles et à réprimander. En outre, il ressort de l'arrêt cantonal que le comportement de la recourante a duré plus de 4 ans et demi et qu'il n'a pris fin qu'en raison d'un contrôle effectué par le SPC, le montant total des prestations indues s'élevant à plus de 112'000 francs. Contrairement à ce qu'affirme la recourante, ce montant ne peut être qualifié de "modéré" (cf. arrêt 6B_1108/2021 du 27 avril 2023 consid. 1.5.9 destiné à la publication, qui exclut tout cas de peu de gravité à partir de 36'000 francs). La recourante a ainsi agi à plusieurs reprises, sur une longue période et avec une certaine persévérance, abusant de l'aide sociale afin d'améliorer son train de vie, particulièrement puisqu'elle passait une grande partie de son temps dans son pays d'origine où le coût de la vie est notoirement moins élevé qu'en Suisse. Par ailleurs, comme l'a souligné la cour cantonale, la recourante persiste à nier sa culpabilité et sa prise de conscience est inexistante. Elle n'a exprimé aucun regret, ni présenté d'excuses et n'a pas non plus proposé de réparer le dommage en remboursant, même partiellement, les prestations indûment versées. 
En ce qui concerne l'intérêt privé, on peut relever la longue durée de son séjour en Suisse (quelques 40 ans) ainsi que le fait que ses enfants majeurs et petits-enfants y vivent. A cet égard toutefois, comme déjà relevé, des contacts resteront possibles entre la recourante et sa famille demeurant en Suisse, par le biais de moyens de télécommunication modernes et rien n'empêchera ceux-ci de lui rendre visite en Bosnie-Herzégovine. En tout état, si la réintégration de la recourante dans son pays d'origine ne sera certes pas facile, il n'en demeure pas moins que l'intéressée est née et a grandi dans ce pays, qu'elle n'a quitté qu'à l'âge de 24 ans, dont elle parle la langue, où vivent sa mère et son frère et où elle a séjourné très régulièrement et pour de longues périodes durant les dernières années, à tout le moins. Par ailleurs, l'expulsion reste d'une durée limitée, soit du minimum légal. 
En définitive, compte tenu des infractions commises au préjudice de la collectivité publique, de l'intégration limitée de la recourante en Suisse, de son absence de prise de conscience, ainsi que des perspectives qu'elle conserve de se réintégrer dans son pays d'origine, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral en considérant que l'intérêt public à son expulsion l'emportait sur son intérêt privé à demeurer en Suisse. L'expulsion de la recourante pour la durée (minimale) de 5 ans s'avère ainsi conforme au principe de la proportionnalité. 
 
3.5. Au vu de ce qui précède, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral en ordonnant l'expulsion de la recourante.  
 
4.  
Le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Comme il était dénué de chances de succès, la demande d'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 64 al. 1 LTF). La recourante, qui succombe, supportera les frais judiciaires, dont le montant sera fixé en tenant compte de sa situation financière, laquelle n'apparaît pas favorable (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
La demande d'assistance judiciaire est rejetée. 
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'200 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision. 
 
 
Lausanne, le 16 août 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Juge présidant : Denys 
 
La Greffière : Livet