6B_159/2022 02.11.2022
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_159/2022  
 
 
Arrêt du 2 novembre 2022  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, Denys et Koch. 
Greffière : Mme Corti. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Jean-Pierre Bloch, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public central du canton de Vaud, 
avenue de Longemalle 1, 1020 Renens VD, 
intimé. 
 
Objet 
Violation simple des règles de la circulation routière; entrave aux mesures de constatation de l'incapacité de conduire; violation des obligations en cas d'accident; arbitraire; présomption d'innocence, 
 
recours contre le jugement de la Cour d'appel pénale 
du Tribunal cantonal du canton de Vaud, du 17 décembre 2021 (n° 491 AM20.01xxx26/ACO). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par jugement du 23 juillet 2021, le Tribunal de police de l'arrondissement de Lausanne (ci-après: le tribunal de police) a constaté que A.________ s'est rendu coupable de violation simple des règles de la circulation routière (art. 90 al. 1 LCR cum 3 al. 1 OCR), d'entrave aux mesures de constatation de l'incapacité de conduire (art. 91a al. 1 LCR) et de violation des obligations en cas d'accident (art. 92 al. 1 cum 51 al. 1 et 3 LCR), l'a condamné à une peine pécuniaire de 60 jours-amende à 120 fr. avec sursis pendant 2 ans, ainsi qu'à une amende de 2'400 fr., convertible en peine privative de liberté de 20 jours en cas de non-paiement fautif, et a mis les frais de procédure, par 800 fr., à sa charge.  
 
B.  
Par jugement du 17 décembre 2021, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: la cour cantonale) a rejeté l'appel de A.________ et confirmé le jugement de première instance. 
En résumé, la cour cantonale a retenu les faits suivants: 
 
B.a. Le 28 mai 2020, à 0h25, alors qu'il circulait sur l'avenue de U.________ à V.________ au volant de sa voiture de tourisme BMW 330d xDrive immatriculée VD xxx xxx, A.________, parvenu à la hauteur de l'immeuble n° xxx, soit à l'endroit où la largeur de la chaussée est considérablement réduite par deux zones de stationnement marquées de chaque côté de la route, n'a pas remarqué qu'il s'approchait plus que de raison d'une voiture qui était stationnée au bord de la chaussée. C'est ainsi qu'un contact s'est produit entre l'arrière du flanc gauche de la BMW et la partie opposée de la voiture stationnée; à la suite de ce choc, A.________ s'est arrêté, est descendu de son véhicule et s'est déplacé à une bonne distance du véhicule qu'il venait de heurter, avant de remonter dans sa voiture et de quitter sans autre les lieux.  
 
B.b. Le casier judiciaire suisse de A.________ est vierge de toute inscription.  
 
C.  
A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre le jugement du 17 décembre 2021. Il conclut, avec suite de frais et dépens, principalement à son annulation en ce sens qu'il est acquitté des chefs d'accusation de violation simple des règles de la circulation routière, d'entrave aux mesures de constatation de l'incapacité de conduire et de violation des obligations en cas d'accident. Subsidiairement, il conclut à l'annulation du jugement attaqué et au renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision au sens des considérants. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Invoquant l'art. 9 Cst., le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir établi les faits et apprécié les preuves de manière arbitraire. Il se plaint en outre d'une violation de la présomption d'innocence (art. 10 CPP). 
 
1.1. Le Tribunal fédéral n'est pas une autorité d'appel, auprès de laquelle les faits pourraient être rediscutés librement. Il est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), à moins que celles-ci n'aient été établies en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, à savoir, pour l'essentiel, de façon arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. Une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle apparaît discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable et cela non seulement dans sa motivation, mais aussi dans son résultat (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1; 145 IV 154 consid. 1.1). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables. Le Tribunal fédéral n'entre en matière sur les moyens fondés sur la violation de droits fondamentaux, dont l'interdiction de l'arbitraire, que s'ils ont été invoqués et motivés de manière précise (art. 106 al. 2 LTF; ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2 et les arrêts cités). Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2 et les arrêts cités).  
Lorsque l'autorité cantonale a forgé sa conviction quant aux faits sur la base d'un ensemble d'éléments ou d'indices convergents, il ne suffit pas que l'un ou l'autre de ceux-ci ou même chacun d'eux pris isolément soit à lui seul insuffisant. L'appréciation des preuves doit en effet être examinée dans son ensemble. Il n'y a ainsi pas d'arbitraire si l'état de fait retenu pouvait être déduit de manière soutenable du rapprochement de divers éléments ou indices. De même, il n'y a pas d'arbitraire du seul fait qu'un ou plusieurs arguments corroboratifs apparaissent fragiles, si la solution retenue peut être justifiée de façon soutenable par un ou plusieurs arguments de nature à emporter la conviction (arrêts 6B_1177/2021 du 26 septembre 2022 consid. 2.1 et les arrêts cités; 6B_408/2021 du 11 avril 2022 consid. 2.1 et les arrêts cités; 6B_894/2021 du 28 mars 2022 consid. 2.1). 
 
1.2. La présomption d'innocence, garantie par les art. 10 CPP, 32 al. 1 Cst., 14 par. 2 Pacte ONU II et 6 par. 2 CEDH, ainsi que son corollaire, le principe in dubio pro reo, concernent tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large (ATF 145 IV 154 consid. 1.1; 144 IV 345 consid. 2.2.3.1; 127 I 38 consid. 2a). En tant que règle sur le fardeau de la preuve, elle signifie, au stade du jugement, que ce fardeau incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. Comme règle d'appréciation des preuves (sur la portée et le sens précis de la règle sous cet angle, voir ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3), la présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective. Lorsque l'appréciation des preuves et la constatation des faits sont critiquées en référence à la présomption d'innocence (art. 6 par. 2 CEDH, 32 al. 1 Cst. et 10 CPP), celle-ci n'a pas de portée plus large que l'interdiction de l'arbitraire (ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1; 145 IV 154 consid. 1.1).  
 
1.3. En l'espèce, la cour cantonale a conclu que les griefs invoqués par le recourant n'étaient pas susceptibles de remettre en cause l'état de fait retenu par le tribunal de police et l'a ainsi confirmé (cf. supra consid. B.a).  
L' autorité cantonale s'est notamment fondée sur les déclarations des deux témoins et sur le constat de la voiture endommagée fait par la police. A cet égard, la cour cantonale a précisé que les témoins avaient relevé le numéro de plaque, ainsi que la marque de la voiture et que, s'ils s'étaient trompés d'un chiffre sur le numéro d'immatriculation (en mentionnant xx xxx au lieu de xxx xxx), cela ne portait pas atteinte au crédit de leurs déclarations; le fait que l'un des témoins avait indiqué (lors de son audition du 16 février 2021, soit plus de huit mois après les faits) ne pas bien se souvenir de ceux-ci venait renforcer sa crédibilité; au contraire, la version du recourant - qui affirmait ne garder " aucun souvenir d'avoir touché un véhicule en stationnement à l'endroit qui nous occupe " et qui relevait ne pas se souvenir des faits et ne s'être " rendu compte de rien " - n'était pas plausible, sauf à considérer une amnésie ensuite d'une forte alcoolisation. 
L'autorité précédente a ensuite relevé qu'il n'était pas soutenable de dire qu'une manoeuvre mal menée ou qu'un défaut de conduite ne pouvait pas engendrer des dégâts de l'ordre de ceux constatés sur la voiture endommagée, les traces de peinture sur celle-ci étant précisément de la couleur du véhicule du recourant; elle a enfin souligné qu'affirmer que le choc aurait dû impacter les deux voitures de la même manière résultait d'une conception assez réductrice de la physique, dès lors qu'il s'agissait de deux corps de poids différents, dont seul l'un était en mouvement, et qui n'avaient très vraisemblablement pas la même résistance. 
 
1.4. Le recourant reproche tant à la cour cantonale qu'à l'autorité de première instance d'avoir fondé leur décision sur un état de fait en contradiction claire avec la situation de fait réelle, ainsi que sur une appréciation des preuves insoutenable. I l se plaint aussi d'une violation de la présomption d'innocence.  
Il y a lieu tout d'abord de rappeler que seule une décision émanant d'une autorité cantonale de dernière instance peut faire l'objet du recours en matière pénale au Tribunal fédéral (art. 80 al. 1 LTF), de sorte que l'argumentation du recourant est irrecevable dans la mesure où elle concerne le jugement du tribunal de police. 
 
1.4.1. Le recourant soutient en premier lieu qu'il serait arbitraire de le considérer comme fautif de l'accident, sachant qu'il lui est reproché un accident sur l'avenue de U.________ alors que, selon les dires des témoins et de la propriétaire du véhicule endommagé, ce dernier était stationnée sur la rue W.________.  
Il sied de relever que, dans sa déclaration devant la police, l'intéressée a expliqué avoir stationné son véhicule " sur la rue W.________, en face de l'immeuble n° xxx de l'avenue de U.________ [...] " (rapport de la police municipale de Lausanne du 9 juillet 2020, p. 3; pièce n° 4 du dossier cantonal; art. 105 al. 2 LTF). Dans le même sens, les témoins ont déclaré se trouver, le 28 mai 2020 vers 0h25, dans la chambre de l'appartement " situé au 1er étage de l'immeuble de l'avenue de U.________ " et avoir " entendu le bruit caractéristique d'un accrochage qui provenait de la rue W.________ " (rapport de la police municipale de Lausanne du 9 juillet 2020, p. 4; pièce n° 4 du dossier cantonal; art. 105 al. 2 LTF). Il ressort du jugement attaqué que le contact avec la voiture endommagée a eu lieu " à hauteur de l'immeuble n° xxx " de l'avenue de U.________, immeuble qui (comme relevé par les témoins et la propriétaire de la voiture) donne sur la rue W.________. Ainsi, contrairement à ce que soutient le recourant, le jugement querellé ne contient aucune contradiction sur le lieu où l'accident a eu lieu, qui est bel et bien la rue W.________ en bas de l'immeuble n° xxx de l'avenue de U.________. Ce grief doit par conséquent être rejeté. 
 
1.4.2. Le recourant affirme ensuite que la cour cantonale aurait fait preuve d'un " arbitraire clairvoyant " en retenant que son oubli des faits pouvait être considéré comme " une amnésie ensuite d'une forte alcoolisation ", alors que l'oubli du témoin (lors de son audition du 16 février 2021), renforcerait sa crédibilité. Par cet argument, le recourant ne démontre pas en quoi l'appréciation de la cour cantonale serait insoutenable. Au demeurant, la façon dont les oublis (du recourant et du témoin) ont pu être considérés ne change rien à l'appréciation de la cour cantonale lorsqu'elle relève que les déclarations convaincantes des témoins - qui n'ont jamais cherché à accabler le recourant - ont permis à la police de trouver celui-ci, lequel était bien le détenteur du véhicule tel qu'ils l'avaient décrit. Le grief doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité.  
 
1.4.3. Pour le surplus, le recourant oppose essentiellement sa propre appréciation des preuves à celle de l'autorité précédente, dans une démarche appellatoire et partant irrecevable dans le recours en matière pénale.  
Il en va ainsi notamment lorsqu'il soutient que les préjudices subis par la voiture endommagée démontraient sans équivoque que le véhicule avait été accidenté plus qu'une fois, que si sa propriétaire était réellement la victime du dommage, elle aurait très certainement fait valoir ses droits plus tôt, que les dégâts constatés sur les deux voitures (la sienne et celle endommagée) divergeaient quant à leur nombre, à leur importance et à leur hauteur, et que, par conséquent, on ne saurait pas arrêter de lien de causalité entre ces dégâts et un éventuel accident du recourant. 
 
1.4.4. En tout état, l'établissement des faits et l'appréciation des preuves ressortant du jugement attaqué ne prêtent pas le flanc à la critique. En effet, la cour cantonale a relevé plusieurs éléments et indices convergents qui font apparaître le recourant comme l'auteur de l'accident: les déclarations des témoins, par lesquelles ces derniers ont su notamment indiquer la marque de la voiture ayant causé l'accident, sa couleur et son numéro de plaque (qui correspond, à un chiffre près, à celui du recourant), ainsi que le constat fait par la police, montrant notamment que les traces retrouvées sur la voiture endommagée sont précisément de la couleur du véhicule du recourant. A cet égard, que la propriétaire du véhicule endommagé ait ou non déposé immédiatement sa plainte pénale n'y change rien. Il en va de même du fait que le constat sur sa voiture aurait été effectué au moins 14 jours après la plainte ou encore du fait que le recourant ait ou non oublié les faits. Enfin, retenir que le recourant " ne remarqua pas qu'il s'approchait plus que de raison d'une voiture qui était stationnée au bord de la chaussée ", ne signifie pas que, au moment du contact avec le véhicule en question, le recourant ne se soit pas rendu compte qu'il causait un accident.  
 
1.4.5. En définitive, sur la base de l'ensemble des éléments à disposition, la cour cantonale pouvait, sans arbitraire et sans violer la présomption d'innocence, retenir que le recourant était l'auteur de l'accident. Les griefs du recourant sur ce point sont rejetés dans la mesure de leur recevabilité.  
 
1.5. Pour le surplus, le recourant ne conteste pas que les éléments constitutifs des infractions retenues sont réalisés et ne critique d'aucune manière la peine prononcée à son encontre.  
 
2.  
Mal fondé, le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Le recourant, qui succombe, supporte les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 2 novembre 2022 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
La Greffière : Corti