5A_69/2022 17.05.2023
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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
5A_69/2022  
 
 
Arrêt du 17 mai 2023  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Herrmann, Président, 
von Werdt et Bovey. 
Greffière : Mme Dolivo. 
 
Participants à la procédure 
1. A.________, 
2. B.________, 
3. C.________, 
4. D.________, 
tous les quatre représentés par Me Jean-Rodolphe Fiechter, avocat, 
recourants, 
 
contre  
 
E.________, 
représenté par Me Raphaël Mahaim, avocat, 
intimé. 
 
Objet 
assistance judiciaire (action révocatoire), 
 
recours contre l'arrêt de la Chambre des recours civile Tribunal cantonal du canton de Vaud du 15 novembre 2021 (PT19.021817-211642 312). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par demande introduite le 1er mai 2019, E.________ (demandeur) a ouvert une action révocatoire fondée sur l'art. 288 LP à l'encontre de A.________, B.________, C.________ et D.________ (défendeurs) devant la Chambre patrimoniale cantonale vaudoise (ci-après: la Chambre patrimoniale). 
Le 12 juillet 2019, le demandeur a sollicité le bénéfice de l'assistance judiciaire, dans la mesure de l'exonération d'avances et de sûretés, de l'exonération des frais judiciaires ainsi que de l'assistance d'un conseil d'office. Le 16 juillet 2019, les défendeurs ont prié la Juge déléguée de la Chambre patrimoniale (ci-après: la Juge déléguée) de pouvoir se déterminer sur cette requête, exposant qu'ils entendaient réclamer des sûretés, au sens de l'art. 99 al. 1 let. c CPC, à raison des dépens qui leur avaient été alloués dans des procédures antérieures. Le 3 septembre 2019, la Juge déléguée leur a fixé un délai pour présenter leurs déterminations. Donnant suite à cette invitation le 9 octobre 2019, ils ont conclu au rejet de la requête d'assistance judiciaire, subsidiairement à son rejet dans la mesure où elle portait sur l'exonération de sûretés. 
Par décision du 29 octobre 2019, la Juge déléguée a concédé à E.________ l'assistance judiciaire avec effet au 12 juillet 2019, dans la mesure de l'exonération d'avances et de frais judiciaires et de l'assistance d'un conseil d'office, et l'a astreint au versement d'une franchise de 100 fr. par mois. 
Le 29 novembre 2019, la Chambre des recours civile du Tribunal cantonal vaudois (ci-après: la Chambre des recours) a déclaré irrecevable le recours formé par E.________, qui concluait à ce que l'exonération porte également sur les sûretés en garantie des dépens. Elle a également déclaré irrecevable le recours des défendeurs pour le motif qu'ils n'étaient pas parties à la procédure d'assistance judiciaire, dès lors que la décision attaquée ne portait pas sur la question des sûretés et qu'aucune requête en ce sens n'avait été déposée à ce moment-là. Par arrêt du 8 janvier 2020, la Chambre des recours a déclaré irrecevable pour les mêmes motifs le (nouveau) recours que les défendeurs ont formé à l'encontre de la même décision. 
Statuant par arrêt du 28 août 2020 (cause 5A_79/2020), le Tribunal fédéral a admis le recours en matière civile formé par les défendeurs contre cette décision. Il a rappelé que le bénéfice de l'assistance judiciaire tel qu'il avait été octroyé par le premier juge emportait la dispense de sûretés, de sorte que les recourants avaient un intérêt digne de protection à recourir contre la décision accordant l'assistance judiciaire à l'intimé. L'affaire a été renvoyée à l'autorité précédente pour nouvelle décision. 
 
B.  
Par arrêt du 26 octobre 2020, la Chambre des recours a annulé la décision de la Juge déléguée, considérant en substance qu'elle consacrait une violation du droit d'être entendu des défendeurs dans la mesure où elle ne contenait ni les faits pertinents ni les motifs l'ayant conduite à considérer que le demandeur serait indigent et que ses chances de succès seraient sérieuses. Elle a renvoyé la cause à l'autorité de première instance pour nouvelle décision. 
Statuant à nouveau par décision du 18 octobre 2021, la Juge déléguée a accordé à E.________ le bénéfice de l'assistance judiciaire, avec effet au 12 juillet 2019, dans la mesure de l'exonération des avances et des frais judiciaires ainsi que de l'assistance d'un conseil d'office, et l'a astreint à payer une franchise de 100 fr. par mois. Elle a considéré que l'indigence de E.________ était en l'état suffisamment établie. Elle a aussi relevé que l'acte de donation litigieux avait été fait dans les cinq ans précédant l'ouverture de la succession selon les règles de la faillite et que pour le surplus, les conditions subjectives de l'art. 288 LP devraient faire l'objet d'une instruction au fond; compte tenu des nombreuses questions et points litigieux à résoudre, la procédure ne pouvait pas être considérée comme dépourvue de toute chance de succès. 
Par arrêt du 15 novembre 2021, expédié le 13 décembre 2021, la Chambre des recours a rejeté le recours formé par les défendeurs contre cette décision. 
 
C.  
Le 31 janvier 2022, A.________, B.________, C.________ et D.________ exercent un recours en matière civile, subsidiairement un recours constitutionnel, au Tribunal fédéral. Ils concluent à l'annulation de la décision cantonale et au renvoi de la cause à l'autorité précédente " pour statuer sur le fond ". 
Il n'a pas été demandé d'observations. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. La décision entreprise, qui confirme l'octroi de l'assistance judiciaire à l'intimé pour la procédure de première instance, est de nature incidente dès lors qu'elle a été prise séparément et avant que la cause au fond soit jugée (arrêts 5A_984/2022 du 27 mars 2023 consid. 1; 5A_644/2022 du 31 octobre 2022 consid. 1). Elle est susceptible de causer un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF, en tant que l'octroi de l'assistance judiciaire à l'intimé emporte la dispense de fournir des sûretés en garantie des dépens (arrêts 5A_79/2020 du 28 août 2020 consid. 1.1; 4A_121/2018 du 10 septembre 2018 consid. 5). La voie de recours contre une décision incidente est déterminée par le litige principal (ATF 137 III 380 consid. 1.1), à savoir en l'espèce une cause pécuniaire en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 72 al. 2 let. a LTF, en lien avec les art. 285 ss LP). Le recours a été introduit dans le délai légal (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision prise par une juridiction cantonale de dernière instance statuant sur recours (art. 75 al. 1 et 2 LTF). La valeur litigieuse requise est atteinte (art. 74 al. 1 let. b LTF en lien avec l'art. 51 al. 1 let. c LTF). Les recourants, qui ont participé à la procédure devant l'autorité cantonale (art. 76 al. 1 let. a LTF), disposent d'un intérêt digne de protection à l'annulation ou à la modification de la décision entreprise (art. 76 al. 1 let. b LTF), puisqu'ils ont annoncé qu'ils entendaient demander des sûretés et que l'octroi de l'assistance judiciaire à l'intimé emporte la dispense de sûretés (arrêts 5A_79/2020 du 28 août 2020 consid. 2.3.2; 4A_314/2013 du 6 août 2013 consid. 1.2). Le recours en matière civile étant ouvert au regard des dispositions qui précèdent, le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable (art. 113 LTF).  
 
1.2. En tant que les recourants se plaignent d'un défaut de motivation et de déni de justice formel, leurs conclusions purement cassatoires sont recevables. En effet, si le Tribunal fédéral accueillait le recours sur ces points, il ne serait pas en mesure de statuer lui-même sur le fond du litige (ATF 137 III 313 consid. 1.3; 134 III 379 consid. 1.3; 133 III 489 consid. 3.1). Quoi qu'il en soit, les conclusions doivent être interprétées à la lumière de la motivation du recours (ATF 137 II 313 consid. 1.3); en l'occurrence, on comprend de cette motivation que les recourants demandent aussi la réforme de l'arrêt cantonal, en ce sens que la requête d'assistance judiciaire de l'intimé pour la procédure de première instance est rejetée.  
 
2.  
 
2.1. Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit au sens des art. 95 s. LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Cela étant, eu égard à l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 2 LTF, il n'examine en principe que les griefs soulevés (ATF 142 III 364 consid. 2.4 et les références). Le recourant doit par conséquent discuter les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi l'autorité précédente a méconnu le droit (ATF 146 IV 297 consid. 1.2; 142 I 99 consid. 1.7.1; 142 III 364 consid. 2.4 et la référence). Il doit exister un lien entre la motivation du recours et la décision attaquée; le recourant ne peut se contenter de reprendre presque mot pour mot l'argumentation formée devant l'autorité cantonale (ATF 145 V 161 consid. 5.2; 134 II 244 consid. 2.1 et 2.3; arrêt 4A_467/2019 du 23 mars 2022 consid. 2.3). Le Tribunal fédéral ne connaît par ailleurs de la violation de droits fondamentaux que si un tel grief a été expressément invoqué et motivé de façon claire et détaillée (" principe d'allégation ", art. 106 al. 2 LTF; ATF 146 III 303 consid. 2; 144 II 313 consid. 5.1).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été constatés de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1). Le recourant qui soutient que les faits ont été établis d'une manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 147 I 73 consid. 2.2; 144 III 93 consid. 5.2.2; 140 III 264 consid. 2.3), doit, sous peine d'irrecevabilité, satisfaire au principe d'allégation susmentionné (art. 106 al. 2 LTF; cf. supra consid. 2.1; ATF 147 I 73 consid. 2.2; 146 IV 88 consid. 1.3.1).  
 
3.  
Les recourants font valoir que " les instances précédentes " ont omis d'examiner si les deux conditions de l'art. 117 CPC étaient remplies, qu'elles ont commis un déni de justice formel et fait preuve d'arbitraire. Ils soutiennent que leurs déterminations du 9 octobre 2019, en particulier le passage de celles-ci qui se rapportait à l'absence de chances de succès, n'ont pas été prises en compte. Or, il ressortait de cette écriture que l'intimé n'avait pas invoqué d'arguments supplémentaires par rapport à ceux développés dans le cadre de la procédure de mesures provisionnelles, dans laquelle tant la Chambre patrimoniale que le Tribunal cantonal avaient constaté qu'il n'était pas vraisemblable que les conditions de l'action au fond soient réalisées. Si la Chambre patrimoniale avait voulu changer d'avis dans le cadre de la procédure relative à l'octroi de l'assistance judiciaire, elle aurait dû le motiver, ce qu'elle n'avait manifestement pas fait. Ces résultats diamétralement opposés devaient être considérés comme arbitraires. En n'admettant pas d'emblée ce grief, l'autorité précédente avait elle aussi versé dans l'arbitraire. 
 
3.1. Selon la jurisprudence, commet un déni de justice formel proscrit par l'art. 29 al. 1 Cst. l'autorité qui ne traite pas un grief relevant de sa compétence, motivé de façon suffisante et pertinent pour l'issue du litige (ATF 142 II 154 consid. 4.2; 141 V 557 consid. 3.2.1; 135 I 6 consid. 2.1; arrêt 5A_1062/2019 du 16 avril 2020 consid. 4.1). De même, la jurisprudence a déduit du droit d'être entendu de l'art. 29 al. 2 Cst. l'obligation pour l'autorité de motiver sa décision, afin que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 143 III 65 consid. 5.2; 142 I 135 consid. 2.1; 138 I 232 consid. 5.1; 136 V 351 consid. 4.2). Pour satisfaire à cette exigence, il suffit que l'autorité mentionne au moins brièvement les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé sa décision. Elle n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se limiter à ceux qui, sans arbitraire, peuvent être tenus pour pertinents (ATF 142 II 154 consid. 4.2 et les références). Dès lors que l'on peut discerner les motifs qui ont guidé la décision de l'autorité, le droit à une décision motivée est respecté même si la motivation présentée est erronée. La motivation peut d'ailleurs être implicite et résulter des différents considérants de la décision (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1 et les références).  
 
3.2. En l'espèce, les recourants ne peuvent être suivis lorsqu'ils soutiennent que les conditions de l'octroi de l'assistance judiciaire n'ont pas été examinées. L'arrêt querellé distingue clairement les deux conditions cumulatives prévues par la loi à cet égard et contient pour chacune d'elles une motivation qui permet de comprendre les raisons pour lesquelles le bénéfice de l'assistance judiciaire a été octroyé à l'intimé, étant rappelé au surplus que l'autorité précédente n'avait pas l'obligation de discuter expressément et en détail tous les moyens développés par les parties (cf. supra consid. 3.1). Le point de savoir si cette motivation est convaincante - ce que contestent les recourants en la qualifiant d'" arbitraire " - est une question distincte de celle du droit à une décision motivée.  
 
4.  
En vertu de l'art. 117 CPC - qui concrétise, en procédure civile, les principes que le Tribunal fédéral a dégagés de l'art. 29 al. 3 Cst. (ATF 142 III 131 consid. 4.1; 138 III 217 consid. 2.2.3) - une personne a droit à l'assistance judiciaire si elle ne dispose pas de ressources suffisantes (let. a) et si sa cause ne paraît pas dépourvue de toute chance de succès (let. b). Ces conditions sont cumulatives (arrêts 5A_396/2018 du 29 juin 2018 consid. 5.1; 5A_327/2017 du 2 août 2017 consid. 4 et les références). 
 
4.1. En premier lieu, les recourants font valoir que la requête d'assistance judiciaire aurait dû être rejetée, faute pour l'intimé d'avoir établi son indigence.  
 
4.1.1. L'autorité cantonale a constaté, dans le cadre de l'examen de cette condition, que les recourants faisaient valoir deux arguments: d'une part, l'intimé avait violé son devoir de collaboration, d'autre part, il manquait des informations sur sa situation financière. Elle a considéré que l'on pouvait admettre avec l'autorité de première instance que la collaboration de l'intimé à la preuve de son indigence n'était pas remarquable. Peu importait toutefois, l'essentiel étant de constater que par décision du 25 juin 2010 [recte: 2019], le Tribunal d'Uppsala (Suède) avait clos la faillite de celui-ci faute d'actifs. L'inventaire des biens établi le 25 février 2019 par le Tribunal précité mentionnait des actifs de 5'467 SEK (couronnes suédoises; soit environ 500 fr.), et un passif de plus de 34 millions de francs suisses. L'intimé percevait une rente de 1'370 fr. et vivait dans un appartement qui lui coûtait 765 fr. Il était aidé par des tiers, était dispensé de payer une prime d'assurance-maladie et ne pouvait pas détenir de carte de crédit compte tenu de sa situation financière. Procédant par affirmations qu'ils n'étayaient guère, voire par questionnement, les recourants affirmaient que l'intimé dissimulait sa fortune. Ils en déduisaient que l'autorité de première instance, en retenant qu'il était indigent, avait apprécié arbitrairement les faits. Cette motivation n'était pas recevable dans un recours limité au droit. La décision de première instance, qui se fondait sur des pièces officielles attestant de l'indigence de l'intimé, devait ainsi être confirmée.  
 
4.1.2. Une personne est indigente lorsqu'elle n'est pas en mesure d'assumer les frais de la procédure sans porter atteinte au minimum nécessaire à son entretien et à celui de sa famille. Pour déterminer l'indigence, il convient de prendre en considération l'ensemble de la situation financière du requérant au moment où la demande est présentée (ATF 144 III 531 consid. 4.1; 141 III 369 consid. 4.1). Il y a lieu de mettre en balance, d'une part, la totalité des ressources effectives du requérant et, d'autre part, l'ensemble de ses engagements financiers (ATF 135 I 221 consid. 5.1 et la référence; arrêt 5A_984/2022 du 27 mars 2023 consid. 3.1). La part des ressources excédant ce qui est nécessaire à la couverture des besoins personnels doit être comparée aux frais prévisibles de l'instance. L'assistance judiciaire n'est pas accordée lorsque la part disponible permet de couvrir les frais judiciaires et d'avocat en une année au plus, pour les procès relativement simples, et en deux ans pour les autres (ATF 141 III 369 consid. 4.1; 135 I 221 consid. 5.1). Il appartient à la partie requérante de motiver sa requête et d'apporter, à cet effet, tous les moyens de preuve nécessaires et utiles (art. 119 al. 2 CPC; parmi plusieurs, cf. arrêt 5A_984/2022 du 27 mars 2023 consid. 3.2).  
Savoir quels sont les critères qu'il faut prendre en considération pour évaluer l'indigence, au regard de l'art. 117 let. a CPC, est une question qui relève du droit, partant, qui est examinée librement par le Tribunal fédéral; la détermination des actifs et passifs relève en revanche du fait et n'est revue que sous l'angle de l'arbitraire (ATF 135 I 221 consid. 5.1; 120 Ia 179 consid. 3a; arrêt 5A_591/2020 du 17 novembre 2020 consid. 3.1). 
 
4.1.3. Les recourants soutiennent que la requête d'assistance judiciaire aurait dû être rejetée " pour cause de manque crasse de collaboration de la part du requérant ", qui avait pris plus de deux ans avant d'exposer " un tant soit peu " sa situation financière. Ils relèvent que selon les propres constatations de la cour cantonale, " la collaboration de l'intimé à la preuve de son indigence n'est pas remarquable ". Cette autorité aurait considéré l'indigence comme établie du simple fait que la faillite de l'intimé en Suède avait été clôturée faute d'actifs. Si cette conclusion pouvait selon eux paraître logique de prime abord, elle " surpren [ ait] tout de même quand on sait (fait notoire) que l'intimé devait SEK 35 millions (CHF 3,5 millions) au fisc et qu'il a parqué sa fortune personnelle à l'abri des autorités et des créanciers ".  
 
4.1.4. De jurisprudence constante, une faillite prononcée par une autorité étrangère ne déploie aucun effet en Suisse tant qu'elle n'y a pas été reconnue (art. 166 ss LDIP; ATF 147 III 365 consid. 3.2.3; 137 III 631 consid. 2.3.3; arrêt 4A_34/2021 du 18 mars 2022 consid. 2.2), de sorte que dans une telle configuration, l'intéressé peut librement continuer à disposer de ses biens sis en Suisse. En l'occurrence, l'arrêt querellé ne fait nullement mention d'une décision suisse qui reconnaîtrait la faillite prononcée en Suède. Cela étant, il ne ressort pas non plus de l'arrêt attaqué que l'intimé disposerait de biens en Suisse, et les recourants ne le prétendent pas. En tant qu'ils soutiennent, de manière toute générale, que l'intimé a dissimulé sa fortune, force est de constater qu'ils ne s'en prennent pas aux considérations de la juridiction précédente selon lesquelles la motivation qu'ils avaient présentée dans leur mémoire de recours cantonal sur ce point consistait en de simples affirmations ou questionnements, partant, était irrecevable. Enfin, contrairement à ce qu'ils prétendent, ce n'est pas uniquement en raison de la clôture de la faillite en Suède que la condition de l'indigence a été considérée comme réalisée en l'espèce. D'autres éléments ont aussi été pris en considération, à savoir le fait que l'intimé ne peut pas détenir de carte de crédit compte tenu de sa situation financière, qu'il perçoit une rente de 1'370 fr., qu'il vit dans un appartement qu'il paye 765 fr. par mois et qu'il est aidé par des tiers. Les recourants ne prétendent pas, ni a fortiori ne démontrent, que les faits auraient été établis de manière arbitraire (cf. supra consid. 2.2) à cet égard, ni que la prise en considération de ces éléments serait dénuée de pertinence. Le grief doit ainsi être rejeté, dans la mesure de sa recevabilité.  
 
4.2. En second lieu, les recourants soutiennent que la cause au fond devait être considérée comme dépourvue de chances de succès, au sens de l'art. 117 let. b CPC, ce qui devait conduire au rejet de la requête d'assistance judiciaire.  
 
4.2.1. La Chambre des recours a notamment constaté à cet égard que E.________ alléguait avoir versé à F.________, les 6 décembre 2005 et 1er février 2006, respectivement 500'000 euros et 2'000'000 SEK depuis deux comptes bancaires dont il était titulaire. Le 21 janvier 2010, l'intimé et F.________ avaient établi un contrat intitulé " vvv " portant le sceau d'un notaire et concernant ces deux montants. Par contrat de donation du 9 octobre 2012, F.________ aurait transféré à ses enfants A.________, B.________, C.________ et D.________, à titre gratuit, les parcelles n° s xxx et yyy de la commune de U.________ et le mobilier se trouvant dans l'immeuble n° zzz sis sur la parcelle n° xxx. E.________ alléguait avoir résilié le prêt octroyé à F.________ par courrier du 6 juin 2014. Par lettre du 11 juin 2014, F.________ avait indiqué à l'intimé qu'il n'avait plus d'argent, qu'il avait donné ces derniers biens à ses enfants et qu'il n'avait jamais eu l'intention de rembourser " ces dettes ".  
De leur côté, les défendeurs contestaient fermement l'existence d'un quelconque prêt de l'intimé à leur père et soutenaient que le premier se serait servi du compte du second pour effectuer des virements, en cachant la provenance réelle des fonds. 
F.________ était décédé le 9 septembre 2015. Les défendeurs avaient répudié sa succession, dont l'inventaire public laissait apparaître un découvert de 2'017'489 fr. 11, y compris la production de l'intimé de 1'650'705 fr., laquelle incluait 148'925 fr. d'intérêts. Le 29 juillet 2016, la procédure de liquidation de la succession selon les règles de la faillite avait été ouverte. La production de l'intimé avait été colloquée en troisième classe. 
Par contrat de vente du 16 décembre 2016, les défendeurs avaient transféré à titre onéreux les parcelles n° s xxx et yyy de la commune de U.________. Par ordonnance du 6 mars 2017, l'administration de la faillite chargée de la liquidation de la succession avait cédé à E.________ les droits de la masse en faillite.  
Les défendeurs avaient rappelé dans leur mémoire de recours cantonal qu'au stade des mesures provisionnelles, il avait été retenu que l'intimé n'avait pas rendu vraisemblable leur intention dolosive, à savoir qu'ils étaient au courant des prêts qu'il avait prétendument octroyés à feu F.________ au moment de la donation litigieuse, de sorte que l'une des conditions de l'action révocatoire, fondement de la demande, n'était pas remplie. Ils en déduisaient que l'action révocatoire était dénuée de chances de succès. Selon la juridiction précédente, les recourants perdaient cependant de vue que l'analyse de l'autorité de première instance se situait au niveau des chances de succès de l'action et non à un stade ultérieur, ce qui reviendrait à préjuger du sort de la demande. La première juge avait exposé les arguments des parties pour parvenir à la conclusion qu'au vu des allégués et des pièces produites, en particulier un courrier du 11 juin 2014 de feu F.________, il subsistait de nombreuses questions et points litigieux à résoudre commandant une instruction complète de la cause. Sa décision était ainsi conforme à la jurisprudence et ne pouvait qu'être approuvée. 
 
4.2.2. Un procès est dépourvu de chances de succès lorsque les perspectives de le gagner sont notablement plus faibles que les risques de le perdre, et ne peuvent donc être considérées comme sérieuses, de sorte qu'un plaideur raisonnable et aisé renoncerait à s'y engager en raison des frais qu'il serait exposé à devoir supporter; en revanche, il ne l'est pas lorsque les chances de succès et les risques d'échec s'équilibrent à peu près ou que les premières n'apparaissent que légèrement inférieures aux secondes. Cette évaluation doit s'opérer en fonction des circonstances existant à la date du dépôt de la requête et sur la base d'un examen sommaire (ATF 142 III 138 consid. 5.1 et les références).  
L'absence de chances de succès peut résulter des faits ou du droit. L'assistance judiciaire sera ainsi refusée s'il apparaît d'emblée que les faits pertinents allégués sont invraisemblables ou ne pourront pas être prouvés. Il en sera de même si, en droit, la démarche du requérant paraît d'emblée irrecevable ou juridiquement infondée. La perspective concrète du recourant d'obtenir entièrement gain de cause n'est pas déterminante; pour que la condition de l'art. 117 let. b CPC soit remplie, il suffit qu'il existe une chance d'admission même partielle des conclusions (arrêts 5A_770/2021 du 4 mars 2022 consid. 6.3; 4A_638/2021 du 20 mai 2022 consid. 3.1.1; 4D_22/2020 du 29 juin 2020 consid. 4.2.1 et les références). 
Savoir si les faits sont établis ou susceptibles d'être prouvés est une question qui relève de l'appréciation des preuves, laquelle ne peut être corrigée qu'en cas d'arbitraire. En revanche, déterminer s'il existe des chances de succès est une question de droit; l'autorité qui statue sur l'octroi de l'assistance judiciaire disposant d'un large pouvoir d'appréciation à cet égard, le Tribunal fédéral ne revoit la décision qu'avec retenue: il doit uniquement vérifier que le juge ne s'est pas écarté des principes juridiques reconnus en la matière, qu'il n'a pas tenu compte de circonstances qui ne jouent pas de rôle pour le pronostic dans le cas particulier ou inversement qu'il n'a pas méconnu des circonstances pertinentes dont il aurait dû tenir compte (arrêt 5A_881/2022 du 2 février 2023 consid. 7.1.2 in fine et 7.1.3, avec les arrêts cités). 
 
4.2.3. Les recourants reprochent à la Chambre des recours de n'avoir fait que relater les propos des parties et d'avoir considéré que de nombreuses questions restaient à résoudre, préférant ainsi " s'en remettre à plus tard, au fond ". Or, il était selon eux aisé de résoudre les points litigieux, qui n'étaient ni nombreux ni complexes, sur la base des pièces au dossier et des déterminations des parties. Ils reproduisent dans leur recours un extrait de leurs déterminations du 9 octobre 2019, dans lesquelles ils avaient pris position sur le courrier du 11 juin 2014 de feu F.________ évoqué dans l'arrêt entrepris. Ils affirment que l'intimé, qui se prévalait de faux documents, n'avait pas rendu vraisemblable avoir prêté quoi que ce soit à feu F.________, que celui-ci avait contesté officiellement cette affirmation devant les autorités compétentes et que rien au dossier ne permettait de rendre ne serait-ce que vraisemblable qu'ils auraient eu connaissance d'un tel prêt. La Cour d'appel civile du Tribunal cantonal vaudois avait d'ailleurs très justement relevé, dans un arrêt rendu sur mesures provisionnelles le 19 avril 2019, que les conditions de l'action révocatoire au sens des art. 285 ss LP n'étaient pas réalisées. La requête d'assistance judiciaire du 12 juillet 2019 ne contenait rien de nouveau, de sorte que les chances de succès étaient aujourd'hui aussi faibles que dans le cadre des mesures provisionnelles. En particulier, l'intimé se contentait d'affirmations non étayées, voire de simples suppositions infondées, ce qui était clairement insuffisant. En définitive, ce serait à tort que la Juge déléguée et la cour cantonale n'avaient pas tenu compte des jugements rendus précédemment dans la même affaire, pour parvenir à un résultat diamétralement opposé. La demande devait en réalité être considérée comme dénuée de chances de succès.  
 
4.2.4. Les recourants semblent méconnaître que, si la décision relative à l'assistance judiciaire doit certes être rendue avec une certaine précision, elle ne doit pas conduire à déplacer à ce stade le procès au fond (arrêt 5A_241/2022 du 11 juillet 2022 consid. 4.1 et les références). A cela s'ajoute que lorsque la requête d'assistance judiciaire est introduite pour la procédure de première instance, comme c'est le cas en l'espèce, le juge ne doit pas se montrer trop strict au moment d'apprécier les moyens de preuve offerts par les parties (arrêt 5A_327/2017 du 2 août 2017 consid. 5.2). En particulier, lorsque de nombreux éclaircissements sont nécessaires, la cause n'est en principe pas dépourvue de chances de succès (arrêts 5A_241/2022 du 11 juillet 2022 consid. 4.2; 5A_327/2017 du 2 août 2017 consid. 5.2; 5A_313/2013 du 11 octobre 2013 consid. 2.2 et la référence). A cet égard, en tant que les recourants soutiennent que contrairement à ce qui ressort de l'arrêt querellé, les points litigieux pouvaient en réalité être aisément résolus, affirmant notamment que rien au dossier ne rendrait vraisemblable qu'ils avaient connaissance d'un prêt, ni qu'un tel prêt aurait existé, ils ne font qu'opposer de manière appellatoire, partant, irrecevable, leur appréciation à celle de l'autorité cantonale en relatant leur propre vision des faits de la cause (cf. supra consid. 2.2 et 4.2.2). On ne saurait par ailleurs les suivre lorsqu'ils se prévalent des considérants d'une décision rendue par la Cour d'appel civile sur mesures provisionnelles. Appelée à se prononcer sur l'octroi de l'assistance judiciaire, la Juge déléguée, respectivement la juridiction précédente, n'étaient pas liées par les considérations figurant dans cette décision, qui relève d'une autre procédure et dont les conditions ne sont au demeurant pas strictement identiques à celles de l'action au fond. Pour le surplus, dans le cadre de la présente procédure, il s'agissait uniquement de déterminer s'il apparaissait d'emblée que les faits pertinents allégués paraissaient invraisemblables ou ne pourraient pas être prouvés, respectivement si la démarche de la partie qui a requis l'assistance judiciaire paraissait d'emblée irrecevable ou juridiquement infondée (cf. supra consid. 4.2.2), non pas de trancher avec certitude l'issue du litige au fond. Enfin, il n'apparaît pas que des circonstances non pertinentes auraient été prises en considération dans le cadre de l'appréciation des chances de succès, et les recourants ne le font d'ailleurs pas valoir.  
En définitive, en confirmant la décision de la Juge déléguée selon laquelle, au terme d'un examen sommaire tenant compte des éléments fournis par E.________ au moment de sa requête, il n'y avait pas lieu de considérer que ses perspectives de gagner le procès étaient notablement plus faibles que les risques de le perdre, la Chambre des recours n'a pas abusé de son pouvoir d'appréciation. 
 
5.  
En conclusion, le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable et le recours en matière civile doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité. Les frais judiciaires sont mis à la charge des recourants, solidairement entre eux (art. 66 al. 1 et 5 LTF). Il n'est pas alloué de dépens à l'intimé, qui n'a pas été invité à se déterminer. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours constitutionnel subsidiaire est irrecevable. 
 
2.  
Le recours en matière civile est rejeté, dans la mesure où il est recevable. 
 
3.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'500 fr., sont mis à la charge des recourants, solidairement entre eux. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre des recours civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 17 mai 2023 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Herrmann 
 
La Greffière : Dolivo